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Citation de genou


genou
07 septembre 2016
Il y avait eu alors un épais silence, comme si soudain tout le monde prenait conscience de la réalité des choses. Des hirondelles griffaient le ciel. Quelques chiens gueulaient dans les lointains. Les enfants aux cheveux tondus n'osaient plus bouger. Ils regardaient leurs pères ou leurs frères en mordillant leur pouce. Alors les gars étaient montés dans une grande charrette, tous ensemble, comme une fournée d'échafaud, et la carriole s'était éloignée dans des grincements d'essieux et des souffles de bêtes. Plus un mot, plus rien. Simplement des regards et des gestes timides, de brefs au revoir du bout des doigts, des mains levées comme pour caresser l'air. Ce fut seulement lorsque l'équipage tourna l'angle de l'église et disparut à la vue qu'on entendit, comme sorties désormais de nulle part, des voix entonner, tout d'abord faiblement, puis ensuite comme un claquement de fouet "Guillaume, Guillaume, tu s'ras foutu, ton casque à pointe on va te le mettre dans l'cul".
Sur la place, personne n'avait bougé ni parlé. Le maire était toujours là. La chanson s'éloignait. Il faisait bon. Un couple de pies perché sur le faîte d'un toit jacassait et se cognait le bec. On n'entendit bientôt plus quelles et plus du tout la chanson. Alors, seulement, les uns et les autres se décidèrent d'un pas traînard à quitter la place du village, en évitant les regards et les mots, en tirant les enfants par le bras, comme si toutes et tous venaient d'assister à un évènement dont il valait mieux ne pas parler. On s'enferma dans les maisons. Les rues ressemblèrent à un corps ouvert et vidé de son sang. Cela dura jusqu'au jour suivant.
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