Citations de Quentin Debray (71)
La cécité affective du psychopathe peut expliquer encore sa naïveté, son anosognosie, ses emportements, lui qui se croit si roué, si psychologue.
[instabilité sociale]... le psychopathe n'a pas de quille et dérive au moindre vent.
Comme l'a écrit Y. Pélicier ; "Les objets non investis ou mal investis ne sont que des outils. Le psychopathe ne les voit pas. Ce sont les pierres du chemin." Donc pas de morale, au sens biologique ou au sens légal, et ce mépris écrasant qui fait frémir quand le psychopathe passe à l'acte.
... le Moi du psychopathe est faible : il est immature, dépendant, la dépression menace.
Son destin est celui d'un aventurier le plus souvent illégal et médiocre mais que peut transfigurer l'acte héroïque.
Le psychopathe est différent de l'état limite qui est plus anxieux, plus névrotique, et se défend beaucoup moins bien contre lea société.
Le psychopathe est théoriquement bien différent du schizophrène puisqu'il n'est ni délirant ni discordant toutefois, il est des cas où les passages à l'acte prennent un caractère insensé et ce n'est pas sans raisons que l'on a pu qualifier de délires en actes le comportement du psychopathe.
La nosographie psychiatrique est un cimetière de formes cliniques symptomatiques bâties sur du sable. On pourrait décrire une multitude de formes tant est variée la symptomatologie du psychopathe.
... l'entourage du psychiatre Pour les parents, l'irruption d'un déséquilibré dans une famille est une catastrophe ; mais au-delà, les partenaires et les compagnons sont complices. Ce sont souvent eux-mêmes des psychopathes, ou des psychopathes par procuration qui prennent plaisir au passage à l'acte sans agir eux-mêmes.
En fonction de son intelligence, de sa capacité à séduire, de ses appuis, le psychopathe peut briller, réussir, s'approcher des plus grands dans le monde de la politique et des affaires ; mais il risque de retomber durement. C'est le destin de bien des héros (on pense à Manon Lescaut, à Lucien de Rubempré, à Barry Lindon). Mais le plus souvent, le malheureux psychopathe demeure dans un monde de médiocres, malgré ses agitations et ses intrigues.
... leur vie imaginaire est pauvre, en dépit des récits et des mensonges qu'ils dispensent.
Les facultés intellectuelles du psychopathe sont quasiment normales. Toutefois, certains auteurs ont pu suggérer que leurs capacités intellectuelles étaient meilleures dans le domaine des performances que dans le domaine verbal Il est possible également que les psychopathes aient une intelligence plus pratique qu'abstraite.
Le psychopathe n'a pas de volonté, de constance, de cohérence dans sa vie émotionnelle. Il n'acquiert aucune expérience venant du plaisir (les récompenses ne le satisfont pas ou du déplaisir (les punitions ne le marquent pas et, partant, aucune morale solide. On a volontiers parlé d'amnésie éthique à son sujet.
Le psychopathe est le jouet de ses passions. Amour, emportement, coups de foudre, déceptions, haines, ruptures remplissent sa vie affective qui apparaît très dépendante des circonstances. Cependant ces emportements sont superficiels, ne durent pas, ne se fixent pas ; on peut peine les qualifier de sentiments, états affectifs par définition durables. On a dit aussi que ces passions étaient inauthentiques ; elles ne remuent leur auteur que pour lui-même, sans réciprocité, sans véritable intérêt pour l'autre, sans amour. Il n'y a pas d'investissement au gré de ces relations que le psychopathe inaugure sans cesse.
Cette capacité du psychopathe à mentir, à se dérober, à changer d'existence, à être insaisissable - et finalement à ne plus exister de manière authentique pour la plupart des gens - a fait proposer le terme évocateur de personnalité pseudopathique.
... pour lui, "la norme est morne".
Ce terme de passage à l'acte, élégamment employé par les psychiatres, désigne en fait des actions extrêmement diverses depuis la fugue banale jusqu'au déoturnement d'avion en passant par le holup et le viol. Mais il implique d'une façon générale une rupture de tension, un accomplissement cathartique, à travers un acte dangereux, agressif, hors du commun.
L'agressivité physique du psychopathe est bien banale. Réagissant à la moindre sollicitation avec une sensibilité presque paranoïaque, il frappe facilement.
Dans son instabilité, le psychopathe est également guidé par le plaisir, ou plus exactement par le désir urgent de l'éprouver. Il supporte mal de retarder le moment du plaisir, de temporiser. Il supporte mal la frustration. Cela pourrait rendre compte de certains actes de délinquance, les vols en particulier : le psychopathe désire quelque chose, il le lui faut le plus vite possible, par n'importe quel moyen. Cependant, ce plaisir vite atteint est également vite comblé, et immédiatement il y aura un autre désir à assouvir.
Il ne faut pas penser que le psychopathe est un artiste qui a choisi par goût et en toute liberté un mode de vie itinérant et enrichissant on pense à Robert-Louis Stevenson ou à Valéry Larbaud). Le psychopathe ne vit pas cette vie-là librement, il est sans cesse en train de faire le projet d'une insertion sociale qui sera enfin paisible et confortable ; et ces projets du psychopathe sont touchants d'idéalisme et de naïveté dans leur paradoxal conformisme.