Se mêler des affaires des autres et ruiner les réputations était tout de même plus passionnant que de parler du temps qu’il faisait ou de la politique !
Lorsque Stuart, quelques instants plus tard, émergea à son tour de l’écoutille, la scène qu’il découvrit avait tout pour le clouer sur place d’incrédulité et de stupeur.
Seule avec Stark au milieu d’un cercle de marins qui des pieds et des mains marquaient la cadence, Cassandra évoluait sur le pont au rythme enfiévré de la gigue, ses jupes froufroutant et ses prunelles pervenche étincelant à la lueur des lanternes.
La tête rejetée en arrière et le corps ondoyant au gré du tempo, elle était si splendide ainsi que Stuart, déglutissant avec peine, se tint coi, dissimulé dans l’ombre d’un paquet de cordages. Mais que ne devint-il pas lorsque son regard tomba sur le malencontreux Daniel Stark, occupé à dévorer littéralement sa cavalière des yeux, avec une expression qui ne pouvait laisser aucun doute sur l’ardent désir qu’elle lui inspirait ?
Fou de colère et de jalousie, Stuart serra les poings dans l’obscurité et prit sur lui pour ne pas se donner en spectacle en bondissant sur le couple de danseurs. La poitrine oppressée, il observa encore Cassandra, dont le sens du rythme et la grâce innée se déployaient avec une aisance époustouflante. Lorsque les derniers accords de la gigue retentirent dans la nuit étoilée des tropiques, force lui fut de s’avouer que si Cassandra n’avait pas été déjà son épouse, elle l’aurait conquis en cet instant au point de lui faire oublier le reste du monde.
-Je vais vous donner un avertissement et un seul, Lorna Mac Bryde, reprit-il d'une voix blanche de rage, près de son oreille. Si vous essayez, encore une fois, de vous jouer ainsi de moi, je vous promets que vous attendrez la venue de votre père au fond d'un cachot.