Gaëlle Tertrais

Car en Mennelmâr, nul n’a le droit de penser du mal du roi Oromock. Les chansons et les poèmes qui ne célèbrent pas sa gloire sont interdits, La musique elle-même est devenue suspecte. Les Oromores brûlent tous les livres qui rappellent la culture arzhurienne.

— Mais pourquoi ?

— Quand un dirigeant n’est pas légitime, mon fils, il détruit toute trace du passé pour imposer son pouvoir. Ce qu'ils ne peuvent gagner par la sagesse, certains essayent de le gagner par la violence. L'homme est ainsi fait. Mais ce genre de règne ne dure pas. Il finit toujours par s'écrouler de lui-même... Après avoir occasionné beaucoup de dégâts.

Vers midi, la pluie cessa enfin. Un soleil pale redonnait au ciel quelques couleurs sans parvenir à percer complètement. Tout en mangeant une tranche de viande séchée, Mat commenta la rencontre de la matinée :

— Ce narval est diablement bien équipé. Je l’ai observé avec attention : mat rétractable, voiles métallisées. Je pense qu'elles forment un toit hermétique quand le narval veut plonger sous l'eau. Hélice à l’arrière pour propulser le bateau. Canon de quinze pouces, boulets en fer minéralisé deux fois plus lourds que la normal. Quel engin ! Il va sûrement revenir nous surveiller en constatant qu'il
n'y a rien à se mettre sous la dent du côté de l’est. Il va falloir jouer à cache-cache !

Mat était intarissable sur l’aspect technique de ce navire. S'il n'avait été un engin de mort, il l'aurait trouvé formidable ! Mais pour l’heure, ce qui inquiétait Orfan, c'était qu'il pouvait surgir de l’eau à tout moment.

Orfan le plaça au centre de la table, à l’endroit exact où toutes les pointes se rejoignaient. À cet instant, un faisceau lumineux jaillit. Les quatre couleurs se mêlaient en ondes tournoyantes jusque faire un cylindre de lumière qui heurta le plafond de la grotte. Des éclats de pierre volèrent. Puis la lumière sembla redescendre et être absorbée par les épées. Quand il n’y eut plus d’autre lumière dans la pièce que, celle des flambeaux, chacun reprit son arme et Orfan récupéra son bracelet dont les quatre pierres irradiaient.

Après un moment de silence, Orfan l’interrogea:

— Pourquoi les quatre vertus ? D'où cela vient-il ?

— On raconte qu'Enor le Grand, le premier roi Arzhur, au Ve siècle de notre ère, était un homme rempli de sagesse. Lorsqu'il appela ses meilleurs guerriers à devenir chevaliers, il leur demanda de s’engager à respecter quatre vertus qui sont comme quatre piliers solides sur lesquels ils pourraient s'appuyer: justice, prudence, force et temperance. Depuis, tous les chevaliers doivent s'engager à respecter ces vertus. Peut-être que si notre pays s'est effondré, c'est que trop de chevaliers les ont oubliées. Toi, ne les oublie pas. Si tu t'appuies sur elles, tu ne vacilleras pas.

Fais-tu le serment d'être toujours fidèle à dieu, d'aimer ton pays, de ne jamais fuir devant les difficultés, de combattre le mal avec acharnement, de t'attacher au bien et d'être fidèle à ta parole ?

Orfan, tome 1 : Le secret du braceletGaëlle Tertraistous les livres sur Babelio.com