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Citations de Francis Vielé-Griffin (40)


Francis Vielé-Griffin
Chanson

J’ai pris de la pluie dans mes mains tendues
— De la pluie chaude comme des larmes —
Je l’ai bue comme un philtre, défendu
À cause d’un charme ;
Afin que mon âme en ton âme dorme.

J’ai pris du blé dans la grange obscure
— Du blé qui choit comme la grêle aux dalles —
Et je l’ai semé sur le labour dur
À cause du givre matinal ;
Afin que tu goûtes à la moisson sûre.

J’ai pris des herbes et des feuilles rousses
— Des feuilles et des herbes longtemps mortes —
J’en ai fait une flamme haute et douce
À cause de l’essence des sèves fortes ;
Afin que ton attente d’aube fût douce.

Et j’ai pris la pudeur de tes joues et ta bouche
Et tes gais cheveux et tes yeux de rire,
Et je m’en suis fait une aurore farouche
Et des rayons de joie et des cordes de lyre
— Et le jour est sonore comme un chant de ruche !
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Francis Vielé-Griffin
LA CLARTÉ DE VIE

C’est toujours le même doute :
On la guette ; elle approche sans bruit ;
Elle rit tout bas et froufroute
Entre les algues bercées :
Elle s’est doucement glissée
À travers les brisants, là-bas, dans la nuit ;
Elle a peur qu’on l’écoute :
Et, sur le sable discret,
Elle hésite et recule d’un pas,
Et les algues s’égouttent…
Mais la voici qui bute aux galets
Qui s’écroulent en fracas !

Entends-la, maintenant : la voilà reconnue ;
Elle éveille la dune
D’un grand cri de défi
Et se lève, éperdue,
Avec sa chevelure d’écume, sous la lune,
Qui s’y pose, cornue…

Elle en rit, forte et franche et s’en pare
Scintille et monte en chantant,
Riche d’une résille hilare
De rayons de lune éclatants ;

Elle varie son air au hasard de la grève ;
Selon galets ou sable, elle mêle
Aux plaines de l’Arc éternel
La voix claire et frêle du Rêve ;
Car notre âme est en elle…

S’en aller à elle et l’étreindre
Et se fondre en sa caresse vive !
Se vêtir d’elle et la ceindre
Et se draper en elle et en vivre
Et rire en sa voix et s’y plaindre
Et la pleurer toute et la suivre !

Car la voici étale ; elle est lasse
De son œuvre fatale et vaine ;
C’est l’heure des affres humaines :
Par-delà les grèves basses,
S’en retournant, elle entraîne
Vers l’éternité sans trace,
En son filet qui racle et qui roule
Et se tord et hurle en la houle,
L’âme des morts que l’aube chasse…
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Francis Vielé-Griffin
J’ai couru d’abord; j’étais jeune…

J’ai couru d’abord; j’étais jeune;
Et puis je me suis assis:
Le jour était doux et les meules
Étaient tièdes, et ta lèvre aussi;

J’ai marché, j’étais grave,
Au pas léger de l’amour;
Qu’en dirai-je que tous ne savent?
J’ai marché le long du jour;

Et puis, au sortir de la sente,
Ce fut une ombre, soudain:
J’ai ri de ton épouvante;
Mais la nuit m’entoure et m’étreint.
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Francis Vielé-Griffin
CROIS : Vie ou Mort, que t’importe…



CROIS : Vie ou Mort, que t’importe,
En l’éblouissement d’amour ?
Prie en ton âme forte :
Que t’importe nuit et jour ?
Car tu sauras des rêves vastes
Si tu sais l’unique loi :
Il n’est pas de nuit sous les astres,
Et toute l’ombre est en toi.

Aime : Honte ou Gloire, qu’importe,
A toi, dont voici le tour ?
Chante de ta voix qui porte
Le message de tout amour ?
Car tu diras le chant des fastes
Si tu dis ton intime émoi :
Il n’est pas de fatals désastres,
Toute la défaite est en toi.
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Francis Vielé-Griffin
D’autres viendront par la prée
S’asseoir au banc de la porte;
Tu souriras belle et parée,
Du seuil, à ta jeune escorte:

Ils marcheront à ta suite
Aux rayons de ton printemps
- Qu’ont-ils à courir si vite?
Moi, j’eus, aussi, leurs vingt ans

Ils auront tes sourires
Et ta jeunesse enchantée…
Qu’importe? qu’en sauront-ils dire:
Moi seul, je t’aurai chantée.
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Francis Vielé-Griffin
N'est-il une chose au monde,
Chère, à la face du ciel,
-un rire, une rêve, une ronde,
un rayon d'aurore ou de miel

N'est-il une chose sacrée
- un livre, une larme, une lèvre,
une grève, une gorge nacrée,
Un cri de fierté ou de fièvre (...)

Qui soit comme une âme en notre âme ,
Comme un geste guetté que l'on suive,
Et qui réclame, et qui proclame ,
Et qui vaille qu'on vive ?

(" La partenza")
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Francis Vielé-Griffin
Il y eut trois fils de Finland :
Slafide et Égile et Wieland.
Ils vinrent de l’Est dans un vent de neige,
Jusqu’au Val-du-Loup, s’y bâtir des demeures,
Près d’une eau propice à la trempe du fer,
A l’orée des bois noirs qui roulent vers la mer.

L’un, Slafide,
Tendait des lacets aux bêtes,
Bon chasseur et vaillant et agile,
A la marche muette ;
L’autre, archer aux flèches mortelles,
Égile,
Tournait en risées toutes choses ignorées
Et son rire se mêlait à ses flèches, l’une d’elles,
Quand son arc détendu vibrait sous la forêt.

Toute vie a sa peine autour d’elle.
Comme un manteau de laine
Que la pluie alourdit,
Que le soleil allège ;
Toute vie a sa peine,
Comme un manteau ourdi.

Or l’âme de Wieland était belle,
Et son manteau de peine est léger autour d’elle,
Un beau manteau de rêve ;
Et s’il forgeait des glaives
C’est que sa jeune ardeur était vive,
Comme le feu de sa forge sous le soufflet de cuir,
Et c’est que la force captive
Et son blanc bras de fille
Balançait le marteau comme un fuseau de lin ;
S’il forgeait le fer et s’il le trempait,
C’est que la jeune ardeur de son âme était franche
Et l’orgeuil de sa force et de sa beauté blanche
Et sa volonté droite était comme une épée :

« Épée!
O rayon brusque perçant la nue,
Voie droite et claire,
Éclair nu !
Rigidité surgie des pins en troupe ;
Ligne couchée de l’horizon des mers
Barré du sillage incliné vers lui des barques ;
Stature dressée de l’homme de poupe ;
Geste martial des proues de fer!
Ligne,
Ligne lumineuse
Que trace le vol des cygnes,
Ou qui prolonge le geste qui devance
Et montre le chemin qu’il fraie!
Signe de lucide volonté,
D’action insigne,
Impatience!
Épée!… »

Ainsi, obscure ou vive,
L’idée l’étreint
Et fait sa jeunesse ivre
Du rêve de son lendemain,
Ivre du travail de ses mains ;
Car elles arment le geste
Façonneur du destin.

Wieland est grave de son rêve étrange ;
Son âme s’en grisa dès le berceau d’enfance :
Telles ces fièvres sans nom allumés dans le sang,
Nées d’un crépuscule d’automne,
Quand le ciel était rouge au-dessus de l’enfant
Et que porte vers la mort le sang de l’homme ;
Fièvre qui s’attise et s’éteint dans les veines,
Au gré d’une loi mystérieuse de gloire,
Qui domine les sorts et les mène
A la défaite,
A la victoire!
Et qui dans l’enfant grave façonne le poète.
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Dormir et rire d’aise, un sommeil : je divague ;
Dormons : le mal d’aimer, ô cœur, t’a ravagé ;
Et je me sens, ce soir, si follement âgé
Que je me crois le survivant d’un monde vague.

La nuit est formidable et triste à tout jamais,
Un souvenir qui hante emplit l’ombre déserte ;
Mon regret est futile et mon désir inerte
N’appelle plus l’espoir des rêves abîmés ;

Dormons: il n’est plus rien sous le crêpe d’azur
Où s’est drapée à tout jamais la vieille joie ;
Tes ailes, que le saint désir ouvre et déploie,

Retombent, ton espoir d’aimer est presque impur...
Je divague au retour des vaines lassitudes,
N’avions-nous pas rêvé d’autres béatitudes ?
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XXI


La vague roule et s’effondre,
Se reploie et remonte et s’éploie :
― Son culte étreint le monde
D’un océan de joies.

La vague se dresse et s’écroule,
S’assemble et brandit sa clarté :
― Elle donne une âme à la foule
Et la pare de sa beauté.

La vague surgit et nous porte,
Nous qui chantions sous nos treilles,
Assis devant notre porte
À compter nos jours pareils ;

Nous qui chantions en poètes,
L’un pour l’autre, nos mêmes soucis,
Savons-nous si nos âmes sont prêtes
Pour les lendemains que voici ?

p.49-50
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V


J’ai couru d’abord ; j’étais jeune ;
Et puis je me suis assis :
Le jour était doux et les meules
Étaient tièdes, et ta lèvre aussi ;

J’ai marché, j’étais grave,
Au pas léger de l’amour ;
Qu’en dirai-je que tous ne savent ?
J’ai marché le long du jour ;

Et puis, au sortir de la sente,
Ce fut une ombre, soudain :
J’ai ri de ton épouvante ;
Mais la nuit m’entoure et m’étreint.

p.17-18
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XXIII


« N’est-il une chose au monde,
Chère, à la face du ciel
― un rire, un rêve, une ronde,
Un rayon d’aurore ou de miel

N’est-il une chose sacrée
― un livre, une larme, une lèvre,
Une grève, une gorge nacrée,
Un cri de fierté ou de fièvre

N’est-il une chose haute,
Subtile et pudique et suprême
― Une gloire, qu’importe ! une faute,
Auréole ou diadème

Qui soit comme une âme en notre âme,
Comme un geste guetté que l’on suive,
Et qui réclame, et qui proclame,
Et qui vaille qu’on vive ?… »

p.53-54
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03 – Je regarde, feuille à feuille…

Je regarde, feuille à feuille,
S’éparpiller dans le soir
Le manteau d’or et d’orgueil
De ces grands arbres noirs;

Je regarde, goutte à goutte,
Tomber comme du sang,
Les feuilles… et le soir en déroute
Tourne et fuit dans le couchant;

On rêverait toute une vie
D’espoir si vain qu’on en doute
- Mais voici la côte gravie,
Et voici le soir, et la route.
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Francis Vielé-Griffin
NE croyez pas…


Extrait 2

Oui, mais ne croyez pas
—Parce qu’autour de vous toute âme est vile,
Et que la foule adore son vice servile,
Parce que, sur la plaine où le Mystère halète
Courbant l’épi, froissant la feuille, d’ailes inquiètes,
Grandit la ville —,
Ne croyez pas,
—Bien que tout cœur soit bas —,
Que le vieil Angelus sonne à jamais le glas,
Croyez, sachez, criez à pleine voix
Que l’Amour est vainqueur et que l’Espoir est roi !
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C’ÉTAIT UN SOIR DE FÉERIES


C'était un soir de féeries,
De vapeurs enrubannées,
De mauve tendre aux prairies,
En la plus belle de tes années.

Et tu disais — écho de mon âme profonde, —
Sous l'auréole qui te sacre blonde
Et dans le froissement rythmique de soies :
« Tout est triste de joies ;
Quel deuil emplit le monde ?
Tout s'attriste de joies. »

Et je t'ai répondu, ce soir de féeries
Et de vapeurs enrubannées :
« C'est qu'en le lourd arôme estival des prairies,
Seconde à seconde,
S'effeuille la plus belle de tes années ,
Un deuil d'amour est sur le monde
De toutes les heures sonnées. »

p.111-112
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21 – La vague roule et s’effondre…

La vague roule et s’effondre,
Se reploie et remonte et s’éploie:
- Son culte étreint le monde
D’un océan de joies.

La vague se dresse et s’écroule,
S’assemble et brandit sa clarté:
- Elle donne une âme à la foule
Et la pare de sa beauté.

La vague surgit et nous porte,
Nous qui chantions sous nos treilles,
Assis devant notre porte
A compter nos jours pareils;

Nous qui chantions en poètes,
L’un pour l’autre, nos mêmes soucis,
Savons-nous si nos âmes sont prêtes
Pour les lendemains que voici ?
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17 – On part… et l’automne morose…

On part… et l’automne morose
Que l’on croise au tournant du chemin
Flétrit d’un souffle les roses
Qu’on emportait dans la main;

On part, et la pluie, éployée
Comme une aile, vous frôle la joue:
La pluie banale a noyé
Tes larmes et les mêle à la boue.

On part vers l’aventure neuve;
Hier est là en sa jeune beauté
Qui sourit sous son voile de veuve;
On part – et l’on pourrait rester…
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15 – J’emporte comme un fardeau léger…

J’emporte comme un fardeau léger,
Comme une gerbe de fleurs et de feuilles,
Toute l’ombre de ton verger,
Toute la lumière de ton seuil;

Le poids est si doux qu’il m’enivre
D’un baiser de lys sur la bouche;
Faut-il donc tout ceci pour, enfin, que tu livres
L’aveu de ton âme farouche ?

Il est bon de partir quand on aime,
Il est doux de se quitter ainsi:
Puisqu’on ne le sait qu’à ce prix
Et qu’on se découvre soi-même.
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11 – Mon pas, sur la route d’automne…

Mon pas, sur la route d’automne,
Berce la chanson des adieux
Au rythme monotone
De la plaine grise et des cieux;

Je me sens si fort et si leste
Que je marche au son de mes pas,
Entre le double geste
Balancé de mes bras;

Ma pensée monte, lente,
Comme l’étoile du soir
Et je ne sais si je chante
La certitude ou l’espoir;

Tant ma jeunesse fut ivre
De ce grand rêve hasardeux
Et du poème de vivre
A sa guise, au soleil de Dieu,

Et tant mon rêve est sage
De cette folie éternelle,
Et tant est belle la page
Qui s’ouvre dans le ciel…
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04 – Aussi bien je me dirais joyeux…

Aussi bien je me dirais joyeux,
Car la joie est subtile et fait mal
- La pluie en fils soyeux
Traîne sur l’horizon pâle.

Aussi bien je me croirais aimé,
Car l’amour est étrange et cruel
- Le soleil d’un rire enflammé
Met du sang au bord du ciel.

J’ai honte et j’ai hâte de vivre
Dans le deuil et la mort du monde,
Je ne sais quelle route suivre;
Mais j’entends mourir les secondes !…
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Francis Vielé-Griffin
Le vent nous précède et nous pousse…


Le vent nous précède et nous pousse,
La poussière de nos pas
Les devance, chère douce,
Qui ris bien, mais ne souris pas ;

Je suis de tout là-bas, où tinte
Une cloche d’argent dans le jour,
Où s’espace la demi-teinte
Du peuplier et du labour ;

Tout t’y semblerait triste et pâle,
Le fleuve et la plaine et les cieux :
J’y sais une chose sans égale :
Le Sourire silencieux.
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