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Critiques de Martin Morazzo (14)
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She Could Fly, tome 3 : Fight or Flight

Appréhender la réalité

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Ce tome fait suite à She Could Fly Volume 2: The Lost Pilot (2019) qu'il faut avoir lu avant. Celui-comprend les épisodes 1 à 5 constituant la saison 3, initialement parus en 2021, écrits par Christopher Cantwell, dessinés et encrés par Martín Morazzo, avec une mise en couleurs réalisée par Miroslav Mrva. Il comprend une postface d'une page, rédigée par Cantwell expliquant que son héroïne ne sait pas où elle va que ce soit en termes de sens, de santé ou d'amour. Cantwell est le cocréateur de la série TV Halt And Catch Fire.



Au recto et au verso d'une page blanche, avec une tâche de rond de café, Luna Brewster a établi une liste de gens disposant de la capacité de voler. Il y a en a plus de soixante-dix, allant de Superman et des frères Wright, à peut-être Jésus (mais ce n'est pas sûr) et tous les pilotes de la première guerre mondiale et des suivantes, en passant par Jean-François Pilâtre de Rosier, Mary Poppins, Ultraman, John Alcock et Arthur Brown, Buzz Aldrin, Shazam, Howard Hughes, Tom Cruise dans Top Gun, Mario avec une cape et bien d'autres. Au temps présent, des images défilent dans la tête de Luna Brewster qui se tient immobile sur une passerelle piétons : une palette de peinture, une girafe sur le terrain d'un match de baseball, c'est son animal favori, une girafe, un éléphant et un zèbre se tenant sur une tourte. Son flux de pensée s'interrompt et elle se demande ce qu'elle était en train de faire. Elle se tient immobile, debout dans la grande pièce unique de son appartement, avec encore son bonnet de laine sur la tête. Ou alors elle est derrière le comptoir de l'établissement Good's Popcorn où elle travaille en tant qu'employée servant du popcorn dans des cornets, aux clients. C'est là qu'elle travaille. Et maintenant elle a son appartement. Parois elle se trompe d'arrêt de bus pour descendre.



Luna Brewster sait qu'elle souffre d'un syndrome dysexécutif qui a été causé par une intervention chirurgicale sur son cerveau. Ses parents avaient décidé de cette opération de chirurgie du cerveau, à cause de la gravité de ses troubles obsessionnels compulsifs. Elle n'avait que seize ans. Maintenant elle a treize ans, non dix-huit ans, dix-huit ans. Ce n'est pas si grave que ça en a l'air, malgré la cicatrice sur la partie gauche de son crâne, là où les cheveux ne repoussent pas. Mais elle n'aurait pas dû avoir une opération du cerveau : c'était plus de dérangement que ça n'en valait la peine. Du coup elle ne parle plus à ses parents même s'ils l'appellent très régulièrement, car elle est en colère contre eux du fait de l'opération. Elle a dix-huit ans : à son âge, les autres vont à la fac, mais elle, elle travaille à Good's Popcorn. Mais elle est plutôt heureuse de sa vie : son appartement, une vie d'adulte. Évidemment, elle a tendance à s'embrouiller parfois, et le syndrome dysexécutif ressemble parfois aux troubles obsessionnels compulsifs : s'inquiéter, prendre beaucoup de notes écrites, penser qu'on va tout oublier, tout vérifier beaucoup trop de fois, s'inquiéter qu'on la replace dans une institution. Parfois elle est très en colère, sans bien savoir pourquoi. De temps à autre, la femme volante passe dans le ciel.



Le lecteur retrouve avec plaisir Luna Brewster au comportement un peu bizarre, comme lié à une légère déficience mentale. Il a conscience qu'il a failli ne jamais pouvoir découvrir la dernière partie de cette trilogie de miniséries, la pandémie globale ayant remis en cause la viabilité économique de la parution en épisode mensuel. Il soupire de soulagement en découvrant ce troisième et dernier tome : il va pouvoir passer plus de temps avec Luna et découvrir ce qu'elle va faire de son harnais lui permettant de voler dans le ciel. Le tome s'ouvre avec cette liste un peu étrange de personnes ayant la capacité de voler, mêlant des individus de genre différent, réels ou imaginaires, avec des interrogations car Luna n'est pas très sûre de sa liste. Il y a une liste en ouverture de chacun des quatre chapitres. Le lecteur la parcourt curieux, identifiant sans peine 80% des personnes citées, s'interrogeant sur les autres. Jean-François Pilâtre de Rozier (1754-1785) fut l'un des deux premiers aéronautes de l'histoire le 21 novembre 1783, avec le marquis d'Alandre. Puis il découvre la narration si particulière : des dessins descriptifs très premier degré, les courts cartouches de texte reprenant le flux de pensée de Luna Brewster. Elle a conscience de son état : des difficultés de concentration, et des états émotionnels perturbants. Dans un premier temps, le lecteur un peu sceptique se dit que ça ne va pas durer : l'auteur a trouvé un truc pour produire un effet bizarre, mais il va rapidement se laisser entraîner par son intrigue, et abandonner ce dispositif en cours de route.



Dans les faits, le lecteur partage le point de vue de Luna Brewster tout du long du récit : il appréhende la réalité et prend connaissance des faits et des événements, par le biais de son regard. La narration visuelle n'est pas réalisée en vue subjective, comme vue par les yeux de Luna : elle est représentée dans les cases comme les autres personnages. Mais le commentaire qui court dans les cartouches de texte s'apparente à son flux de pensées, à ses réflexions intérieures, du début à la fin. Ce n'est donc pas un artifice pour installer le personnage, mais bien un mode narratif tenu tout du long. Luna explique elle-même qu'elle souffre d'un syndrome dysexécutif. Elle n'explicite pas ce que c'est. Le lecteur voit bien qu'elle souffre de trouble de la concentration, ce qui l'empêche parfois de trouver le comportement adapté à un événement, à un interlocuteur. Effectivement, une recherche en ligne permet de trouver que les fonctions exécutives permettent au cerveau de s’adapter à de nouvelles situations, de mettre en place des stratégies et de réaliser des tâches cognitives complexes. Ce syndrome touche plutôt les enfants, et se manifeste sous la forme de déficits d’inhibition, de planification, de jugement. Cela se traduit par une incapacité partielle ou totale de développer et de planifier un comportement dirigé vers un but. Luna Brewster ne se conduit pas vraiment comme une enfant, ou comme une personne souffrant de déficience mentale, mais de temps à autre elle n'arrive pas à maintenir son attention, à mener un raisonnement complexe, à prendre du recul sur une émotion. Christopher Cantwell fait preuve d'une sensibilité remarquable en mettant en scène ces moments de désarroi intérieur, dont Luna a conscience, tout en montrant qu'elle continue à vivre et à agir.



La narration présente donc une saveur assez particulière qui n'est ni de la naïveté, ni de la crétinerie, mais qui est en léger décalage avec un comportement normal d'adulte. Le lecteur se rend compte dès la première page que les dessins présentent des caractéristiques en cohérence parfaite avec les fonctionnements mentaux de Luna Brewster. Le détourage est réalisé par un trait fin, générant une impression à la fois de précision obsessionnelle, et un peu mal assurée par endroit. La façon de montrer les choses et les gens est très littérale, descriptive, parfois jusqu'à l'obsession. En particulier le lecteur peut passer un temps certain à détailler certains décors : la pièce principale de l'appartement de Luna, l'architecture des différents immeubles quand elle lève les yeux au ciel pour voir passer la femme volante, tous les produits et ustensiles de nettoyage dans le réduit où elle trouve refuge le temps de reprendre contenance, les différents ingrédients composant son hamburger qu'elle a lâché en prenant de la hauteur dans le ciel, la grille lumineuse formée par les rues de la ville vue du ciel la nuit. Morazzo apporte la même application précise à représenter les personnages, sans chercher à les rendre beaux, mais plutôt en capturant leur expression de visage quand ils ne font pas attention, très naturelles et parlantes. Le lecteur peut également prendre le temps de jeter un coup d'œil aux tenues vestimentaires des uns et des autres, également banales et différentes pour chacun. Il remarque que l'artiste a une préférence marquée pour l'emploi de cases de la largeur de la page, avec des informations présentes sur toute la largeur. Du coup, le contraste s'avère saisissant quand une chute se produit, tout en cases de la hauteur de la page.



L'intrigue suit un fil directeur très simple : une nouvelle femme vole dans le ciel au-dessus de la ville. Elle assassine des personnes en les soulevant du sol et en les laissant tomber depuis une grande hauteur. Ayant conscience du fonctionnement troublé de son cerveau, Luna Brewster hésite entre l'existence réelle de cette femme volante, et le fait qu'elle présente peut-être des épisodes psychotiques dont elle ne garde aucun souvenir. Le lecteur suit donc une intrigue bien construite, sous forme d'enquête pour découvrir qui est la meurtrière et quel est son motif. Le scénariste se sert également du vol autonome comme d'une métaphore : bien sûr s'échapper, être indépendant. Cette capacité et se retrouver libre et détachée dans le ciel génèrent un réel sentiment de bonheur chez Luna. La possibilité de s'envoler et d'évoluer libre de toute contrainte dans le ciel devient un voyage vers le bonheur et les émotions positives qui l'accompagnent. Or l'auteur le rappelle : sur le mode de tout ce qui monte doit redescendre, tout ce qui vole doit finir par se poser.



Ce dernier tome vient conclure la trilogie de manière admirable. La narration visuelle n'a rien perdu de sa rigueur et de la beauté bizarre qui nait de la représentation de l'ordinaire sans fard, ce qui n'exclut pas un sens du spectaculaire maîtrisé. La narration réussit le pari de raconter l'histoire du point de Luna Brewster, jeune femme un peu perturbée, sans moquerie ni condescendance, avec un véritable suspense et une affection palpable pour ce personnage principal dont les aspirations sont les mêmes que celles de tout être humain.
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Ice Cream Man, tome 7

Acceptation & Exploration

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Ce tome fait suite à Ice Cream Man, tome 6 : Just Desserts (épisodes 21 à 24) qu'il n'est pas indispensable d'avoir lu avant, mais ce serait dommage de s'en priver. Il regroupe les épisodes 25 à 28, initialement parus en 2021, écrits par W. Maxwell Prince, dessinés et encrés par Martín Morazzo, avec une mise en couleurs réalisée par Chris O'Halloran. Il comprend également les 4 couvertures originales de Morazzo, ainsi que les couvertures variantes réalisées par Zoe Thorogood, Yuko Shimizu, Martin Simmonds Morazzo, Alex Eckman-Lawn (*2), Audrey Benjaminson. Chaque épisode constitue une histoire complète. Il y a une histoire courte de six pages supplémentaire à la fin de l'épisode 25.



À bord d'un gros avion de ligne, les deux pilotes papotent tranquillement, évoquant le décès de Jerry Donaldson, un de leurs collègues. Joe, le pilote, demande à Ned le copilote comment arrêter cette alarme qui n'arrête pas de sonner : un écran rouge, avec une tête de mort, et le message Défaillance catastrophique. Ned répond qu'il aurait dû faire plus attention pendant la formation car il n'en a aucune idée. Joe estime que ça finira bien par s'éteindre tout seul. Vu de dehors, il est possible de constater qu'un des réacteurs est en feu. Harold est un analyste de données et il a compris que l'avion va s'écraser. Il court dans l'allée centrale en réclamant un parachute. Les autres passagers ne semblent pas inquiets. Une femme lui confirme qu'ils descendent et lui propose de trinquer au champagne avec elle.



C'est toujours un plaisir anticipé que de retrouver quatre nouveaux épisodes de cette anthologie si particulière, réalisée par une seule et même équipe de créateurs. Le lecteur se demande sur quel genre d'histoire il va tomber. Il sait qu'il va s'agir d'une intrigue bouclée en un seul épisode, et qu'il y aura une forme d'horreur, de nature différente à chaque fois. La couverture du présent tome provoque une réaction immédiate chez le lecteur : un avion qui va s'écraser, avec en sous-entendu les attentats du onze septembre 2001. En fait, l'avion s'écrase dans une zone sans population. Le déroulement est très bizarre d'entrée de jeu : un passager qui panique pleinement conscient de l'accident en cours, et les autres qui prennent plus ou moins, ou pas du tout en compte cette catastrophe imminente. Il faut ajouter trois autres scènes très courtes dans lesquelles un individu a une crise cardiaque, une femme risque d'accoucher en plein désert sans aucune aide, deux jeunes adultes sont en train de se piquer dans un pavillon minable.



Le pauvre Harold court d'un passager à l'autre en demandant un parachute, en constatant leur calme. Il y a même une dame qui continue sa broderie, mais pas comme si de rien n'était. Arrivé à ce tome-ci, le lecteur s'est déjà acclimaté aux particularités des dessins : des détourages avec un trait fin et précis, des décors dessinés avec une précision froide, des personnages avec un visage marqué par une expression un peu bizarre, soit des yeux un peu grands, soit des dents apparentes dans une bouche entrouverte. Cette petite touche d'étrangeté induit un décalage qui légitime l'étonnement de Harold allant d'un passager à l'autre. Le lecteur ressent une fascination morbide pour cette catastrophe en train de se produire, sans qu'aucun personnage n'y puisse rien changer. Cette mort imminente met sur le devant de la scène la différence entre résignation et acceptation, mais aussi la réalité de l'occupation du moment des uns et des autres, et pas seulement sa futilité. Qui sommes-nous pour remettre en question les catastrophes ?



Il faut tourner le recueil de quatre-vingt-dix degrés pour la deuxième histoire. Michael Arvek se tient au sommet de l'arbre généalogique de sa famille et il salue le lecteur. Il a décidé d'entreprendre de descendre le long du tronc de cet arbre, physiquement, littéralement. Il veut ainsi découvrir pour quelle raison il est comme il est. Il se sent constamment endolori, avec une anxiété hors de contrôle. Il est souvent pris d'accès de consommation de substances, avec une préférence pour celles opiacées. Il se sent souvent en proie à une profonde solitude qui le consume, qu'il soit seul ou dans une foule. Du coup, il éprouve de grandes difficultés à se conduire comme un être humain normal. Il continue à descendre le long du tronc.



Les auteurs continuent de provoquer à leur manière : ici, en contraignant le lecteur à tourner son recueil pour pouvoir le lire, une manipulation fortement déconseillée à tout auteur, parce que ça brise une habitude et une règle implicite de lecture. Le lecteur se dit que le scénariste en voulait personnellement à l'artiste pour lui infliger de dessiner neuf doubles pages au cours desquelles le personnage descend le long d'un tronc d'arbre, de branche en branche. Pour autant, Morazzo s'en sort bien parvenant à maintenir un intérêt visuel à chacun de ces dessins en double page, montrant Michael Arvek descendre le long de son arbre généalogique. Prince file également la métaphore de rechercher les causes d'une situation, en l'occurrence le comportement de dépendance aux substances de Michael. Le lecteur peut ainsi voir comment ce genre de comportement était présent dans les générations précédentes, comment il s'est transmis de manière explicite ou implicite. Le questionnement sur une forme de prédestination comportementale en découle tout naturellement, une autre forme d'horreur.



Merry est en train de remercier son compagnon Earl pour la soirée qu'ils viennent de passer : un spectacle à Broadway, un diner dans un restaurant de gourmets, et une glace pour le dessert. Son compagnon est d'ailleurs en train d'en savourer une qui a tendance à couler. Soudainement, il se rend compte qu'il a du mal à articuler les mots, et il tombe à quatre pattes sur le trottoir, puis allongé sur le dos et il perd connaissance. Trois cafards s'approchent de la glace qui fond sur le revêtement, et puis s'en éloignent la trouvant trop sucrée. Deux d'entre eux s'adressent à l'autre en l'appelant Greg. Les trois cafards vont se rentrer dans un carton à côté des poubelles, pendant que Earl, toujours inconscient, est emmené sur une civière dans une ambulance.



Le lecteur repère immédiatement le clin d'œil dans le titre : Morphométastase, ainsi que la référence visuelle à La métamorphose (1915), de Frantz Kafka (1883-1924). Le scénariste en propose une variation : c'est un cafard doté d'un embryon de conscience qui se transforme progressivement en homme. La narration visuelle est plus que jamais incroyable : l'artiste parvient à donner à voir cette métamorphose, à faire exister cette créature au milieu des êtres humains, comme si c'était tout naturel, comme si ça allait évidemment de soi. À nouveau, sa façon d'introduire un air de potentiel déséquilibre mental fonctionne à merveille pour impliquer la différence de cet être par rapport aux humains normaux qu'il côtoie. Le lecteur est happé par le caractère fantastique du récit qui lui fait voir la vie de cet homme avec un point de vue qui la rend très différente : un regard extérieur sur la condition humaine. Ce n'est pas un malaise misérabiliste, mais une forme d'étonnement devant la vie quotidienne. La chute n'en est que plus cruelle.



Après une page de dictionnaire contenant des mots commençant par la lettre E, un groupe de trois individus gravissent une montagne en randonnée. Sam sert de guide à Brian Gartner, un étymologiste. Ils arrivent devant Gatu, un dragoman, c’est-à-dire un interprète. Il est aveugle et ne parle que le dialecte de la région, Sam traduisant ses propos à Gartner, un occidental. Ensemble, ils reprennent leur marche pour se rendre au sommet du mont qui se dresse devant eux.



Après ces trois récits au concept original et fort, le lecteur reprend plus facilement pied avec une quête : trouver un sage qui pourra murmurer le tout premier mot créé par un être humain, un mot si pur dans son sens qu'il transforme celui qui en a la connaissance. Le scénariste s'amuse bien en casant quelques définitions choisies au gré des remarques des compagnons de voyage de l'étymologiste, mettant en application le principe de revenir à la racine du mot, de revenir à son sens premier et fort. L'artiste passe tranquillement dans un mode descriptif avec un niveau de détails suffisant pour éviter que les cases montrant le trio en train de marcher ou de crapahuter ne soient génériques. Gartner finit par obtenir ce qu'il est venu chercher, d'une certaine manière, et pourtant la satisfaction n'est pas au rendez-vous. Le lecteur ne peut pourtant pas s'empêcher de sourire en voyant mentionné le nom de Riccardus, ce qui le renvoie à l'histoire courte en fin d'épisode 25.



Une anthologie toujours aussi extraordinaire : le scénariste développe une idée nouvelle pour chaque épisode, avec une inventivité bien cadrée, et un sens de l'horreur viscérale. Le dessinateur se révèle être capable de tout rendre visuellement intéressant, cohérent, inconsciemment dérangeant. Le lecteur est fasciné du début à la fin, ressentant un vague malaise qui se confirme à chaque chute. Du grand art.
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Great pacific : Tome 1

Peu convaincue par cette BD, les thèmes abordés et la façon de le faire n'ont pas l'originalité souhaitée pour continuer à lire la serie, de même que les dessins un peu trop conventionnels.

On ne peut pas toujours être surprise, étonnée ou emportée par nos lectures.
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Ice Cream Man, tome 2 : Strange Neapolitan

Ce tome fait suite à Ice Cream Man Volume 1: Rainbow Sprinkles (épisodes 1 à 4) qu'il vaut mieux avoir lu avant, car il y a un fil conducteur sous-jacent. Il comprend les épisodes 5 à 8, initialement parus en 2018, écrits par W. Maxwell Prince, dessinés et encrés par Martín Morazzo, avec une mise en couleurs réalisée par Chris O'Halloran. Il contient également les couvertures originales de Morazzo et les couvertures variantes réalisées par Frazer Irving, Christian Ward, Fábio Moon, Vanesa R. Del Rey.



Épisode 5 - Un homme en costume cravate se tient en haut d'un gratte-ciel dans une ville américaine, sur le rebord du toit. Il se jette dans le vide. Il a 100 étages à descendre en chute libre, avant de s'écraser sur le trottoir. Il se souvient de ce que se dit l'homme au sourire avant de se transformer en buse. À l'intérieur du bâtiment, dans la salle de réunion du quatre-vingt-neuvième étage, Vicky (ou est-ce Vanessa, ou peut-être Valerie) enjoint à sa cheffe de descendre avec elle. L'autre refuse, et une buse lui arrache l'œil droit de son orbite. Veronica sort en courant et commence à descendre les étages par l'escalier. Épisode 6 - Dans une banlieue pavillonnaire, un homme se promène à pied. Il arrive devant la camionnette du marchand de glace et en demande une à 3 boules : chocolat, vanille, fraise. Il repart en léchant sa glace. Il arrive devant un croisement où 3 choix s'offre à lui. Dans le premier, il tourne à gauche, dans le second il continue tout droit, dans le troisième il tourne à droite. Le lecteur suit ce qui arrive dans chacune de ces 3 possibilités.



Épisode 7 - Lucy (9 ans) est en train de faire de la balançoire dans le jardin, en mangeant un cornet de glace. Ses parents l'observent depuis le salon. Sa mère s'inquiète pour elle car sa meilleure amie Kayla vient de décéder d'un cancer. Le père s'énerve en disant qu'il faut que sa fille arrête de se conduire comme si le fantôme de Kayla étant tout le temps à ses côtés. Le lendemain, Lucy participe à sa séance de psychothérapie, et répond aux questions de la psy, lui indiquant qu'effectivement Kayla se tient à ses côtés et lui répond. Épisode 8 - Dans une petite ville de banlieue, Jenny conduit l'ambulance, avec Mike son coéquipier sur le siège passager. Dans la rue où ils circulent, une maison est en train de brûler, une voiture a percuté un arbre sur une pelouse, un groupe d'individus se promènent avec des torches, un autre est en train de traîner un cadavre ensanglanté par les cheveux. Un peu plus loin, un homme est en passe d'être dévoré par des vers de terre longs de plusieurs dizaines de centimètres. Dans l'ambulance, Mike est en train de s'envoyer plusieurs cachetons d'un médicament pour la leucémie pour voir s'ils ont un effet psychotrope. Brenda lui raconte comment elle et sa sœur avaient recueilli une petite souris à la patte brisée, quand elles étaient jeunes.



Le premier tome avait laissé un goût étrange, entre horreur et histoire qui ne démarre pas. Ce deuxième tome vient clarifier la structure de la série : une anthologie d'histoires en 1 épisode, avec un très discret fil rouge : les apparitions d'Ice Cream Man, et celles encore plus sporadiques de Caleb, l'homme au stetson. Le premier épisode du présent tome prend le lecteur au dépourvu, avec cet homme qui se suicide en sautant du centième étage, et cette femme qui rencontre une horreur après l'autre en descendant les étages. L'épisode suivant baigne également dans l'horreur, avec les 3 chemins de vie concomitant de ce jeune homme. Ça ne va pas en s'arrangeant avec la petite fille hantée par sa copine morte, et avec les 2 ambulanciers irresponsables. Cette série est bien une anthologie d'horreur, avec des éléments graphiques comme une énucléation graphique, un individu se vidant de son sang avec un couteau fiché dans la cuisse, un individu dépecé vivant, ou encore un type qui se plante une fourchette dans la main.



Dès le premier épisode, le lecteur est également frappé par la structure des récits : une alternance entre un suicidé et une femme qui descend les escaliers, 3 récits en parallèle, et même la folle cavalcade des 2 ambulanciers. Seul l'épisode 7 suit un déroulement plus classique. Dans ces formes, le lecteur est bien sûr impressionné par l'épisode 6 dans lequel il suit 3 chemins de vie en parallèle sur chaque page d'un même individu, en fonction du trottoir qu'il a emprunté pour manger sa glace. La mise en parallèle provoque un effet ludique irrépressible chez le lecteur qui se met à comparer les 3 destins, à établir des rapprochements de nature plutôt sinistre. Le premier épisode produit aussi un effet ludique, le lecteur se livrant également au jeu de comparer les 2 descentes, même si les préoccupations du suicidé et de Veronica sont de nature très différente. Du coup, il adopte la même approche de lecture pour l'épisode 7 en s'interrogeant sur la réalité du fantôme, sur ce qu'il va advenir de cette petite fille, sur l'équilibre psychique de son père. Dans le dernier épisode, il apprécie la suite de situations macabres et ne fait pas forcément attention au mystère installé dans les premières pages.



Martin Morazzo continue de dessiner de la même manière, dans une approche réaliste et détaillée, en utilisant un trait de contour très fin, mais pas cassant. Avec la première page, le lecteur se dit que l'artiste utilise peut-être un logiciel de modélisation pour la vue du dessus des immeubles, puis pour la façade de verre au fur et à mesure de la chute de l'homme, tellement les traits sont droits et propres sur eux. Il en va de même pour la netteté de la cage d'escalier en vue de dessus dans une perspective vertigineuse. Mais cette impression disparaît dans les épisodes suivants, les décors étant moins géométriques. Il subsiste parfois une impression d'éléments factices, trop propres sur eux. D'un autre côté, le niveau élevé de détails et la méticulosité des dessins donnent corps à des environnements substantiels : les façades des pavillons de la banlieue dortoir, l'ameublement du bureau de la psychologue de Lucy, l'aménagement du diner où Jenny et Mike vont manger un burger. Du coup, Morazzo donne à voir une réalité concrète, des endroits où le lecteur peut se projeter même s'il peut les trouver manquant de texture de matériau, de marque du temps qui passe.



Comme dans le premier tome, il faut un petit temps d'adaptation au lecteur pour les visages des personnages. En effet Morazzo aime bien leur faire entrouvrir la bouche pour montrer leurs dents. Les expressions des visages peuvent également sembler parfois un peu décalée par rapport à l'émotion qu'elles expriment. Il faut un peu de temps pour comprendre que la majorité des personnages semblent habités par une sourde inquiétude mêlée d'une douleur sous-jacente, avec un brin de nostalgie. Une fois repéré cet état d'esprit généralisé, le lecteur peut passer outre et constater que les expressions de visage sont en fait variées et nuancées, tout en étant marquées par cette inquiétude. Bien sûr, l'épisode 6 constitue une preuve éclatante du talent de narrateur visuel de l'artiste, car il est dépourvu de mot et il se lit sans aucune difficulté, avec un impact émotionnel bien réel. À la fin du présent tome, le lecteur peut lire le script du scénariste pour une demi-douzaine de pages de l'épisode 6, et voir comment le dessinateur y a apporté sa vision et son savoir-faire pour y insuffler de la vie et de l'émotion. Tout au long de ces 4 épisodes, il sait faire apparaître à la surface la vie intérieure des personnages, en ce qu'elle a d'unique et d'intense. Le lecteur ressent leur implication émotionnelle et se retrouve incapable de prendre ses distances. Il se trouve donc impliqué dans leur situation. Il ne peut pas non plus se protéger contre les situations horrifiques qui surviennent, du fait de leur caractère inattendu.



Avec ces quatre épisodes, W. Maxwell Prince sait faire remonter à la surface l'absurdité de la vie, l'angoisse de la différence et de l'anormalité. Le suicide et la course pour sortir du bâtiment mettent en évidence l'absence de sens de la vie et sa valeur relative. Les 3 chemins de vie indiquent que cet individu ne pouvait pas échapper à la souffrance. Le scénariste confronte ses personnages à des horreurs absurdes et dramatiques survenant sans raison, s'acharnant parfois sur un individu. Pour autant, ces épisodes ne flanquent pas le cafard, car il sait faire preuve d'humour noir avec un second degré, et il ne fait finalement que montrer que le comportement des individus n'a pas grande incidence sur ce qui leur arrive. Malgré l'horreur bien réelle du vide existentiel, le lecteur se retrouve étrangement rasséréné de voir qu'il n'est pas le seul à y être confronté, que d'autres que lui s'y heurtent sans que leurs tentatives d'effort n'y changent rien. Il finit par se produire un effet libérateur de voir que le suicide n'a pas produit d'effet significatif (sauf sur le suicidé bien sûr), que quel que soit le choix, le chemin de vie reste de même nature, que les efforts des parents n'influent pas sur le sort de l'enfant, ou que le comportement à risque des ambulanciers ne prête pas à conséquence (enfin, pour ce dernier épisode, si). Le scénariste a l'air de suggérer au lecteur d'accepter le caractère arbitraire des événements et de ne pas s'en sentir responsable.



À la fin du premier tome, le lecteur s'était dit qu'il voulait en avoir le cœur net et qu'il reviendrait pour le suivant. Son jugement sur cette anthologie de récit évolue. Il apprécie plus les dessins précis et détaillés de Martin Morazzo et les expressions bizarres de ses personnages. Il se confronte à l'horreur des situations imaginées par W. Maxwell Prince, se réjouissant que ce soit les personnages qui y sont soumis et pas lui, et éprouvant un effet cathartique inattendu à voir de telles situations absurdes.
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Great Pacific, tome 1 : Trashed !

Il s'agit du début d'une série indépendante. Ce tome comprend les épisodes 1 à 6, initialement parus en 2012/2013. Le scénario est de Joe Harris, les dessins et l'encrage de Martin Morazzo, et la mise en couleurs de Tiza Studio.



Il y a 2 semaines, Chas Worthington III chassait le lion à la sagaie en compagnie de guerriers Massaï dans la brousse africaine. Juste après il rejoint son campement de base où l'attend Alex, son secrétaire particulier (et son ami d'enfance). Worthington va fêter son anniversaire le lendemain, il est à la tête d'une des plus compagnies pétrolières de la planète, héritée de son père. Sur le chemin du retour, il s'arrête dans l'Oklahoma pour saluer son oncle et lui expliquer ce qu'il projette. Worthington a décidé de s'approprier le continent flottant constitué de déchets (vortex de déchets du Pacifique Nord) qui s'étend à peu près sur la taille de l'état du Texas, et de le faire reconnaître comme état souverain. Il lui faut encore réussir à disposer des fonds correspondants. Pour coloniser ce continent d'un genre particulier, il a fait développer un outil technologique baptisé "Hydrocarbon remediation operation" en abrégé "HERO"). 2 semaines plus tard, Chas Worthington est tout seul abandonné et un peu amoché sur un monceau de déchets en plein Pacifique Nord, face à une mouette à 2 têtes.



Joe Harris a composé un récit très malin qui s'adresse aux grands adolescents mais aussi aux adultes. Il incorpore des éléments qui l'inscrivent dans la littérature pour jeunesse : l'âge du héros, sa capacité à manipuler le directoire de l'entreprise pétrolière, le gadget technologique de science-fiction, 2 éléments surnaturels intervenant en cours de récit. Si le lecteur adulte peut passer outre ces éléments ciblant un public déterminé, il découvre un récit bien construit imaginatif, évoquant par certains cotés l'esprit d'aventure qui existe dans les romans de Jules Verne. Harris associe cette entreprise peu commune de découverte d'un nouveau continent, avec la mise en application d'un plan qui réserve bien des surprises.



Harris a donc choisi un lieu principal pour son histoire qui sort de l'ordinaire, une sorte de nouveau continent moderne (le vortex de déchets) composé de 7 millions de tonnes de déchets. Le point de départ est étonnant et les 2 créateurs parviennent sans difficulté à rendre plausible l'installation de la base de vie. Morazzo se décarcasse pour dessiner avec minutie l'agrégat de déchets de petite taille formant un no man's land plus ou moins stable. S'il n'est pas possible de reconnaître la nature exacte de chaque déchet, le lecteur dispose d'assez d'éléments pour se projeter dans cet environnement artificiel, preuve de l'inconséquence de l'être humain.



Le lecteur évolue donc dans cette grande zone d'ordures du Pacifique, sans pouvoir échapper à sa réalité. Néanmoins le propos d'Harris n'est pas alarmiste, encore moins de faire culpabiliser le lecteur. Il emmène le lecteur dans une partie stratégique aux tours et détours inattendus, pleine de suspense. Chas Worthington se révèle un fin stratège ayant les moyens de ses ambitions peu communes, avec une vision frappée au coin du bon sens. En particulier il sait que ses projets n'aboutiront que s'il est capable de dégager un profit au sens capitaliste du terme. Ici le héros n'envisage pas l'écologie comme une utopie parée de jolies petites fleurs, mais bien comme un paramètre à intégrer dans les réalités économiques. Par certains cotés, cette aventure peu faire penser à la série "Largo Winch" pour sa partie d'intrigue dans le monde politique et entrepreneurial. Cet aspect reste compréhensible par tout le monde dans la mesure où Harris s'intéresse avant tout aux mouvements tactiques des uns et des autres, l'aspect aventure et découverte restant prépondérant.



L'approche graphique du dessinateur argentin Morazzo évoque également plus une bande dessinée franco-belge qu'un comics. Il n'y a pas de héros bodybuildé ou habillé en collant moulant et le personnage féminin principal Zoe dispose d'une taille de poitrine normale. Outre de représenter des individus normaux, la force de Morazzo est de réussir à faire croire à chacun des environnements, à commencer par ce continent de déchets plastiques. Morazzo privilégie une approche réaliste, légèrement simplifiée, sans volonté d'avoir un rendu photographique, et sans exagération de type comique (pour les expressions des visages) ou dramatique (pour les séquences d'action). Son degré de minutie évite aux dessins d'être fades, et permet une immersion de bon niveau dans cette histoire peu banale.



Dans cette première partie, Harris et Morazzo racontent une histoire originale assez dense qui évoque les récits d'aventure d'antan dans un contexte moderne, en dosant avec soin les éléments de science-fiction pour ne pas exiger un niveau trop important de suspension consentie d'incrédulité de la part du lecteur. À la lecture, l'intention de cibler un public assez précis peut atténuer légèrement le plaisir de lecture des plus grands.



Pour plus d'information sur la grande zone d'ordures du Pacifique



http://fr.wikipedia.org/wiki/Vortex_de_d%C3%A9chets_du_Pacifique_nord



http://www.lemonde.fr/planete/article/2012/05/09/le-7e-continent-de-plastique-ces-tourbillons-de-dechets-dans-les-oceans_1696072_3244.html
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Ice Cream Man, tome 6 : Just Desserts

Insignifiant

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Ce tome fait suite à Ice Cream Man Volume 5: Other Confections (épisodes 17 à 20) qu'il n'est pas indispensable d'avoir lu avant, mais ce serait dommage de s'en priver. Il contient les épisodes 21 à 24, initialement parus en 2020, écrits par W. Maxwell Prince, dessinés et encrés par Martín Morazzo, avec une mise en couleurs réalisée par Chris O'Halloran. Il comprend également les 4 couvertures originales de Morazzo, ainsi que les couvertures variantes réalisées par Andrea Sorrentino, Sam Wolfe Connelly, Valentine de Landro, Tiffany Turrill, Justin Mitchiner. Chaque épisode constitue une histoire complète.



Quelque part dans une salle sombre d'un bâtiment à New York, un homme nu est agenouillé devant trois autres en robe à capuche, entre deux braséros. Les maitres de cérémonie invoquent la divinité Riccardus, et s'apprêtent à offrir cette viande sur deux pattes à leur Seigneur des Sucettes. La victime implore leur pitié, arguant qu'il est un simple vendeur de glaces, leur demandant ce qu'ils veulent. Ils crucifient l'homme sur une structure à base de triangle pointe en bas avec un demi-disque sur le dessus, traçant un smiley qui fait la tête sur son torse, avec un couteau, et en appelant à leur divinité pour qu'elle se nourrisse. Sur l'échelle de secours en façade, Ray Kowalski s'en grille une en pensant au bien que ça lui fait. Il met fin à ce plaisir car on l'appelle depuis la porte de son bureau de détective privé. Madame Cohen vient l'engager parce que son mari Bertrand L. Cohen, un vendeur de glaces, a disparu.



Dès la première page, le lecteur retrouve le goût si particulier de cette anthologie. Une histoire complète dans chaque épisode, avec l'apparition plus moins explicite d'un marchand de glace. Une situation horrifique, qui peut l'être en raison d'une horreur visuelle ou charnelle, ou existentielle sans élément visuels sanguinolents. Des dessins à l'apparence un peu particulière : descriptifs avec des traits de contour très fin, des visages souvent marqués par une émotion intense teintée d'incompréhension, d'absence de maîtrise, une absence d'aplats de noir pour les ombres portées. Une fois réacclimaté à ces particularités, ou après les avoir retrouvées avec délectation, le lecteur se lance à la découverte d'un récit court, mais à chaque fois intense. Voilà donc un détective privé, marié sans enfant, pas très heureux dans sa vie, avançant lentement mais sûrement dans sa recherche d'indices et de preuves. Les auteurs mêlent malicieusement une narration très pragmatique, avec un fil secondaire indiquant l'existence d'une secte qui sacrifie des marchands de glace à une divinité pour le moins peu probable.



Plusieurs situations arrêtent l'œil du lecteur par leur banalité, ou par le léger décalage d'avec les conventions et les clichés habituels : le regard un peu exalté de madame Cohen, le smiley de mauvaise humeur, la bagarre dans la bibliothèque municipale dans laquelle personne n'intervient. Il faut peu de temps au lecteur pour également remarquer que toutes les pages sont construites sur une base de 9 cases de taille identique, en 3 bandes de 3 cases. S'il a lu Watchmen (1986) d'Alan Moore & Dave Gibbons, le lecteur fait tout de suite le lien, d'autant que le dessinateur reprend deux ou trois cases emblématiques, ainsi que le principe de Smiley, mais ici il fait la tête plutôt que de sourire. Par exemple, le détective Kowalski entre dans un appartement par la fenêtre, comme Rorschach dans l'appartement du Comédien. Dans un premier temps le lecteur se retrouve un peu décontenancé car l'hommage est patent, mais le récit ne reprend pas la trame de Watchmen, ni les thèmes. Il faut un peu de temps pour établir le parallèle : les auteurs tournent en dérision l'idée que les bizarreries de la réalité puissent s'expliquer par une séduisante théorie du complot.



30 novembre, les parents de Julie sont en train d'installer le sapin de Noël dans le salon, et comme d'habitude, ils l'ont pris un peu trop grand. Ils offrent un calendrier de l'avent à leur fille. Premier décembre, elle ouvre la première petite fenêtre : un œuf en chocolat. Elle va acheter un test de grossesse au supermarché, plusieurs en fait. Deux décembre, elle utilise le test et il l'informe, comme les deux autres avant, qu'elle est enceinte.



Changement d'épisode, changement d'histoire, avec une continuité narrative puisqu'il s'agit des mêmes créateurs. Le scénariste adopte une structure rigoureuse : une scène par page, et chaque fois un jour différent du 30 novembre au 25 décembre. La narration visuelle fait des merveilles comme d'habitude avec cette représentation descriptive de la banalité du quotidien légèrement distanciée, un peu froide. Le lecteur apprécie la manière dont les auteurs construisent littéralement la continuité d'une existence d'un jour à l'autre : la suite d'une action (acheter un test de grossesse, l'utiliser, aller voir le gynécologue), ou des éléments visuels récurrents normaux (le calendrier de l'avent, le manteau de Julie) ou décalés (les araignées). Le fil narratif est très simple : Julie se rend compte qu'elle porte seule la responsabilité de son avortement. La sensation est très dérangeante : le lecteur ressent que cette responsabilité bouscule son système de valeurs et de croyances, non pas de manière frontale, mais de manière indicible. La force des auteurs est de parvenir à rendre visuel ce conflit intérieur, non pas à grand renfort d'éléments gore ou horrifiques, mais par de petits décalages, de petites hésitations, de petits doutes sur la réalité de ce qu'elle observe.



Ce soir-là, dans son émission de fin de soirée, l'animateur Mack Benson reçoit Rick Saccharine un dresseur d'animaux qui vient lui en présenter plusieurs. Quatre heures plus tard, le présentateur est en unité de soin intensif, car il a été mordu au visage par le python albinos birman qui l'avait enserré dans ses anneaux constricteurs. Dans la salle, d'attente, Brian Pardue, le producteur exécutif de l'émission, se lamente sur le sort de Mack. Il a toujours été à ses côtés : à ses débuts dans des petits clubs minables, y compris le soir où un client lui avait lancé une laitue à la tête en lui demandant d'être un peu drôle. Pendant toutes les étapes de son ascension jusqu'à la consécration de l'émission de fin de soirée.



Ils peuvent tout se permettre : contre l'évidence basique, les auteurs ont choisi d'alterner une page de texte sans illustration avec un dessin en pleine page. C'est une provocation très risquée vis-à-vis du lecteur. En effet celui-ci est venu pour lire une BD, pas un texte illustré. Bon, il fait quand même l'effort de lire au moins une page, et de regarder l'image sur la page de droite. Il se trouve que cette première page de texte évoque une situation dramatique, et que le lecteur ressent tout de suite un élan de sympathie pour le producteur et ami, ainsi que le malaise sous-jacent. En effet, cet ami a bâti toute sa carrière sur le talent du présentateur : celle-ci s'arrête brutalement si le présentateur se retrouve dans l'incapacité d'exercer son métier. Même en pleine page, les dessins ne sont pas plus spectaculaires que ceux des épisodes précédents : toujours aussi descriptifs, capturant la bizarrerie de la situation, même si elle est plausible et pragmatique. Le lecteur peut ainsi mesurer toute l'incongruité de l'énorme vautour perché sur l'épaule du montreur d'animaux, l'artificialité de la construction totalement factice qu'est le plateau de télévision. Les auteurs parviennent à surprendre le lecteur alors même qu'ils ont établi la fin de leur histoire dès la première page. En effet les personnages sont très attachants, et le lecteur s'inquiète pour eux, tout en se demandant comment ils en sont venus là. La conclusion ouverte est d'une rare cruauté… pour le lecteur : tout peut arriver, il faut apprendre à vivre avec cette absence de certitude.



Jerry est malade, sans trop sans rendre compte. En ce moment, il est allongé sur le fauteuil du dentiste qui lui arrache une dent. Ce dernier lui fait des remarques bizarres sur le fait que c'est l'âge auquel où le corps commence à lâcher, et qu'il soutient son client à fond. Une voix commente : Jerry a commencé à dégénérer, et il n'y a pas que son corps qui part en sucette. Jerry se rend compte qu'il est en retard pour son rendez-vous avec son épouse, pour signer les documents qui finalisent le divorce. Sans qu'il en ait conscience, un animateur incite les téléspectateurs à faire des dons pour Jerry, dans une émission de télé.



Le lecteur se rend compte que les auteurs continuent exactement dans la même veine que les 3 épisodes précédents, avec une forme tout aussi cruelle. Un adulte voit sa situation bien établie partir en cacahuètes : relation de couple, emploi, etc. Dans le même temps, sans qu'il en ait conscience, un téléthon a été ouvert pour essayer de compenser sa déveine. Les dessins avec leur apparence un peu cruelle font ressortir la dégradation progressive de l'état de santé de Jerry, le jeu forcé de l'animateur du téléthon, l'absence de réelle compassion des téléopératrices qui sont très professionnelles, le décor vraiment très bon marché du plateau de télé, la bonne humeur forcée des acteurs pour les placements produits et autres annonceurs. C'est une horreur existentielle d'une rare cruauté, avec un humour noir à froid terrifiant, se terminant par le constat que le lecteur est responsable de la mort d'un chien. Le lecteur finit terrassé pour son insignifiance, par la réalité de sa mort inéluctable et qu'il n'emportera rien avec lui dans l'au-delà. Il faut avoir le cœur bien accroché pour regarder ainsi la réalité de la vie en face.



Tome après tome, épisode après épisode, les auteurs continuent d'explorer les possibilités narratives, autant en genre littéraire, qu'en forme avec une aisance élégante, et un regard sans fard sur la terreur que peut être la condition humaine.
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Great Pacific, tome 1 : Trashed !

Ce premier album se lit très bien, on passe un bon moment, mais on n'est pas épaté par les trouvailles scénaristiques ! Graphiquement, c'est très honnête là aussi.
Lien : http://www.sceneario.com/bd_..
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Great Pacific, Tome 2 : Fondation

Great Pacific » est décidément une chouette série, ce que confirment ces nouveaux épisodes. Vivement la suite et fin !
Lien : http://bdzoom.com/93578/comi..
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Great Pacific, tome 3 : Chasse au gros

Ce tome fait suite à Nation building (épisodes 7 à 12). Il contient les épisodes 13 à 18, initialement parus en 2014, écrits par Joe Harris, dessinés et encrés par Martin Morazzo, avec une mise en couleurs du Studio Tiza. Ce tome correspond à une fin de saison (sans réel besoin de suite) à cette histoire dont il faut avoir commencé la lecture par le premier tome Trashed! (épisodes 1 à 6).



Épisode 13 – Les services de sécurité de New Texas ont récupéré un individu (appelé Arthur Managan Clarke) qui prétend être l'émissaire d'une civilisation extraterrestre. Chas Worthington se souvient des leçons de pêche que lui donnait son père. Épisode 14 – Worthington et Zoe découvrent que certains habitants de New Texas sont devenus dépendant à une drogue de synthèse appelée Skag.



Épisodes 15 à 18 – Baston Duvalier a débarqué à New Texas. Il souhaite récupérer sa femme, les bombes atomiques qu'il convoitait, et pourquoi pas s'instaurer comme nouveau chef de ce jeune état, par la force bien sûr.



Dans les 2 premiers épisodes, Joe Harris joue avec habilité sur le cumul des fonctions du jeune Chas Worthington. D'un côté, il utilise le fait que ce jeune homme est responsable de tout pour le placer au centre de chaque événement. Dès que ce prisonnier aux déclarations étranges est en sécurité, c'est Worthington lui-même qui se charge de l'interroger. Dès que Mistress Ibogene (la dealeuse) de Skag est arrêtée, c'est encore lui qui va conduire l'interrogatoire. Harris n'oublie pas de montrer le prix qu'il doit payer du fait qu'il endosse toutes ces responsabilités. De l'autre côté, il montre les compétences bien réelles du personnage.



Le scénariste ne se contente pas d'une enquête bien menée ; il montre aussi quels sont les enjeux pour cette micro-nation d'avoir des citoyens utilisant des produits psychotropes. Lorsque Chas Worthington se tient devant son conseil d'adjoints, il tient un discours très clair qui met en avant ses motivations : le capitalisme et la préservation de la force de travail avant tout, la question de santé publique n'est même pas évoquée. C'est d'une franchise désarmante, mais en cohérence avec la nature de ce despote éclairé. Il illustre son propos à l'aide d'un exemple historique : la consommation de stupéfiants en Chine avant l'arrivée de Mao Zedong au pouvoir.



À partir de l'épisode 15, l'histoire change de centre d'intérêt. À nouveau, Chas Worthington doit faire face à une tentative de coup d'état, cette fois-ci aussi simple qu'efficace. Le lecteur sent bien que Joe Harris précipite un peu les choses et prend grand soin de gérer toutes ses intrigues secondaires pour les mener à un terme satisfaisant (tout en laissant une possibilité de suite). Cette narration un peu rapide inclut malgré tout plusieurs séquences et réflexions qui viennent étoffer une longue course-poursuite.



Le lecteur découvre ainsi la première rencontre entre Chas et Alex, ce qui éclaire la nature de leurs relations actuelles. Harris prend le temps de montrer en quoi Baston Duvalier est un adversaire redoutable. La relation entre Chas et Zoe évolue de manière significative. Little Chief prend une décision quant à l'avenir de son peuple. Même le calmar géant refait une apparition pour clarifier son rôle.



Martin Morazzo continue de donner une existence visuelle à cette étrange micro-nation établie sur un tas de déchets flottants, d'une superficie de plusieurs kilomètres carrés. Le lecteur retrouve cette visualisation bien conçue qui permet de voir ces déchets agrégés grâce à la technologie HERO, ainsi que les parties non consolidées, susceptibles de se disloquer sous les pieds des personnages, ou de s'écrouler en avalanche.



Dans cet environnement ainsi rendu crédible, Morazzo dessine des individus aux morphologies normales, avec des vêtements utilitaires ou simples, avec des outils plausibles. Les éléments d'anticipation s'insèrent avec naturel dans ces visuels, permettant au lecteur d'accepter ce qui sort de l'ordinaire, sans soumettre sa suspension consentie d'incrédulité à de trop fortes contraintes.



Il utilise régulièrement des cases de la largeur de la page, dans lesquelles il prend soin d'utiliser toute la largeur pour y porter des informations visuelles. Il n'y a pas simplement une tête de dessinée au milieu de la case, sur un fond uniforme, il y a un arrière-plan qui participe à donner de la profondeur et une notion d'espace.



Grâce aux dessins de Martin Morazzo, le concept de cette micro-nation acquiert de la consistance visuelle, avec une forme de plausibilité satisfaisante dans le cadre d'un récit d'anticipation. Il réussit à faire coexister dans le même environnement des individus normaux (avec des plis un peu prononcés sous le nez), un sol très particulier, des constructions solides sans être monumentales, des indigènes contraints de vivre dans cette île gigantesque et une faune particulière.



À l'issue de ce tome, le lecteur regrette que ce soit déjà la fin de cette histoire, ou du moins de ce chapitre. Il est satisfait de connaître le devenir de New Texas. Martin Morazzo a réussi le pari risqué de faire croire à la possibilité d'une communauté logeant sur un tas de détritus flottant. Joe Harris s'est montré un scénariste ambitieux qui a proposé un concept original dont il a exploré de nombreuses facettes, à commencer par les stratégies délicates d'un despote éclairé pour pérenniser un nouvel état bâti de toutes pièces. Il a développé un personnage central ambitieux et ambigu, mauvais perdant et fin stratège.
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Great Pacific, Tome 2 : Fondation

Ce tome fait suite à Trashed! (épisodes 1 à 6) qu'il faut avoir lu avant. Il comprend les épisodes 7 à 12, initialement parus en 2013, écrits par Joe Harris, dessinés et encrés par Martín Morazzo.



Ce tome débute 18 mois après la fin du premier, alors que l'état du Nouveau Texas a accueilli ses premiers immigrants et que la base de vie initiale a mué en un village comptant 704 habitants. Chas Worthington est toujours le président de cette micro-nation, assisté par son ami Alex. Il a réussi à convaincre Zoe de travailler pour lui, en particulier d'enquêter sur les actes de sabotage dont New Texas continue d'être la cible. Il dirige la première réunion de cabinet de ministres pour mettre au point la stratégie qui lui permettra de faire reconnaître New Texas comme une nation souveraine. Il est victime d'un attentat en pleine réunion : une balle de fusil l'atteint en pleine poitrine.



En s'immergeant dans ce récit, le lecteur constate que seul le format de parution (22 pages mensuelles, se terminant à chaque fois sur un suspense donnant envie de revenir le mois suivant) permet de savoir qu'il s'agit d'un comics. Pour le reste, l'histoire, les thèmes abordés, les dessins et la mise en couleurs évoquent plutôt une bande dessinée traditionnelle. Martín Morazzo (artiste argentin) dessine en utilisant un trait d'une épaisseur quasi uniforme pour délimiter le contour des silhouettes et des éléments de décors. Les informations relatives à l'intensité lumineuse, la texture et les variations de profondeur des surfaces sont apportées par la mise en couleurs qui les complète de manière discrète et naturaliste.



Martín Morazzo dessine ses personnages de manière réaliste, sans rechercher le photoréalisme, sans surcharger ses dessins en traits non signifiants ou en détails surnuméraires. Il sait rendre crédible cette petite ville bâtie sur un territoire de déchets flottants, imaginant des bâtiments à 1ou 2 étages, de taille réduite pour prendre en compte le caractère déformable du terrain sur lequel ils sont construits. Faire croire à ce terrain mouvant constitué de déchets semblait au départ une gageure. Morazzo prend bien soin de montrer que les centaines de débris de nature diverse et variée qui forment le "sol" de ce continent, ainsi que l'épaisseur relative de ce terrain. Il ne se limite jamais à un vague sol informe sans texture.



Morazzo effectue un travail de costumier correct, donnant des tenues différentes à chaque personnage, adaptées à ses fonctions, sa stature sociale, son activité (quelques robes de soirée lors de la réception précédant la réunion des Nations Unies). Il sait rendre avec conviction l'ambiance marine de New Texas, que ce soit par les horizons dégagés, le vol d'oiseaux maritimes, ou encore une faune marine réaliste. Sous ses crayons, chaque endroit acquiert un caractère spécifique, même une chambre d'hôtel. Il sait aussi s'astreindre à reproduire l'apparence des lieux connus, comme lors de la visite du bâtiment des Nations Unies, et de sa célèbre salle de conférence en amphithéâtre.



Les personnages ont une morphologie réaliste et des postures vraisemblables. Morazzo effectue un effort particulier pour que le lecteur puisse deviner les états d'âme de Chas Worthington à son langage corporel. Ainsi le poids de ses décisions et de leurs conséquences pèse vraiment sur ce jeune homme. Il représente la violence sans voyeurisme, mais en transcrivant bien son horreur et la douleur qui va avec (en particulier lors des interrogatoires à base de torture, réalisés par les soldats de Chukwu, le président de la Rhodésie de l'Ouest).



Joe Harris peut ainsi se reposer sur les images pour porter une grande partie de la narration qui développe une situation toujours aussi intrigante. Harris joue avec les attentes du lecteur en plaçant cette deuxième partie 18 mois après la création du Nouveau Texas. Ça y est : ce nouveau pays est installé et tout roule. Au fil des séquences, le lecteur prend conscience qu'il n'en est rien. Harris n'a pas abandonné son ambition en route. Chas Worthington est à la tête d'un tout jeune état qui n'a aucune existence légale. Il lui faut entreprendre les démarches nécessaires pour être reconnu autrement que comme une entreprise de recyclage des déchets, et là c'est une autre affaire. Chas Worthington est le personnage principal de ce récit, ce qui en fait d'office le héros... sauf que pas tout à fait. Certes il est victime d'un assassinat, et il se produit plusieurs actes de sabotage sur New Texas (perpétrés par l'association activiste Green X). D'un autre côté, Joe Harris joue là aussi sur les attentes du lecteur en faisant en sorte que son récit prenne un peu de recul sur les conséquences des actions de Worthington. Il y a un de ses conseillers qui lui fait un exposé sur la micro-nation de la République de Minerva qui a existé quelques mois en 1972 (véridique) qui introduit un doute sur le caractère réaliste et réalisable de vouloir créer un nouvel état aussi petit. Il y a les conséquences des détournements de fonds réalisés par Worthington qui lui reviennent de plein fouet. Il y a sa manière peu intelligente de gérer l'effet de l'augmentation des responsabilités qui pèsent sur ses épaules. Il y a encore sa vision de la politique étrangère et les alliés qu'il se choisit (la république fictive de Rhodésie de l'Ouest, les diamants de sang de la Sierra Leone) dont on finit par ne plus savoir si le remède n'est pas pire que le mal, et de loin.



Joe Harris concocte une politique fiction refusant la dichotomie simpliste Bien / Mal, montrant qu'un projet de création d'une nation a des répercussions à l'échelle mondiale, et que le jeune Worthington a plongé directement dans le grand bain, à ses risques et périls (sa future micro-nation n'a pas les moyens matériels et humains pour lutter à armes égales contre de grands pays). Toutes ses convictions sont remises en cause, voire battues en brèche (créer une industrie de recyclage et pérenniser le vortex de déchets du Pacifique Nord n'est-il pas contre-productif par rapport à la réduction des déchets ?). Ce récit ne devient pas pour autant un cours de politique fiction, car Harris n'oublie pas l'action et les intrigues (le sous-marin de Lars et Lucy), un peu de science-fiction ("Hydrocarbon remediation operation" en abrégé "HERO"), et une pincée discrète de surnaturel (Little Chief, Yalafath).



Avec ce deuxième tome, Joe Harris et Martín Morazzo confirment qu'ils ont créé une série originale avec un personnage principal complexe aux objectifs moralement ambigus (ou au moins discutables), dans un environnement très original, avec plusieurs composantes intrigantes.
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Great Pacific, tome 1 : Trashed !

Une série écolo sympa et différente
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Great Pacific, tome 3 : Chasse au gros

Il y a des tonnes de bonnes idées, mais ça manque de tripes globalement ! Comme un sentiment de pas assez !
Lien : http://www.sceneario.com/bd_..
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Great Pacific, Tome 2 : Fondation

Ce deuxième volume installe un cadre plus solide et on attend la suite avec impatience !
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Great pacific : Tome 1

C'est efficace, avec une narration bien ficelée ! Une série qui demande à être suivie pour se donner le temps de bien se développer !
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