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Critiques de Michel Aglietta (10)
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Capitalisme : Le temps des ruptures

Je n'ai lu que le chapitre 9, écrit par Michel Aglietta et intitulé : "Pour une croissance inclusive et soutenable". Il y pourfend le néolibéralisme de l'économiste Hayek dont s'inspirèrent Reagan et Thatcher et explique le passage de la politique sociale de l'après-guerre à la politique au service du profit des entreprises depuis les années 70 par l'influence des théories de Hayek dans le monde promues par la société du Mont Pèlerin (en Suisse). Aglietta préfère reprendre Keynes et plus récemment John Rawls dont il fait un "anti-Hayek" : il n'y a pas que le jeu de la libre concurrence, la défense des intérêts (des profits) privés et l'idée que l'actionnaire serait celui qu'il faut au final servir au seul motif qu'il apporte le capital ; les notions de justice sociale, d'équité, d'intérêt commun ont également un sens.



Pour une finance durable, il reprend l'idée de changer les normes IFRS (tout autant mise en place pour favoriser les actionnaires et la rémunération du capital) et s'inspire des travaux du CARE (Comprehensive Accounting in Respect of Ecology) qui font de la nature et de l'être humain non plus des ressources renouvelables, mais des éléments à intégrer au capital.



Pour réserver la monnaie à l'usage de l'économie réelle, il faudrait isoler son rôle de réserve de valeur de celui de moyen d'échange. Les cryptomonnaies pourraient le permettre, mais à condition de faire l'exact inverse de Bitcoin : couvrir les obligations par les banques centrales, isoler les usages, réguler les entreprises qui usent des monnaies numériques pour en faire des intermédiaires financiers. La banque centrale (européenne dans notre cas) pourrait émettre une telle monnaie numérique de banque centrale et donner à des banques de développement la liberté de financer sur la base de cette garantie de monnaie de banque centrale les projets liés à la transition écologique.



Des réformes lourdes seraient à prévoir au niveau de la politique européenne pour engager une telle politique au niveau du continent sur une durée qui dépasse le demi-siècle et à une époque où la légitimité populaire fait défaut.



Mais au-delà, la résistance du système dollar dont la masse monétaire ne cesse de croître alors que la part de l'économie étatsunienne ne cesse de décroître, ainsi que l'égocentrisme des États-unis à refuser toute forme de coopération, impliquerait l'établissement d'une légitimité politique internationale qui permette d'assoir les principes supérieurs du développement soutenable avant les intérêts des États.



Il achève son chapitre et donc le recueil en mentionnant que la pluralité monétaire pourrait permettre de stabiliser les systèmes économiques et favoriser la coopération internationale en multipliant les niveaux d'usage des monnaies (locale, régionale, nationale, etc). Il faudrait aussi prévoir un système d'échange de ces monnaies entre elles à un niveau international. Les DTS pourraient être remis au goût du jour pour cela.
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La monnaie. Entre dettes et souveraineté

Des premières monnaies, comme le Shekel à Sumer il y a 5000 ans à l'euro et au Yuan d'un système monétaire international réformé en passant par la monnaie dokima de Crésus fabriquée avec le minerai du fleuve Pactole, le système bimétallique en Grèce, le tétradrachme de la ligue de Délos, l'ambivalence de la monnaie chez Aristote, les crises financières à Rome, l'invention de la lettre de change par les banques italiennes qui fait naître le capitalisme et le marché monétaire international, la livre tournoi, la création de la banque d'Amsterdam, puis de celle d'Angleterre, son passage à l'ancêtre de la banque centrale, le système de l'étalon-or lors de la première mondialisation à la Belle Époque, les crises de 1907 et 1913, la création de la Fed américaine, les tentatives vaines de rétablissement de l'étalon-or durant les Années Folles, la crise de 1929, le système tripartite mort-né de 1936, Bretton Woods, puis son dépérissement, les quarante dernières années de dérégulation, et nous voilà arrivés à l'euro et au marasme contemporain d'un dollar à la fois irremplaçable et inadapté ; et à envisager un nouveau système tripartite euro-dollar-yuan pour l'avenir. Ouf, quel travail que ce parcours de 50 siècles de crises économiques, monétaires et financières !



Le parti pris de l'ouvrage est de montrer le lien entre la finance et la monnaie et de considérer, à l'encontre des théories "naturelles", que la monnaie précède et autorise la création du marché. La monnaie est un bien public, un lien social. Une dette est un retrait de ressources de la société ; une créance, un droit sur la société ; et un paiement reçu, une reconnaissance d'une contribution par la société. Ce qui génère le besoin de monnaie est le désir de liquidité. La masse monétaire est la capacité de liquidité de la monnaie ; le système monétaire doit garantir cette liquidité. Elle est assurée par la souveraineté politique qui assure le lien social et la pérennité de la société. Sans elle, pas de confiance, et pas de monnaie qui vaille. Mais comment faire alors à l'échelle de la planète où la notion de souveraineté n'a pas cours ?... Ah, il faut tout reprendre à zéro, alors...



La monnaie subit un phénomène d'abstraction : les métaux, la monnaie fiduciaire (la valeur affichée est arbitraire), la monnaie scripturaire (le nombre affiché sur son écran d'ordinateur). La multiplication des banques et le droit conférée de créer de la monnaie crée des tensions fortes et mène en 1866 à ce que la Banque d'Angleterre ne soit plus une banque concurrente des autres, mais une banque qui alimente en liquidités le système quand celui-ci vient à bloquer : la banque centrale était inventée. le système international est à peu près stable - les crises sont résorbées - jusqu'à la veille de la second guerre mondiale et la création de la Fed, la banque fédérale américaine en 1913. Pendant cinquante ans, la Banque d'Angleterre assure la convertibilité des monnaies du monde en or. le Franc ne concurrence pas la livre : les investissements en livres sterling ne sont pas dirigés vers les mêmes zones que le franc. La cohabitation fonctionne.



Mais les États-Unis, au début du XXème siècle, deviennent la première puissance économique mondiale, sans système monétaire, ou presque. le système ultra-libéral crée des dépendances vis-à-vis des autres banques du monde et empêche de mener une politique internationale. La création de la Fed menace directement la Banque d'Angleterre et la fin de la Première Guerre mondiale voit la fin définitive de la domination de la livre sterling sur le système monétaire international.



Bretton Woods consacre la suprématie du dollar mais contient une faille : les États-Unis sont condamnés à produire des dollars pour alimenter la liquidité mondiale : ils en produisent tant que la Bundesbank commence à penser que la convertibilité vers l'or n'est plus garantie et refuse d'acheter des dollars. En réponse, Nixon décrète l'inconvertibilité du dollar. C'était en 1971, on y est toujours. le dollar est sa propre valeur, il s'apprécie par rapport à lui-même et la taille et l'homogénéité de l'économie américaine l'autorise à continuer de supporter les échanges internationaux.



Le Yuan chinois vise à devenir une monnaie de réserve et veut aussi devenir convertible comme monnaie d'échange dans le monde, ce qu'il réussit de mieux en mieux puisque les pays en voie de développement qui commercent avec la Chine dépensent moins en l'utilisant qu'en utilisant le dollar.



L'euro reste une monnaie internationale, spéciale puisqu'elle remplace les monnaies nationales, et incomplète car elle n'est fondée sur aucune souveraineté. Les Allemands peinent à faire accepter leur ordolibéralisme aux autres États qui voudraient bien mener leur propre politique ; et le Conseil européen finit par mettre en conflit les intérêts nationaux. le budget européen n'est jamais connu qu'après coup, ce qui interdit toute anticipation, toute politique monétaire. L'absence d'homogénéité empêche l'euro de concurrencer le dollar en tant que monnaie d'échange international en le rendant plus cher, moins sûr et moins liquide.



Donc il faudrait retrouver une organisation internationale que pourrait prendre en charge le FMI puisque tel était son rôle du temps de Bretton Woods et qu'il a abandonné depuis. Il deviendrait une sorte de banque centrale planétaire. Une monnaie internationale existe déjà, ce sont les DTS (droits de tirages spéciaux), qu'il faudrait émettre en quantité bien plus grande, avec des quote-part par pays, etc. Avec cela, on pourrait se priver de ce qui ne se peut, à savoir une souveraineté universelle.



Pourtant, l'institution d'un ordre mondial implique bien une base de confiance mondiale qui, si elle ne se nomme pas souveraineté, pourrait se dire "opinion publique" - et que celle-ci n'existe pas. On rejoint ici ce qui était posé en début d'ouvrage, à savoir que la monnaie du XXIème siècle des États démocratiques dépend d'un espace public... devenu mondial...



Et donc, à la question "d'où viennent les milliards des banques centrales ?" la réponse est : d'une décision souveraine puisque c'est le rôle de la banque centrale d'autoriser la création de monnaie par les banques et d'en assurer la liquidité en cas de risque systémique, ce qui est bien le cas.



Et à la seconde question : "mais alors qui va payer ?" la réponse est : "les générations futures, à moins que ce ne soit personne puisque depuis quarante ans les dettes sont prolongées, accrues, reportées et non soldées - et tant que le système monétaire international n'est pas réformé et que c'est la Fed qui crée les dollars pour le monde avec ce "privilège exorbitant" selon l'expression de VGE d'un potentiel endettement infini, ça ne risque pas de changer".



À la troisième question : "mais qu'est-ce qui pourrait faire que cela change ?", question spéculative, il y a la réponse : "une crise majeure, de confiance, qui ferait qu'un pays ou une zone serait tellement endettée qu'elle n'obtienne plus la confiance de ses acteurs économiques à assurer la liquidité ; ou alors où la création monétaire serait devenue tellement importante et récurrente qu'elle mettrait en évidence l'absurdité d'un système qui "fuit" et créerait cette perte de confiance" ; à moins que la réponse soit que... que... ben, c'est tout en fait... non ?



Si, peut-être, qu'un espace public mondial permette de partager des valeurs qui seraient spontanément reconnues comme universelles et engageantes pour le monde comme l'environnement, les transports, l'exploration spatiale et celle des océans, la production d'énergie, etc., bref, qui permettraient aux "souverains", les populations donc, de faire la part des choses et de percevoir ce qui ressortit au bien commun universel du bien commun culturel et ferait que les politiques monétaires et industrielles (consommatrices de capitaux) se mettraient en place automatiquement pour articuler le nouveau système monétaire international sans qu'il soit nécessaire d'une catastrophe cosmique pour cela, avant qu'elle se produise du moins... on peut dire ça, non ?... ah ?... ah, non ?... ah... bon... bon...



En tous les cas, il ressort qu'un système monétaire repose sur une confiance uniforme, donc une certaine forme de culture ou de valeurs partagées par la population qui le légitime... Affaire à suivre...
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Le futur de la monnaie

J'ai apprécié les explications de la différence entre cryptoactifs, cryptomonnaie et monnaie digitale - en revanche, j'ai regretté que ces technologies ne soit pas mises en relation avec la promotion qui est faite dans ce livre des monnaies locales, de la nécessité d'améliorer le fonctionnement de l'Euro et du rôle des DTS comme « monnaie » internationale : est-ce que, justement, l'une ou l'autre solution (l'euro numérique à venir ; la réintroduction du Franc, du Marck sous une forme digitale ; la création de DAO régionales (bavaroise ? catalane ? bretonne ?) ; l'utilisation de DTS numériques) ne soutiendrait pas opportunément les besoins d'une transition écologique mise en évidence ici au travers des monnaies locales ? La liquidité et la stabilité de l'Euro ? La mutation nécessaire du SMI ?



Ces perspectives sont à nouveau abordées d'une manière traditionnelle : les lacunes du dollar et de l'Euro, la politique agressive et égocentrique des États-Unis, la montée en puissance de la Chine, les chiffres alarmants de l'écologie… on sait déjà tout cela.



C'est dommage, la pensée de Michel Aglietta qui fait de la monnaie un lien social est originale et enthousiasmante : parler de l'avenir en tenant compte des crypto aurait permis plus efficacement de réaliser le traitement de la promesse du titre - peut-être dans un prochain ouvrage ?…



(Erreur, me semble-t-il (interversion de termes), dans le schéma p.113...)
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Le dollar et le système monétaire international

Cet ouvrage est très intéressant dans sa partie historique, avec des similitudes qui ne peuvent manquer de frapper, même si cela n’apparait pas vraiment dans le texte, entre ces treize États d’Amérique du Nord qui se disputent vivement sur la question de savoir s’il faut ou non mutualiser les dettes résultant de la guerre d’indépendance, et notre situation européenne contemporaine, ce petit livre devient très confus dès qu’il aborde les questions techniques.

Par exemple, le paradoxe de Triffin, pourtant très simple, fait l’objet d’une explication inutilement longue et compliquée, et il en va de même dans la partie sur les accords de Bretton woods, quant au mode de fonctionnement de la proposition de Keynes.

La confusion croit au fur et à mesure qu’on avance dans le livre, et devient maximale dans les dernières pages, au point que l’on peut se demander si ces choses là sont seulement exposées de manière maladroite ou ne sont en réalité même pas claires dans l’esprit des auteurs.

Il reste que, dans son ensemble, sa lecture est tout de même utile.
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Zone Euro : éclatement ou fédération

Ce livre propose une récapitulation de la crise de la dette de l'euro par dix questions critiques sur les mesures prises ainsi que leurs résultats. Malgré un style d'écriture plutôt familier, Aglietta propose une lecture intéressante et pertinente de la crise, en proposant plusieurs solutions tirées d'exemples historiques et remaniées.

Très intéressant, cet ouvrage traite néanmoins d'un thème redondant et comporte plusieurs longueurs au fil des pages, ce qui rend la lecture parfois moins fluide.
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La monnaie. Entre dettes et souveraineté

Excellent ouvrage qui explique le rôle central de la monnaie dans l'économie.
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La double démocratie. Une Europe politique po..

Le récent ouvrage de deux économistes restaure patiemment la signification politique et sociale de ces « gros mots » de l’Union économique et monétaire, renouant avec le projet trop longtemps laissé en friche d’une économie politique européenne.
Lien : http://www.laviedesidees.fr/..
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La Voie chinoise

Cet ouvrage est sans conteste novateur et a pour grand mérite de placer le destin de la Chine dans une perspective globale à moyen et long terme. Cette étude ne voit pas le pays comme une menace pour la société internationale, mais davantage comme une opportunité de l'améliorer en redessinant un système à bout de souffle.
Lien : http://www.nonfiction.fr/art..
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Zone Euro : éclatement ou fédération

Michel Aglietta analyse de façon didactique la crise de la zone euro en posant une série de questions qui constituent la trame d’autant de chapitres.
Lien : http://www.laviedesidees.fr/..
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Zone Euro : éclatement ou fédération

Rédigé dans un style didactique, l'ouvrage offre des propositions constructives en faveur d'une Union plus forte, plus homogène, plus verte et plus démocratique. Projetant un regard qui ne se limite pas aux scores imposés par les agences de notation, très critiquées dans ce livre, Michel Aglietta s'en prend à la finance déchaînée autant qu'au dogmatisme des technocrates. Sera-t-il entendu ?
Lien : http://www.lemonde.fr/livres..
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