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Citations de Magali Giovannangeli (33)


Le système publicitaire a pris une place considérable dans l’industrie de l’information et du divertissement. Il porte la marchandisation du désir humain à une limite où il cesse de « faire sens », où il devient proprement insensé. Si les informations télévisées n’ont pas pour objectif premier de me donner les moyens d’exercer ma citoyenneté en connaissance de cause, mais de mettre mon cerveau en état de disponibilité pour les annonces publicitaires qui suivent ou qui précèdent, si la courbe de l’action Bouygues devient le moteur du sens, alors le langage perd sa fiabilité. Il s’effondre. On ne peut plus se parler. On ne peut plus se croire. L’autonomie et la liberté deviennent des leurres. Réduit à ses fonctions de séduction, le langage cesse d’être la place publique où nous élaborons le sens de nos vies et de notre histoire.
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L’air du temps a fait que nos esprits sont spontanément conduits à penser le financement des transports publics sous la forme d’un service marchand : j’ai besoin de me déplacer, j’en paie le prix. Malgré la sorte d’évidence qu’elle semble porter, cette réaction réduit et déforme la réalité. Elle part de l’idée que le déplacement a pour bénéficiaire, pour seul bénéficiaire, la personne transportée. C’est faux.
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L’émancipation humaine n’est pas une destination, c’est un mouvement. […] Quand un humain parvient à la fin de son âge, s’il dit : « J’ai eu une belle vie », il ne parle pas de l’aboutissement chronologique, qui est la mort. Il ne dit pas non plus qu’il a sans cesse nagé dans le bonheur. Ça n’existe pas. Il parle du mouvement de sa vie, du sens de sa vie, difficultés comprises : « Je n’ai pas dormi, j’ai vécu ! »
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« Avant de m’installer à Aubagne, j’habitais Bezons, dans le Val-d’Oise. Je me déplaçais en voiture, souvent tôt le matin. Chaque jour, je voyais des files de gens se diriger, parfois d’assez loin, vers le pont qui traverse la Seine en direction de Paris, le franchir à pied et attendre le bus de l’autre côté. Pourquoi ne le prenaient-ils pas à Bezons même ? Je me suis d’abord posé la question sans trouver la réponse. Et puis j’ai compris : ils marchaient pour économiser une zone. Ces travailleurs de l’aube se coltinant parfois deux à trois kilomètres à pied, doublés par leur bus à moitié vide, c’est resté dans mon esprit comme un symbole des absurdités d’une certaine gestion du service public. » Ce témoignage d’un Aubagnais récent dit tout. Qu’aurait perdu la RATP en embarquant ces hommes et ces femmes près de chez eux ? Rien ! Les fraudeurs n’ont pas ces scrupules ambulatoires ! Quel manque à gagner pour l’économie ? Aucun, au contraire, la fatigue supplémentaire n’arrange pas les employeurs. Seul « avantage », le dressage aux règles du marché : on n’a rien sans rien !
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Quotidiennement, à cent occasions, notre expérience intime nous murmure une évidence toute simple qui nous réconforte : « sans prix » n’est pas « sans valeur ». Le temps-marchandise que nous vendons à notre employeur sur le marché du travail est évalué en monnaie. Cela lui confère-t-il une importance plus grande que le temps gratuit consacré à l’amour, à la culture, à la politique, au plaisir ?
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Si les transports sont gratuits, n’est-ce pas la porte ouverte à des usages socialement futiles ? Gratuit pour aller au travail, d’accord, si c’est le patron qui paye. Gratuit pour se rendre à l’hôpital, à l’école, pour aller voter ou rejoindre une manifestation, à la rigueur. Mais vous allez voir qu’ils profiteront de la gratuité pour baguenauder, musarder, aller d’un ami à l’autre, pire peut-être.
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Beaucoup de souffrance au travail naît de là : contraindre au non-sens un être qui vit par le sens. S’acheter le monopole du sens est une réalité rendue possible par les évolutions contemporaines de la marchandisation, par un recul de la culture de gratuité. Pour les victimes de cette vente forcée, c’est un pénible non-sens. On se suicide beaucoup au travail.
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Encore une fois, inutile de s’emballer. Aucune mesure politique, si novatrice, si efficace soit-elle, si contraire à l’ordre injuste n’ouvre les portes du paradis terrestre. L’objectif d’une politique d’émancipation n’est pas le bonheur, mais la liberté. Or la liberté renvoie les perspectives du bonheur à la responsabilité des individus et des groupes, plongés dans le débat sans fin entre le hasard et la volonté. Une société plus libre, plus juste, plus égale, plus prospère ouvre la possibilité d’une vie intense, mais n’y oblige pas. Intense dans les joies. Intense dans les tristesses.
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Il est devenu courant d’employer le mot « vendre » à tout propos, vendre ou se vendre. Une jeune fille en recherche d’emploi peut sans rougir affirmer qu’elle souhaite « apprendre à bien se vendre ». A un ami qui vous explique un projet, on répondra sans y penser : « C’est une bonne idée et tu la vends bien. » Les agences de communication en vogue se pressent auprès des élus pour les aider à « vendre » leur politique et leur image. Ces tics de langage, nés dans les années 1980, étaient impensables auparavant. Ils seraient apparus comme la marque d’une abjecte vulgarité. Les temps ont changé.
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Aucune réduction de tarif, aucune multiplication des gratuités conditionnées à la situation sociale des ”bénéficiaires” ne sont jamais parvenues à provoquer un engouement comparable à la gratuité claire et nette, celle qui met chaque usager à égalité dans la jouissance de bouger
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On se souvient des réserves de l’administration communautaire quand lui est demandé par les élus de réfléchir à la gratuité. La réalité a par la suite balayé les réticences et les fonctionnaires concernés éprouvent aujourd’hui de la fierté pour la gratuité qu’ils ont été amenés à mettre en œuvre. Néanmoins, ces blocages symptomatiques retiennent l’attention. Est-il déraisonnable d’y lire comme un instinct de sauvegarde de la part des structures de pouvoir, comme une suspicion spontanée vis-à-vis d’une réforme mettant en cause des siècles de culture administrative et rendant caduques, dans le secteur du transport public, tant de compétences professionnelles liées au « gouvernement des hommes » ?
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Le marché s’est installé dans les faits et dans les têtes comme une mécanique universelle, seule efficace seule légitime, seule en mesure de conférer de la « valeur » aux biens et aux services produits par l’activité humaine : un infranchissable horizon. Si c’est gratuit, c’est donc sans valeur.
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L’institution du salariat permet d’acheter l’activité d’un être humain et de l’acheter sous la forme encore malléable d’un potentiel d’activité, ce que Marx appelle la force de travail. Concrètement, cette transaction se traduit par du temps humain placé sous l’autorité d’un autre et utilisé à son profit. C’est ce que la très grande majorité d’entre nous acceptons après nous être présentés sur le marché du travail et avoir obtenu un contrat d’embauche. Très vite, la nécessité vitale par laquelle le grand nombre est contraint de vendre son temps et son activité produit des tensions analogues à celles apparues entre l’esclave et le maître, entre le sentiment de gratuité qui rôde autour de la personne humaine et l’efficacité économique de sa marchandisation. Prenant parti dans cette tension, les anarchistes et les premiers communistes lancent un mot d’ordre radical : abolition du salariat. Ils entendent par là que l’être humain n’est pas fait pour vendre son temps, ni pour le placer sous une autorité extérieure, qu’il est fait pour agir et s’associer librement.
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La tension de gratuité sait se fixer avec modestie des objectifs réalisables, mettre l’horizon à portée de main. Mais elle est au cœur de ce qui constitue le « lourd » du mouvement d’émancipation des deux derniers siècles dans l’aire occidentale : la désaliénation de l’activité productive, avec sa grande victoire, l’abolition de l’esclavage, et sa grande espérance, l’abolition du salariat.
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Parmi ceux qui déplorent les dégâts éthiques, culturels, sociaux, politiques du règne de l’argent, un grand nombre pensent qu’on n’y peut rien, ou pas grand-chose. La doctrine du libéralisme affirme que la conduite de l’économie par le capitalisme et le marché est, avec le modèle occidental, la consommation de masse ou l’Etat représentatif, l’ultime aboutissement du mouvement d’émancipation humaine. Toute la liberté possible serait atteinte avec l’accomplissement de ce programme. Les inévitables inconvénients du système seraient à mettre au compte de l’humaine finitude et tenter de dépasser cette « fin de l’histoire » porterait la menace de malheurs sans nom.
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Avec 15 000 ou 16 000 habitants de plus chaque année, c’est 1000 voitures de plus tous les mois sur la rocade toulousaine. Soit on met l’argent sur des équipements de transports publics et on essaye de maintenir un équilibre entre des modes et des cadres de vie qui restent vivables, soit c’est le doublement de la rocade, donc c’est encore des voitures, des coupures urbaines, un étalement de l’urbanisation… Un vrai choix de société.
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Les indications dont on dispose permettent d’estimer que la gratuité a diminué la pression automobile d’environ 10%,, une baisse du trafic qui n’est pas vraiment perceptible par les automobilistes, mais qui est significative du point de vue de l’environnement. Les objectifs de Kyoto, c’est -20% d’émissions de gaz à effet de serre. Nous serions à la moitié du but fixé pour ce qui concerne les déplacements, et donc au quart de l’ensemble des émissions.
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Souvent, les élus sont tentés de présenter leur bilan ou leur projet sous la forme d’un catalogue de « réalisations » […]. C’est visible. C’est quantifiable. Promesses tenues ! En communiquant par priorité sur ces réalisations matérielles, les élus « vendent » non leur engagement politique, qui on l’espère n’est pas à vendre, mais leur capacité gestionnaire. L’action politique est alors configurée de telle sorte que l’élu se présente comme un fournisseur de mesures politiques et que l’électeur se vit comme son client. Si le client n’est pas content, il change de boutique. Consommateur de mesures politiques ou citoyen actif de la vie publique ?
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Gratuit, donc sans valeur ? Cette scie du bon sens libéral a sa traduction dans les lois, dans les traités européens, dans les injonctions de l’organisation mondiale du commerce, de la Banque mondiale ou du FMI : rien ne doit échapper aux lois du marché, seules habilitées à légitimer la valeur des êtres, des choses et de l’activité.
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La démarche entreprise dans le pays d’Aubagne et de l’Etoile n’est pas une recette, mais un ferment. Elle ne dit pas : faites comme nous ! Elle dit : nous avons mis en marche le moteur à construire des politiques alternatives et c’est dans le secteur des transports qu’ici, concrètement, nous avons trouvé le carburant nécessaire pour y parvenir –moyens matériels, humains, idéologiques. Même s’il est toujours bon d’examiner ce qui fonctionne, le copier-coller n’est jamais la solution. Cette invitation au mouvement peut inciter d’autres à imaginer cent diverses issues à la dureté des rapports marchands.
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