« Si on ne poudrait pas la vie avec de l’amour, le plus d’amour possible, mignonne, comme on met du sucre dans les drogues pour les enfants, personne ne voudrait la prendre telle qu’elle est. »
"Jadis" de Maupassant, 1880 cité dans Bernard M. "Histoire du consentement féminin" 2021 Arkhé, Paris: France
Alors que les plaintes pour promesses de mariage non tenu sont courantes au tribunal ecclésiastique de l’officialité de Paris au XVIe et XVIIe siècles elles se raréfient dès la fin de la première moitié du XVIIIe siècle. Ce ralentissement est dû à une plus grande sévérité judiciaire, remettant davantage en cause la parole féminine. Au début de l’Ancien Régime, une jeune fille séduite puis abandonnée dénonçant la tromperie dont elle avait été victime, était écoutée parfois soutenue, voire vengée. La justice condamne le séducteur à se marier ou a lui verser une pension, d’autant plus si la jeune fille est enceinte.
… il est assez facile de sauvegarder la virginité d’une jeune fille jusqu’à ses 12 ans [âge légal du mariage pour les filles au Moyen-âge], il est nettement plus compliqué de s’assurer de sa pureté, passé ses 28 ans [âge moyen du mariage]. Les jeunes filles du XVIIIe siècle deviennent plus belle aux environs de leurs 16 ans, elles ont donc près de 10 ans d’abstinence avant de connaître la sexualité conjugale tolérée par la société et l’église. Avant cela, l’honneur et la vertu de la jeune fille reposent encore et toujours sur la sauvegarde de l’hymen, cette « fleur fragile » qui se fane si facilement.
L’analyse du crime de viol est central, il est le parfait négatif d’une relation consentie, et donne ses grandes limites au concept de consentement.
Au XVIe siècle, les jeunes filles se marient aux alentours de 20 ou de 22 ans, au XVIIIe siècle, cet âge est plus tardif : autour de 25–26 ans pour les filles et de 27–28 ans pour les garçons. À la veille de la révolution, ce n’est pas avant leurs 28 ans que les filles deviennent femmes, et les garçons, pour leur part, attendent généralement leurs 30 ans avant de devenir chef de famille.
Au XVIIIe siècle, même si le crime de viol se distingue désormais du rapt et de l'adultère, il n'est pas compris de la même façon qu'il l'est actuellement. Est violée une femme qui crie pendant tout l'acte sexuel, résiste, est blessée par son agresseur et a perdu son honneur - sa virginité ou sa chasteté conjugale. En creux, pour que la justice écoute une victime de viol, il faut qu'elle soit vertueuse et/ou issue d'une condition sociale aisée. Les preuves attendues dans un procès pour viol n'ont donc, en substance, pas vraiment évolué de l'époque médiévale jusqu'à la fin du XXe siècle.
Au XVIIIe siècle […] est violée une femme qui crie pendant tout l’acte sexuel, résiste, est blessé par son agresseur, et a perdu son honneur - sa virginité ou sa chasteté conjugale.
[Au Moyen-âge] Les victime dans les procès pour viol ont généralement entre 8 et 12 ans, leur jeune âge permet à leurs parents de penser que leur consentement ne sera pas remis en cause - l’hymen étant le premier élément regardé lors de l’examen médical qui doit avoir lieu moins de 24 heures après le crime. Les victimes plus âgées préfèrent généralement garder le silence ou régler l’affaire en privé, car les chances de voir le violeur condamné sont minces.
[Au Moyen-âge] Pour prouver le viol, la victime doit faire preuve d’une résistance sans faille, mais aussi manifester son désaccord par des cris et témoigner d’un honneur intact avant le crime. Face à elle, l’accusé remet en cause l’absence de son consentement et cherche à prouver que le violent était en réalité un acte sexuel consenti, lorsqu’il ne nie pas simplement les accusations proférées à son encontre.
Au XVIIIe siècle, le badinage et la séduction, bien que contrôlés, commencent à être tolérés pour permettre aux jeunes jeunes se rapprocher.