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Critiques de Gabriel Hardman (25)
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Green Lantern - Terre-Un, tome 2

Ce tome fait suite à Green Lantern - Terre-Un, tome 1 (2018) qu'il vaut mieux avoir lu avant. Ce récit a été publié directement en album, sans prépublication, en 2020, coécrit par Corinna Bechko & Gabriel Hardman, dessiné et encré par Hardman, mis en couleurs par Jordan Boyd. Ce sont ces mêmes auteurs qui avaient réalisé le tome 1.



Trois ans après la bataille d'Oa, un groupe de 3 êtres humains pénètre dans un vaisseau Llaran, en orbite géostationnaire autour de la Terre. Il s'agit de la docteure Ngendo Muturi, de l'ingénieur Sophie Rivas, et du spécialiste Jonathan Stewart. Ils constatent que l'atmosphère est respirable à bord du vaisseau, même si elle est un peu riche en argon. Ils sont accueillis par deux Llaran qui leur proposent de sortir du sas et de pénétrer plus avant dans leur vaisseau. À Raton en Floride, dans le site principal de l'entreprise Ferris Galactic, un ingénieur rend compte de la situation à Carol Ferris. Celle-ci souhaite en particulier savoir si le gouvernement central Centcom a tenté d'intervenir : la réponse est négative, tout est calme de ce côté. A priori toute action d'intervention de leur part proviendrait de la station orbitale Arrowhead. le trio de négociateurs arrive dans la salle de contrôle du vaisseau Llaran. Stewart s'émerveille devant des cristaux qui semblent être la source d'énergie. Il pose une question sur ce qui lui semble être une pédale activée par l'appendice caudal des Llaran. Un de leurs hôtes répond que c'est tout simplement un repose-queue. À bord de la plateforme de défense orbitale Arrowhead, une agente apporte les ordres au commandant : ils doivent ouvrir le feu sur le vaisseau Llaran. L'ordre est donné de positionner la plateforme spatiale pour être en mesure de faire feu. Au dernier moment, le commandant se ravise et ordonne de ne rien faire.



Mais le vaisseau Llaran explose quand même dans une gerbe de feu. Les extraterrestres ripostent et une pluie de missiles s'envole en direction d'Arrowhead. Ils ne l'atteignent pas car Green Lantern (Harold Jordan) s'est interposé. Il aide à évacuer la plateforme qui a quand même été touchée de manière irrémédiable. Trois navettes de guerre se profilent sur l'horizon et se dirigent droit vers le vaisseau Llaran qui tire un nouveau missile. Une énorme explosion se produit, et Jordan se précipite pour évacuer les civils et les protéger dans un halo grâce à son anneau. Alors qu'il s'éloigne, la plateforme orbitale s'embrase dans une énorme boule de feu, totalement détruite. Les journalistes commentent les faits tout azimut. La décision de pointer Arrowhead vers l'espace pour servir d'avertissement contre d'éventuelles flottes extraterrestres. L'attaque du vaisseau Llaran qui risque de provoquer une guerre contre une puissance extraterrestre. L'intervention d'Harold Jordan pour protéger Arrowhead, une base de Centcom, alors qu'il s'est opposé à leur politique. L'ambiguïté qui plane sur les actions de Jordan, à la fois défenseur de la Terre contre une potentielle invasion extraterrestre, à la fois responsable d'avoir attiré l'attention desdits extraterrestres sur l'existence de la Terre. le général Jask, haut responsable de Centcom, est mis en cause par l'opposition. La question se pose de savoir si la plateforme Arrowhead a bien tiré la première sans provocation. Les Llaran ont emmené les trois terriens à bord de leur vaisseau pour les placer en détention.



Le lecteur est plutôt partant pour découvrir la suite de cette version de Green Lantern, indépendante de celle de l'univers partagé DC, dans cette collection destinée au réseau de librairies non spécialisées américaines. le premier tome avait parfaitement rempli ses objectifs : un récit complet qui peut être proposé à des lecteurs qui ne font pas partie du public habituel des comics, une version de Green Lantern un peu différente et moins infantile dans son origine. Les coscénaristes commencent donc par une approche science-fiction mâtinée de politique. Harold Jordan a établi le contact avec des races extraterrestres et c'est une rue à double sens : ceux-ci ont pris connaissance de l'existence de la Terre. Il ne s'agit plus d'un premier contact à proprement parler (il a déjà eu lieu avec Jordan), mais c'est quand même le premier contact formel entre deux civilisations, et bien sûr c'est la catastrophe. Ces prémices s'entremêlent avec des jeux de pouvoir entre Global Centcom, une organisation temporelle dans l'opposition appelée ITDC, pour savoir quelle stratégie adopter face à ce premier contact officiel, aux enjeux énormes, tant de diplomatie extraterrestre, qu'économiques en fonction des technologies adaptables. Sans compter que la Terre ne dispose pas de la technologie de voyage interstellaire, ce qui la place dans une position de faiblesse vis-à-vis des autres races qui elles en disposent.



Le lecteur retrouve le savoir-faire de l'artiste pour donner de la consistance et de la conviction à cet environnement de science-fiction. Il dessine dans un registre descriptif et réaliste, avec des traits de contour parfois un peu secs apportant un aspect rugueux, comme si la réalité avait un effet abrasif sur les individus et les choses, les usait. Il représente essentiellement des individus de morphologie humaine, bien proportionnés. Au fil des séquences les personnages rencontrent plusieurs races, la plupart anthropomorphes avec de petites variations par rapport aux êtres humains (couleur de peau mauve et oreilles en pointe pour Arisia, ou une minceur singulière pour Sinestro), ou des variations plus significatives (les Llaran évoquant des sauriens, une sorte de méduse spatiale dotée de conscience et d'un anneau de Lanterne, une race insectoïde), sans oublier les robots que sont les Manhunters. le lecteur habitué aux récits de Green Lanterns constate que Hardman reprend des races souvent présentes dans la série mensuelle classique du personnage. Il les dessine de sorte à ce qu'elle s'intègre sans solution de continuité dans le reste de la narration visuelle, avec ces contours rugueux et ces zones noires irrégulières attestant de l'usure engendrée par l'espace, par les conflits.



L'artiste reprend l'apparence de la plateforme orbitale Arrowhead déjà présente dans le premier tome. Il apporte un soin particulier à tout ce qui est vaisseau spatial et technologie futuriste, sans se livrer à une tentative de prospective futuriste, mais sans se contenter non plus de servir des formes passe-partout. le lecteur prend ainsi le temps d'observer les modules lunaires lors de l'approche de l'usine établie sur la Lune. Jordan Boyd vient compléter les dessins avec une mise en couleurs en phase avec les intentions du dessinateur, des teintes un peu sombres parfois presque ternes pour évoquer la banalité de ces environnements aux yeux des personnages, des couleurs plus vives lors de l'utilisation de l'anneau des Green Lantern, ou celui d'une autre couleur du spectre, ainsi que lors des explosions pendant les affrontements. Ce dernier point ramène le récit vers un comics de superhéros classique lors des combats. le dessinateur a une légère tendance à utiliser les gros plans sur les visages avec une régularité assez élevée pour que le lecteur finisse par le remarquer, mais sans atteindre un niveau insupportable qui pourrait s'assimiler à de la fainéantise.



Le lecteur se laisse donc facilement emmener dans cette intrigue qui promet une bonne dose de politique fiction dans une science-fiction de type opéra de l'espace. Il se rend vite compte que les coscénaristes changent le dosage de leurs ingrédients en cours de route, et intègrent de nombreux éléments tirés de la mythologie des Green Lanterns. Finalement les tensions politiques sur Terre ne servent qu'à expliquer pourquoi un responsable a jugé judicieux de provoquer l'incident diplomatique avec les Llaran, dans un pari audacieux (irresponsable, peut-être idiot) pour écraser l'opposition, sans déboucher sur autre chose. L'enlèvement des trois terriens a pour objectif d'entraîner Harold Jordan au plus profond de l'espace. En découvrant le nom de Jonathan Stewart, le lecteur se doute bien qu'il va récupérer un anneau ou un autre avant la fin de l'histoire. Dès l'apparition d'un individu doté d'un anneau d'une autre couleur, le lecteur comprend que le récit va se rapprocher de la dynamique de la série mensuelle Green Lantern, perdant une partie significative de sa saveur originale, pour revenir vers du superhéros de l'espace traditionnel. Peut-être s'agissait-il d'une spécification éditoriale, mais effectivement les coscénaristes reviennent à Oa, aux gardiens, et à la problématique de l'énergie qui alimente les anneaux de pouvoir. Cela est bien exécuté, mais il est possible que le lecteur espérait une histoire qui explore de nouveaux territoires, plutôt que d'emprunter les sentiers bien balisés de la série mensuelle.



C'est un vrai plaisir de constater que la deuxième saison de cette version autonome de Green Lantern est réalisée par la même équipe créative que la première. le lecteur retrouve donc la narration visuelle plus SF que superhéros de Gabriel Hardman, avec des passages saisissants, bien rehaussés par la colorisation. Il est tout de suite accroché par l'intrigue mêlant SF et politique, avec une promesse de visiter d'autres planètes, et d'affronter le vide glacial de l'espace. le récit tient ses différentes promesses, de manière plus ou moins satisfaisante, en rajoutant une bonne quantité d'anneaux, et de combats pyrotechniques, perdant ainsi une partie de son originalité, et donc de sa raison d'être de déclinaison Earth One, collant parfois trop à l'univers partagé DC classique.
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Aliens : Cendres

Ce tome comprend une histoire complète indépendante de toute autre qui ne nécessite qu'une connaissance superficielle des Aliens pour pouvoir être appréciée. Il contient les 4 épisodes de la minisérie, initialement parus en 2018, écrits, dessinés et encrés par Gabriel Hardman, avec une mise en couleurs réalisée par Rain Beredo. Il contient les couvertures originales d'Hardman, ainsi que les couvertures alternatives réalisées par Carlos d'Anda (*4). Le tome commence par une introduction de 2 pages écrites par Hardman en novembre 2018, indiquant dans quelles circonstances il a découvert Alien et à quel âge.



Sur la colonie Trono, sur la Lune LV-871, le jeune Maxon (un garçon de 12 ans) se réveille en sursaut. Il se lève et se rend compte qu'il y a une personne en train de tirer sur un agresseur invisible dans le passage en dessous de sa chambre. Soudain sa fenêtre vole en éclat et il se retrouve projeté à terre par le souffle. Il se relève avec plus de peur que de mal et court chercher du réconfort dans la chambre de sa mère. Il découvre qu'il y a une sorte de gros insecte à 8 pattes avec une longue queue sur son visage. Il a un mouvement de recul et voit son visage dans le miroir ; il en retire un débris de verre alors que le gros insecte tombe par terre. Sa mère se réveille d'un coup. Il se jette dans ses bras. À l'extérieur les combats font rage et plusieurs bâtiments sont la proie des flammes. Sur l'écran d'information de la chambre, un message de l'entreprise Weyland-Yutani clignote indiquant une alerte code jaune. La mère intime à Maxon de s'habiller et de prendre des affaires dans son sac de classe.



La mère convainc son fils de partir : il faut qu'ils se rendent au spacio-port pour monter à bord d'une navette d'évacuation. En descendant l'escalier, ils doivent passer par-dessus le cadavre d'un homme. La mère en profite pour ramasser son fusil. Ils se retrouvent face à un xénomorphe et se tiennent immobiles. La créature les ignore ; ils poursuivent leur périlleux chemin. Au dehors le chaos règne, entre véhicules renversés et cadavres. La mère réussit à faire démarrer l'un des véhicules du garage. En passant dans les rues, ils voient 2 xénomorphes s'acharner sur un cadavre humain. L'un des pneus finit par crever et le véhicule s'immobilise en plein milieu de la rue, avec plusieurs xénomorphes qui commencent à s'approcher et à monter le toit du véhicule. Soudain surgit un autre véhicule qui les percute. La voiture est renversée, mais les xénomorphes volent au loin. Le conducteur sort de la voiture utilisée comme un bélier, et enjoint Maxon et sa mère de le rejoindre. Il s'agit de l'assistant administrateur Waugh. Le périple pour rejoindre le spacio-port maintenant tout proche peut continuer.



Dans l'introduction, Gabriel Hardman explique donc qu'il a découvert les xénomorphes en allant voir le film Aliens (1986) de James Cameron à l'âge de 12 ans, ce qui lui a donné l'idée de raconter son histoire avec le point de vue d'un enfant du même âge. Avec le succès du film Alien (1979) de Ridley Scott, les xénomorphes sont devenus une franchise, d'abord déclinée en film, puis en comics édités par Dark Horse à partir de 1988, à commencer par Aliens Omnibus Volume 1 et suivants. Dans un premier temps, les auteurs se sont concentrés sur la race des xénomorphes comme la forme de vie dédiée à sa survie, parfaitement adaptés à cet objectif, avec une dimension horrifique. Rapidement, les scénarios ont évolué vers une confrontation entre l'instinct de survie des humains, et la perpétuation des xénomorphes. Dans son introduction, Gabriel Hardman explicite son intention : un mélange d'horreur et d'action spectaculaire. Il indique qu'il est conscient que cet exercice est beaucoup plus difficile à réussir dans une bande dessinée que dans un film, car il n'y a pas l'aide de la musique, et c'est le lecteur qui maîtrise le rythme de l'histoire, c’est-à-dire sa vitesse de lecture, par opposition à un film où le réalisateur impose le rythme au spectateur. Néanmoins, le lecteur sait que cet auteur est à même de se montrer à la hauteur car il a déjà réalisé plusieurs histoires de science-fiction bien troussées avec sa femme Corinna Bechko, que ce soit leur propre création comme Invisible Republic (2015-), ou une version alternative très réussie d'un superhéros DC Green Lantern: Earth One Vol. 1 (2018).



Dès le départ, le lecteur sait bien qu'il ne va pas trop s'attacher aux personnages : il y a peu de chance qu'ils en réchappent, les xénomorphes étant des tueurs d'une rare efficacité. Du coup, le scénariste doit déployer d'énormes efforts pour pouvoir provoquer un début d'empathie vis-à-vis de protagonistes dont l'espérance de vie est très réduite. Fort à propos, Gabriel Hardman ne perd pas de temps à essayer. Maxon reste un enfant, ou plutôt un pré-adolescent, absolument pas porté sur la pleurnicherie. On peut même dire qu'il ne prend pas le temps de faire son deuil, et qu'il se montre intrépide et déterminé jusqu'à l'inconscience, ce qui correspond bien à son âge. L'auteur ne perd pas non plus de temps à développer la personnalité des 2 autres principaux protagonistes : Waugh et la capitaine de vaisseau Sinta. Ils sont définis par leur fonction, par une caractéristique physique découverte en cours de récit pour Waugh, et par leur détermination à fuir cette colonie infestée. Le fil directeur du récit est également très simple et clair : rejoindre une navette d'évacuation à tout prix. Effectivement, les quelques survivants se heurtent à plusieurs reprises aux xénomorphes dont Hardman respecte scrupuleusement la mythologie, du Face-hugger à la reine. Effectivement, le nombre de survivants diminue très rapidement. Le récit est conclu en bonne et due forme. L'auteur tient sa promesse d'un récit entre horreur et spectaculaire.



Le lecteur vient donc pour voir des Aliens impitoyables massacrer des humains qui font tout pour essayer de survivre. Gabriel Hardman réalise des dessins descriptifs, avec des traits de détourage qui donnent l'impression de ne pas toujours être ébarbés, rarement polis pour obtenir des jolies courbes, et des aplats de noir plus importants que de simples ombres portées, avec des contours anguleux et parfois déchiquetés. Ces caractéristiques aboutissent à des dessins alourdis par du noir propice au surgissement de créatures violentes, à une atmosphère sombre (renforcée par la mise en couleurs), à des visages fatigués par le stress et les épreuves, à des corps usés et meurtris par les coups. En tant qu'auteur complet (scénariste + dessinateur), Hardman propose une narration très cohérente et complémentaire entre intrigue et mise en images. Oui, les xénomorphes sont très réussis à chacune de leur apparition, quel que soit leur stade de développement. Le dessinateur respecte leurs caractéristiques, trouve le juste milieu entre détails descriptifs et zones d'ombre mystérieuses, transcrit leurs mouvements vifs et létaux, met les personnages et le lecteur en face de leur visage dénué d'expression indifférent. Il en découle des apparitions horrifiques, et des combats très tendus. Mais, dans le même temps, les aliens donnent l'impression d'être un peu moins efficaces que d'habitude. Plusieurs personnages se sortent plutôt à bon compte de leur face-à-face, ou arrivent à s'enfuir assez facilement. En outre le sang des xénomorphes ne coulent pas beaucoup, évitant les horribles blessures à l'acide.



Gabriel Hardman fait également le nécessaire pour rendre l'action spectaculaire, en s'investissant pour donner de la consistance aux décors. Le lecteur voit les protagonistes évoluer dans des endroits avec de la profondeur, se déplacer en fonction des caractéristiques de chaque lieu (volumes, obstacles) et la base de la colonie est à la fois conforme aux constructions des films et à une installation fonctionnelle et éphémère. Les courses-poursuites et les rencontres au détour d'un couloir ou d'un escalier deviennent donc plausibles, gagnant en impact sur le lecteur. L'artiste privilégie un jeu d'acteur naturaliste, sans exagération de panique ou perte de contrôle, même parfois trop en retenue pour Maxon. Le lecteur observe donc des individus crédibles, autant capables de réflexion, que capables de réagir sous le coup de la montée de l'adrénaline, avec un rythme de péripéties soutenu sans être épileptique. L'investissement de l'artiste ne faiblit pas du début à la fin, et s'il ne fait pas l'effort de s'interroger sur la présence ou non des décors en fond de case, le lecteur ne ressent aucune baisse de la qualité d'immersion.



Le lecteur referme ce tome avec une impression mitigée. Gabriel Hardman a imaginé une histoire simple avec des xénomorphes s'en prenant à une petite installation. Il y greffe des observations très standards sur les manigances de la corporation Weyland-Yutani. Il prend le point de vue d'un enfant de 12 ans, montrant bien comment les adultes le considèrent régulièrement comme quantité négligeable, et n'oubliant pas l'absence de notion de danger spécifique à cet âge. Pour autant, régulièrement, Maxon se comporte comme un héros adulte classique. La narration visuelle est particulièrement adaptée aux spécificités du genre Aliens, avec des dessins sombres, consistants, violents sans avoir besoin de se complaire dans le gore. Dans le même temps, le déroulement de l'intrigue recèle peu de surprises, le dénouement est plié d'avance, et l'implication émotionnelle du lecteur reste en berne. 4 étoiles pour un récit Alien bien maîtrisé, mais manquant d'incarnation.
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Green Lantern - Terre-Un, tome 1

Ce tome est le premier d'une nouvelle série qui ne nécessite aucune connaissance préalable sur le personnage de Green Lantern. Il est initialement paru en 2018, sans prépublication, écrit par Gabriel Hardman & Corinna Bechko, dessiné et encré par Hardman, avec une mise en couleurs réalisée par Jordan Boyd.



Dans un futur où l'homme envoie des vaisseaux spatiaux pour aller effectuer des opérations minières dans le système solaire, Harold Jordan et Volok sont en train de sonder un astéroïde dans la ceinture entre Mars et Jupiter, pour le compte de la société Ferris. Ils reçoivent un message comme quoi un autre tandem a découvert un gros filon sur un autre astéroïde, et que par voie de conséquence leur mission est annulée. Jordan (un ex-pilote de la NASA) décide de terminer son exploration de l'astéroïde avant d'obtempérer. Il découvre un vaisseau spatial a demi enterré. Malgré les consignes, il décide de s'y introduire pour voir ce qu'il contient. Il est rejoint par Volkov. À l'intérieur, il découvrir un robot de forme humanoïde à la taille imposante, à la surface abimée par l'usure du temps. Un peu plus loin dans les entrailles du vaisseau, Volkov découvre une batterie en forme de lanterne, émettant une douce lumière verte. Jordan arrive devant un extraterrestre avec une poutrelle métallique fichée en pleine poitrine et un anneau vert au doigt.



Alors qu'ils continuent à avancer dans le vaisseau, Volkov et Jordan perçoivent un bruit de frottement : le vaisseau est en train de glisser de son perchoir. Ils parviennent à en sortir de justesse. Volkov a ramené avec lui la lanterne et l'anneau. De retour dans leur propre vaisseau, Volkov passe l'anneau au doigt et touche par mégarde la batterie. Il se produit une déflagration d'énergie verte qui occasionne une brèche dans la coque du vaisseau. Volkov est aspiré dans l'espace avec la batterie. Alors qu'il tentait de le ramener dans l'abri du vaisseau en l'agrippant par la main, Jordan se retrouve avec seulement l'anneau dans la sienne. Il est soudain enveloppé d'un halo vert. Il tente de rejoindre le vaisseau orbitant autour de l'astéroïde, mais les astronautes lui indiquent qu'ils ne peuvent l'accueillir à bord, pour des raisons de risque de contamination. Alors que Harold Jordan réfléchit à ce qu'il va pouvoir faire, il est violemment percuté dans le dos par une forme humanoïde.



Avec la collection Earth One, l'objectif de l'éditeur DC Comics est de disposer de produits dans un format plus noble que celui des comics habituels pour pouvoir les distribuer dans les librairies non spécialisées. Pour ce public, DC a demandé à quelques auteurs triés sur le volet de réaliser des histoires mettant en scène leurs personnages mais sous une forme repensée, et en repartant de zéro pour qu'ils soient accessibles à un public qui ne les connait pas. C'est ainsi que le lecteur a découvert Superman Earth One (2010) par Joe Michael Straczynski & Shane Davis, Batman Earth One (2012) par Geoff Johns & Gary Frank, Teen Titans Earth One (2014) par Jeff Lemire & Terry Dodson, et Wonder Woman Earth One (2016) par Grant Morrison & Yanick Paquette. Ces titres ont connu une ou deux suites, et DC sort les nouveautés au compte-goutte. Lorsqu'il prend connaissance du projet Green Lantern, le lecteur estime a priori qu'il est digne d'intérêt car les auteurs Corinna Bechko & Gabriel Hardman sont également les auteurs d'une série mêlant science-fiction et politique fiction de haut vol : Invisible Republic.



Réinventer un personnage aussi iconique que Green Lantern (ou les autres) tient de la gageure, car il faut en garder l'essence, tout en proposant une version moins ancrée dans des origines enfantines. Le défi pour les auteurs réside donc dans les choix qu'ils font, dans leur capacité à réaliser un récit qui tienne la route de manière autonome pour les nouveaux lecteurs, mais aussi à proposer une version susceptible de plaire au lectorat des comics de superhéros. Or ces derniers savent par avance les événements qui vont survenir dans l'histoire. Effectivement, Harold (et plus Hal, mais c'est un changement mineur) trouve un anneau vert nécessitant d'être rechargé dans une batterie ayant une forme de lanterne verte. Effectivement, il va rencontrer d'autres individus porteurs de ce même équipement. Effectivement, il a tout à apprendre. Pourtant les auteurs introduisent un décalage dès la première page, puisque le récit ne se déroule pas au temps présent, mais dans un futur indéterminé. En plus l'histoire commence dans l'espace, sans passage par la Terre.



Corinna Bechko & Gabriel Hardman jouent le jeu de proposer une variation sur la version canonique du personnage, tout en reprenant les caractéristiques principales. Le lecteur habitué des comics joue lui le jeu d'anticiper ce qu'il va retrouver des éléments habituels de la série. Il ne peut pas être surpris par l'inclusion de tel ou tel personnage, ou par la dynamique entre les porteurs d'anneaux et ceux qui les ont construits. Néanmoins les coscénaristes réussissent à faire en sorte qu'il ne puisse pas reconnaître un enchainement d'événements déjà utilisé. Du coup, le lecteur de comics découvre bel et bien une histoire nouvelle, avec plusieurs surprises qui ménagent habilement les attendus de la mythologie des Green Lanterns, et des variations qui font sens. Le lecteur novice découvre une histoire qui prend le temps d'installer son héros, de raconter la découverte de l'anneau, de montrer qu'Harold Jordan ne sait pas comment l'utiliser faute de mode d'emploi, et d'ouvrir progressivement l'horizon du récit.



Gabriel Hardman réalise des dessins descriptifs avec un bon niveau de détails, ce qui donne de la consistance à cet environnement de science-fiction. Ses traits de contours présentent quelques aspérités et quelques angles, ce qui donne l'impression d'une réalité soumise à l'usure du temps, un peu rêche et abrasive, pas forcément très accueillante pour la vie humaine. Les contours des aplats de noir présentent les mêmes caractéristiques, avec des irrégularités, et soit une surface uniformément noire, soit un remplissage plus charbonneux et irrégulier. À nouveau ces particularités participent à écrire un environnement un peu âpre. Il représente des êtres humains à la morphologie normale, bien découplé pour Harold Jordan, mais sans musculature surdéveloppée, ou même entretenue par la musculation. Sans grande surprise, les représentants des différentes races extraterrestres ont tous une morphologie anthropoïde, avec quelques petites différences quant à la couleur de peau, la forme du crâne ou le nombre de doigts.



L'artiste conçoit des combinaisons spatiales proches de celles existant dans la réalité, se tenant à l'écart des stéréotypes visuels des comics de superhéros. De la même manière, les engins spatiaux terriens restent proches des formes que l'on connaît pour les satellites et les navettes spatiales. Ceux utilisés par différents extraterrestres attestent d'une technologie plus avancée, tout en conservant des formes utilitaires et pragmatiques. Il en va de même pour les tenues vestimentaires qui restent utilitaires et qui ne reprennent pas les caractéristiques des costumes de superhéros. L'histoire emmène Harold Jordan sur d'autres planètes, mais majoritairement dans des zones naturelles, ou industrielles, Hardman n'ayant donc pas à concevoir des architectures d'autres cultures. Il réalise donc à nouveau des décors fonctionnels. S'il n'y prête pas attention, le lecteur ne se rend pas compte que la densité de décors n'est pas très élevée. C'est justifié par le nombre de séquences se déroulant dans l'espace ou dans des zones désertes. Jordan Boyd effectue un travail de mise en couleurs, le plus souvent discret (sauf lors de l'utilisation des anneaux), installant une ambiance dans une scène par le biais d'une couleur dominante, ajoutant une peu de relief aux surfaces avec des dégradés très limités. Il se lâche beaucoup plus lorsque l'énergie verte est libérée par les anneaux.



Les dessins de Gabriel Hardman ressemblent quasiment à un reportage quand il s'agit d'activités ordinaires. Le lecteur note qu'il conçoit des plans de prise de vue, avec des mouvements de caméra permettant de voir les mouvements des personnages pendant les discussions, accompagnant les échanges verbaux. L'artiste se révèle redoutable pour la mise en scène des affrontements physiques, à la fois pour les effets pyrotechniques des anneaux (bien complémentés par la mise en couleurs), à la fois pour la force de frappe des coups, avec des angles de vue qui souligne la brutalité des impacts. Il sait tout aussi bien gérer les scènes de foule, que ce soit par les vues d'ensemble, ou par la gestion du placement des figurants. Le lecteur peu familier des histoires des Green Lanterns peut un instant être décontenancé par la luminosité de la manifestation de leurs pouvoirs, mais c'est à la fois cohérent avec a version de l'univers partagé DC, et avec le principe qu'il s'agit à la base de policiers de l'espace, et qu'ils souhaitent être reconnaissables lors de leurs interventions, par les personnes à qui ils viennent en aide.



Les auteurs ont fort à faire dans ce premier tome, pour à la fois exposer la mythologie associée aux Green Lanterns à partir de zéro, pour raconter une histoire, et pour étoffer un peu leur personnage principal. Pour ce dernier, ils restent dans un schéma très classique d'individu cherchant l'aventure (il a été un pilote de la NASA), ayant vu la conquête de l'espace devenir une entreprise capitaliste comme les autres, et se faire arnaquer quand il est passé dans le secteur privé. Il s'agit donc d'un homme prêt à risquer sa vie mais un peu désabusé. Concernant l'intrigue, Bechko & Hardman doivent bien raconter comment Harold Jordan a acquis un anneau, comment il a appris à maîtriser les fonctions de base, d'où sortent ces anneaux, et s'il reste d'autres porteurs d'anneau. Ils sont donc contraints de suivre une intrigue bien balisée, et pourtant ils réussissent à jouer avec les attentes du lecteur et à le surprendre à plusieurs reprises. S'il a lu Invisible Republic, le lecteur ne pas s'empêcher d'en faire le rapprochement, et il constate que la dimension politique reste bien présente dans ce tome d'Earth One, mais moins développée. Par ailleurs, le point de vue sur différentes formes d'écosystème ne se retrouve pas dans ce tome. Il n'empêche que les auteurs font apparaître que le projet des Oans (les créateurs des lanternes) est d'ordre totalitaire, même s'il part d'un bon sentiment. Ils surprennent plus le lecteur avec la place et le rôle qu'ils réservent à Harold Jordan. Ils n'en font pas un héros tout puissant qui résout tout par la force de sa volonté. De lui-même, Jordan constate que la situation dépasse le niveau du simple individu et qu'il faut rechercher une solution collective dont il n'est pas forcément le pivot central.



Ce premier tome (en espérant qu'il y a en aura d'autres) de Green Lantern version Earth One remplit parfaitement les objectifs qui lui ont été assignés : un récit complet qui peut être proposé à des lecteurs qui ne font pas partie du public habituel des comics, une version de Green Lantern un peu différente et moins infantile dans son origine. Gabriel Hardman réalise des dessins un peu durs et sérieux, avec un savoir-faire de bon niveau, à la fois pour les séquences de science-fiction, et pour les affrontements physiques. Le scénario sait ménager les différentes obligations : exposer l'histoire des anneaux de pouvoir, donner une personnalité à Harold Jordan, et raconter une histoire qui se tient. Cette nouvelle version ne constitue pas une révélation sur le personnage, mais en constitue une bonne variation moins superhéros.
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Green Lantern - Terre-Un, tome 1

Ce tome est le premier d'une nouvelle série qui ne nécessite aucune connaissance préalable sur le personnage de Green Lantern. Il est initialement paru en 2018, sans prépublication, écrit par Gabriel Hardman & Corinna Bechko, dessiné et encré par Hardman, avec une mise en couleurs réalisée par Jordan Boyd.



Dans un futur où l'homme envoie des vaisseaux spatiaux pour aller effectuer des opérations minières dans le système solaire, Harold Jordan et Volok sont en train de sonder un astéroïde dans la ceinture entre Mars et Jupiter, pour le compte de la société Ferris. Ils reçoivent un message comme quoi un autre tandem a découvert un gros filon sur un autre astéroïde, et que par voie de conséquence leur mission est annulée. Jordan (un ex-pilote de la NASA) décide de terminer son exploration de l'astéroïde avant d'obtempérer. Il découvre un vaisseau spatial a demi enterré. Malgré les consignes, il décide de s'y introduire pour voir ce qu'il contient. Il est rejoint par Volkov. À l'intérieur, il découvrir un robot de forme humanoïde à la taille imposante, à la surface abimée par l'usure du temps. Un peu plus loin dans les entrailles du vaisseau, Volkov découvre une batterie en forme de lanterne, émettant une douce lumière verte. Jordan arrive devant un extraterrestre avec une poutrelle métallique fichée en pleine poitrine et un anneau vert au doigt.



Alors qu'ils continuent à avancer dans le vaisseau, Volkov et Jordan perçoivent un bruit de frottement : le vaisseau est en train de glisser de son perchoir. Ils parviennent à en sortir de justesse. Volkov a ramené avec lui la lanterne et l'anneau. De retour dans leur propre vaisseau, Volkov passe l'anneau au doigt et touche par mégarde la batterie. Il se produit une déflagration d'énergie verte qui occasionne une brèche dans la coque du vaisseau. Volkov est aspiré dans l'espace avec la batterie. Alors qu'il tentait de le ramener dans l'abri du vaisseau en l'agrippant par la main, Jordan se retrouve avec seulement l'anneau dans la sienne. Il est soudain enveloppé d'un halo vert. Il tente de rejoindre le vaisseau orbitant autour de l'astéroïde, mais les astronautes lui indiquent qu'ils ne peuvent l'accueillir à bord, pour des raisons de risque de contamination. Alors que Harold Jordan réfléchit à ce qu'il va pouvoir faire, il est violemment percuté dans le dos par une forme humanoïde.



Avec la collection Earth One, l'objectif de l'éditeur DC Comics est de disposer de produits dans un format plus noble que celui des comics habituels pour pouvoir les distribuer dans les librairies non spécialisées. Pour ce public, DC a demandé à quelques auteurs triés sur le volet de réaliser des histoires mettant en scène leurs personnages mais sous une forme repensée, et en repartant de zéro pour qu'ils soient accessibles à un public qui ne les connait pas. C'est ainsi que le lecteur a découvert Superman Earth One (2010) par Joe Michael Straczynski & Shane Davis, Batman Earth One (2012) par Geoff Johns & Gary Frank, Teen Titans Earth One (2014) par Jeff Lemire & Terry Dodson, et Wonder Woman Earth One (2016) par Grant Morrison & Yanick Paquette. Ces titres ont connu une ou deux suites, et DC sort les nouveautés au compte-goutte. Lorsqu'il prend connaissance du projet Green Lantern, le lecteur estime a priori qu'il est digne d'intérêt car les auteurs Corinna Bechko & Gabriel Hardman sont également les auteurs d'une série mêlant science-fiction et politique fiction de haut vol : Invisible Republic.



Réinventer un personnage aussi iconique que Green Lantern (ou les autres) tient de la gageure, car il faut en garder l'essence, tout en proposant une version moins ancrée dans des origines enfantines. Le défi pour les auteurs réside donc dans les choix qu'ils font, dans leur capacité à réaliser un récit qui tienne la route de manière autonome pour les nouveaux lecteurs, mais aussi à proposer une version susceptible de plaire au lectorat des comics de superhéros. Or ces derniers savent par avance les événements qui vont survenir dans l'histoire. Effectivement, Harold (et plus Hal, mais c'est un changement mineur) trouve un anneau vert nécessitant d'être rechargé dans une batterie ayant une forme de lanterne verte. Effectivement, il va rencontrer d'autres individus porteurs de ce même équipement. Effectivement, il a tout à apprendre. Pourtant les auteurs introduisent un décalage dès la première page, puisque le récit ne se déroule pas au temps présent, mais dans un futur indéterminé. En plus l'histoire commence dans l'espace, sans passage par la Terre.



Corinna Bechko & Gabriel Hardman jouent le jeu de proposer une variation sur la version canonique du personnage, tout en reprenant les caractéristiques principales. Le lecteur habitué des comics joue lui le jeu d'anticiper ce qu'il va retrouver des éléments habituels de la série. Il ne peut pas être surpris par l'inclusion de tel ou tel personnage, ou par la dynamique entre les porteurs d'anneaux et ceux qui les ont construits. Néanmoins les coscénaristes réussissent à faire en sorte qu'il ne puisse pas reconnaître un enchainement d'événements déjà utilisé. Du coup, le lecteur de comics découvre bel et bien une histoire nouvelle, avec plusieurs surprises qui ménagent habilement les attendus de la mythologie des Green Lanterns, et des variations qui font sens. Le lecteur novice découvre une histoire qui prend le temps d'installer son héros, de raconter la découverte de l'anneau, de montrer qu'Harold Jordan ne sait pas comment l'utiliser faute de mode d'emploi, et d'ouvrir progressivement l'horizon du récit.



Gabriel Hardman réalise des dessins descriptifs avec un bon niveau de détails, ce qui donne de la consistance à cet environnement de science-fiction. Ses traits de contours présentent quelques aspérités et quelques angles, ce qui donne l'impression d'une réalité soumise à l'usure du temps, un peu rêche et abrasive, pas forcément très accueillante pour la vie humaine. Les contours des aplats de noir présentent les mêmes caractéristiques, avec des irrégularités, et soit une surface uniformément noire, soit un remplissage plus charbonneux et irrégulier. À nouveau ces particularités participent à écrire un environnement un peu âpre. Il représente des êtres humains à la morphologie normale, bien découplé pour Harold Jordan, mais sans musculature surdéveloppée, ou même entretenue par la musculation. Sans grande surprise, les représentants des différentes races extraterrestres ont tous une morphologie anthropoïde, avec quelques petites différences quant à la couleur de peau, la forme du crâne ou le nombre de doigts.



L'artiste conçoit des combinaisons spatiales proches de celles existant dans la réalité, se tenant à l'écart des stéréotypes visuels des comics de superhéros. De la même manière, les engins spatiaux terriens restent proches des formes que l'on connaît pour les satellites et les navettes spatiales. Ceux utilisés par différents extraterrestres attestent d'une technologie plus avancée, tout en conservant des formes utilitaires et pragmatiques. Il en va de même pour les tenues vestimentaires qui restent utilitaires et qui ne reprennent pas les caractéristiques des costumes de superhéros. L'histoire emmène Harold Jordan sur d'autres planètes, mais majoritairement dans des zones naturelles, ou industrielles, Hardman n'ayant donc pas à concevoir des architectures d'autres cultures. Il réalise donc à nouveau des décors fonctionnels. S'il n'y prête pas attention, le lecteur ne se rend pas compte que la densité de décors n'est pas très élevée. C'est justifié par le nombre de séquences se déroulant dans l'espace ou dans des zones désertes. Jordan Boyd effectue un travail de mise en couleurs, le plus souvent discret (sauf lors de l'utilisation des anneaux), installant une ambiance dans une scène par le biais d'une couleur dominante, ajoutant une peu de relief aux surfaces avec des dégradés très limités. Il se lâche beaucoup plus lorsque l'énergie verte est libérée par les anneaux.



Les dessins de Gabriel Hardman ressemblent quasiment à un reportage quand il s'agit d'activités ordinaires. Le lecteur note qu'il conçoit des plans de prise de vue, avec des mouvements de caméra permettant de voir les mouvements des personnages pendant les discussions, accompagnant les échanges verbaux. L'artiste se révèle redoutable pour la mise en scène des affrontements physiques, à la fois pour les effets pyrotechniques des anneaux (bien complémentés par la mise en couleurs), à la fois pour la force de frappe des coups, avec des angles de vue qui souligne la brutalité des impacts. Il sait tout aussi bien gérer les scènes de foule, que ce soit par les vues d'ensemble, ou par la gestion du placement des figurants. Le lecteur peu familier des histoires des Green Lanterns peut un instant être décontenancé par la luminosité de la manifestation de leurs pouvoirs, mais c'est à la fois cohérent avec a version de l'univers partagé DC, et avec le principe qu'il s'agit à la base de policiers de l'espace, et qu'ils souhaitent être reconnaissables lors de leurs interventions, par les personnes à qui ils viennent en aide.



Les auteurs ont fort à faire dans ce premier tome, pour à la fois exposer la mythologie associée aux Green Lanterns à partir de zéro, pour raconter une histoire, et pour étoffer un peu leur personnage principal. Pour ce dernier, ils restent dans un schéma très classique d'individu cherchant l'aventure (il a été un pilote de la NASA), ayant vu la conquête de l'espace devenir une entreprise capitaliste comme les autres, et se faire arnaquer quand il est passé dans le secteur privé. Il s'agit donc d'un homme prêt à risquer sa vie mais un peu désabusé. Concernant l'intrigue, Bechko & Hardman doivent bien raconter comment Harold Jordan a acquis un anneau, comment il a appris à maîtriser les fonctions de base, d'où sortent ces anneaux, et s'il reste d'autres porteurs d'anneau. Ils sont donc contraints de suivre une intrigue bien balisée, et pourtant ils réussissent à jouer avec les attentes du lecteur et à le surprendre à plusieurs reprises. S'il a lu Invisible Republic, le lecteur ne pas s'empêcher d'en faire le rapprochement, et il constate que la dimension politique reste bien présente dans ce tome d'Earth One, mais moins développée. Par ailleurs, le point de vue sur différentes formes d'écosystème ne se retrouve pas dans ce tome. Il n'empêche que les auteurs font apparaître que le projet des Oans (les créateurs des lanternes) est d'ordre totalitaire, même s'il part d'un bon sentiment. Ils surprennent plus le lecteur avec la place et le rôle qu'ils réservent à Harold Jordan. Ils n'en font pas un héros tout puissant qui résout tout par la force de sa volonté. De lui-même, Jordan constate que la situation dépasse le niveau du simple individu et qu'il faut rechercher une solution collective dont il n'est pas forcément le pivot central.



Ce premier tome (en espérant qu'il y a en aura d'autres) de Green Lantern version Earth One remplit parfaitement les objectifs qui lui ont été assignés : un récit complet qui peut être proposé à des lecteurs qui ne font pas partie du public habituel des comics, une version de Green Lantern un peu différente et moins infantile dans son origine. Gabriel Hardman réalise des dessins un peu durs et sérieux, avec un savoir-faire de bon niveau, à la fois pour les séquences de science-fiction, et pour les affrontements physiques. Le scénario sait ménager les différentes obligations : exposer l'histoire des anneaux de pouvoir, donner une personnalité à Harold Jordan, et raconter une histoire qui se tient. Cette nouvelle version ne constitue pas une révélation sur le personnage, mais en constitue une bonne variation moins superhéros.
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Invisible Republic, tome 3

Ce tome fait suite à Invisible Republic, tome 2 (épisodes 6 à 10) qu'il faut impérativement avoir lu avant. Dans la mesure où il s'agit d'une histoire d'un seul tenant, il faut avoir commencé par le premier tome. Celui-ci contient les épisodes 11 à 15, initialement parus en 2017, coécrits par Gabriel Hardman & Corinna Bechko, dessinés et encrés par Hardman, avec une mise en couleurs réalisée par Jordan Boyd, la même équipe artistique depuis le début.



En 2844, un an après les événements du tome précédent, le journaliste Croger Babb est en tournée de présentation de son livre intitulé Invisible Republic, constitué essentiellement des journaux intimes de l'activiste politique Maria Reveron. Accompagné par son agent, il atterrit sur une petite planète où il est accueilli par Anette Jere, la maire de Terra Station Three. Devant un amphithéâtre plein, et malgré une électricité fluctuante, il explique la situation géopolitique de la lune habitée Avalon, orbitant autour de la planète Aslan, et de la deuxième lune plus petite Ken. Il évoque la situation du pouvoir et comment cette configuration a favorisé l'apparition d'un personnage politique comme Maia Reveron. Le public commence à lui poser des questions difficiles, telles que l'avis de Maia Reveron sur la publication de ses journaux intimes, ou le fait qu'elle ait fait assassiner une journaliste. Il répond sur la nécessité de communiquer d'une manière transparente afin d'éviter que des rumeurs erronées se répandent, souvent initiées par le gouvernement en place afin de discréditer l'action des opposants au régime.



Croger Babb poursuit sa présentation en lisant un passage du journal de Maia Reveron, relatif à sa situation 42 ans plutôt. Elle se trouvait alors sur la lune Aslan, vivant en couple avec Christoph dans une grande capsule spatiale reconvertie en habitation dans la jungle, éloignée de tout centre urbain. Les vivres commençant à manquer, ils décident de se lancer dans un périple pour rejoindre la ville la plus proche. En progressant sous la pluie, ils passent à proximité d'un immense Eles, l'un des animaux herbivores de la planète. En arrivant dans la ville, ils doivent s'écarter pour laisser passer un groupe de Kelphies, des animaux sauvages proches des chiens. À la fin de son intervention, Croger Babb estime qu'il est temps pour lui de retourner sur Avalon, mais un fonctionnaire l'administration de Terra Station Three lui indique que son droit de vol a été révoqué, alors qu'il se présente à la douane. 42 ans plutôt, Maia Reveron et Christoph sauvent un jeune kelphie d'un piège destiné à un humain en pleine jungle et essayent de la faire opérer par un médecin.



Le lecteur avait été emporté par les 2 premiers tomes, avec des auteurs sachant utiliser à bon escient les conventions des récits de science-fiction, et les mélanger à une aventure politique, avec un leader charismatique (Arthur McBride) ayant accédé au pouvoir après avoir renversé un despote représentant l'autorité du gouvernement terrestre, dans des conditions peu claires, remettant en cause ses principes et ses amitiés. Les dessins de Gabriel Hardman montraient un environnement bien chargé, assez consistant. Le lecteur replonge donc avec plaisir dans cette histoire mêlant SF et politique, et retrouve en fin de volume les pages de texte rédigées par Corinna Bechko, une zoologue de formation. Dans le premier texte, elle évoque la richesse de la faune d'Aslan, en particulier les Eles et les Kelphies, les 2 animaux évoqués dans l'histoire. Dans le deuxième texte, elle développe la notion d'animaux domestiqués, dans le troisième les critères de développement de vie sur une planète (en évoquant ceux de la Terre), dans le quatrième l'inéluctabilité de la modification des écosystèmes de par la présence des êtres humains. Le dernier texte vient compléter un des points de l'histoire, à savoir l'exploration de l'espace par un vaisseau peuplé de femmes, avec les installations nécessaires pour des fécondations in vitro.



En fonction de ses goûts, le lecteur peut choisir de lire ou non les textes de fin, car ils ne sont pas indispensables à la compréhension du récit. S'il le fait, les premiers viennent souligner un thème discret mais bien présent dans la première moitié de ce tome : l'écologie. Maia et Christopher ont décidé de vivre à l'écart de la population, dans une jungle épaisse, soumise à la pluie abondante qui tombe sur cette planète. Puis Maia développe un attachement particulier au jeune Kelphie dont elle a sauvé la vie. Bechko & Hardman ne sont pas les premiers à développer une fibre écologique dans un récit de science-fiction. Ils savent s'en servir avec une sensibilité juste, ni larmoyante, ni revendicatrice ou prosélyte. Le lecteur observe la luxuriance de la végétation, l'humidité omniprésente, le comportement du kelphie qui s'est attaché à un humain, au travers des dessins d'Hardman. Cela lui donne une bonne compréhension de cet écosystème et de l'impact qu'une telle vie peut avoir sur la psyché de Maia Reveron et sur son développement personnel. Cette phase de sa vie fait partie de son histoire et a contribué à forger sa personnalité.



En continuant de lire les textes en fin de volume, il découvre également celui intitulé Les femmes et les enfants d'abord. À nouveau il s'agit d'une petite aide pour se souvenir que ce récit de science-fiction a été pensé et construit de manière cohérente. L'article en lui-même évoque la composition probable d'un équipage ayant pour mission de partir pour un voyage de plusieurs décennies dans l'espace. Au cours du récit, les dessins sont assez précis et concrets pour donner à voir une technologie futuriste au lecteur, ainsi que des environnements d'anticipation qui restent fonctionnels. Gabriel Hardman ne propose pas une technologie futuriste clinquante, mais une technologie fonctionnelle et utilisée. Pour chaque planète, les installations et habitations sont adaptées au climat et reflètent le faible budget alloué à leur construction. Le lecteur peut voir la différence de conception entre les vaisseaux spatiaux, et les navettes pour se déplacer en surface. Il observe également l'équipement des militaires, des forces de l'ordre et les différentes armes à feu. Les vêtements sont assez proches de ceux qui existent aujourd'hui, à nouveau avec une approche fonctionnelle bon marché, et une variété limitée dans les régions les plus défavorisées.



Gabriel Hardman et Jordan Boyd dépeignent un monde assez noir et rugueux. Les couleurs choisies sont souvent ternes, vert de gris, évoquant un environnement pas toujours suffisamment éclairé, faute de moyen, faute d'énergie, des individus qui cherchent pas l'exposition (à la lumière), qui vivent dans une forme de semi-clandestinité. Les contours des formes présentent des aspérités, des irrégularités, comme si les personnages avaient d'autres priorité que de se pomponner pour paraître en société. Les aplats de noir pour donner de la texture aux surfaces, du relief, pour rendre compte des zones d'ombre présentent les mêmes irrégularités, avec l'utilisation d'aplats pleins, mais aussi de zones charbonneuses. Le lecteur plonge dans un monde avec des zones d'ombre, évoquant les secrets des uns et des autres, les manipulations cachées.



Les coscénaristes développent leur histoire selon les axes déjà présents dans les tomes précédents. Le lecteur en apprend plus sur la vie de Maia Reveron, sur la constitution de ses convictions, de ses méthodes. Il voit Croger Babb à nouveau soumis à des forces qu'il ne peut pas maîtriser, ballotté par différentes factions, sans réussir à reprendre le dessus. Il apprécie que les personnages se comportent en adulte, sans pour autant être dépourvus d'émotion. Bechko et Hardman mettent en scène des personnages d'âge différent, les jeunes étant plus impétueux, et les plus âgés plus réfléchis, sans être devenus amers ou cyniques. Si le lecteur ne ressent pas une forte empathie pour eux, il s'implique dans leur situation, dans leurs espoirs, leur volonté de défendre ce qui leur appartient, dans leur ténacité à réussir à faire évoluer la situation, à se battre pour une juste cause, sans avoir de certitude quant aux effets de leur action, sans avoir de certitude sur le fait qu'elles amélioreront la situation.



Comme les 2 précédents tomes, celui-ci reste à forte teneur politique. Les auteurs racontent une aventure, avec des péripéties, les affrontements dans la jungle, la découverte d'un camp de la rébellion, la course poursuite en navettes volante à la surface de la planète. Ils continuent également de sonder les convictions politiques, ou plutôt les tactiques politiques. Le lecteur découvre ainsi comment Arthur McBride a découvert que l'union fait la force, en milieu carcéral. C'est dans l'adversité qu'il a pris conscience de la force du peuple. De son côté, Maia Reveron a pu vivre dans une communauté matriarcale, avec une répartition des tâches valorisantes radicalement différente entre les femmes et les hommes, et l'accouchement comme un rite de passage vers une caste supérieure. Le lecteur observe ces convictions s'opposer dans leurs méthodes, mais aussi dans leur résultat. Il voit Maia Reveron prendre la tête d'une rébellion qui souhaite faire évoluer le gouvernement, tout en préservant les appareils politiques en place, et une faction d'individus plus jeunes souhaitant une véritable révolution.



Ce troisième tome confirme encore une fois la qualité narrative de l'artiste et du coloriste, ainsi que l'épaisseur du scénario qui combine développement des personnages, conception d'un monde de science-fiction, et réflexion politique intelligente.
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Green Lantern - Terre-Un, tome 2

Ce tome fait suite à Green Lantern - Earth One, tome 1 (2018) qu'il vaut mieux avoir lu avant. Ce récit a été publié directement en album, sans prépublication, en 2020, coécrit par Corinna Bechko & Gabriel Hardman, dessiné et encré par Hardman, mis en couleurs par Jordan Boyd. Ce sont ces mêmes auteurs qui avaient réalisé le tome 1.



Trois ans après la bataille d'Oa, un groupe de 3 êtres humains pénètre dans un vaisseau Llaran, en orbite géostationnaire autour de la Terre. Il s'agit de la docteure Ngendo Muturi, de l'ingénieur Sophie Rivas, et du spécialiste Jonathan Stewart. Ils constatent que l'atmosphère est respirable à bord du vaisseau, même si elle est un peu riche en argon. Ils sont accueillis par deux Llaran qui leur proposent de sortir du sas et de pénétrer plus avant dans leur vaisseau. À Raton en Floride, dans le site principal de l'entreprise Ferris Galactic, un ingénieur rend compte de la situation à Carol Ferris. Celle-ci souhaite en particulier savoir si le gouvernement central Centcom a tenté d'intervenir : la réponse est négative, tout est calme de ce côté. A priori toute action d'intervention de leur part proviendrait de la station orbitale Arrowhead. Le trio de négociateurs arrive dans la salle de contrôle du vaisseau Llaran. Stewart s'émerveille devant des cristaux qui semblent être la source d'énergie. Il pose une question sur ce qui lui semble être une pédale activée par l'appendice caudal des Llaran. Un de leurs hôtes répond que c'est tout simplement un repose-queue. À bord de la plateforme de défense orbitale Arrowhead, une agente apporte les ordres au commandant : ils doivent ouvrir le feu sur le vaisseau Llaran. L'ordre est donné de positionner la plateforme spatiale pour être en mesure de faire feu. Au dernier moment, le commandant se ravise et ordonne de ne rien faire.



Mais le vaisseau Llaran explose quand même dans une gerbe de feu. Les extraterrestres ripostent et une pluie de missiles s'envole en direction d'Arrowhead. Ils ne l'atteignent pas car Green Lantern (Harold Jordan) s'est interposé. Il aide à évacuer la plateforme qui a quand même été touchée de manière irrémédiable. Trois navettes de guerre se profilent sur l'horizon et se dirigent droit vers le vaisseau Llaran qui tire un nouveau missile. Une énorme explosion se produit, et Jordan se précipite pour évacuer les civils et les protéger dans un halo grâce à son anneau. Alors qu'il s'éloigne, la plateforme orbitale s'embrase dans une énorme boule de feu, totalement détruite. Les journalistes commentent les faits tout azimut. La décision de pointer Arrowhead vers l'espace pour servir d'avertissement contre d'éventuelles flottes extraterrestres. L'attaque du vaisseau Llaran qui risque de provoquer une guerre contre une puissance extraterrestre. L'intervention d'Harold Jordan pour protéger Arrowhead, une base de Centcom, alors qu'il s'est opposé à leur politique. L'ambiguïté qui plane sur les actions de Jordan, à la fois défenseur de la Terre contre une potentielle invasion extraterrestre, à la fois responsable d'avoir attiré l'attention desdits extraterrestres sur l'existence de la Terre. Le général Jask, haut responsable de Centcom, est mis en cause par l'opposition. La question se pose de savoir si la plateforme Arrowhead a bien tiré la première sans provocation. Les Llaran ont emmené les trois terriens à bord de leur vaisseau pour les placer en détention.



Le lecteur est plutôt partant pour découvrir la suite de cette version de Green Lantern, indépendante de celle de l'univers partagé DC, dans cette collection destinée au réseau de librairies non spécialisées américaines. Le premier tome avait parfaitement rempli ses objectifs : un récit complet qui peut être proposé à des lecteurs qui ne font pas partie du public habituel des comics, une version de Green Lantern un peu différente et moins infantile dans son origine. Les coscénaristes commencent donc par une approche science-fiction mâtinée de politique. Harold Jordan a établi le contact avec des races extraterrestres et c'est une rue à double sens : ceux-ci ont pris connaissance de l'existence de la Terre. Il ne s'agit plus d'un premier contact à proprement parler (il a déjà eu lieu avec Jordan), mais c'est quand même le premier contact formel entre deux civilisations, et bien sûr c'est la catastrophe. Ces prémices s'entremêlent avec des jeux de pouvoir entre Global Centcom, une organisation temporelle dans l'opposition appelée ITDC, pour savoir quelle stratégie adopter face à ce premier contact officiel, aux enjeux énormes, tant de diplomatie extraterrestre, qu'économiques en fonction des technologies adaptables. Sans compter que la Terre ne dispose pas de la technologie de voyage interstellaire, ce qui la place dans une position de faiblesse vis-à-vis des autres races qui elles en disposent.



Le lecteur retrouve le savoir-faire de l'artiste pour donner de la consistance et de la conviction à cet environnement de science-fiction. Il dessine dans un registre descriptif et réaliste, avec des traits de contour parfois un peu secs apportant un aspect rugueux, comme si la réalité avait un effet abrasif sur les individus et les choses, les usait. Il représente essentiellement des individus de morphologie humaine, bien proportionnés. Au fil des séquences les personnages rencontrent plusieurs races, la plupart anthropomorphes avec de petites variations par rapport aux êtres humains (couleur de peau mauve et oreilles en pointe pour Arisia, ou une minceur singulière pour Sinestro), ou des variations plus significatives (les Llaran évoquant des sauriens, une sorte de méduse spatiale dotée de conscience et d'un anneau de Lanterne, une race insectoïde), sans oublier les robots que sont les Manhunters. Le lecteur habitué aux récits de Green Lanterns constate que Hardman reprend des races souvent présentes dans la série mensuelle classique du personnage. Il les dessine de sorte à ce qu'elle s'intègre sans solution de continuité dans le reste de la narration visuelle, avec ces contours rugueux et ces zones noires irrégulières attestant de l'usure engendrée par l'espace, par les conflits.



L'artiste reprend l'apparence de la plateforme orbitale Arrowhead déjà présente dans le premier tome. Il apporte un soin particulier à tout ce qui est vaisseau spatial et technologie futuriste, sans se livrer à une tentative de prospective futuriste, mais sans se contenter non plus de servir des formes passe-partout. Le lecteur prend ainsi le temps d'observer les modules lunaires lors de l'approche de l'usine établie sur la Lune. Jordan Boyd vient compléter les dessins avec une mise en couleurs en phase avec les intentions du dessinateur, des teintes un peu sombres parfois presque ternes pour évoquer la banalité de ces environnements aux yeux des personnages, des couleurs plus vives lors de l'utilisation de l'anneau des Green Lantern, ou celui d'une autre couleur du spectre, ainsi que lors des explosions pendant les affrontements. Ce dernier point ramène le récit vers un comics de superhéros classique lors des combats. Le dessinateur a une légère tendance à utiliser les gros plans sur les visages avec une régularité assez élevée pour que le lecteur finisse par le remarquer, mais sans atteindre un niveau insupportable qui pourrait s'assimiler à de la fainéantise.



Le lecteur se laisse donc facilement emmener dans cette intrigue qui promet une bonne dose de politique fiction dans une science-fiction de type opéra de l'espace. Il se rend vite compte que les coscénaristes changent le dosage de leurs ingrédients en cours de route, et intègrent de nombreux éléments tirés de la mythologie des Green Lanterns. Finalement les tensions politiques sur Terre ne servent qu'à expliquer pourquoi un responsable a jugé judicieux de provoquer l'incident diplomatique avec les Llaran, dans un pari audacieux (irresponsable, peut-être idiot) pour écraser l'opposition, sans déboucher sur autre chose. L'enlèvement des trois terriens a pour objectif d'entraîner Harold Jordan au plus profond de l'espace. En découvrant le nom de Jonathan Stewart, le lecteur se doute bien qu'il va récupérer un anneau ou un autre avant la fin de l'histoire. Dès l'apparition d'un individu doté d'un anneau d'une autre couleur, le lecteur comprend que le récit va se rapprocher de la dynamique de la série mensuelle Green Lantern, perdant une partie significative de sa saveur originale, pour revenir vers du superhéros de l'espace traditionnel. Peut-être s'agissait-il d'une spécification éditoriale, mais effectivement les coscénaristes reviennent à Oa, aux gardiens, et à la problématique de l'énergie qui alimente les anneaux de pouvoir. Cela est bien exécuté, mais il est possible que le lecteur espérait une histoire qui explore de nouveaux territoires, plutôt que d'emprunter les sentiers bien balisés de la série mensuelle.



C'est un vrai plaisir de constater que la deuxième saison de cette version autonome de Green Lantern est réalisée par la même équipe créative que la première. Le lecteur retrouve donc la narration visuelle plus SF que superhéros de Gabriel Hardman, avec des passages saisissants, bien rehaussés par la colorisation. Il est tout de suite accroché par l'intrigue mêlant SF et politique, avec une promesse de visiter d'autres planètes, et d'affronter le vide glacial de l'espace. Le récit tient ses différentes promesses, de manière plus ou moins satisfaisante, en rajoutant une bonne quantité d'anneaux, et de combats pyrotechniques, perdant ainsi une partie de son originalité, et donc de sa raison d'être de déclinaison Earth One, collant parfois trop à l'univers partagé DC classique.
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Aliens : Cendres

Ce tome comprend une histoire complète indépendante de toute autre qui ne nécessite qu'une connaissance superficielle des Aliens pour pouvoir être appréciée. Il contient les 4 épisodes de la minisérie, initialement parus en 2018, écrits, dessinés et encrés par Gabriel Hardman, avec une mise en couleurs réalisée par Rain Beredo. Il contient les couvertures originales d'Hardman, ainsi que les couvertures alternatives réalisées par Carlos d'Anda (*4). Le tome commence par une introduction de 2 pages écrites par Hardman en novembre 2018, indiquant dans quelles circonstances il a découvert Alien et à quel âge.



Sur la colonie Trono, sur la Lune LV-871, le jeune Maxon (un garçon de 12 ans) se réveille en sursaut. Il se lève et se rend compte qu'il y a une personne en train de tirer sur un agresseur invisible dans le passage en dessous de sa chambre. Soudain sa fenêtre vole en éclat et il se retrouve projeté à terre par le souffle. Il se relève avec plus de peur que de mal et court chercher du réconfort dans la chambre de sa mère. Il découvre qu'il y a une sorte de gros insecte à 8 pattes avec une longue queue sur son visage. Il a un mouvement de recul et voit son visage dans le miroir ; il en retire un débris de verre alors que le gros insecte tombe par terre. Sa mère se réveille d'un coup. Il se jette dans ses bras. À l'extérieur les combats font rage et plusieurs bâtiments sont la proie des flammes. Sur l'écran d'information de la chambre, un message de l'entreprise Weyland-Yutani clignote indiquant une alerte code jaune. La mère intime à Maxon de s'habiller et de prendre des affaires dans son sac de classe.



La mère convainc son fils de partir : il faut qu'ils se rendent au spacio-port pour monter à bord d'une navette d'évacuation. En descendant l'escalier, ils doivent passer par-dessus le cadavre d'un homme. La mère en profite pour ramasser son fusil. Ils se retrouvent face à un xénomorphe et se tiennent immobiles. La créature les ignore ; ils poursuivent leur périlleux chemin. Au dehors le chaos règne, entre véhicules renversés et cadavres. La mère réussit à faire démarrer l'un des véhicules du garage. En passant dans les rues, ils voient 2 xénomorphes s'acharner sur un cadavre humain. L'un des pneus finit par crever et le véhicule s'immobilise en plein milieu de la rue, avec plusieurs xénomorphes qui commencent à s'approcher et à monter le toit du véhicule. Soudain surgit un autre véhicule qui les percute. La voiture est renversée, mais les xénomorphes volent au loin. Le conducteur sort de la voiture utilisée comme un bélier, et enjoint Maxon et sa mère de le rejoindre. Il s'agit de l'assistant administrateur Waugh. Le périple pour rejoindre le spacio-port maintenant tout proche peut continuer.



Dans l'introduction, Gabriel Hardman explique donc qu'il a découvert les xénomorphes en allant voir le film Aliens (1986) de James Cameron à l'âge de 12 ans, ce qui lui a donné l'idée de raconter son histoire avec le point de vue d'un enfant du même âge. Avec le succès du film Alien (1979) de Ridley Scott, les xénomorphes sont devenus une franchise, d'abord déclinée en film, puis en comics édités par Dark Horse à partir de 1988, à commencer par Aliens Omnibus Volume 1 et suivants. Dans un premier temps, les auteurs se sont concentrés sur la race des xénomorphes comme la forme de vie dédiée à sa survie, parfaitement adaptés à cet objectif, avec une dimension horrifique. Rapidement, les scénarios ont évolué vers une confrontation entre l'instinct de survie des humains, et la perpétuation des xénomorphes. Dans son introduction, Gabriel Hardman explicite son intention : un mélange d'horreur et d'action spectaculaire. Il indique qu'il est conscient que cet exercice est beaucoup plus difficile à réussir dans une bande dessinée que dans un film, car il n'y a pas l'aide de la musique, et c'est le lecteur qui maîtrise le rythme de l'histoire, c’est-à-dire sa vitesse de lecture, par opposition à un film où le réalisateur impose le rythme au spectateur. Néanmoins, le lecteur sait que cet auteur est à même de se montrer à la hauteur car il a déjà réalisé plusieurs histoires de science-fiction bien troussées avec sa femme Corinna Bechko, que ce soit leur propre création comme Invisible Republic (2015-), ou une version alternative très réussie d'un superhéros DC Green Lantern Terre-un Tome 1 (2018).



Dès le départ, le lecteur sait bien qu'il ne va pas trop s'attacher aux personnages : il y a peu de chance qu'ils en réchappent, les xénomorphes étant des tueurs d'une rare efficacité. Du coup, le scénariste doit déployer d'énormes efforts pour pouvoir provoquer un début d'empathie vis-à-vis de protagonistes dont l'espérance de vie est très réduite. Fort à propos, Gabriel Hardman ne perd pas de temps à essayer. Maxon reste un enfant, ou plutôt un pré-adolescent, absolument pas porté sur la pleurnicherie. On peut même dire qu'il ne prend pas le temps de faire son deuil, et qu'il se montre intrépide et déterminé jusqu'à l'inconscience, ce qui correspond bien à son âge. L'auteur ne perd pas non plus de temps à développer la personnalité des 2 autres principaux protagonistes : Waugh et la capitaine de vaisseau Sinta. Ils sont définis par leur fonction, par une caractéristique physique découverte en cours de récit pour Waugh, et par leur détermination à fuir cette colonie infestée. Le fil directeur du récit est également très simple et clair : rejoindre une navette d'évacuation à tout prix. Effectivement, les quelques survivants se heurtent à plusieurs reprises aux xénomorphes dont Hardman respecte scrupuleusement la mythologie, du Face-hugger à la reine. Effectivement, le nombre de survivants diminue très rapidement. Le récit est conclu en bonne et due forme. L'auteur tient sa promesse d'un récit entre horreur et spectaculaire.



Le lecteur vient donc pour voir des Aliens impitoyables massacrer des humains qui font tout pour essayer de survivre. Gabriel Hardman réalise des dessins descriptifs, avec des traits de détourage qui donnent l'impression de ne pas toujours être ébarbés, rarement polis pour obtenir des jolies courbes, et des aplats de noir plus importants que de simples ombres portées, avec des contours anguleux et parfois déchiquetés. Ces caractéristiques aboutissent à des dessins alourdis par du noir propice au surgissement de créatures violentes, à une atmosphère sombre (renforcée par la mise en couleurs), à des visages fatigués par le stress et les épreuves, à des corps usés et meurtris par les coups. En tant qu'auteur complet (scénariste + dessinateur), Hardman propose une narration très cohérente et complémentaire entre intrigue et mise en images. Oui, les xénomorphes sont très réussis à chacune de leur apparition, quel que soit leur stade de développement. Le dessinateur respecte leurs caractéristiques, trouve le juste milieu entre détails descriptifs et zones d'ombre mystérieuses, transcrit leurs mouvements vifs et létaux, met les personnages et le lecteur en face de leur visage dénué d'expression indifférent. Il en découle des apparitions horrifiques, et des combats très tendus. Mais, dans le même temps, les aliens donnent l'impression d'être un peu moins efficaces que d'habitude. Plusieurs personnages se sortent plutôt à bon compte de leur face-à-face, ou arrivent à s'enfuir assez facilement. En outre le sang des xénomorphes ne coulent pas beaucoup, évitant les horribles blessures à l'acide.



Gabriel Hardman fait également le nécessaire pour rendre l'action spectaculaire, en s'investissant pour donner de la consistance aux décors. Le lecteur voit les protagonistes évoluer dans des endroits avec de la profondeur, se déplacer en fonction des caractéristiques de chaque lieu (volumes, obstacles) et la base de la colonie est à la fois conforme aux constructions des films et à une installation fonctionnelle et éphémère. Les courses-poursuites et les rencontres au détour d'un couloir ou d'un escalier deviennent donc plausibles, gagnant en impact sur le lecteur. L'artiste privilégie un jeu d'acteur naturaliste, sans exagération de panique ou perte de contrôle, même parfois trop en retenue pour Maxon. Le lecteur observe donc des individus crédibles, autant capables de réflexion, que capables de réagir sous le coup de la montée de l'adrénaline, avec un rythme de péripéties soutenu sans être épileptique. L'investissement de l'artiste ne faiblit pas du début à la fin, et s'il ne fait pas l'effort de s'interroger sur la présence ou non des décors en fond de case, le lecteur ne ressent aucune baisse de la qualité d'immersion.



Le lecteur referme ce tome avec une impression mitigée. Gabriel Hardman a imaginé une histoire simple avec des xénomorphes s'en prenant à une petite installation. Il y greffe des observations très standards sur les manigances de la corporation Weyland-Yutani. Il prend le point de vue d'un enfant de 12 ans, montrant bien comment les adultes le considèrent régulièrement comme quantité négligeable, et n'oubliant pas l'absence de notion de danger spécifique à cet âge. Pour autant, régulièrement, Maxon se comporte comme un héros adulte classique. La narration visuelle est particulièrement adaptée aux spécificités du genre Aliens, avec des dessins sombres, consistants, violents sans avoir besoin de se complaire dans le gore. Dans le même temps, le déroulement de l'intrigue recèle peu de surprises, le dénouement est plié d'avance, et l'implication émotionnelle du lecteur reste en berne. 4 étoiles pour un récit Alien bien maîtrisé, mais manquant d'incarnation.
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Invisible Republic, tome 2

Ce tome fait suite à Invisible Republic volume 1 (épisodes 1 à 5) qu'il faut avoir lu avant. Il comprend les épisodes 6 à 10, initialement parus en 2015/2016, coécrits par Gabriel Hardman & Corinna Bechko, avec des dessins et un encrage de Gabriel Hardman, et une mise en couleurs de Jordan Boyd.



En 2843, sur Avalon l'un des lunes de la planète Asan, la baronne Dame Panonica de Roths est de retour après 30 ans d'absence, attendue par la presse à la descente de sa navette spatiale. Pendant ce temps-là, les journalistes Croger Babb et Woronov sont emmenés dans un véhicule pour une audience avec Maia Reveron. Ils ont les yeux bandés, et le véhicule traverse une grande étendue désertique de boue. Il y a 42 ans, Maia Reveron était encore une jeune femme qui avait décidé de suivre son cousin Arthur McBride, embringué dans une aventure politique peu claire.



Les circonstances avaient fait de McBride et Reveron, 2 fugitifs pour avoir tué des policiers faisant respecter la loi telle que définie par la tutelle du gouvernement de la Terre. Les 2 rebelles en fuite avaient trouvé refuge dans les derniers étages d'un immeuble de haut standing, avec quelques autres fuyards. L'opinion publique des natifs de Maidstone avait pris fait et cause pour les actes de rébellion d'Arthur McBride (la participation de Maia n'ayant pas été mentionnée). Au temps présent, Croger Babb se retrouve en possession du journal intime de Maia Reveron décrivant l'ascension d'Arthur McBride comme représentant du parti de libération de Maidstone. 42 ans plus tôt, le même McBride est encore un individu aux convictions politiques peu affirmées.



Le premier tome de cette série avait laissé une forte impression, à la fois pour des dessins assez sombres transcrivant des environnements peu reluisants, et une atmosphère sans beaucoup d'espoir, à la fois pour un scénario ambitieux utilisant les libertés offertes par le genre de la science-fiction pour évoquer l'engagement politique, dans ce qu'il a de plus pragmatique. Le lecteur apprécie que les auteurs aient pu réaliser la deuxième partie de leur récit, en attendant de pouvoir lire la troisième Invisible Republic Volume 3, menant ainsi à bien leur intrigue. Le lecteur prend plaisir à retrouver l'ambiance graphique très particulière de la série. Jordan Boyd effectue toujours un travail si personnel de mise en couleurs. L'ambiance reste plombée par des teintes gris-vert qui attestent d'un quotidien déprimant, et peu joyeux. Mais au lieu de rendre la lecture morose, ces teintes font d'autant plus ressortir la vie apportée par les personnages dans ces environnements. Il n'applique pas une couleur uniforme à chaque surface délimitée par les traits encrés, mais des gradations d'une même nuance, pour rendre compte de l'éclairage, et aussi pour faire ressortir certaines formes par rapport à d'autres. Il s'agit d'une véritable approche structurée et personnelle de la mise en couleurs, conçue sur mesure pour souligner le fond du récit. Dans le même ordre d'idée, les séquences du passé bénéficient d'une mise en couleurs plus variée et un peu plus vive, comme si les personnages étaient plus neufs, pas encore englués dans leurs idées arrêtées, et subissant le poids du passé.



Le lecteur retrouve également les dessins de Gabriel Hardman, dont la première caractéristique réside dans les traits de contours. L'artiste adopte une approche descriptive, détoure les formes avec des traits précis, et nets. Cependant certains contours donnent l'impression de ne pas avoir été correctement ébarbés, comme s'il subsistait des aspérités qui n'avaient pas pu être lissées. Renforçant cette impression de rugosité parfois piquante, les ombres portées le sont sous forme de zones géométriques mal définies, et totalement irrégulières. Il en découle une impression qu'il subsiste des zones de flous dans les personnages ou les décors, ou en tout cas des zones qui restent impénétrables au regard, qui conservent une part de mystère, quelle que soit la minutie et l'application avec laquelle le dessinateur a pu représenter le reste. À nouveau cette approche graphique est en phase avec un récit qui dévoile le passé petit à petit, les faits et gestes des uns et des autres, leurs relations interpersonnelles et leurs partis pris, mais avec la certitude qu'il demeure bien d'autres secrets.



Au fil des séquences, le lecteur constate que cette forme des contours qui peut sembler un peu hâtive ne l'est en rien. Pour commencer, tous les personnages sont aisément reconnaissables aux traits de leur visage, et à leur morphologie, à commencer par leur taille et leur corpulence. Ensuite, en regardant un peu les tenues vestimentaires, le lecteur constate qu'elles évoluent en fonction des époques, et qu'elles sont cohérentes entre elles dans une vision assez pragmatique du futur. Ensuite, les personnages évoluent dans des environnements variés, dans lesquels le lecteur peut se projeter grâce au bon niveau de détail. Croger Babb et Woronov sont emmenés dans une immense halle industrielle, avec structure métallique apparente, grands volumes, tuyaux divers et variés, et un sous-sol aménagé en cohérence avec l'usage du bâtiment, ce qui ne veut pas dire qu'il ne recèle pas quelques surprises (dont une de taille). Les étages supérieurs de l'immeuble où squattent la bande de rebelles disposent eux aussi de beaux volumes, mais sans comparaison possible avec ceux de la halle industrielle, ce qui atteste cette fois-ci de la richesse du propriétaire. Le lecteur en a la confirmation lorsque l'un des personnages a accès aux étages inférieures habités, avec un ameublement luxueux. Il peut également apprécier le contraste entre la tranquillité du marché de produits de luxe, et l'espace confiné de la station orbitale.



Le lecteur apprécie également la qualité de la mise en scène de l'artiste. Lors des séquences de dialogue, il lui arrive de dessiner des têtes en train de parler pendant une page, mais il s'agit plus de plan sur des bustes, avec des inclinaisons différentes, et des changements d'angle de vue pour accompagner soit le changement de prise de parole entre interlocuteurs, soit pour insister sur qui a le dessus psychologique dans la conversation. Il y a également de nombreuses conversations qui bénéficient d'une mise en scène plus sophistiquée, avec des plans plus larges pour montrer ce que font les personnages, ce qui les entoure. Gabriel Hardman réalise des séquences d'action tout en sécheresse, sans une once de romantisme de la violence, sans glorification des capacités physiques, mais pas sans force. Il prend également soin de montrer les conséquences, à commencer par les blessés, avant même les destructions matérielles.



La partie graphique fait exister un monde de science-fiction, plus désespérant que désespéré, plus résigné que débilitant, avec des personnages adultes, sans être auréolés de prestige, sans dramatisme émotionnel. Ce parti pris est parfaitement en phase avec la nature du récit. Le lecteur peut très bien apprécier ce récit au premier degré. Les coscénaristes ont établi au départ la conclusion : le régime auquel a participé Arthur McBride en héros a fini par s'effondrer. Ils entremêlent avec élégance 2 fils chronologiques qui progressent de concert, le présent permettant de maintenir une tension narrative, et le passé venant éclairer le comportement des individus au présent. Sur ce plan littéral, le récit s'avère très prenant, sous la forme d'un thriller mâtiné de politique, le lecteur se demandant bien qui finira par avoir le dessus entre les différentes forces en présence. En découvrant le passé au fur et à mesure, il prend conscience qu'il n'est pas possible de départager les factions entre Bien & Mal. Chaque faction a son propre objectif, son propre plan d'action. Qui plus est, même si chaque faction est représentée par son chef, Corinna Bechko & Gabriel Hardman montrent bien que les individus qui composent chaque groupe disposent de motivations personnelles similaires mais pas identiques à celles des chefs ou de la faction. Ils saupoudrent le tout d'une petite touche de paranoïa engendrée par la clandestinité dans laquelle le groupe de rebelles est contraint de vivre, ce qui installe une tension sous-jacente permanente.



Il est également possible de lire ce récit au second degré : la description des forces qui façonnent les personnages publics, à commencer par les hommes politiques, la manière dont ils évoluent, la distance qui sépare leur image publique de l'individu qu'ils sont dans leur vie. Les auteurs réalisent un travail fascinant en commençant par exposer la réputation d'Arthur McBride telle qu'elle s'est figée après sa mort, puis ils racontent son histoire personnelle, au travers des yeux de sa cousine Maia Reveron. Finalement, le lecteur n'a pas accès aux pensées intérieures de McBride, mais il apprend à le connaître au travers de ses actions et de ses dires. Les auteurs montrent comment l'image publique se nourrit de fait tels que constatés par les médias, mais déconnectés des motivations et des circonstances qui ont amené l'individu à se conduire ainsi. Le lecteur est aux premières loges pour voir cette déconnexion, sans pour autant que McBride ne donne l'impression d'être maître des déformations qui se produisent, des interprétations qui sont données à ses actes. À ce deuxième niveau de lecture, il s'agit d'une analyse pénétrante de la construction d'une image publique, semblant réfléchie pour le grand public, faite de tâtonnements et d'opportunité lorsqu'on la voit de l'intérieur.



Ce deuxième tome confirme l'excellente qualité de cette série qui baigne plus dans la politique fiction que dans la science-fiction. Les auteurs savent raconter un récit prenant, baignant dans un monde consistant, avec une ambiance cafardeuse, tout en se livrant à une analyse de la figure de l'homme politique et du rebelle politique aussi perspicace qu'intelligente. Remarquable. 5 étoiles. Ils se payent même le luxe de terminer avec 8 pages de texte consolidant leur parti pris de science-fiction, ou plutôt d'anticipation sur des sujets comme les ressources nutritives des algues, ou la possibilité de construire un ascenseur orbital.
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Invisible Republic, tome 1

"Invisible Républic" de @gabrielhardman, Corinna Becko et ‏ @jordantboyd chez @HiComicsFrance



Synopsis : 



"Un régime renversé. Un reporter déchu. Une femme effacée. Un journal secret.



Le régime galactique d’Arthur McBride est tombé. La messe est dite.



C’est du moins ce que pensait la population, jusqu’à ce que le reporter Croger Babb déterre le journal de Maia, la cousine cachée du dictateur. Elle y raconte l’ascension violente et audacieuse du plus grand révolutionnaire de l’univers. Effacée de toutes les archives officielles, Maia est aussi la seule à connaître les noirs secrets de ce héros du peuple. Croger Babb tient là le sujet de sa carrière.



Sera-t-il prêt à tout risquer pour révéler la vérité ?"



Scénario : Gabriel Hardman et Corinna Becko ;

Dessins : Jordan Boyd ;

Éditeur : HiComics ;

Prix : 16.90 € ;

Commandez-le sur HiComics.



Les bonnes idées, un monde parfait, un monde juste et équitable, je devrais même dire, un univers juste et équitable, tout cela commence à chaque fois par la même chose : une révolution, une révolution engagée, importante, nécessaire et sanglante. Voilà, ce qu'Arthur McBride a voulu mettre en place, a voulu pour l'humanité et c'est ce qu'il a réussit à faire, en tout cas, jusqu'à ce que son régime galactique tombe, comme les autres. Du moins, c'est ce que tout le monde a cru [...]



La suite de la chronique ici
Lien : https://wordpress.com/post/y..
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Invisible Republic, tome 1

Ce tome est le premier d'une série indépendante de toute autre. Il contient les épisodes 1 à 5, initialement parus en 2015, coécrits par Gabriel Hardman & Corinna Bechko, dessinés, encrés et lettrés par Gabriel Hardman, avec une mise en couleurs de Jordan Boyd.



En 2843 sur la planète satellite Maidstone (autrefois appelée Avalon), le reporter Corger Babb enquête sur le régime politique Malory, aujourd'hui disparu. Il interroge les gens dans la rue sur le fait que cette gouvernance a connu une fin. Il se fait envoyer balader par tout le monde. Par le plus grand des hasards, il met la main sur une pile de papiers qui ne sont autres que le journal de Maia Reveron, cousine d'Arthur McBride, une figure politique controversée de cet ancien régime.



Ce journal commence 42 ans plus tôt, alors que Maia Reveron et Arthur McBride se nourrissent chichement sur une plage appelée Bright Rock, ayant fui la plantation dans laquelle ils travaillaient. Ils sont interpellés par un groupe de 4 soldats en maraude. L'affrontement est inéluctable et brutal. Ils deviennent des fuyards. L'un des soldats a survécu, Sasha O'Hand, et est capable de les identifier.



En 2015, Image Comics continue d'être un éditeur qui sort énormément de nouveautés, dans des genres qui évitent le plus souvent les superhéros. Le lecteur voit ainsi arriver ce récit de science-fiction, essentiellement réalisé par un dessinateur dont le style évoque celui de Michael Lark, avec une mise en couleurs qui évoque celle d'Elizabeth Breitweiser. Pourtant dès le départ, le ton est spécifique. En surface, Hardman semble utiliser un trait un peu épais, un peu imprécis, conférant une bonne densité de noir sur chaque page. La mise en couleurs se base sur des tons un peu ternes, légèrement foncés (pas au point de masquer les traits), donnant une apparence un peu sombre, un peu cafardeuse.



À y regarder de plus près, Gabriel Hardman dessine de manière plus précise et plus détaillée que Lark. Une mention indique sur la première page que le récit se déroule en 2843. En regardant les dessins, le lecteur constate que les constructions ont un petit air futuriste, mais rien de clinquant, plutôt des constructions marquées par l'usure du temps. Les véhicules présentent des carrosseries assez semblables à celles d'aujourd'hui. Les tenues vestimentaires sont également passepartout. Il reste des satellites, des vaisseaux spatiaux, des drones et une moto de type futuriste. Cet aspect familier s'explique par le fait que la société sur Maidstone a été délaissée par la société d'Asan, la planète mère, et qu'elle fait avec ce dont elle dispose, c’est-à-dire une technologie bas de gamme.



Ce n'est pas pour autant des décors et des accessoires du pauvre. L'artiste construit et montre un environnement présentant une solide cohérence graphique, qu'il s'agisse des tenues vestimentaires adaptées à chaque endroit et au niveau de revenus des personnes les portant, de l'ambiance urbaine, ou encore de celle des faubourgs, avec le centre d'apiculture. Le lecteur éprouve bien l'impression de se trouver sur une planète lointaine, à l'histoire inconnue, avec ce qu'il faut de décalage par rapport au quotidien terrestre pour assimiler que le récit se déroule dans le futur.



Le récit se déroule dans plusieurs sites de nature différente. Le bord de mer est sauvage à souhait, avec des rochers râpeux, une mer légèrement agitée de vagues venant s'écraser sur lesdits rochers, et une faune extraterrestre, évoquant des crabes de par leur carapace, et leur mode de progression. Les déplacements de Croger Babb montrent une ville usée, sans être délabrée pour autant, avec une population fatiguée par une guerre civile encore assez récente, résignée à une forme de dictature économique due à une crise prégnante, et des traces discrètes des affrontements passés telles que des affiches de propagande à moitié arrachées.



Au fil du récit, Gabriel Hadman réussit des séquences qui plongent le lecteur dans l'environnement, aux côtés des personnages. Il peut s'agir d'un affrontement physique sec, brutal, sans aucune forme de romantisme ou de glorification de la violence (Maia Reveron et Arthur McBride se battant contre les soldats), le lecteur ressentant l'âpreté des rochers, et les éclaboussures des vagues. Il peut s'agit d'une situation périlleuse, comme le journaliste Babb suspendu dans le vide, accroché par une main à une vitre brisée. Sans que l'artiste ne détaille l'aspect gore de la blessure, le lecteur ressent la coupure du verre s'enfonçant dans la chair, ainsi que l'élan vital du personnage le poussant à tenir bon.



Hardman est tout aussi convaincant quand il décrit des scènes de dialogues. Il conçoit des mises en scène dans lesquelles le jeu des acteurs évite qu'elles ne soient trop statiques. Ainsi quand Reveron et McBride se disputent à haute voix sous un pont, le lecteur apprécie le jeu des ombres générées par les caillebotis des grilles au-dessus de leurs têtes, et leurs mouvements vifs du fait de leur état émotionnel troublé. Quand Babb et Woronov (une journaliste avec de l'ambition) discutent dans l'appartement de cette dernière, le jeu des acteurs fait qu'ils bougent, se déplacent, vaquent à leurs occupations, donnant ainsi des informations visuelles complétant ce qu'ils se disent.



Ainsi immergé auprès des acteurs, le lecteur découvre une situation complexe. Il y a donc une sourde chape qui pèse sur la société de Maidstone en 2843. Le lecteur remarque des indices qui laissent supposer une forme de dictature, ou du moins de société fortement policée. Au détour d'une conversation, il comprend que les habitants ont le choix de se résigner à vivre sur cette planète, dans des conditions de vie offrant un confort limité, des revenus peu conséquents, sans descendre en dessous du seuil de pauvreté. Il comprend à demi-mots que Croger Babb essaye d'expier une faute qui pèse sur sa conscience. Il voit que sa collègue Woronov voit en lui une possibilité de sortir de la routine sans gloire de sa position de téléreporter.



Les actes d'Arthur McBride montrent qu'il s'agit d'un individu aux abois, prêt à recourir à une violence létale pour conserver sa liberté. Les commentaires de Maia Reveron (dans les cellules de texte) indiquent qu'il y a quelque chose de pourri dans cette histoire. Arrivé à la fin de ce premier tome, le lecteur a pu apprendre à connaître les personnages. Il en sait un peu plus sur Croger Babb, pourquoi il est considéré comme un pestiféré dans la profession, pourquoi il a une piètre opinion de lui-même, et pourquoi il s'accroche tant à cette enquête nébuleuse. Bechko et Hardman ont fourni les informations de manière naturelle, sans recourir à un gavage du lecteur, et dans une forme qui participe à montrer le caractère de ce personnage. De la même manière, il comprend bien la motivation de sa collègue Woronov.



De la même manière, le lecteur voit Arthur McBride et Maia Reveron agir sous ses yeux. L'histoire personnelle de McBride n'est pas abordée ; il ne peut donc que constater sa capacité à se battre, et sa détermination que l'on peut qualifier de farouche. Les auteurs donnent plus de place à Reveron, permettant au lecteur de mieux la cerner. Il s'agit d'une jeune femme déterminée à exercer sa liberté de choix, avec une forme de conscience politique, ou tout du moins économique, qui lui permet de se rendre compte de l'étroitesse de la place que la société lui a réservée en son sein. Le lecteur assiste à son éveil politique. Elle n'est pas une héroïne maîtrisant son destin. Elle plus un individu normal ayant décidé de refuser de capituler devant le système, avec des conséquences très concrètes et pragmatiques puisqu'elle devient SDF pour un temps.



Arrivé à la fin d tome, le lecteur s'interroge sur le fond du récit. Finalement il n'a pas appris grand-chose sur l'histoire politique de Maidstone, pas grand-chose sur l'ascension au pouvoir de McBride, et pas grand-chose sur les enjeux réels de l'enquête de Croger Babb. De ce point de vue, il reste même sur sa faim. Le cœur du récit est donc à chercher ailleurs. En fait, les auteurs montrent l'engagement politique de Croger Babb et de Maia Reveron (42 ans plutôt). Le lecteur voit comment les choix de ces 2 protagonistes en font des citoyens qui dérangent. Il y a un vrai engagement qui n'a rien d'héroïque, qui ne résout pas les conflits avec les poings, qui n'en fait pas des héros acclamés par tout un peuple. En fonction de ses attentes, le lecteur peut ressentir une forme de déception à la lecture d'un récit à la fois spectaculaire, à la fois très pragmatique, et à la découverte d'une intrigue qui n'en dit pas beaucoup.



À contrario, il peut aussi apprécier une narration qui accepte le spectaculaire, pour maintenir l'attention du lecteur par des séquences visuelles, et qui se situe au niveau de l'individu normal pour montrer ce que l'engagement politique peut avoir d'ordinaire, presque de banal quand on n'est pas un leader. La deuxième chose qui fait l'originalité de ce récit est que Maia Reveron et Croger Babb sont des individus constructifs, ils ne se contentent pas de partir en croisade pour dénoncer, dans une position de rebelle un peu facile. 5 étoiles pour un récit politique qui ne sacrifie rien au divertissement, et au genre de la science-fiction.
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Secret Avengers, tome 1

Ce tome fait suite à Run the mission, don't get seen, save the world (épisodes 16 à 21) qu'il n'est pas besoin d'avoir lu avant (mais dont la lecture est chaudement recommandé pour la narration impeccable d'Ellis). Il contient les épisodes 21.1, et 22 à 25, initialement parus en 2012, tous écrits par Rick Remender. Patrick Zircher a dessiné et encré l'épisode 21.1. Gabriel Hardman a dessiné et encré les épisodes 22 à 25. Les couvertures ont été réalisées par Art Adams. Rick Remender a écrit 17 épisodes de cette série, qui ont été regroupés en 3 tome: celui-ci, Secret Avengers by Rick Remender - Volume 2 (AVX) et Secret Avengers by Rick Remender Volume 3



Épisode 21.1 – Captain America (Steve Rogers) et Hawkeye (Clint Barton) sont en mission en Bagalya (un pays fictif, vraisemblablement proche de la Turquie), pour exfiltrer un sénateur américain. Sur place, ils sont attendus par un groupe de supercriminels.



Épisodes 22 à 25 – Avec l'assentiment de Captain America, Hawkeye a pris la tête des Secret Avengers, équipe composée de Beast (Hank McCoy), Ant-Man (Eric O'Grady, voir The irredeemable Ant-Man de Robert Kirkman), Valkyrie (Brunnhilde), Black Widow (Natalia Romanova), Captain Britain (Brian Braddock), et Hank Pym. Leur première mission consiste à arrêter des terroristes dotés de superpouvoirs, au Pakistan.



Le premier épisode sert de transition entre l'ancienne équipe et la nouvelle. Il est effectivement un peu difficile de croire que quelqu'un ait pu avoir l'idée de désigner Captain America comme chef d'une branche des Avengers chargée d'effectuer des missions secrètes, voire clandestines. Difficile de passer inaperçu ou même discret quand on s'habille avec le drapeau américain. Remender raconte donc une mission dans laquelle Captain America passe son temps à rappeler la discrétion à Hawkeye, alors que lui-même est reconnaissable et ressort comme le nez au milieu de la figure, comme l'incarnation de l'ingérence des États-Unis dans les affaires étrangères d'une nation souveraine.



Patrick Zircher réalise des dessins compétents, évoquant l'esthétique initiée par Steve Epting sur la série Captain America d'Ed Brubaker. Il est bien épaulé par la mise en couleurs d'Andy Troy qui déploie des camaïeux complétant les arrière-plans parfois un peu vides.



Remender commence donc vraiment son récit avec l'épisode 22. Le lecteur constate qu'il ne reprend pas le schéma de Warren Ellis dans le tome précédent. Il ne s'agit pas de 5 missions indépendantes, mais d'une histoire continue (qui se poursuit d'ailleurs dans les tomes suivants). Il constate également que ce scénariste n'abandonne jamais une idée. Ainsi l'agent Venom rejoint les Secret Avengers, sachant que Remender avait déjà écrit quelques épisodes de sa série, voir Venom by Rick Remender vol. 1 & Venom by Rick Remender vol. 2. Il voit également revenir Father, déjà apparu dans la série Uncanny X-Force (voir Deathlok nation), écrit par Rick Remender.



Le scénariste reprend un concept assez malin et intrigant apparu dans X-Force, pour en faire l'opposant de cette équipe d'Avengers. Ce concept utilise des personnages secondaires, voire très secondaires de l'univers partagé Marvel, en les plaçant dans un contexte innovant qui donne une forme de légitimité à leurs actions, au-delà d'un clivage basique bien/mal (du type je suis méchant parce que je suis méchant). Le lecteur découvre donc avec surprise les objectifs de Father, Lady Deathstrike, Ideal, Mother, Urn et les autres.



Comme à son habitude, Rick Remender s'avère très habile à recycler des éléments de l'univers partagé Marvel pour les agréger dans un tout cohérent, avec un angle de vue innovant. Le lecteur appréciera d'autant plus cette histoire qu'il est familier d'Eric O'Grady (Ant-Man), de Jim Hammond (Human Torch), ou encore Captain Britain. L'apparition d'un personnage comme Vengeance ne parlera qu'aux lecteurs disposant d'une solide culture Marvel.



L'encrage de Gabriel Hardman apparaît un peu plus rugueux que celui de Patrick Zircher, avec des traits plus secs, des formes présentant des petites cassures dans leur contour, des petits angles de ci, de là, ce qui aboutir à des images plus sérieuses, plus abîmées par les contraintes extérieures. L'ambiance de la narration visuelle donne une vision de la réalité avec plus d'aspérités, plus dangereuse.



Au fur et à mesure des chapitres, la distribution va en augmentant, jusqu'à une dizaine d'Avengers, et autant d'ennemis dans le groupe en face. Hardman sait donner assez de spécificités à chaque personnage pour que le lecteur les reconnaisse dans toutes les cases, même les plus peuplées. Durant certaines pages, il peut arriver que les cases manquent assez d'arrière-plans pour que le lecteur finisse par s'en rendre compte. Néanmoins ce n'est que passager, et le reste du temps, Hardman réussit à donner une bonne idée de l'endroit où se trouvent les personnages. En particulier, les rues de Dera Ghazi Khan (au Pakistan) donnent l'impression d'être réalistes, sans pour autant disposer d'un haut niveau de détails. Hardman éprouve un peu plus de difficultés à rendre palpable la cité de Father. Il faut dire que le scénario est assez exigeant sur point, requérant une mégapole souterraine, et secrète bien sûr.



À partir de ce tome, Rick Remender s'installe aux commandes de la série, en lui donnant une orientation différente des épisodes précédents, avec une intrigue principale conçue sur la durée. Comme dans Uncanny X-Force, il s'empare des personnages en les plaçant dans une situation complexe, nourrie par la richesse des recoins de l'univers partagé Marvel, tout en créant une dynamique innovante. Il bénéficie des dessins de Patrick Zircher, puis de ceux de Gabriel Hardman qui savent transcrire l'ambiance sombre de la série, et mettre en scène un nombre impressionnant de personnages. Par comparaison avec Uncanny X-Force, ou d'autres séries ultérieures comme Captain America et Uncanny Avengers, le lecteur ne perçoit pas de thème structurant dans ces épisodes. Certains personnages de ce récit refont surface dans Avengers: Rage of Ultron.
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Invisible Republic, tome 1

Ce premier volume d'Invisible Republic est très intriguant. On suit deux, histoire en parallèle, une dans le passé et l'autre 42 ans plus tard. C'est un thriller politique très prenant qui donne immédiatement envie de lire la suite.  

Graphiquement irréprochable ! 
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Green Lantern - Terre-Un, tome 1

Je ne connaissais pas le personnage de Green Lantern et je dois reconnaitre que l'histoire m'a captivé dès le début. On découvre l'origine de la puissance verte et l'histoire du héros, au départ une sorte de mineur galactique travaillant sous contrat.

Un peu comme dans Prometheus, la découverte d'un ancien vaisseau et son exploration vont tout changer...
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Invisible Republic, tome 1

Cette critique porte sur les trois premiers volumes parus en France, qui suivent exactement la parution reliée US. Quinze épisodes sont actuellement parus, sur une trentaine envisagée à terme pour la série (environ cinq chapitres par volume). Chacun des albums comportent en fin de volume plusieurs textes sur les problématiques de la Hard-Science-fiction et sur l’univers d’Invisible Republic. Moyennement intéressants mais ils ont le mérite de donner des infos de la scénariste sur sa création et c’est toujours à saluer.



Sur la lune Avalon le régime dictatorial d’Arthur MacBride est tombé, laissant place à un gouvernement dont les mœurs démocratiques riment avec éloignement des centres du pouvoir martien du Commonwealth. Nous sommes en 2843, l’humanité a essaimé sur des exoplanètes grâce à des vaisseaux générationnels. Un journaliste va découvrir l’existence d’une proche du dictateur, dont le témoignage peut remettre en question toute l’historiographie officielle et secouer jusqu’aux fondements politiques du régime martien.



The invisible Republic jouit d’un sacré buzz au sein des blogueurs et dans la galaxie des comics indépendants. Ses très jolies couvertures et son étiquette de « SF politique » m’ont assez vite attiré… Première déception, les dessins. Je ne peux pas dire qu’ils soient mauvais, mais ils font partie d’une école graphique qui ne me plait pas, avec un style imprécis qui peut avoir un intérêt pour refléter une ambiance mais que je ne trouve pas joli esthétiquement. Pour les mêmes raisons que Lazarus, autre dystopie très politique, que Sheriff of Babylon, ce graphisme m’a empêché d’entrer dans cet univers pourtant riche, ambitieux, réaliste. En outre la colorisation donne un aspect « sale » certainement recherché mais qui accentue l’impression à la fois de zone de guerre, de documents récupérés et clandestins qui collent parfaitement avec le sujet, mais n’aide pas à la lisibilité. C’est très subjectif bien sur, certains aimeront.



La grosse qualité supposée de cette série est son réalisme et son côté politique. Là aussi j’ai été déçu par un scénario assez déstabilisant, qui semble fuir l’action et les scènes choc. On est dans une certaine normalité avec l’ambition des auteurs de déconstruire la mythologie que tout régime politique se construit. Sur ce point c’est très réussi et efficace. On a plus l’aspect d’un documentaire (le personnage axial est le journaliste) que d’un thriller politique. De même, l’histoire commence en suivant ce journaliste assez insipide alors que l’on réalise progressivement que le centre de l’intrigue est la cousine du dictateur, personnage très réussi pour le coup et que l’on retrouvera à différents ages de sa vie et de prise de connaissance par le lecteur de son journal et donc du déroulement de l’ascension du dictateur MacBride.



Vous l’aurez compris, Invisible Republic est une série exigeante avec des auteurs qui (un peu comme Christophe Bec…) s’efforcent de brouiller la lecture, de densifier en poussant le lecteur à l’effort, par des croisements constants de narration (maintenant, le récit de Maïa, la vie passée de Maïa). Cela participe de l’ambiance complexe bien sur, mais cela rend la lecture compliquée, peu fluide en créant des énigmes artificielles. Ce comic est sans doute une série à lire en intégralité quand elle sera finie et l’attente des volumes n’aide certainement pas à rester plongé dans cette atmosphère de hard-science. La scénariste a écrit en fin d’ouvrages plusieurs textes de réflexions sur les problématiques que pose cet univers: le voyage inter-générationnel, la faune et la flore, la gravité, l’ascenseur spatial,…autant d’éléments passionnant pour tout amateur de SF. Il est dommage que ces thèmes soient finalement assez peu abordés dans la BD qui tourne autour de l’enquête de ce journaliste lâche et peu charismatique en laissant un peu confus le but recherché: chronique ethno-politique d’une lune ou description d’une révolution? Personnellement je suis plus intéressé par la seconde et la description SF n’est pas soutenue par des dessins qui auraient nécessité d’être plus précis, plus design.



Je ne voudrais pas laisser penser par une chronique trop négative que The invisible Republic est un mauvais comic. Il est certain que j’ai moyennement accroché et que le déroulé avance assez lentement. Mais la lecture du troisième tome a un peu remonté mon intérêt, avec des dessins que je trouve améliorés, plus nets et colorés et surtout une intrigue qui se simplifie, non dans son scénario mais dans son déroulement, plus linéaire. Du coup l’attention gagnée par le lecteur peut se concentrer sur les détails et l’ensemble y gagne en qualité. On ne peut du reste que saluer l’investissement des auteurs dans une série atypique à tout point de vue et qui fait une proposition novatrice si ce n’est très créative. Pour les amateurs.
Lien : https://etagereimaginaire.wo..
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Invisible Republic, tome 3

Il est frustrant de savoir qu'on ne connaîtra jamais la fin d'Invisible Republic. La série était prévue en 4 tomes et s'arrête avec celui-ci. C'est rageant car c'est un excellent récit de science fiction et de politique. Le genre d'histoire qui fait réfléchir sur l'humanité, l'évolution sociétale, la destruction de notre planète et les futures colonisation. Un récit brillamment orchestré par Corinna Bechko et illustré à merveille par Gabriel Hardman. Malheureusement on ne connaîtra jamais la conclusion et c'est bien triste… les auteurs ayant décidés d'aller vers d'autres horizons super heroic
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Invisible Republic, tome 1

Invisible Republic est une série co-écrite par Gabriel Hardman (Star Wars Legacy, Hulk) et Corinna Bechko (Star Wars Legacy, Angel Season 11), avec Hardman au dessin et Jordan Boyd (Deadly Class, The Astonishing Ant-Man) à la colorisation. Aux États-Unis, elle est éditée depuis 2015 par Image Comics avec une parution qui devrait se tenir entre 30 et 50 numéros. Elle est toujours en cours avec 3 volumes reliés, et dont le premier est paru en février dernier chez HiComics pour l’édition française.



Le récit débute dans un contexte de science-fiction en 2843, sur la planète Avalon la chute du régime Malory avec pour leader Arthur McBride. Si avant le renversement de sa politique dictatoriale la population la plus démunie était déjà mise à mal, depuis c’est pire. Parmi eux se trouve le journaliste Croger Babb, en manque de reconnaissance, va tomber sur des papiers appartenant à la cousine de McBride, Maia Reveron, retraçant les faits de l’ancien homme au pouvoir. Le journal débute 42 ans en arrière, où rien ne prédestinait le destin de cet homme controversé. Débute alors une double narration alternant présent et passé.



La construction de ce récit se tient de par son côté thriller et politique, où le passé de Maia et Arthur joue le témoin d’une époque mais surtout celle d’un homme qui bouleversa plus tard la vie de milliers de personnes. La charte graphique permet de facilement comprendre à quel moment on se trouve dans l’histoire, puisque Hardman et Boyd donnent une teinte différente. Par exemeple, la partie prequelle à l’histoire a des couleurs chaudes et des visages moins sombres. Alors que pour l’Avalon de l’an 2843, les couleurs sont grises, ternes, et les visages sont marqués par les événements et la fatigue. Ainsi le binôme Gabriel Hardman et Jordan Boyd s’amuse à retranscrire deux ambiances à chaque fois, même si le but final reste le même : Comprendre qui était McBride, son ascension et ce qui précipita sa chute.



Au-delà du personnage de McBride, Maia est une femme habitée par les doutes à l’encontre des agissements de son cousin. C’est une femme qui nous apparaît forte et fragile à la fois, tout en montrant sa capacité humaine qui semble tant manquer à McBride. Sur la longueur, Bechko et Hardman arrivent à garder cette aura mystérieuse inspirant la révolte et la fascination de qui est McBride. Si le fait que deux temporalités avancent en parallèle, les auteurs offrent une lisibilité claire et propre au récit, en sèment des éléments liés à l’intrigue sans jamais précipiter les choses. Dans le présent, Croger Babb représente la figure même du journaliste qui tente coûte que coûte de percer la vérité, en profitant également de cette découverte pour essayer de relancer sa carrière au plus mal. Malheureusement je n’ai pas réellement réussi à m’attacher à ce personnage. Je l’ai trouvé froid et calculateur, alors que Maia m’est apparue plus chaleureuse, plus faillible dans son avancée aux côtés de McBride. Ce dernier est évidemment le point de ralliement, puisque c’est de lui que tout a débuté.



Le contexte politique et science-fiction donne lieu à un récit d’anticipation mélangé à du post-apocalyptique, où le lecteur est invité à réfléchir sur la morale et celle de la société actuelle. La critique politique se concentre sur les inégalités et l’exploitation de la population. Le rythme est bon, soutenu par moment, donnant lieu à une lecture assez haletante dans sa globalité et honnête sur le fond. Bechko et Hardman forment un duo complémentaire, aussi bien sur le plan artistique que dans la vie de tous les jours.



Le dessin de Hardman s’ancre dans un style réaliste proche de l’artiste Lee Bermejo, grand nom des comics à qui l’on doit le one-shot Joker, Batman : Noel [mon avis ici] ou encore Suiciders. Toutefois, Hardman n’a rien à envier au trait de Bermejo, puisqu’il arrive à donner vie à des planches visuellement efficaces. Les détails sont à la fois nombreux et trop peu. On entend par là que dans le présent les décors nous semblent plus poussiéreux donnant un sentiment d’oppression, alors que dans les flashbacks le background est aéré tous du long, mais avec une sensation de liberté s’amenuisant au fil des pages. Les expressions des visages sont également importantes puisqu’elles transmettent toute la vivacité du trait de Hardman. Le découpage et la mise en page se permettent quelques variantes agréables lors de la lecture. Concernant l’édition de HiComics, rien à reprocher. La traduction de Philippe Touboul est excellente. En fin de tome outre la galerie de couvertures, vous trouverez deux petits édito par Corinna Bechko parlant de colonisation dans l’espace, les enjeux, les répercussions mais aussi des parallèles entre la population des abeilles et celle de l’homme. C’est assez intéressant du point de vue sociologique, voire écologique, pour que l’on prenne le temps de les lire.



En conclusion, avec ce premier tome de Invisible Republic, le couple Bechko/Hardman propose une histoire riche dans un univers SF, où la politique vient nourrir de son double jeu une narration plaisante à suivre. Si le personnage du journaliste est le moins bien réussi, selon moi, il reste tout de même important pour faire le lien entre les flashbacks avec Maia/McBride et le lecteur. Une lecture ayant des similitudes avec DMZ ou le one-shot The Few [mon avis ici], et dont le cliffhanger promet, on l’espère, de bonnes surprises.
Lien : https://lireenbulles.wordpre..
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Green Lantern - Terre-Un, tome 2

Suite de ces aventures se déroulant dans un univers parallèle, nous y retrouvons de nombreux éléments bien connus, réarrangés de façon intéressante, même si ce deuxième acte apparaît moins mémorable.
Lien : https://www.actuabd.com/Gree..
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Green Lantern - Terre-Un, tome 1

Nouveau titre de la collection des versions « libres » des grands héros DC, une belle aventure, très spatiale et dépressive, qui revisite de façon intéressante l'univers des Chevaliers d’émeraude.
Lien : https://www.actuabd.com/Gree..
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Green Lantern - Terre-Un, tome 1

Beaucoup de science-fiction, un peu de super-héros, un soupçon de la communauté de l'anneau, et on obtient cette bande-dessinée, noire sur fond vert translucide. Ajoutez-y un zeste de politique, d'écologie (décidément, tous les mondes courent après l'énergie), et les super-héros potentiels deviennent des êtres naïfs, qui sèment le chaos. Il y a parfois des ellipses, on sent que l'histoire aurait pu être plus développée, mais ces raccourcis n'entachent en rien la compréhension du récit.

Affaire à suivre...
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Invisible Republic, tome 3

« Invisible Republic » est un essentiel d’anticipation, comme on en lit assez rarement en bande dessinée, scénaristiquement et graphiquement très homogène, à découvrir absolument.
Lien : http://bdzoom.com/144227/com..
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