Discours de Fabien Lecuyer (Collectif l'Andon dou Galo) pendant la Manifestation du 18 juin 2011 à Nantes pour la réunification de la Bretagne, revendiquant le retour de la Loire-Atlantique en Bretagne, sa région historique.
J'ai tout une nouvelle ville en spectacle devant moi. N'importe quelle fenêtre, quelle lumière est une promesse. La nuit, la lumière s'en va et les lumières sont partout. Je regarde ces gens chez eux. Je suis là et ils ne savent même pas que j'existe. Ne m'attarde dans aucune mémoire. Je suis au pied de leur existence pour bien dire. Ils sont dans la lumière et moi qui suis à peine un morceau de nuit je passe devant eux. En évitant les éclairages.
La langue n’est pas un autocollant « A l’aise Breizh », un pull marin qu’on achète l’été à Saint-Malo pour se donner le genre Kerauson. La langue nécessite un long apprentissage et un rapport avec les anciens pour saisir l’esprit de la langue. La langue, dans un monde ou l’éphémère et l’immédiateté sont la règle, est le signe d’un investissement profond. On peut devenir musulman récitant une profession de foi d’une phrase, renouer avec la foi catholique en assistant à une messe de temps en temps, mais apprendre et pratiquer une langue demande beaucoup plus que ça.
Une grande partie de l’ouvrage s’emploie à dessiner une clarification idéologique : comment légitimer le gallo face à la langue française dominante et face à une langue bretonne mieux assumée que le gallo ? Le sociolinguiste Joshua Fishman a expliqué en 1991 dans livre Reversing Language Shift (Inverser la substitution linguistique), que toute communauté culturelle qui veut revivifier sa langue a besoin dès le départ, de mettre au point une idéologie claire et nette en faveur de ladite langue.
Ce que l’exemple de l’hébreu enseigne est qu’aucune langue n’est condamnée à l’extinction si une poignée de locuteurs, voire un seul locuteur (exemple de Ben Yehuda), décide du contraire. Il n’existe pas de sens de l’histoire en matière de langue, il n’existe qu’une seule loi : la loi de Darwin. La loi du plus fort, du plus résilient et du plus performant en matière d’adaptation. Et ce darwinisme linguistique est terrible.
L’époque actuelle, en Occident, est celle de la mièvrerie, du « choix multiple » et de la demi-mesure. Or, en matière de langues minoritaires, je le répète, ce sont les radicaux qui ont toujours fait avancer l’Histoire. Les « modérés » et « raisonnables » participent, généralement à l’enterrement des langues minoritaires qu’ils défendent. Un enterrement de première classe, mais un enterrement quand même.
Chacun peut donc s’acheter un triskel, appeler son fils Maël et même porter des plaques « 22 » au fin fond de la Sarthe si ça l’amuse. Des festoù-noz sont organisés jusqu’en Haute-Savoie de nos jours. Mais alors, qu’est-ce qui distingue réellement un Breton d’un Basque, d’un Occitan ou d’un ressortissant des Deux-Sèvres alors ? La langue !
Malgré tout le respect que nous leur portons, les anciennes générations, notamment celle issue des Trente Glorieuses, ont une vision « utilitariste » des langues. A leurs yeux, une langue mérite d’être apprise à partir du moment où elle permet une ascension sociale.
La Suisse, qui n’est pas particulièrement un pays sous-développé, compte 4 langues nationales et 26 systèmes éducatifs différents, c’est-à-dire un par canton !
Il faut se réjouir quand Fabien Lécuyer écrit que « la première des actions pour faire progresser le gallo est de le parler.