Serhii Plokhy

Dans une préface, l’auteur, Serhii Plokhy, éminent spécialiste de l’histoire d’Ukraine qu’il enseigne à la prestigieuse université de Harvard, explique qu’au moment de l’invasion criminelle de son pays d’origine, le 24 février 2022, il se trouvait à Vienne faisant des recherches sur la catastrophe de Tchernobyl. Interpellé par des journalistes, il a été un des tout premiers à prédire l’incroyable résistance ukrainienne à la soi-disante "opération militaire spéciale" de Poutine, censée ne durer que quelques jours, tout au plus quelques semaines.



Au moment d’écrire ces lignes, le conflit en est à son 578e jour, justement parce que les "nazis ukrainiens" ont résisté à une mainmise de leur pays par les troupes aux ordres du maître du Kremlin, au lieu de les accueillir avec des fleurs, comme on avait pensé naïvement à Moscou.



Pour bien comprendre cette guerre, l’auteur a adopté une approche "de longue durée", pour la simple raison que "la guerre a commencé huit ans plus tôt, le 27 février 2014" avec le rattachement de la Crimée à la Fédération russe.

Pendant les 7 ans suivants, dans le Donbass quatorze mille Ukrainiens sont morts "sans guère attirer l’attention de la communauté internationale".



Dans son ouvrage, dont la version originale anglaise est sortie le 29 juin 2023 et la version française le 7 septembre dernier, Serhii Plokhy remonte donc à l’effondrement impérial russe des XIXe et XXe siècles, car "à bien des égards, la guerre d’aujourd'hui est une guerre impériale à l’ancienne, menée par des dirigeants russes... qui se veulent les continuateurs des traditions expansionnistes" de successivement l’Empire russe et l’Union soviétique.



Cet ouvrage comporte 13 chapitres et compte en tout 394 pages, dont une cinquantaine de pages de notes de l’auteur, suivi d’un index fort utile en fin de volume.



Il s’agit par conséquent d’un ouvrage académique peut-être pas si simple à lire, mais, à mon avis, également et surtout d’un ouvrage capital de référence pour mieux interpréter cette guerre, dont l’issue est, selon l’auteur, important pour "l’avenir du monde dans lequel nous, nos enfants et nos petits-enfants allons devoir vivre".

J'ai beaucoup appris à la lecture de ce livre très riche et vraiment passionnant, et ce d'autant que l'histoire de l'Ukraine ne nous est souvent guère connue, sinon par bribes. Mais l'on a pu mesurer depuis peu la force du sentiment national ukrainien et ce que l'on a pu lire se révèle souvent fort lacunaire. Voici donc un livre qui comble un vide, car il présente une histoire de l'Ukraine depuis l'Antiquité jusqu'à maintenant. On comprend qu'il s'agit d'une histoire fort complexe qui implique la Russie bien sûr, mais aussi l'Empire ottoman, l'Autriche-Hongrie, la Roumanie et naturellement la Pologne et la Lituanie. Tiraillée entre ces Etats parfois fort puissants, l'Ukraine a vu se développer un fort sentiment national à partir essentiellement du 19ème siècle (comme ailleurs en Europe d'ailleurs rien d'original icI). L'auteur est très savant et parvient à nous guider dans cette histoire complexe en insistant par exemple sur la complexité sur le plan religieux.

J'aurai toutefois quelques petits bémols, des cartes certes mais bien peu utilisables en début de livre, c'est bien dommage car cela aurait été fort utile. Ensuite les parties sur l'histoire médiévale et moderne sont un peu trapus ! Enfin la partie contemporaine est très claire, elle, mais parfois un peu courte à mon goût (malgré les 500 pages du livre). Ainsi l'Holodomor est brièvement traité et la partie sur l'après-guerre soviétique est peut-être un peu rapide.

Mais ce sont là des reproches mineurs au vu de l'intérêt très grand que l'on peut prendre à lire ce livre !

C’était un livre plutôt intéressant, où l’auteur fait le récit de six des plus importants / graves accidents nucléaires, pour leurs conséquences dans l’environnement, sur l’Homme, ou simplement pour leur impact sur la conception des réacteurs nucléaires et la gestion de crise (Three Miles Island). C’est bien écrit, le récit est dynamique et prend presque la forme d’un thriller politique, car l’accent est souvent mis sur l’action (ou l’inaction) des décideurs dans l’après-accident.



Ce livre est toutefois compliqué à recommander car il est, je pense, réservé à une minorité : ceux qui 1) s’intéressent au sujet du nucléaire et de la crise 2) ont déjà des connaissances sur la physique nucléaire 3) connaissent bien le fonctionnement d’un réacteur nucléaire (et en anglais, sinon c’est pas drôle).



Bref si les noms de Bikini Atoll, Kyshtym, Windscale et Three Miles Island (je passe sur Tchernobyl et Fukushima que, je pense, tout le monde connait) vous parlent alors peut-être que cela peut vous plaire.

L’historien ukraino-américain Serhii Plokhy, dans son histoire de l’Ukraine, Aux portes de l’Europe, rappelle qu’on fêtait alors le tricentenaire du traité de Pereïaslav qui, le 8 janvier 1654, avait placé les territoires cosaques sous la protection du tsar moscovite – une « réunification de l’Ukraine avec la Russie », selon leurs termes, que les autorités soviétiques célébrèrent en grande pompe, en un temps où ce processus était censé trouver son apogée dans la marche unanime des peuples de l’Union vers le communisme.
Lien : https://www.lemonde.fr/livre..

L’universitaire, qui enseigne à Harvard, retrace toute l’histoire de l’Ukraine et de sa relation avec la Russie.
Lien : https://www.lefigaro.fr/livr..

Un an et demi après le début de l’offensive russe, l’historien ukraino-américain livre un modèle d’histoire immédiate de la première année de la guerre. Par son art du récit, il donne à comprendre toutes ses dimensions, sociales, politiques, historiques et théoriques.
Lien : https://www.lemonde.fr/livre..

Si penser ces frontières reste complexe, car cela impose de penser la rencontre de l’Ukraine d’un espace démocratique, il est désormais possible de le faire grâce Aux portes de l’Europe qui en administre la preuve de la plus belle des manières.
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Professeur à Harvard, Serhii Plokhy publie une somme sur le passé de l’Ukraine. Il y a presque une année désormais, la Russie violait les frontières ukrainiennes. «Aux portes de l’Europe» est un ouvrage capital pour répondre aux falsifications historiques.
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