AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

4.71/5 (sur 7 notes)

Biographie :

Pascal Marichalar est chercheur en sciences sociales (sociologie, histoire, anthropologie). Après 15 ans passés à étudier les conditions de travail et la santé, il entame un nouveau programme de recherche sur les observatoires astronomiques, à l'intersection entre l'histoire des sciences et l'histoire environnementale.

Ajouter des informations
Bibliographie de Pascal Marichalar   (4)Voir plus

étiquettes

Citations et extraits (5) Ajouter une citation
[Les arguments en présence] témoignent de deux manières très différentes d'envisager le cas des victimes de maladies professionnelles. D'un côté, le juge se cantonne à la logique stricte de ce qu'il considère comme étant l'esprit des lois : la matière pénale a besoin de certitude ; or pas une des voix du dossier ne prouve avec une entière certitude que les maladies du verrier sont dues à son ancien travail, y compris parmi ses soutiens ; donc, il n'y a pas lieu de faire un procès. De l'autre côté, le médecin se réfère à l'état de la connaissance scientifique sur le cancer : il est généralement impossible de dire qu'un facteur plutôt qu'un autre a causé le cancer d'un individu ; les études scientifiques sur la cause des cancers sont toutes probabilistes, dans le sens où elles mettent en évidence des facteurs qui augmentent la probabilité pour un individu d'avoir un cancer ; dans le cas du verrier, les facteurs professionnels de cancers sont multiples, intenses et ont déjà été associés à ce type de maladies dans d'autres populations étudiées ; tout ceci devrait donc conduire à dire que c'est son travail qui a rendu Christian Cervantes malade, avant de tuer.

Sous la plume [du médecin], les éléments « sérieux et concordants » ne sont pas des preuves de seconde classe. Ce sont bien les meilleures preuves qu'on puisse avoir. Qu'à cela ne tienne : au nom du professionnalisme juridique, le juge continue d'exiger cette certitude de premier ordre, quand bien même, en l'état de la science, elle est rigoureusement impossible à atteindre.
Commenter  J’apprécie          40
Dans dautres circonstances, l'exposition intentionnelle à un danger de mort serait considérée comme une rupture majeure de la morale commune, et un crime au regard de la loi, qui plus est quand elle se solde effectivement par des morts, prévisibles et évitables. Mais il n'en va pas ainsi lorsque les faits sont commis sur le lieu de travail. À la suite de la plainte pénale de Christian Cervantes, des policiers et des juges se sont brièvement saisis de la question qui est le titre de ce livre. Cependant, ils n'ont pu y apporter même un début de réponse, par manque de formation sur ces questions mais surtout d'outils juridiques. L'enquête préliminaire a examiné s'il y avait la certitude d'un lien causal entre le travail de l'ouvrier et ses cancers, et a dû répondre par la négative, évidemment. En revanche, le fait que Christian Cervantes ait été intentionnellement exposé à des dangers notoires, qui lui ne fait aucun doute, a laissé le juge indifférent.
En engageant des poursuites pénales sur cette base, il aurait pourtant été relativement aisé de faire émerger des responsabilités, en posant juste quelques questions simples : qui savait qu'il y avait danger (et quand) ? Qui avait le pouvoir de protéger le travailleur de ce danger ? Et qui n'a pas utilisé ce pouvoir ? Mais un tel raisonnement relève de la justice-fiction. Il fait fi des forces profondes et anciennes qui s'opposent à ce que l'on utilise les notions de crime et de responsable dans la sphère du travail.
(page 218)
Commenter  J’apprécie          30
On s'en chargea pour eux : leur désir de justice fut soumis aux fourches caudines de la procédure de reconnaissance des maladies professionnelles. Au fil des années, aussi bien l'assurance maladie, l'administration du travail, la médecine du travail que l'institution judiciaire allaient tenir, de manière plus ou moins explicite, le même triple message à l'endroit des verriers : 1) il n'y a d'autre justice que celle de la reconnaissance en maladie professionnelle ; 2) une victime non reconnue ne peut être légitimement considérée comme une victime ; 3) une victime reconnue n'est elle-même plus une victime, puisque la réparation de l'injustice a eu lieu, et doit donc abandonner toute autre prétention.
(page 216)
Commenter  J’apprécie          20
La situation des verriers de Givors est emblématique de la condition contradictoire qui affecte aujourd'hui une grande part du monde ouvrier, et s'étend progressivement à d'autres secteurs du salariat. Tous les verriers qui dénoncent aujourd'hui la pénibilité de leur travail passé se sont fortement mobilisés, dix ans plus tôt, contre la fermeture de leur usine. Certains m'expliquent que les deux drames de leur vie sont la maladie et le fait d'avoir perdu leur emploi de verrier. Cette contradiction apparente ne résulte pas d'un raisonnement irrationnel. Elle n'est que le reflet de la tension structurelle dans laquelle sont piégés ces travailleurs face au chantage des délocalisations et des licenciements boursiers, un chantage orchestré par les employeurs et souvent légitimés par l'État, qui les a conduit à défendre un emploi dangereux pour leur santé plutôt que de se retrouver au chômage.
Commenter  J’apprécie          10
[U]n chercheur court le risque d'être discrédité en tant que scientifique « engagé », et donc bien peu fiable, quand bien même il fait face à des collègues qui sont consultants pour les entreprises, qui sont eux réputés « neutres » à condition de s'acquitter d'une déclaration formelle d'intérêts.
Commenter  J’apprécie          20

Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Pascal Marichalar (11)Voir plus

Quiz Voir plus

L'île du Crâne d'Anthony Horowitz par Victoria

Comment s'appelle le héros ?

David
Jeffrey
Alex
John

10 questions
924 lecteurs ont répondu
Thème : David Eliot, tome 1 : L'Ile du crâne de Anthony HorowitzCréer un quiz sur cet auteur
¤¤

{* *}