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4.5/5 (sur 2 notes)

Né(e) à : Brno en Moravie , le 21/12/1919
Mort(e) à : Colchester, Angleterre , le 05/08/1990
Biographie :

Ivan Blatný est un poète tchécoslovaque. Il est le fils de l'écrivain expressionniste Lev Blatný. Son premier recueil, Paní Jitřenka, est publié en 1940. Il devient membre du Groupe 42 en 1942, en compagnie du critique d'art Jindřich Chalupecký, des poètes Jiří Kolář, Josef Kainar, Jiřina Hauková, des peintres Kamil Lhoták, František Hudeček et František Gross. L'influence du Groupe 42 est notable dans les deux recueils Tento večer (1945) et Hledání přítomného času (1947).

Exilé en Angleterre, il fait plusieurs séjours en hospices et hôpitaux psychiatriques. Il reprend son activité poétique après 1970.

Source : Wikipédia
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Bibliographie de Ivan Blatny   (1)Voir plus

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Citations et extraits (12) Voir plus Ajouter une citation
Des années passeront

(à Adolf Kroupa)

Des années passeront avant que ne vienne visiter
Par la trouée des démolitions rue Údolni*
Par où arrive l’horizon
Ou par-dessus les toitures neuves
Comme les troupes d’oiseaux survolant les campagnes au-delà rue Špilberk**
Comme des ciseaux de jardinier cliquetant dans les maisons de verre
Du parc des expositions à l’abandon
Comme les débris luisants des jardins après la pluie
Comme la main
Conduisant parmi les tiges ces ciseaux humides de rosée

Des années passeront avant que Paris ne vienne me visiter
Comme aujourd’hui
Le chemin vers une petite ville endormie
Où l’épouse du maître d’école cueille le soir des roses
Vis-à-vis du cimetière
Les élèves saluent en s’inclinant
Et rose
Après rose tombe
Chaque nouvelle chute amortie par le bouquet qui
Lentement grandit et dans la petite ville la nuit vient.

8 août 1946

(pp. 55-57)

* Rue de Brno
** Ou Spielberg, forteresse qui domine la ville de Brno, employée comme prison autrichienne de 1740 à 1855
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Ivan Blatny
Nocturne

Dans la nuit, quand le grain s’illumine
Dans les greniers que le clair de lune dessinent
Chaque grain de blé brille pour lui
Les sorcières sont portées sur leurs balais jusqu’aux cieux.
L’idiot du village, qui pense qu’il ne mourra jamais
Se lève et repart en direction de Morton Morell.
Je le suis un bout de chemin. Je l’accompagne.
Nous nous retrouvons tous deux invités par l’été.

(adaptation personnelle)
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Les lieux

Les lieux que nous avons quittés continuent à vivre.
Le cheval file, l’enfant crie, la mère ouvre la porte :
« Ce n’est pas là, ce n’est pas là, alors je ne sais pas ce que c’est devenu. » Ils cherchent.
Ils cherchent quelque chose, s’agitent à travers le logis.
Ils cherchent les lieux que nous avons quittés, les lieux où nous étions autrefois.
Ils courent à la gare et pensent : la maison.
La maison est restée.
Où s’en vont-ils ?
À l’enterrement de la sœur. Pour toujours. Chez le fils.
La grand-mère reste. La grand-mère, ils ne l’emmènent pas.
Ils laissent chez eux siffler Mélusine.
L’horloge, il ne l’emmène pas.
L’horloge sonne dans une pièce vide.

(p. 53)
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Quatrième

à Frantiek Halas

Un abandon sans borne, épaisse poussière,
Reposait sur les poutres et sur les pierres,
Un abandon sans borne, le jour baissait.
Un abandon sans borne, épaisse poussière,
Reposait sur les poutres et sur les pierres,
Un abandon sans borne, le jour baissait.
De rares flocons d’une neige maussade
Cinglaient les visages serrés dans les tramways,
En ville à nouveau grondait la canonnade.

Un abandon sans borne, poussière, friable,
Reposait sur les livres et sur la table,
Un abandon sans borne, le jour baissait.
Un abandon sans borne, poussière, friable,
Reposait sur les livres et sur la table,
Un abandon sans borne, le jour baissait.
La porte d’un immeuble, comme si souvent,
Livrait passage à un promeneur nocturne, lent,
- Et la neige lui cinglait le dos, en capilotade.

Page ouverte où écrivaient la fatigue, la peur et la
guerre,
Se tapissant dans les poutres et dans les pierres,
Un abandon sans borne, le jour baissait.

Page ouverte où écrivaient la fatigue, la peur et la
guerre,
Se tapissant dans les poutres et dans les pierres,
Un abandon sans borne, le jour baissait.
Et les visages serrés vie contre vie
N’y faisaient plus qu’un, point infime,
Tandis qu’en ville grondait la canonnade.

11 mars 1945

(pp. 45-47)
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Tableau historique

Tandis que les enfants lâchaient leurs petits bateaux
Le vent soufflait si fort que des gouttes du jet d’eau
Éclaboussaient parfois
Les passants même à une bonne distance
Tandis que les enfants rattrapaient leurs petits bateaux
Monsieur Wang Shi Shieh
Remit la présidence de l’assemblée à monsieur Bidault
On entendait le bruit de l’eau crachée par les six sources
Entourées d’ornements feuillus
De la fontaine de Delacroix et on entendait
Un pan d’écorce tomber d’un platane
Dans le bassin parmi les plumes les brindilles et les saletés.

Monsieur Bidault dit : La conférence de paix est terminée.

(p. 59)
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Les mortels terrifiés cherchent en vain à exorciser cette apparition
en se signant, en ânonnant les sages sentences
des rites tranquillisants de la religion,
en vain touchent-ils
les mystérieuses racines protectrices
de la merdragore
sous la forme de divers petits
nains impuissants,
impuissants face à la majesté de la grande Terrestris.
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Cinquième

Où peux-tu bien être maintenant, maintenant à cet
instant même,
À cet instant précis, aujourd’hui, où je commence à
écrire.
C’est ce fameux dimanche vide,
Cette voix bien connue, traînante, qui chante,
Désespérément monotone, da capo, du capo, du capo,
Désespérément monotone, da capo, da capo, da capo,
Et encore et encore.
Une formule incantatoire
Vole de balcon en balcon : Merde *
Dans le profond silence répond gravement
Das deutsche Volkskonzert.

Où peux-tu bien être maintenant, maintenant à cet
instant même,
À l’instant précis où tu lis ce poème.
Était-ce après la guerre ? Était-ce l’automne ? Était-ce
le printemps ? Quelqu’un dehors m’accompagnait à la guitare
Et c’était moi qui jouais.
C’était ce fameux dimanche vide,
Bouquet, fauteuil, rubans et ainsi de suite.
Chez vous il n’y avait personne elle était partie avec
son amant.
Un monsieur vêtu de noir traînait une couronne
funéraire.
C’était ce fameux dimanche vide.

Souviens-toi, Albertine, de ces jours ensuite,
Une piéride blanche gisait par terre,
On creusait des tranchées, des bombes tombaient sur
Prague,
Une piéride blanche, transie de froid.
Vous auriez dû la tuer, a dit Françoise,
Elle pondra des œufs, bonjour les dégâts !
Souviens-toi, Albertine, de ces jours !
Das deutsche Volkskonzert traînait quelque part une
couronne funéraire.
Cette voix bien connue, traînante, qui chante.
Désespérément monotone, da capo, da capo, da capo,
Désespérément monotone, da capo, da capo, da capo
Et encore et encore.

(Das deutsche Volkskonzert : Le concert populaire allemand.
1945

(pp. 49-51)
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Menue(a)

Si une femme m’invitait à « monter » avec elle
j’aurais ensuite une journée parfaitement heureuse
je n’ai pas non plus autant de cigarettes que demain
je n’ai pas non plus autant de cigarettes que de mains

Perhaps it is macaroni cheese
I’ll go for dinner
there is perhaps the drug called happiness (b)

a. Menu.

b. Peut-être sera-ce du fromage eux macaronis/j’irai dîner/il y a
peut-être un médicament qui s’appelle le bonheur.

(p. 155)
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Quand le Passant se réveilla le matin
son cauchemar matinal
se leva avec lui
et mit en marche son petit moteur,
son petit ventilateur
à propulser en plein jour les reliefs de la nuit passée, ce qu'on appelle les Nachtreste,
avec un bruit comme de conduites de bière piétinées,
un cauchemar s'envola du réverbère,
de la lanterne accrochée entre les pointes de la grille,
un autre se brossait les dents cariées de la balustrade.
[...]

(p. 97)
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Troisième

J’attends ma nounou -
c’est la mort.
…………………….
Mais les gars prennent la route.

(Langston Hughes)

J’attends ma nounou -
C’est la mort.
Elle traîne encore quelque part dans la rue,
Elle traîne devant la maison.
Et les choses sur la table sont déjà pleines d’elle,
Et les choses sur la table sont déjà pleines d’elle :
Papiers, livres, cruche.
J’attends ma nounou -
C’est la mort.
Elle s’en vient à pas de loup, se dépose comme la
poussière,
Invisible encore, mais présente.
Je l’entends battre la semelle en bas dans les décombres
Restés là depuis le premier raid.
Le dimanche matin. Les canons règlent le tir.
Et le froid siffle à travers les branches encore nues.
Un accordéon annonce le printemps,
Un accordéon annonce le printemps
À travers les couloirs, à travers les cours.
Une girouette saccade à l’arrière sur le ciel.

J’attends ma nounou -
C’est la mort.
Je lis dans les choses sur la table
Papiers, livres… Sommeil.
Appelé par les regrets. (Albertine, Toi.)
Mais l’Europe prend la route.

4 mars 1945

(pp. 41-43)
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