Estelle Fenzy

extrait 5


Invocation au jour
Et à la côte
Hissons sur nos épaules
La part respirable
De nos vies

extrait 2


Tous ces lacets
Serrées les gorges
Plus soif que les troupeaux
Les balles sifflent
Aveugles
Courir fuir
Disloqués
Djebel
Golgotha de l’exil

extrait 1


La vie gît dans quelques unes
Qui marchent avec nous
Dans l’arène du voyage
L’enfant futur
Déjà gibier
Cerné de chair

 
 
Je vais me coucher bientôt je me demande si tu me
rendras visite en rêve comme la nuit dernière

Rêve où mes paroles te font ouvrir les yeux rendent
chair à ton corps te font te lever sourire me convain-
cre que jamais tu malade

Que jamais tu mort

 
 
Je n’ai que ma nudité sur les épaules
une étole de peu
Elle suffira bien
Quoi d’autre pour réchauffer la nuit

 
 
Je suis né dans ce village
à l’engrais des tempêtes

la forge des orages

Qui était cette femme
au visage froissé dans ma poche

Je ne m’en souviens plus

Renoncer à ta mort
bricoler la fracture ouverte du vivre impossible à réduire
Le faire sans

Fais comme s’il y avait un voyage
  
  
  
  
Fais
comme s’il y avait
un voyage

Imagine
il te mène
à toi-même

à bord
d’un vaisseau
qui porterait
ton nom.

  
  
Qui trouvera
la boîte noire de mon crâne
avec dedans les restes de

mon existence.

  
  
Qui
pourrait dire
ce qui survient
ce qui trébuche dans la poitrine
quand l’imminence de la fin

le temps réel de la mort collective

Qui quoi

sinon les yeux de l’autre sur le siège à côté.

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Nous nous tenons la main.
Dans ce geste, tous les mots que nous ne savons pas encore.

Dans tes yeux…



Dans tes yeux
les terrils
ce n’étaient pas
ces déchets
montés du fond
ces débris en collines
plus tristes que le ciel
C’étaient
des seins d’ébène
de la poudre de volcan
soufflée d’un sablier brisé

Juin finissait…



Juin finissait
L’école aussi
J’avais reçu
le premier prix
un livre en couleurs
que j’avais choisi
Tu nous as invités
chez toi pour le goûter
m’as envoyée au grenier
chercher la farine pour Mémé

Disposer de fruits rares
rire inespéré
repli de la douleur
Respecter tes silences

Chut! Le monstre dort
Buvons le galop des jours
et la surprise
de vivre
dans le même verre

Sous tes paupières
lumière fêlée
tu débâtis
les prisons

Chaque instant
gagné
Le temps peut-être
fait crédit

Parole fauchée
débordée
à l'aveuglette
balle perdue
enfermée
dans tes poings

Penser vif
Écrire simple
Crier grand
Puisque la vie ampute