Citations de Robert Béné (38)
Il abandonna alors la fac de médecine trop chahuteuse et ses défilés protestataires pour entrer dans celle de droit, beaucoup mieux pensante,selon les déclarations de la branche maternelle. Mais le cours de droit ne tardèrent pas à engendrer, chez le jeune Poulacre, une certaine mélancolie qui se traduisit par des bâillements fréquents et une forte somnolence sur les bancs de la fac.
L'éclat de rire de Gégé eut le même son qu'une casserole fêlée mais heureusement le douanier n'avait pas l'oreille musicale.
Tous deux avaient compensé leur manque d'amour par un amour démesuré de l'argent et n'étaient possédés que par un seul désir, celui de posséder
Tiens donc, un cadavre, comme ça, devant ta porte ? Il est arrivé tout seul. C'est vrai que c'était peu de temps avant Noël
[les frères Baillon], deux marginaux dont la matière grise mijotait en permanence dans les vapeurs d'alcool.
Autour du Frederikshavn, c’était une effervescence continue, aussi bien du côté quai, où ne cessaient d’arriver des villages voisins de lourds chargements de barriques pour ses vastes cales, que du côté large, où des plates accostaient le flanc du navire, chargées de denrées diverses nécessaires au long voyage que le voilier allait bientôt entreprendre.
Quand on était en classe, tu étais un petit con, maintenant que tu es dans la politique, tu es une belle ordure
Le flot de paroles que l’alcool avait déclenché chez ce petit homme, par vert comme un martien, ni noire comme une cuisinière, mais rouge comme un homme que la passion emporte »
(il) choisit une belle chemise turquoise sur laquelle semblait batifoler de gros poissons multicolores parmi des algues ondulantes et phosphorescentes. Ainsi attifé, Gégé belle face avait tout l'air d'un aquarium;
« Après avoir longtemps attendu le prince charmant, Raymonde passa deux ans de sa jeunesse à attendre le facteur tout en faisant du crochet. »
Ludovic leva le nez de son assiette :
- Si ça ne vous ennuie pas, je voudrais bien dormir chez vous, cette nuit. Je ne suis pas pressé de montrer à ma femme ce qu'il reste de moi. Suzy le regarda droit dans les yeux pour lancer avec flamme :
- Mais tu es un héros, Ludo. Tu peux être fier de toi. Et ta femme le sera aussi.
Ludovic prit tout son temps pour vider son verre avant de dire tout simplement, d'une voix pleine d'une grande tristesse :
- J'en doute.
Après avoir pesé le pour et le contre, c'est à dire après avoir comparé son garage-studio, avec ses waters et sa douche à l'extérieur, à la maison dans laquelle vivait Gladys, avec sa spacieuse salle de bains, sa piscine et son jacuzzi, Joël Briand céda aux suppliques de la jeune femme : il décida de vivre chez elle, malgré sa présence débilitante.
— Sais-tu qu’actuellement est mouillée au large de l’île d’Aix une frégate, La Vaillante, qui attend une quinzaine de députés et quelques repris de justice pour les emmener en détention en Guyane ?
— Pourquoi les députés en Guyane ?
— Parce qu’ils ont déplu aux autorités actuellement en place, le Directoire. Et ces hommes-là ont tellement condamné de gens à la guillotine qu’ils commencent à craindre le courroux de la population, et pour leur sécurité, ils les envoient mourir à petit feu dans des pays lointains. C’est ce qu’on appelle pudiquement la guillotine sèche.
En silence, les deux hommes avaient contemplé de haut en bas ce bout de femme au visage entaillé de rides, à la silhouette vieillie prématurément, vêtue comme un épouvantail à moineaux. Leurs deux regards s'étaient alors croisés et avaient confirmé ce que chacun pensait : en la voyant, ils s'estimaient heureux d'être homosexuels.
– Jem ? Désirerais-tu un gin tonic ? demanda Tatiana Vanderloo, la compagne attitrée de celui que les intimes se plaisaient à appeler Jem (pour Jean-Edgar Marcellin).
Cette fois, l’écrivain prolifique, l’auteur de nombreux romans à succès, ouvrit grand les yeux et émergea du creux de la balancelle pour regarder sa compagne qui sortait nue de la piscine, la peau luisante et lisse comme un bronze de Maillol dont elle avait les formes généreuses.
– Avec plaisir, si tu me l’apportes.
J'ai toujours vu mon île comme un grand navire échoué sur le sable, dont l'équipage était, depuis la nuit des temps à la merci des calmes plats et des grandes tempêtes.
[...] Et voilà que, brusquement, tout s'écroulait.
Il avait, pour la première fois, une chambre, une vraie ou presque, où il était enfin seul, avec une fenêtre sans barreaux entre les étoiles et lui, mais au contraire ouvrant sur le jardin.
Les jambes coupées autant par l'effort qu'il venait de fournir sur son vélo que par les mots qu'il venait d'entendre, Maurice se laissa tomber sur le banc qui se trouvait derrière lui. Soudain, il eut l'impression que pour lui la guerre venait vraiment de commencer, car depuis qu'il était dans l'île, alors que partout la bataille faisait rage, il était sûrement le seul à vivre une période de paix et de liberté.
Il se sentait semblable à ce bois flotté, ballotté par la mer, venu de nulle part.