PUF Presses Universitaires de France

Un savoir fondé sur le marketing ou un internet mal compris est une clé provisoire pour surfer à la surface des choses avant que la vague ne dépose l'individu démuni sur le rivage. Le prêt-à-penser se donne aujourd'hui à foison largement dispensé par le marketing et une immense partie des médias. La lecture, l'écriture et peut-être la pensée deviennent des formes de résistances face à un monde régi par la marchandise et le formatage des esprits.

David Le Breton

Je crois que pour accéder à l'histoire des autres, il faut commencer par bien comprendre celle de son propre peuple, non pas pour exacerber un quelconque ethnocentrisme, mais au contraire parce que là encore l'histoire particulière d'un vieux peuple introduit à toutes les facettes du comportement des sociétés humaines.

Thierry de Montbrial

L'éducation, aujourd'hui, en étant plus que jamais tournée vers une préoccupation exclusive du profit, avec le délabrement des humanités à tous les niveaux scolaires, court le risque de perdre son sens véritable qui est d'être une éducation à la citoyenneté. [...] La citoyenneté repose sur la construction d'un savoir mondial disponible. Préserver ce savoir est donc une exigence impérieuse qui permet de situer le niveau de décence d'une société. S'il est vrai qu'une "société décente est une société dont les institutions n'humilient pas les gens" (Margalit), alors seule la préservation institutionnelle d'une éducation au savoir permettra de donner sens à la démocratie contre les dérives néo-libérales qui en appellent à une culture tous azimuts du profit.

Guillaume Le Blanc

[...] il vaut mieux avoir du savoir pour pouvoir faire un peu de tri dans le déluge de désinformation. Le savoir permet de ne pas croire tout ce qu'on lit ou entend. Le savoir permet de détecter les erreurs, honnêtes ou non, de corriger la connerie, et dans une certaine mesure, de faire front à la foutaise.

Robert Kandel

Pour certains d'entre nous, le savoir ne relève pas du champ de l'utilité, mais de la nécessité. Il y a un besoin de savoir, qu'on appelle la curiosité, et que certains ressentent avec le même impératif qu'un besoin de respirer ou de s'alimenter. Un besoin créant un état de dépendance. Le savoir peut être une drogue, une course sans fin.

Jean-Baptiste Jeangène Vilmer

[...] notre Savoir reste toujours incomplet, la quête est toujours interrompue. Le Savoir trouve ainsi son unique raison d'être : interrompre le cycle du temps, frôler l'éternité. Qui n'a ressenti, en refermant un bon livre, le sentiment d'avoir vécu quelques instants ailleurs, oublieux de son environnement et de l'heure qui passe? Et de se lever du canapé un peu étourdi, comme au réveil quand on revient à la vie?

Pascal Gauchon

Plus généralement, c'est en convoquant les savoirs accumulés sur leur culture ancienne que les peuples libérés des régimes communistes et de l'occupation soviétique redonnent de la dignité à leur passé, qu'ils réhabilitent leur patrimoine, qu'ils réaffirment leur singularité. C'est en mobilisant des connaissances ethnologiques sûres qu'ils préviennent la manipulation politique de leur histoire.

Jean Cuisenier

des lieux
enfant je lisais partout, sur le tapis, dans le jardin, sous le pommier, dans le grenier; chaque livre avait son lieu : le tapis était réservé aux romans historiques et le jardin aux auteurs anciens, quant aux poèmes le grenier était leur place incontestée.
[...]
des livres à soi
le lecteur laisse une trace, soulevant le coin droit de la page avec le majeur, faisant ensuite glisser la paume sur le papier, sensuelle, comme à capter le sens avec la main.

Anne Cauquelin

[...] le savoir rend puissant; il ne rend pas bon. Le savoir a transformé radicalement la vie humaine, son rapport au temps, à l'espace, à la nature. Mais les hommes des Lumières avaient tort - le savoir ne s'est pas accompagné de progrès moral. Le savoir n'est pas nécessairement assorti de son usage réglé. Leçon amère qui contraint à reconnaître non que le savoir ne sert à rien, mais qu'il ne suffit pas au progrès social et moral.

Monique Canto-Sperber

L'historien s'attache, lui, à un monde révolu, sur lequel l'analyse peut s'exercer à plein, grâce à des archives ou à d'autres sources. Bien sûr, celles-ci ne donnent qu'un regard partiel de la réalité. Néanmoins, la reconstruction du passé constitue un exercice de l'intelligence et de l'imagination. Un parcours chez les morts permet de mieux comprendre les vivants, pour mieux aimer la vie.

Lucien Bély

Certes, le savoir nous grandit et nous permet de nous dépasser mais ses effets nous échappent et nous prennent à rebours. Les docteurs Folamour sont pléthores prêts à nous entraîner dans leur course folle. Science sans conscience... A charge pour nous, avide de "savoir" et de ses bons usages, de lui redonner le crédit et l'éclat de nos enthousiasmes d'antan.

Régine Azria

Ne disons pas trop vite que le savoir doit être partagé : il doit d'abord être acquis et thésaurisé, on doit en jouir pour le pouvoir offrir. Un savoir dont on ne tire pas de jouissance intérieure est un corps mort, qui va vite pourrir et ne saurait attirer le chaland.

Jean-Robert Armogathe