AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Fatma Bouvet de la Maisonneuve (99)


Sommes-nous enveloppés d’une couche de protection émotionnelle que la dépression décape pour mettre à vif notre sensibilité et nous montrer l’insupportable des faits ?
Commenter  J’apprécie          80
Si Freud parle de fixation au stade oral pour expliquer l'alcoolisme. Rado, lui, ajoute la notion de régression narcissique et rapproche ainsi l'alcoolisme de la psychose maniaco-dépressive, ce qui pourrait être justifié par le caractère brutal et impulsif que l'on observe à la fois chez les alcooliques et chez les maniaco-dépressifs. Pour lui, le produit jouerait d'abord un rôle d'antidépresseur pour, ensuite, devenir "instrument de suicide".


Commenter  J’apprécie          70
... les chercheurs ont trouvé que le mariage semblait être un facteur de mauvais pronostic pour les femmes, alors qu'il protège les hommes de l'alcool. Que le statut de femme mariée soit un facteur de risque, cela peut s'expliquer par la survenue d'éventuelles tensions conjugales ou familiales. Mais aussi par le simple fait de l'allongement de la vie des femmes. En effet, non seulement elles arrivent plus jeunes au mariage, mais elles ont aussi une espérance de vie plus longue. Elles sont donc plus exposées à vivre le décès du conjoint, ce qui représente un facteur dépressogène. Elles sont, pour les mêmes raisons, plus nombreuses à vivre seules longtemps, ce qui pousse les plus fragiles d'entre elles vers l'abus d'alcool. C'est ainsi que l'on peut comprendre cette progression, à la fois observée en clinique et décrite dans les études, de l'alcoolisme féminin à des âges de plus en plus avancés.
Commenter  J’apprécie          60
... les négligences affectives pendant l'enfance ou l'adolescence. Olivenstein, au sujet de cette dimension chez les toxicomanes, écrivait : "Tout se passe comme s'ils avaient été brutalement privés de sécurité ou d'amour, comme s'ils avaient le sentiment que le monde devenait injuste." C'est ce qu'il appelait le "miroir brisé". Pour garder la métaphore optique, je dirais que l'alcool peut aussi agir comme une loupe. Le produit, au début, est une sorte d'antidote de la souffrance, mais il devient assez rapidement son amplificateur.

Commenter  J’apprécie          60
Des études récentes, dont celles du prix Nobel d’économie James Heckman, montrent que la qualité de vie durant la petite enfance, santé comprise, influence l’avenir des futurs adultes.
Commenter  J’apprécie          60
La psychologisation à tout va de la société actuelle fait dire un nombre incalculable d’âneries à certains professionnels du psychisme, ce qui nous discrédite, nous autres « psy », et cela est bien dommage lorsque nous pourrions être si utiles aux moments adéquats.
Commenter  J’apprécie          60
Comme tous les matins depuis qu’elle est là, Ève creuse le sable de sa foulée régulière. Mais elle sent, aujourd’hui, une sorte d’excitation, une impatience sourde qui met tout son corps sous tension. C’est une camisole indicible qui l’enserre jusqu’à la ralentir dans sa course. Dès son réveil, bien plus tôt que les autres matins, elle s’est trouvée bizarre. Peut-être est-ce encore à cause du malaise qui s’est installé entre Jérôme et elle ?
Elle a l’impression de courir à côté de son corps ; et cette sensation d’étrangeté s’accentue lorsqu’elle aperçoit à quel point la Fata Morgana est prononcée ce matin. Il s’agit d’un phénomène fréquent sur cette île : au lever du jour, le ciel et la mer se confondent. La brume de la nuit, qui n’est pas encore dissipée, vient napper la mer au large en lui donnant la couleur du ciel. Alors la ligne d’horizon semble s’avancer vers vous et, comme par magie, les barques, au loin, paraissent voler dans le ciel. Cette illusion d’optique induit une forte sensation onirique. D’habitude, Ève aime et s’amuse de ce mirage, mais aujourd’hui, il lui donne le vertige. Il la prend au corps et l’ankylose. Allez, si elle force sur la cadence et si elle allonge le parcours, elle pourra probablement évacuer cette oppression et se libérer de cette contention qui l’étouffent. Alors, Ève accélère son pas de course.
Commenter  J’apprécie          50
La notion de comorbidité, comme celle des facteurs prédictifs ou héréditaires [...], montre à quel point les troubles sont intriqués et forment un tout. C'est cela que l'on peut appeler "maladie alcoolique". C'est cette globalisation qui fait la singularité de ces tableaux de patientes : les problèmes sont à la fois psychologiques, familiaux et sociaux. Les patientes cumulent presque toujours toutes les conséquences à la fois : en effet, elles ne consultent le plus souvent que trop tard et l'alcool aura pu prendre tout son temps pour désorganiser la totalité de leur vie.
Commenter  J’apprécie          50
Les préjugés ont la peau dure et il arrive qu'ils atteignent le corps médical, la notion d'hystérie perd alors toute valeur diagnostique pour ne plus signifier qu'un motif de rejet à forte connotation morale. Il existe encore aujourd'hui des soignants qui abordent les questions d'alcool avec mépris : "Les femmes alcooliques sont toutes des hystériques, c'est bien connu !" Certains se méfient encore d'une "parole d'ivrogne", ce qui signifie, on le sait bien, qu'il ne faut jamais faire confiance à ces patients et qu'il faut les considérer avec beaucoup de vigilance et de méfiance. Pour ce qui est de mes patientes, je pense au contraire que leur parole est précieuse, c'est un cadeau qu'elles font au médecin lorsqu'elles "déballent" devant lui des soucis si longtemps gardés sous silence.

Commenter  J’apprécie          40
... la première conséquence sociale de l'alcoolisme, retrouvée chez les patientes, est la rupture du lien social, l'enfermement sur soi, l'ennui, voire la dépression qu'elles vont traiter à nouveau par l'alcool.
Commenter  J’apprécie          40
Si la France accuse un véritable retard en matière de prévention de la maltraitance thérapeutique, c’est bien parce que celle-ci est mal identifiée ou banalisée ou qu’elle suscite la peur des représailles du patient ou des familles qui s’en plaindraient.
Commenter  J’apprécie          40
Ce jour-là, le métro est presque vide, lorsqu'une jeune femme monte et s'assoit sur un strapontin près de la porte. Peu après, nous les passagers, nous entendons de curieux reniflements et nous cherchons d'un regard discret d'où peuvent bien parvenir ces bruits inquiétants qui se transforment rapidement en d'authentiques sanglots. La jeune femme vient de monter et elle pleure maintenant tout son soûl. Elle est assise auprès d'un passager qui semble bien embarrassé par la situation. Elle paraît se consumer dans son chagrin, face à notre impuissance ; personne ne semble plus exister autour d'elle. Quelques stations plus loin, elle se lève et sort de la rame, nous laissant là, interdits, coupables de passivité et de malaise face à cette scène poignante. Quels événements ont pu provoquer une telle tristesse ? L'annonce d'un drame humain me vint à l'esprit. Le tragique existe, mais mon expérience m'a rappelé qu'on pouvait aussi pleurer pour moins grave que cela : une rupture sentimentale ou amicale, un conflit professionnel ou, tout simplement, la fatigue. J'ai pensé à toutes ces patientes éreintées par la vie qui pleurent dans mon bureau. Elles sont parfois si dévastées avant ou après la consultation qu'il ne serait pas surprenant qu'elles aussi sanglotent dans le métro. "Qu'est-ce qui fait pleurer les blondes ?" chantait Sylvie Vartan. Qu'est-ce qui fait trébucher les femmes alors qu'elles sont si résistantes ?
Commenter  J’apprécie          30
Il y a vingt ans, j’émigrais à Paris pour finir ma spécialité médicale. Je voyais mon exode d’un oeil averti, pourtant j’imaginais trouver une terre de grande liberté et d’ouverture. J’idéalisais la France au point de croire que Paris était la ville de l’amour et de l’humour…Évidemment, ce n’est pas tout à fait ce que j’ai trouvé, mais j’ai rencontré des êtres humains, des gens comme moi et comme ceux que j’avais laissés là-bas. Et je ne suis pas déçue. Exit les préjugés, brisées les idées préconçues. Car oui, à moi aussi, il a fallu beaucoup d’efforts pour comprendre les plus récalcitrants…
Commenter  J’apprécie          30
Assumer en public est une force qui donne de la force.Les encouragements et les réconforts peuvent venir des membres de la famille, des amis, parfois des collègues qui sont passés par la même situation, sans oublier, bien sûr, les associations d'anciens buveurs.
Commenter  J’apprécie          30
Maisondieu : ... Dans le monde viril qui est sa référence, la femme est forclose... Il n'y a donc pas d'autre perspective pour une femme que d'être radicalement et définitivement condamnée à être mal dans sa peau."


Commenter  J’apprécie          31
Dépendance, faible estime de soi, manque de réactions devant certaines situations y compris les plus douloureuses et conflit identitaire sont des caractéristiques si souvent observées chez les femmes en général et les femmes alcooliques en particulier qu'il est opportun de s'interroger ici avec nos patientes sur le lien entre ces traits de caractère et leur maladie.


Commenter  J’apprécie          30
Il faut bien reconnaître que la représentation sociale des femmes est teintée de mépris depuis des siècles, à travers des dits penseurs comme Clément d'Alexandrie, qui il y a déjà plus de mille ans écrivait : "Toute femme devrait être accablée de honte à la pensée qu'elle est femme." Imaginez la honte d'être une femme alcoolique de surcroît, encore au XXIe siècle : les mentalités évoluent lentement.
Commenter  J’apprécie          30
A ce jour, je peux affirmer qu'aucune des patientes qui ont osé révéler leur maladie ne m'a rapporté de propos blessants ou désobligeants à son encontre, au contraire. Ce qui est assez saisissant, c'est la résonance que rencontrent leurs aveux : "Moi aussi, tu sais, je pense que je bois trop, ça commence à avoir des répercussions sur ma vie de couple", ou encore : "Ma soeur a aussi eu des problèmes de ce genre, je comprends, tiens le coup !" Ce sont des propos qui renforcent les patients dans leur décision.
Commenter  J’apprécie          20
... je ne pense pas qu'une distance infranchissable entre la patiente et moi soit une condition sine qua non pour que la relation thérapeutique soit efficace. J'ai souvent remarqué, par exemple, à quel point poser sa main sur l'épaule ou le bras de celui qui va mal est un geste apaisant qui peut changer totalement le cours d'une évolution. Le transfert avec des patientes pour lesquelles le langage ne peut encore réussi à endiguer la passion avec des mots passe d'abord par une expression du corps qui est ressentie comme plus directe et plus vraie. Voilà pourquoi il ne faut jamais être avare de ces formes d'expression.


Commenter  J’apprécie          20
J'encourage la liberté de chacune à mettre en place ses stratégies personnelles. L'essentiel est qu'elles soient efficaces et qu'elles leur permettent d'être en paix avec elles-mêmes.
Commenter  J’apprécie          20



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Listes avec des livres de cet auteur
Lecteurs de Fatma Bouvet de la Maisonneuve (23)Voir plus

Quiz Voir plus

L'Odyssée

Comment s'appelle l'île sur laquelle vit Ulysse?

Calypso
Ithaque
Ilion
Péloponnèse

10 questions
2558 lecteurs ont répondu
Thème : L'Odyssée de HomèreCréer un quiz sur cet auteur

{* *}