Haikitos est le nouveau spectacle de Luce Buchheit et Pascale fauveau. Ce concert de poèmes pour voix et flûte s'appuie sur les poèmes de Luce Buchheit extraits de "Au berceau de ses rêves" , paru chez Elea Bizi. La flûtiste, comédienne et chanteuse Pascale Fauveau de la compagnie Sed Etiam répond, illustre et entoure les poèmes de sa flûte et de sa voix. 2017
Tamarii no Tahiti : enfants de Tahiti. Miri, hina, Alice, Moé, Maui et Roimata sont des parts entières de l'île merveilleuse. Tahiti, broyeyse d'âmes dont la beauté n'en finit pas pourtant de nourrir l'imaginaire d'une langueur sensuelle infinie
La peinture des murs est fraîche, mais votre histoire a vieilli. Tu te sens prisonnière. Le dimanche, après l'incontournable quiche lorraine, et le poulet rôti, le Fernand embarque Greg sur ses épaules jusqu'au stade de football. Ils reviennent à la tombée de la nuit. Leur monde d'hommes, libre, actif, est bien distinct du nôtre, fait d'attentes interminables et d'enfermement. Lisette et moi, les regardons partir. Nous sommes résignées. Nous échangeons un regard. Nous savons que nous devrons passer cette épreuve du dimanche après-midi, avec, comme compagnes, ta colère et ta frustration. [...] Après son départ, tes yeux flambent de colère. Tu te précipites sur des aiguilles à tricoter, tu en prends une paire pour toi, tu en distribues une paire à Lisette, une autre paire à moi. Nous devons confectionner nos slips en laine beige pour l'hiver à venir. Il sera long, comme ces dimanches interminables où ni le soleil, ni la tendresse n'arrivent jusqu'à nous. C'est un désert de fin de monde où nous cherchons en vain une place, ou au moins, le droit d'exister. Nous sommes emprisonnés dans la cuisine verte. Le ciel est en larmes. Lisette et moi savons qu'il ne nous sera toléré aucune faute, aucune demande. Nous ne faisons pas de bruit.
Je chante pour apprivoiser ma solitude, pour éloigner mes fantômes, je chante pour ne plus entendre le silence des absents, je chante pour le ciel bleu, je chante pour un sourire offert.
Parfois, un piéton me regarde, qui ne chante pas.
Je chante alors pour lui, qui ne sait pas toujours que la musique est un cadeau céleste.
Tu étais née le neuf novembre, deux jours avant l'armistice d'une horrible guerre, en l'absence de ton père, terré dans les tranchées. Tu as traversé ta vie comme on fuit un champ de bataille. Tu es repartie, aussi anonyme et orpheline qu'à ton arrivée, le neuf février, dans le froid de la solitude et de l'indifférence, un peu avant midi. À huit cent trente kilomètres de toi, j'ai su avec certitude. Cette douleur dans mon coeur ne pouvait être que toi. La chatte a su aussi. Elle a bondi en haut de la bibliothèque vitrée.
Je suis sûre que parler d'une vie, c'est parler d'une multitude de vies, de multitudes de voix. Seuls changent les décors et les dates.
Chaque jour. Avec ou sans nous, le monde continue d'avancer. Il doit advenir. Il doit créer.
Les cadeaux de la vie ne se dévoilent pas aux cœurs épuisés de déceptions ou d'envie.
Le silence est infaillible, sa lumière ne laisse rien dans l'ombre.
Les plus grands désarrois se nichent dans les détails.
Il fait gris, il fait froid, il fait chagrin.