Parvenu au seuil…
Parvenu au seuil
Dépose les insignes de la vie
Montre, clés, lunettes
Et franchis-le d’un bond
Entre
Une fois dépassée la fin — enjambée —
Dans l’éternel entretien.
Le temps s’enfonce …
Le temps s’enfonce de plus en plus dans son contraire
Comme l’aiguille d’acier dans la peau tendre
Comme les bêtes noires dans les buissons enneigés.
Un moustique a dépassé Dieu…
Un moustique a dépassé Dieu
Mais peu importe au fond
Je ne sais pas pourquoi je vous annonce cette nouvelle
De toute façon il n’y a rien à voir.
Les fils ramassés en écheveau…
Les fils ramassés en écheveau
Tout ce travail de la pensée vain comme le mouvement
des vagues et des nuages
Quel est cependant son secret ?
De quel voyage est-il le but ignoré ?
Comment trouver le sens de sa peine perdue ? .
"Subir le patriarcat est ce qui fait de nous des femmes" ("Nous sommes les opprimées").
"Subir le patriarcat est ce qui fait de nous des femmes" (dans "Nous sommes les opprimées").
le nuage dans le couchant…
le nuage dans le couchant n’est pas le nuage dans le couchant
l’étang noir n’est pas l’étang noir
celui que je suis n’est pas celui que je suis
ainsi nous accédons tous trois au néant
qui est le non-néant
Julius Bissier jouait du violoncelle
Dans son journal, le peintre allemand Julius Bissier écrit :
« Comme une araignée nous surprend dans le rêve et le sommeil,
l’angoisse me saisit à la gorge » (13 novembre 1943)
et le 16 janvier 1944 :
« Il faut une force énorme pour attendre la renaissance de la vie. »
Prise à la même époque, une photographie le montre
jouant du violoncelle
attentif semble-t-il autant aux sons tirés de l’instrument
qu’aux résonances intérieures
le visage partagé entre l’ombre et la clarté
chaque jour il lance un appel à l’infiniment lointain
qui lui répond en toute intimité
LE CAHIER VIDE ET LE CAHIER QUI SE REMPLIT…
Le cahier vide et le cahier qui se remplit
Quelque chose me dit qu’ils se valent
Que les mots et l’absence de mots c’est tout un
Comment ne pas devenir fou quand on se regarde dans la glace
Et qu’on veut simplifier l’équation de l’existence ?
Maintenant c’est toi que je regarde
Est-ce que je te vois ou pas ?
Est-ce que je me vois en toi ?
Est-ce que je te vois en train de me regarder ?
L’idéal serait que la vie soit comme un meuble
Où la poussière du passé ne se déposerait jamais.
Que je parle dans ma chambre
Ou que je me taise à ciel ouvert
Avec ta tête sur mes genoux
C’est tout un, assurément.