Quelque part, dans une des nombreuses galaxies de l’univers, au sein d’un double système solaire doté de nombreuses planètes marchandes, la planète Ikaré passait inaperçue. Cette petite planète auparavant vierge et inhabitée ne possédait ni minerais rares ni produits recherchés, les premiers colons, exilés de leur ancien monde et en quête d’un refuge paisible, l’avaient d’ailleurs choisie pour ces caractéristiques. La seule particularité digne d’intérêt de ce monde, depuis sa colonisation, était ses habitants, communément appelés les « Hommes Oiseaux ». Ce nom, attribué par les autres races galactiques dès leur arrivée, avait une explication et une légitimité bien réelle. En effet, chaque Ikaréen et Ikaréenne vivait depuis sa naissance en symbiose complète avec un oiseau. Celui-ci vivait la plus grande partie de son existence dans une poche dorsale protectrice - nommée le Nid – morphologiquement indétectable, qui se développait anatomiquement dès la conception de l’enfant. D’apparence humaine, tous les Ikaréens pouvaient cependant être identifiés comme tels par un tatouage caractéristique de taille variable et d’une grande précision. Celui-ci délimitait toute la surface du Nid et représentait avec un réalisme frappant le type d’oiseau accueilli par l’hôte et se nommait la Marque.
Un genou à terre, les yeux clos, Rosa reprenait son souffle. Détendue, l’esprit attentif au moindre détail : le bruit de sa respiration, la brise sur son corps recouvert de sueur qui faisait courir un long frisson sur les quelques parties nues de sa peau. La femme Rouge-Gorge se sentait infiniment libre en cet instant, apaisée, sereine et détachée du monde.
Rosa savourait la douleur de ses muscles et la fatigue euphorique que seul l’exercice physique intensif pouvait lui apporter. Cet état de grâce éphémère, si fragile, était une drogue pour le Lieutenant. Elle entendit Asor qui roucoulait son contentement de très loin, le manifestant par des sensations et des pensées désordonnées : ivresse, plaisir, bien-être. Son intervention accentua son état qui confinait, selon ses critères, à l’extase.
Elle regarda sa main gauche. Plus exactement sa paume dont la peau lisse et douce trahissait la jeunesse et le soin qu'elle apportait a en soigner la moindre égratignure a l'aide d'herbes et d'onguents.
Elle soupira et se concentra emplissant ses yeux du grain, du moindre pli, de la moindre ligne.
Puis elle ferma les paupières emplie de cette vision de sa paume et créa dans son esprit, dans l'image de sa peau un tout petit morceau d’étoupe bien sèche. Elle en visualisa tous les détails les plus infimes puis ordonna.
Existe.