Emilia Hart

… être différente n’était peut-être pas une si mauvaise chose, après tout. C’était même peut-être une chose dont elle pouvait être fière.

Sorcière. Le mot glissait entre les lèvres tel un serpent, collait sur la langue à la façon du goudron noir et épais. Nous ne nous étions jamais envisagées de la sorte, ma mère et moi. Car ce mot avait été invité par les hommes, ce mot qui apporte du pouvoir à ceux qui le prononcent plutôt qu’à celles qu’il désigne. Un mot qui construit des potences et des bûchers, qui transforme des femmes bien vivantes en cadavres.

La vue est une chose surprenante, aimait à répéter ma mère. Parfois, elle nous montre ce qui est sous nos yeux. Et parfois, elle nous montre ce qui s’est déjà produit, ou ce qui reste à advenir.

Au point qu'elle a bien cru, un temps, qu'elle avait perdu la magie de la lecture, ce pouvoir de se plonger dans une autre époque et un autre lieu. Elle avait l'impression d'avoir désappris à respirer.
Elle n'aurait pas dû s'en faire, pourtant. A présent les univers, les personnages et même certaines phrases laissent leur empreinte dans son esprit, tels des phares lui rappelant qu'elle n'est pas seule.

Sorcière. Le mot glissait entre les lèvres tel un serpent collait sur la langue à la façon du goudron noir et épais Nous ne nous étions jamais envisagées de la sorte, ma mère et moi. Car ce mot avait été inventé par les hommes, ce mot qui apporte du pouvoir à ceux qui le prononcent plutót qu'à celles qu'il désigne. Un mot qui construit des potences et des búchers, qui transforme des femmes bien vivantes en cadavres.

Sorcière. Le mot glissait entre les lèvres tel un serpent, collait sur la langue à la façon du goudron noir et épais. Nous ne nous étions jamais envisagées de la sorte, ma mère et moi. Car ce mot avait été inventé par les hommes, ce mot qui apporte du pouvoir à ceux qui le prononcent plutôt qu’à celles qu’il désigne. Un mot qui construit des potences et des bûchers, qui transforme des femmes bien vivantes en cadavres.

À présent les univers, les personnages et même certaines phrases laissent leur empreinte dans son esprit, tels des phares lui rappelant qu'elle n'est seule.

La vérité est semblable à la laideur : il faut se tenir tout près pour la voir

Ce soir-là, il l'avait suppliée de ne pas partir pendant qu'elle faisait ses valises, lui disant qu'il était désolé, que cela ne se reproduirait jamais, qu'il ne pouvait pas vivre sans elle.
Elle avait hésité, déjà. Malgré tout, quand le taxi était arrivé. elle était montée à bord.
C'était la seule chose à faire, non ? Pour elle, une femme prétendument éduquée et qui avait encore suffisamment d'estime de soi. Elle ne pouvait pas rester.

Je réfléchis par où commencer. Qui décide où commencent et ou se terminent les choses ? J’ignore si le temps suit un cours linéaire ou circulaire. Ici, les années se succèdent moins qu’elles ne se répètent en boucle : l’hiver devient le printemps qui devient l’été qui devient l’automne qui redevient l’hiver. Parfois je me dis que toutes ces tranches de temps se déroulent simultanément. Ainsi, je pourrais dire que ce récit débute maintenant, tandis que je prends ma plume pour le raconter. Mais l’on pourrait aussi dire qu’il naquit avec la première femme Weyward, il y a bien des lunes de cela.

Il y avait longtemps qu'elle n'avait pas puisé autant de joie dans les récits tissés à partie des rêveries d'autres qu'elle. (...)
Au point qu'elle a bien cru, un temps, qu'elle avait perdu la magie de la lecture, ce pouvoir de se plonger dans une autre époque et un autre lieu. Elle avait l'impression d'avoir désappris à respirer.
Elle n'aurait pas dû s'en faire, pourtant. A présent les univers, les personnages et même certaines phrases laissent leur empreinte dans son esprit, tels des phares lui rappelant qu'elle n'est pas seule.

Je ne suis pas une femme instruite, sinon grâce aux enseignements transmis par ma mère et qu'elle tenait de sa propre mère. Néanmoins je connais le bien et le mal, la lumière et les ténèbres.
Et je connais le diable.
Je l'ai vu. J'ai vu sa marque. Sa vraie marque.
J'ai vu ces choses, oui.

La vue est une chose surprenante. Parfois, elle nous montre ce qui est sous nos yeux. Et parfois, elle nous montre ce qui s'est déjà produit, ou ce qui reste à advenir

Sorcière. Le mot glissait entre les lèvres tel un serpent, collait sur la langue à la façon du goudron noir et épais. Nous ne nous étions jamais envisagées de la sorte, ma mère et moi. Car ce mot avait été invité par les hommes, ce mot qui apporte du pouvoir à ceux qui le prononcent plutôt qu’à celles qu’il désigne. Un mot qui construit des potences et des bûchers, qui transforme des femmes bien vivantes en cadavres.

-A présent, tu connais la vérité. L'homme est né de la femme. Et non le contraire. Je lui demandai pourquoi le père Goode mentait à ce propos.
-C'est écrit dans la Bible. Le père n'est pas le premier à colporter ce mensonge. Quant à la raison, j'ai la conviction que les gens mentent quand ils ont peur.
Je ne cachai pas ma perplexité.
- De quoi le père aurait-il peur ?
Elle me sourit.
- De nous. Les femmes.
Elle se trompait. Nous étions celles qui aurions dû avoir peur.

Nous le savons, les femmes sont particulièrement soumises à la tentation du diable, car elles sont faibles d'esprit et d'âme.

Un été chaud, le plus chaud depuis des décennies à en croire ma mère. Nous avions passé notre temps à parcourir le village et à nous rafraîchir dans le ruisseau. Une fois lassées, nous étions parties goûter l’air plus frais des collines. Là, il y avait des pentes et des rochers escarpés couronnés de bruyère et de brume. Nous avions grimpé si haut que Grace prétendait pouvoir apercevoir la France. J’avais ri, répliquant que la France était très, très loin d’ici, et de l’autre côté de la mer, qui plus est. Un jour nous irions, lui avais-je dit. Ensemble.
Un balbuzard avait choisi cette heure pour pousser son cri dans le ciel. J’avais tourné mon regard vers lui, pour admirer son vol, ses ailes que le soleil ourlait d’argent. Grace avait ma main dans la sienne, et un sentiment de légèreté s’était diffusé en moi, comme si je m’élevais également pour traverser les nuages.

Elle se rendit à l'étable pour la traite.Ses mouvements étaient lents,son corps plié en deux par la douleur.Elle vacilla avant de tomber à genoux et d'avoir un haut-le-coeur.Je pressai une main sur ma bouche quand la porte s'ouvrit.John sortit et fondit sur son épouse,agenouillé dans la boue gelée.

Dix jours qu'ils me retiennent ici.

Les liens entre femmes sont les plus redoutés, les plus difficiles et constituent, potentiellement, la force de transformation la plus puissante de la planète. Adrienne Rich