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Citations de Léon Roger-Milès (60)


Et pourquoi Millet, qui vint travailler à Paris, ne se laissa-t-il pas tenter par le populaire des villes, comme il s'attendrit au populaire des campagnes? N'y avait-il donc de durs labeurs, de misères que pour le paysan? L'ouvrier parisien, dont le peintre, tout jeune alors, connaissait la vie, n'était-il pas digne d'éveiller sa sensibilité? L'heure où il se trouvait à Paris était pourtant bien faite pour se révéler à lui avec une réelle grandeur et une émouvante poésie : c'était vers la fin du règne de Louis-Philippe, à l'instant des fermentations sociales ; on répétait dans l'atelier, et quelquefois dans la rue, ce que des voix éloquentes avaient dit ou écrit. Toutes les utopies socialistes et communistes avaient chance de ne pas retentir sans éveiller un écho flatteur, autant que vain. Plus tard, ce furent les journées tragiques de Février, avec des souffrances populaires dignes de pitié. Millet pourtant n'eut pas à ce spectacle, à ce contact, cette émotion que j'appellerai l'émotion esthétique. Et cela pour une raison qui apparaît nettement à qui le comprend : l'ouvrier de Paris était un révolté ; l'ouvrier de la terre, le paysan est un résigné, un instinctif pour qui le travail de la terre est une sorte de fonction religieuse : de là cette gravité, cette solennité qui est une des caractères du paysan, et qui est sa poésie.

Aussi, pour Millet, le bonheur doit-il être tout entier contenu dans le calme et dans l'apaisement, dans celte chose essentiellement saine de se tenir pour satisfait d'un minimum de bien-être pour un maximum d'effort : c'est le principe des consciences simples, des consciences fortes, par conséquent. Et lorsque le génie de Millet nous semble éperdu de mélancolie, cette mélancolie n'est qu'une fraternelle compassion, qu'une pitié tendrement humaine. Or, la pitié, a dit éloquemment M. Ch. Bigot, a la pitié, c'est encore ce qu'il y a de plus noble dans l'âme humaine ; elle est la forme la plus haute de la sympathie, le plus beau nom de la charité, le meilleur auxiliaire, ici-bas, de la justice ! »
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LA NEIGE EST BELLE

La neige est belle. pâle, o froide, ô calme vierge
Salut! Ton char de glace est traîné par des ours,
Et les deux assombris tendent sur ton parcours
Un dais de satin jaune et gris couleur de cierge.

Salut! dans ton manteau- doublé de blanche serge,
Dans ton jupon flottant de ouate et de velours
Oui s'étale à grands plis immaculés et lourds,
Le monde a disparu. Rien de vivant n'émerge.

Contours enveloppés, tapages assoupis,
Tout s'efface et se tait sous cet épais tapis.
Il neige, c'est la neige endormeuse, la neige

Silencieuse, c'est la neige dans la nuit.
Tombe, couvre la vie atroce et sacrilège,
O lis mystérieux qui t'effeuilles sans bruit!
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Désormais, Rosa a commencé le cycle d'études et de compositions auquel la mort seule mettra un point final : elle nous racontera, au hasard de ses voyages, où elle sut se documenter solidement, la vie des bêtes dans la vie rustique ; elle n'est pas seulement un naturaliste qui fait le portrait d'un animal et note, pour l'utilité des classifications, les caractères apparents de cet animal ; son effort a plus de pénétration : elle interprète l'animal dans la nature où il évolue, et dans le rôle qui lui est échu ; et sa façon à elle de chanter un cantique à la création c'est de peindre avec passion les êtres qui se meuvent dans un paysage, selon l'ordre chromatique où le caprice des heures les lui montre, et ce cantique, pour réel que soit son objet, n'en a pas moins sa poésie et son émotion.
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Si l'interprétation de l'eau doit nous donner une sensation de profondeur, que doit-on exiger de l'interprétation du ciel ?
— Une sensation d'infini.
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Chez les Primitifs, la figure de la Vierge est bien la figure d'une mère, jeune, au cœur débordant de tendresse. Ils ont eu le sens de l'humanité, et c'est pour cela que les symboles sont par eux magnifiquement exprimés.
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Pourquoi donc Millet a-t-il paru à son temps gémir sur le sort du paysan ? Pourquoi a-t-on pu dire que le cri de la terre était, chez lui, obstinément un cri de douleur ? Parce que Millet, par son origine, par son éducation, par son inspiration n'était pas préparé aux grosses gaîtés rustiques ; parce qu'il y avait en son âme, avec un sens profond de la justice, une innéité de patriarche, une ardeur d'apôtre, et aussi une naïveté d'enfant.
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Les collectionneurs d'ailleurs peuvent se diviser en deux catégories : ceux qui créent, à côté de leur vie toute moderne, un musée rétrospectif où ils accumulent les choses d'autrefois, sans but d'usage précis; et ceux qui s'entourent de ces choses pour en ressusciter l'usage, pour y vivre dans leur emploi immédiat, rendant ainsi à la curiosité ce qu'elle semblait avoir perdu l'utilité pratique.
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J'ai toujours peur, quand je vois accuser un artiste d'immoralité, qu'on ne se plaise à découvrir dans son œuvre ce que lui-même n'a point voulu y mettre ; et quand on songe que nul artiste n'affirma, comme Houdon, son respect de l'antiquité et la compréhension qu'il avait de l'humanité traduire par l'art antique, on est convaincu qu'il y eut dans des difficultés qu'on souleva à propos de sa Diane, un prétexte, et rien qu'un prétexte, à combattre l'homme dans son œuvre et à humilier son génie, alors en plein rayonnement.
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Lors des débuts de Corot, on était en plein règne du paysage historique, ce genre que Valenciennes, paysagiste célèbre, très pénétré de Poussin et de Claude Lorrain, avait défendu, le pinceau et la plume à la main. Dans son ouvrage qui ne manque pas d'autorité : Traité élémentaire de perspective pratique, Valenciennes, élève de Doyen, avait félicité l'État d'avoir institué un prix de Rome, de paysage historique, prétendant que ce genre possédait toutes les vertus, et l'Italie tout le pittoresque que peut rêver un artiste.
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Le style Pompadour, qui exagéra l'horreur du style Louis XV pour la ligne droite, et ne se servit de la rocaille que pour multiplier sa fièvre du chantourné, ne fut, il faut le déclarer, qu'une mode raisonnée, un marivaudage de bon sens avec le mauvais goût, une neurasthénie qui força la sensibilité à trouver de l'agrément là où, en d'autres temps, elle se fût déclarée offensée ; et des hommes d'humeur calme eurent le courage, au temps de la pleine vogue des folies rocailleuses, de dire le danger qu'il y avait à s'y abandonner.
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Je crois que tout individu essentiellement né pour l'art devient artiste, en dépit de toutes les difficultés, de toutes les embûches de l'existence, et cela sans que l'école puisse le former à autre chose qu'à la grammaire, et un peu à la syntaxe manuelle de son art. Il n'en va pas de même du goût à percevoir utilement des sensations esthétiques ; ce goût a besoin, chez ceux qui ne seront jamais des créateurs, d'être développé, encouragé ; il faut que, de force, il pénètre partout et à tout moment ; qu'il soit un aide constant et souriant à la parure matérielle de la vie, afin de devenir l'agent le plus puissant et de la beauté morale et de l'harmonie sociale.
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Ton marteau d'ivoire à manche d'ébène, n'est pas, ô commissaire-priseur ! un instrument de démolition ; c'est lui, au contraire, qui ressuscite les oubliés.
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Quand Rubens exécutait l'admirable portrait nu d'Hélène Fourment, il le peignait avec amour; quand il se retrouvait avec sa femme dans l'intimité conjugale, il devait l'aimer avec art.
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Quel est l'auteur, écrivain, musicien, poète, artiste peintre ou sculpteur qui ne souhaite pas ardemment d'être remarqué et ne tente pas tous les moyens qu'il a entre les mains pour y parvenir? Cela est si vrai, que si l'auteur ne sait pas doubler ce petit promontoire de la renommée, la foule peu indulgente le traite de médiocre. — Cependant, nous répond-on, Richepin a écrit lui-même en tête de sa Chanson des Gueux cette phrase caractéristique : Ce livre est non seulement un mauvais livre, niais encore une mauvaise action. On était donc fondé de lui en vouloir de son livre.
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Désormais, et jusqu'en 1855, Rosa Bonheur parut à tous les Salons ; mais il est à noter de suite que le succès ne se fit pas aussi rapide qu'on pourrait le croire, à ne considérer que l'énorme vogue qui s'attacha, à partir de 1853, à tout ce qui porte sa signature.
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Voilà bien la genèse du talent, du génie de Corot. Il n'a pas fait que voir la nature, il l'a sentie, il l'a aimée, et, bien qu'on puisse dans son oeuvre immense marquer deux manières à son pinceau, ces deux manières sont bien issues d'une même vision, on peut même dire d'un même doigté. Ce qui les a déterminées, c'est la force de l'influence ambiante, cette influence qui, commencée par Michallon, Bertin et Aligny, aura besoin de près de vingt ans pour s'effacer complètement.
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Aujourd'hui, quiconque possède chez soi un Rembrandt authentique, vrai, muni de son état civil, possède du même coup un patrimoine de gloire : celui-là sent autour de lui le respect; on le considère comme le gardien, comme le dépositaire de quelque chose de très auguste ; et, lorsqu'ils sont admis à contempler ce dépôt sacré, certains croient affirmer plus complètement leur dévotion au génie, en se refusant à toute critique et en multipliant les marques d'une admiration aveugle. Il est juste d'ajouter que pour beaucoup de ces admirateurs le prix atteint par le tableau, bien plus que la valeur d'art de l'oeuvre, est de nature à les impressionner.
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L'oeuvre géniale est celle qui nous arrête et nous émeut spontanément, au point que les mots, qui nous viennent aux lèvres, ne traduiront jamais complètement la sensation vivement ressentie en face d'elle.
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Ce qui prouve que tout, dans les arts plastiques, doit se ramener à une harmonie, c'est que le langage, pour parler de peinture, emprunte à la musique ses termes de comparaison.
Par contre, on se plaît à juger la musique avec le vocabulaire spécial de la couleur.
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Le nu n'est indécent que selon le degré de moralité de celui qui le regarde. C'est le geste seul, c'est-à-dire la manifestation active, qui peut choquer la pudeur. Et encore ! Ce sont les regards cyniques qui en ont la compréhension la plus outrée.
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