Kit Frick discusses her YA thriller I KILLED ZOE SPANOS,
Je me rends compte que c'est exactement comme ça que je voyais le monde de Matthias. Un oignon, un nombre infini de couches. On sait qu'on aura les yeux pleins de larmes, mais on serre les dents et on continue à l'éplucher, coûte que coûte.
- Tu nages en plein délire, reprend Kaylee. Tu t'en rends compte, au moins ?
Ce n'est pas la première fois qu'Anna s'interroge sur sa santé mentale, son "bien-être psychique", comme ils disent ici. La nuit, allongée sur sa couchette, elle ferme les yeux et envoie un projecteur imaginaire à l'intérieur de sa tête, à la recherche d'un indice, d'une zone déficiente. Mais son esprit reste impénétrable.
Celui qui a dit que le temps guérit toutes les blessures ne savait pas de quoi il parlait. Le temps les rend supportables, mais il ne répare rien.
C'est clair, à présent. J'ai obtenu ce boulot grâce à la jeune fille disparue. Ca n'explique pas tout ce que j'ai ressenti : la bouffée de nostalgie à la plage, la drôle d'impression chez le glacier, le vertige en regardant le balcon de Windermere. Mais c'est un début. Des éléments rationnels, qui tissent un lien entre le destin de Zoé et le mien.
- C'est gentil de lui apporter des cookies. Elle finira par comprendre que l'amitié est plus important que l'opinion de certaines filles qui racontent n'importe quoi.
- Et si elle ne le comprend pas ?
- Alors, tant pis pour elle. Tu mérites mieux. Dans la vie, il faut s'entourer de gens qui nous soutiennent.
Je sais que je devrais penser à la chance que j'ai d'avoir une maison chauffée où j'irai tout à l'heure retrouver ma famille et les restes d'un bon repas. Je sais que je devrais remercier une puissance supérieure - Dieu, Jeanne d'Arc ou Frida Kahlo- de m'avoir accordé tout cela, mais je n'y arrive pas.
J'ai un secret. Je ne dis pas ça par coquetterie, pour attirer l'attention. Ce n'est pas un vi'ain petit truc de gosse, anodin. Mon secret est toxique, corrosif ; il me brûle de l'intérieur.
J'ai tué Zoé.
Ret n'était vraiment heureuse que quand elle était en mouvement. Et moi, j'étais heureuse quand j'étais avec Ret.
Sans elle, ça ne fonctionnait pas entre nous. Nous étions son système solaire, sa création.
Est-elle cruelle ou sincère ? Avec Ret, ça a toujours été impossible à dire.