Citations de Fabien Benoît (21)
Le smartphone, et plus largement le numérique, véhicule une idéologie et conditionne nos existences.
Une prise de conscience mais aussi une intuition : celle que des outils construits par ceux qui vont les utiliser, en fonction de leurs besoins, des outils réparables et partagés, valent mieux que des machines standardisées, complexes, pensées pour une agriculture intensive sur des surfaces toujours plus grandes.
L'abondance apportée par la modernisation de l'agriculture est une abondance de produits de mauvaise qualité.
Quand les situations sont complexes, il est difficile de les faire rentrer dans les cases d'un formulaire en ligne ou de naviguer dans les méandres d'un serveur vocal automatisé. Tout cela sans même parler de la simple question de l'accès à un ordinateur, de l'illettrisme ou de "l'illectronisme", ce manque de savoir-faire face à un écran.
Le perfectionnement technologique devait accompagner la transition écologique, il brille surtout par sa gourmandise en énergie et en matériaux.
L'industrialisation pose des problèmes de plus en plus inextricables qu'elle promet de résoudre avec toujours plus de technique.
De plus en plus de personnes ne se résignent pas à ce que le numérique braconne leurs vies, les aliène, les isole et détruise leurs métiers. Leurs voix sont de plus en plus nombreuses, et surtout de plus en plus audibles. Les collectifs d'opposants convergent et mettent en commun leurs expériences. Et si le monde se referme, il n'est pas encore totalement clos. Nous sommes encore à la croisée des chemins. Il est encore temps de refuser la 5G, la reconnaissance faciale, les voitures autonomes, la Smart City, le règne des QR codes et le remplacement intégral de l'humain par des formulaires en ligne, des applications et autres robots conversationnels.
L'école numérique n'existe pas. On vient juste pallier des échecs déjà présents. Les élèves n'arrivent pas à se concentrer, on les scotche devant un écran. Ils ne savent pas écrire, on les dispense de le faire.
Penser le monde avec les mots du numérique, c'est ne plus penser la place du numérique dans le monde.
Au fil des rencontres, nous avons été interpellés par la surreprésentation des ingénieurs, informaticiens, programmeurs et autres chercheurs en intelligence artificielle au sein des collectifs technocritiques ou des mouvements emblématiques de la "génération climat".
Ce métier je l'aime. Il est sensible, empirique, tu t'adaptes en permanence, il n'y a pas de méthode pour faire de l'élevage, tu apprends, tu testes, tu évolues.
Les discours simplistes, qui rejouent l'histoire maintes fois répétée de la grande marche vers le progrès, font plus recette que les démonstrations minutieuses, documentées.
Vanter l'arrivée de l'agriculture connectée en reprenant les annonces de ses promoteurs, à grand renfort de novlangue, est plus payant que d'entreprendre un travail minutieux d'enquête sur l'infrastructure qui sous-tend un drone épandeur de pesticides.
L'usage de ces trottinettes en libre-service qui ont envahi les rues, contrairement aux arguments de leurs promoteurs ne remplace pas celui de la voiture mais essentiellement la marche (dans 47% des cas), les transports en commun( 29%) et le vélo (9%). Ou bien encore d'y glaner des informations sur leur courte durée de vie - 29 jours pour certains modèles - leur impossible recyclage et leur insatiable appétit pour nos données privées..
La 5G est un enjeu économique majeur. Sans elle, pas de renouvellement du parc de smartphones, pas d'objets connectés, pas de voitures autonomes, pas d' "agriculture 4.0" ou de Smart City. La 5G, c'est la pierre de touche de la numérisation intégrale.
Facebook tint une telle place lors de la révolution qu'un Egyptien d'une vingtaine d'années, Jamal Ibrahim, décida en février 2011 de baptiser sa première fille "Facebook".
Le journal en ligne RUE89 publie chaque mois un classement des status et des "groupes" Facebook les plus loufoques ou futiles. En voici un échantillon, non exhaustif: "Tricote une doudoune", "A mal aux muscles ou plutôt à l'absence de muscles", "Quand le pouvoir de l'amour dépassera l'amour du pouvoir, le monde connaîtra la paix", "Le Nutella est un fruit", "Grrrr!! Ma collègue me sort par les yeux!!!!!!", "Parfaite cette raclette!!!" ou encore les plus traditionnels "En mode vacances" ou "En mode shopping".
Le maintien d'un accès physique aux services publiques, défendu par "Lève les yeux", est essentiel pour "le droit de dire non au numérique", comme le formule Catherine Luciaud, membre du collectif et docteure en informatique : garantir la possibilité de payer ses impôts, acheter un billet de train, prendre un rendez-vous chez le médecin, sans avoir à passer par un écran.
Plutôt que la télémédecine, j'aimerais avoir un médecin à Saint-Cadou.
Le numérique est une "dépossession existentielle", venant confisquer l'autonomie que les gens avaient dans leur travail, le sens qu'ils lui donnaient.