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Critiques de Sophie Pietrucci (1)
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Contre les publicités sexistes

« La publicité est un vecteur puissant de la circulation des stéréotypes sexistes. Le publisexisme, c’est l’ensemble des images commerciales exposées dans l’espace public qui exploitent les clichés sexistes, les stéréotypes de la virilité et de la féminité, ou qui présentent l’hétérosexualité comme ”naturelle” par rapport aux autres orientations sexuelles. »



La publicité est intimement liée à la marchandise, matérialisation des besoins individualisés sous le capitalisme. Qu’importe alors si ces besoins sont réels, potentiels, artificiels, abordables ou fantasmagoriques. La publicité peut donc être relié à la théorie du fétichisme de la marchandise. Mais cette dimension, non traitée par les auteures, ne saurait à elle seule suffire à expliquer les mécanismes de prolifération de la publicité.



La publicité fonctionne aussi sur l’illusion, le rêve et la frustration, et pour se faire, s’empare des « normes » de fonctionnement des rapports sociaux, dont ceux de sexe (système de genre, patriarcat). La publicité est sexuée ; elle utilise la construction asymétrique de genre et ses normes, les remodèle, pour son objet, et les renforce. Cela est d’autant plus facile que la publicité simplifie la complexité, réduit l’être humain à la cliente ou au client, à une fonction de consommatrice/consommateur.



Le livre est divisé en cinq parties :



« Pourquoi s’attaquer à la publicité ? ». Sophie Pietrucci, Chris Vientiane et Aude Vincent examinent le système de la publicité, sa présence envahissante, ses images, à juste titre caractérisées comme politiques, les formatages des désirs. Elles montrent le caractère sexiste de la publicité



« Le publisexisme : l’image des femmes ». Les auteures analysent les stéréotypes de la Beauté (« Au travail de la beauté , tu te plieras », « Jeune tu resteras », « La minceur tu cultiveras », « Lisse tu seras ». Puis elles étudient comment la publicité utilise les femmes et leurs corps « Les femmes qui s’offrent » à travers l’utilisation du nu, de la disponibilité, des codes du porno. Sophie Pietrucci, Chris Vientiane et Aude Vincent déconstruisent d’une part « L’humour misogyne », la réduction des femmes aux « bavardes, dépensières, idiotes » ou « dominatrices », et d’autre part la place du foyer comme ”destin naturel”, avec son cortège de ménagères épanouies, de mères parfaites, de familles harmonieuses. « La publicité renforce donc les préjugés sexistes qui veulent que ce soit la mère et uniquement elle, qui ait la charge et la responsabilité des enfants (en bas âge ou plus grands). Elle glorifie l’instinct maternel, dont on sait à quel point il est construit socialement, et présente la relation entre la mère et l’enfant comme une relation où les hommes sont exclus. Indirectement, elle encourage les pères à se décharger de cette fonction parentale sur les mères, en toute bonne conscience, puisque ce serait une histoire de ”nature”… » Les auteures analysent aussi l’utilisation par la publicité des images des femmes comme « victimes passives » ou « proies sexuelles ».Elles concluent cette partie en mettant l’accent sur deux autres dimensions : les fantasmes racistes et l’éternel, mais néanmoins inventé, mystère féminin.



« Le publisexisme : d’autres clichés sexistes ». Les auteures soulignent les différences importantes entre la femme-publicité et l’homme-publicité et que « ce sont les femmes-publicité qui déclenchent le désir masculin » ou lors de l’utilisation de « genres non conformes ».



« Les effets du publisexisme ». La publicité peut-être assimilée à une campagne agressive permanente, un flux d’images, un martèlement de visions sexistes. Un des premiers effets et/ou une de ses premières causes est la négation de « l’oppression sociale des hommes sur les femmes ». Sophie Pietrucci, Chris Vientiane et Aude Vincent insiste sur une dimension, souvent omise : la vision sexiste martelé par la publicité « finit par apparaître non plus comme une opinion mais comme une ”vérité”. » Les auteures développent autour du thème de « la dictature de l’apparence » (marché de la Beauté, la Beauté facteur d’exclusion « Le culte de l’apparence et l’idéologie de la Beauté produisent de la culpabilité et une forme de honte vis-à-vis de son propre corps qui est un ferment idéal pour le manque de confiance en soi »). Elles poursuivent sur l’aliénation de soi (la guerre contre son corps), la domination des autres ou le fondement politique de l’oppression des femmes par les hommes. Elles détaillent, dans la publicité, l’idéalisation de la famille, le mode imposé de sexualité, la place du porno, la sexualisation des plus jeunes, le climat de mépris, la violence « Comme l’ensemble de la culture sexiste, il entretient aussi des mythes concernant la violence sexiste : ”l’homme violent a perdu le contrôle”, ”l’homme n’avait pas la volonté de faire mal”, « cela n’est pas grave”, ”la femme l’a cherché”. Ces idées préconçues sont dangereuses car elles permettent aux hommes auteurs de violence de dénier toute responsabilité de leur acte, à leurs propres yeux et aux yeux des autres » ou « L’érotisation de l’agression sexuelle fait passer deux croyances perverses : une femme que l’on force peut finir par y prendre plaisir, et le ressenti de la femme agressée n’a pas d’importance ».



« Lutter contre le publisexisme ». La publicité n’est ni neutre ni sans conséquences. « L’une des caractéristiques du publisexisme est bien d’offrir au regard de tous des femmes qui s’exhibent comme des marchandises à posséder ». Il convient donc d’en limiter la diffusion mais aussi d’agir en permanence pour en dénoncer les effets, faire reculer les publicitaires dans leur volonté de banaliser l’infâme, atteindre les sociétés par leur image de marque en refusant les thématiques sexistes, homophobes et racistes. Cela consiste aussi « à briser ce système d’images partout où on le voit sévir, à en démystifier les séductions, et pour commencer, à en cesser l’absorption ». Les auteures décrivent certaines luttes sur ce sujet et leurs effets non négligeables, même si trop ponctuels.



« L’émancipation, c’est aussi, à terme, parvenir à se libérer des stéréotypes, déconstruire la notion de Beauté, le modèle du couple idéal, les pratiques et les imaginaires liés à l’érotisme patriarcal (hiérarchie actif/passif, focalisation sur le plaisir génital et le coït, performance de l’orgasme, le plaisir comme un dû, etc.). C’est démonter systématiquement les mythes qui entourent le viol et la violence. C’est combattre la crédulité et l’ignorance pour inciter à renoncer à courir après des promesses miraculeuses. C’est donner plus d’importance à l’estime de soi qu’à la conformité à la norme, et aux relations égalitaires plutôt qu’à la concurrence et à la compétition. C’est apprendre à respecter son propre corps et le corps des autres comme une base élémentaire de relations égalitaires et solidaires. Ce qui peut contrer l’influence des publicités sexistes, c’est tout ce qui peut ouvrir des espaces d’action féministe, qui apprend aux garçons et aux filles à s’accepter semblables et égaux et non comme fondamentalement différents et pris obligatoirement dans un rapport de domination »



Le poids de la publicité a quelque chose à voir aussi, me semble -t-il, avec la perte d’espérance, la difficulté à rendre tangible une alternative d’émancipation, dont les dimensions concrètes et immédiates, pourraient desserrer les étaux de la marchandise, de la frustration, des normes telles qu’elles imposent. Ce livre et plus généralement la dénonciation du sexisme par un mouvement d’auto-organisation de femmes y contribuerait indéniablement.



Un livre dont certaines parties entrent en résonance avec le récent ouvrage de Mona Chollet : Beauté fatale. Les nouveaux visages d’une aliénation féminine (Zones, Paris 2012). Je rappelle chez le même éditeur : Contre les jouets sexistes (collectif)
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