Gilles Modica

Nuages plus fous que le Fou, à jamais vierges.

Aux Jorasses, pas une vire digne de ce nom sur 1200 m, une escalade en creux, étranglée, sous des masses d'ombres et de rochers qui se délitent. Au Tournier, qui est un cap au soleil, on se serait assis à chaque relais, au large sur le granit, pour regarder le cirque d'Argentière et les nuages battus en neige qui s'élevaient avec nous.

Un type qui plante des golots n'est plus limité ou conditionné par le rocher. Plus de passage insurmontable, plus de paroi impossible, plus de problème qui ne trouve sa solution pour peu qu'on ait un tamponnoir et la résistance d'un travailleur du bâtiment.

Sans orgueil on ne serait que l'ombre de soi-même.

Profil de cascade dans sa partie centrale, les Droites, vues du refuge d'Argentière, de face donc, écrasent les Courtes (3856 m) et l'aiguille Verte (4121 m), ses voisins.

Tout progrès technique nous prive de quelque chose.

Jusqu'en 1820, aucun accident ne s'était produit sur les pentes du mont Blanc. Les caravanes sont rares et, quand les caravanes sont rares, la montagne est bonne fille! La catastrophe du Docteur Hamel s'imprima dans toutes les mémoires. Chamouni, la catholique fit remarquer qu'elle s'était produite un dimanche et à l'heure de la grand-messe. Genève, la protestante, n'en tira aucune conclusion.

Ce matin j'ai vibré comme au premier jour au spectacle inouï du lointain Monarque des Alpes nimbé des brillances de l'aube.
Puis, avec mon compagnon nous nous sommes immergés à la découverte d'un fantastique univers de pierre et de vide. Bonheur de gamins de suivre les traces des premiers, d'imaginer leur enthousiasme et d'admirer leur astuce. Moment unique du sommet, conscience du privilège... avant la redescente concentrée et stupéfaite au fil des sentes du vertige.
Journée parfaite où se conjuguent effort et contemplation, passion du monde d'en haut et du partage de m la cordée.
Chaque course peut être un parfum, une histoire à part entière et, à sa manière, une première.

Préface de Patrick Gabarroli

Le Moyen Age avait judicieusement placé la Prudence au rang des vertus cardinales avec Justice, Force et Tempérance.

Une voie comme la Brenva sembla longtemps impossible sans le métier des grands guides, sans leur connaissance de la neige et de la glace.

Passer d'une neige pourrie à une neige portante : c'est un plaisir qu'on expliquera plus facilement à un renard dont on a coupé la trace qu'à un type effondré entre la plage et le canapé de son hôtel cinq étoiles.

Il y a un dieu pour les alpinistes. Ce dieu les attend au sommet quand ils oublient leur montre et leur maître, le temps qui passe.

La majesté, la puissance et la gloire des Alpes édifient le silence du chalet et du savant en promenade, méditant debout sur le plancher des vaches.

L'hiver là-haut était un autre hiver, avec des soleils fabuleux pour qui venait des brouillards et des marais de la vallée du Rhône, un hiver de gloire et de lumière.

La Corse des montagnes vieillit et se dépeuple en hiver.

Il y a des orages secs en Corse, des orages purement électriques, sans tonnerre, aussi dangereux que des orages ordinaires.

La datte a de l'énergie et du goût.

En montagne, plus on marche, moins on mange.

La Corse, c'est le sel de la Méditerranée, et ce vent du large qui gagne brusquement les hauteurs de l'île en changeant de sens et de force.

La Corse : arbousiers, chênes verts, chênes-lièges, pins, bruyères arborescentes, cistes de Montpellier aux feuilles minces, et baveuses avec l'arrivée du printemps.