Franck Andersen

Notre cerveau, lui aussi, sait généralement réagir à ce flux d’informations. Mais parfois il peut bugger ! Allons-nous changer toutes les pièces du véhicule si la communication semble dysfonctionnelle, si le voyant s’allume alors que nous venons de faire le plein ? Probablement pas. Nous allons chercher d’où vient le signal.

Le cerveau fonctionne en réseau et ses différents lobes communiquent sans cesse entre eux. Les informations circulent en permanence. Cependant, le psychiatre et psychanalyste Boris Cyrulnik en atteste, on peut situer sans faire d’erreur le fonctionnement émotionnel dans l’amygdale. C’est là en effet qu’est centralisé le traitement émotionnel. C’est donc là qu’il faut intervenir.

Les sensations sont les manifestations corporelles éprouvées précédemment et inscrites parfois de façon archaïque, mais qui sont à éprouver pour un dépassement, et non un déplacement, du symptôme.

La résolution émotionnelle n’est pas un protocole interventionniste qui pourrait confisquer l’effet recherché : le thérapeute ne force rien, ne suggère rien, ne fait rien à la place du consultant. Il est toujours plus sain de s’éloigner de la culture du résultat : le danger, pour un praticien qui cherche à en faire trop, est de ne pas atteindre le but recherché. S’engager trop volontairement, vouloir à tout prix peut être contreproductif.

Pour choisir l’émotion principale entre la peur, la jalousie, la colère, la tristesse, la déception, puis identifier la difficulté, nous allons donc interroger votre quotidien le plus banal.

La résolution émotionnelle est aussi efficace en cas de difficulté plus larvée ou de « flot » émotionnel. Ici, nous allons devoir creuser, mais, rassurez-vous, pas trop profondément, pour trouver la bonne difficulté et la situation représentative adéquate. Dans cette arborescence d’émotions et de difficultés, qui sont souvent reliées, nous allons essayer de trouver la principale, celle qui semble la plus redondante, la plus forte, celle qui se présente le plus souvent, et vous obsède, vous culpabilise.

Il n’est pas rare de dormir intensément la nuit suivant la consultation ! Si de nouvelles sensations surgissent, alors peut-être qu’une nouvelle séance sera à envisager. Mais vous connaissez maintenant son déroulé, elle n’a plus aucun secret pour vous.

Il se peut aussi que toutes les sensations inconfortables ne disparaissent pas à l’issue de la séance. Le travail a bousculé la mémoire corporelle, et il est parfaitement normal que le calme mette un certain temps à revenir dans le corps. Mais on peut avoir toute confiance en ce dernier : le corps connaît le chemin et il poursuit son autorégulation en dehors du champ de la conscience.

Le sensoriel vécu dans une inutile prolongation ne serait pas la manifestation d’une résolution en cours, mais relèverait plutôt, comme nous l’avons déjà évoqué, d’une forme de tourisme sensoriel. Ce serait alors le début d’une autre pratique, plus traditionnelle celle-ci, de méditation de pleine conscience.

Il y a toujours plusieurs situations évocatrices d’une difficulté, et l’idée est de choisir celle qui engendre le plus de sensations corporelles. Nous procédons donc par essais et, si ça ne marche pas, nous en tentons une autre.

Ces traumatismes sont trop anciens. Non, ce qui nous occupe, ce sont les difficultés qu’ils créent aujourd’hui, les pensées, les émotions et surtout, vous l’avez maintenant compris, les sensations corporelles qu’ils engendrent. Vous avez pris rendez-vous parce que quelque chose cloche dans votre vie actuelle, pas dans votre enfance ou dans votre passé. Il se peut par ailleurs que la source de la phobie échappe à toute explication intelligible, parce qu’elle remonte à une époque qui précède l’âge de 3 ans ou à la vie intra-utérine, et qui n’a donc pas été mémorisée.

La résolution émotionnelle est une voie vers la libération. Si elle empêchait les uns et les autres d’exercer leur libre arbitre, elle deviendrait un dogme. Or son principe est précisément à l’opposé d’un tel point de vue puisqu’elle permet à chacun, non seulement de RE-découvrir son pouvoir personnel, mais d’en RE-disposer alors que celui-ci était en berne pour une raison qui n’a plus lieu d’être aujourd’hui.

Notre tendance à repartir dans le mental alors que nous devons rester dans le sensoriel est tenace et parfois même insidieuse. Sans nous en apercevoir, nous rebasculons dans le discours, et le processus s’arrête. Nous croyons éclairer les choses, mais en réalité, nous les bloquons. L’exercice est subtil au début, mais loin d’être insurmontable. L’expérience de la résolution émotionnelle en cabinet est l’occasion d’apprendre à mettre en œuvre un protocole simple. Sa facilité même la rend parfois difficile à appliquer, mais, grâce à un accompagnement, l’autonomie peut être acquise.

La résolution émotionnelle n’est pas seulement un concept, c’est un outil. Et c’est en l’utilisant dans les moments difficiles, au quotidien, que nous pourrons profiter de ses bienfaits. Alors elle deviendra une nouvelle habitude.

Les réactions sont différentes en fonction de la personne. Il se peut aussi que rien ne se manifeste vraiment, et pourtant « ça a bouclé » ! Pourquoi ? Comment ? Est-ce bien utile de le savoir ou de le comprendre ? Le principal n’est-il pas que nous nous sentions mieux ?

Ce sont des messages qu’il nous faut reconnaître et entendre pour enfin les assimiler, pour laisser le cerveau lui-même faire son travail de résilience. Ainsi, elles n’auront pas à redoubler d’intensité pour nous prévenir que quelque chose ne va pas.

Il n’y a pas de « bonnes » ou de « mauvaises » sensations, et il faut éviter tout jugement, tout commentaire. L’idée n’est autre qu’accueillir ce que le corps lui-même tente de nous faire entendre. Ces sensations peuvent apparaître sous des formes assez précises, par exemple :


une tension physique ;


une douleur en divers endroits ;


le souffle court, un phénomène d’asphyxie ;


le cœur qui palpite, parfois plus fort ou plus vite ;


un léger vertige ou un étourdissement plus prononcé ;


des frissons ;


la contraction des muscles ou au contraire leur relâchement ;
des nausées ;


la tête qui tourne ;


le ventre qui gargouille ;


des tiraillements musculaires ;


des bouffées de chaleur ;


des variations de température.

Les sensations finiront par se dissoudre, et le poids que nous portons sur nos épaules sera déposé. Comme une valise pleine de vêtements devenus trop petits, démodés, inutiles, notre valise émotionnelle n’encombrera plus notre placard intérieur !

Mais bonne nouvelle ! Nous pouvons libérer le corps. Comme on vidange une voiture, comme on nettoie un disque dur, nous pouvons faire en sorte que les choses prennent juste la place nécessaire, leur place. Comment ? En redonnant de l’espace aux sensations, en les laissant « vivre leur vie » de sensations, là où nous les avions auparavant bloquées.

« Tout ce qui ne s’exprime pas s’imprime », disait le psychanalyste Carl G. Jung. Le corps nous montre toujours le bon chemin. Notre fonctionnement naturel est la seule voie qui permette la résilience.