Citations de Stéphanie Thomas (18)
Rares sont les femmes ou les couples qui au moment de prendre la décision de faire un enfant se livrent avec lucidité au calcul des plaisirs et des peines, des bénéfices et des sacrifices. La maternité est toujours baignée d’un halo de bonheur qui cache la réalité.
Quant à l’instinct maternel, contrairement à son appellation qui impliquerait que toute mère en serait dotée, il ne fait plus aucun doute que c’est un sentiment qui se construit au jour le jour. Il n’est certainement pas inscrit dans les gènes. Il est au contraire le fruit (ou pas) de l’histoire de chaque femme.
Plus près de nous, en Occident et depuis deux cents ans, il est un instrument de choix pour éveiller les petites filles à « l’instinct maternel ». Au début du XIXe, les poupées avaient l’apparence de jeunes femmes élégantes comme pour donner aux fillettes l’envie de grandir et de séduire. Puis en 1850, les fabricants de jouets créent des poupons asexués. Le succès est immédiat, la petite fille joue à la maman.
De la poupée de chiffon pour se faire les dents à la Barbie, le jouet est le seul à suivre la croissance de l’enfant et à se transformer avec lui. La poupée valorise les jeux de rôles et reste toujours liée à l’apprentissage des conduites féminines stéréotypées, couture, ménage, cuisine. L’enfant joue le rôle de la mère ou de toute autre personne qui s’occupe de l’enfant (nourrice, maîtresse, médecin, infirmière).
Je pense souvent au film Matrix. À la pilule bleue et à la pilule rouge. Sans hésiter, je prendrais celle qui me fait revenir en arrière. Je n'aurais pas d'enfant.
Le regret de maternité relève de l'indicible et de l'inavouable dans une société où ce sentiment va à l'encontre des fondements de l'organisation des sociétés humaines.
Et aussi étrange que cela puisse paraitre, c'est justement l'intérêt que ces femmes portent à leur regret qui fait d'elles des femmes investies dans leur rôle de mère.
Le regret naît d'une pression sociale qui voudrait que chaque femme ait vocation à devenir mère, bonne si possible, et l'expérience de chacune d'entre elles conditionne son rapport à la maternité.
« Je pense souvent au film Matrix. A la pilule bleue et à la pilule rouge. Sans hésiter, je prendrais celle qui me fait revenir en arrière. Je n'aurais pas d'enfant. »
"C'est ton père qui voulait des enfants. Maintenant que tu sais, il ne faut pas en parler. Il ne faut pas dégoûter les autres." J'étais encore plus en colère contre toutes les femmes de mon entourage et contre moi d'avoir cru au mythe sirupeux du bonheur de la maternité.
Une mère doit rester coûte que coûte avec sa progéniture. Elles sont victimes du diktat social qui impose aux mères de vivre sous le même toit que leurs enfants et de ne jamais quitter le domicile familial, quelles que soient les circonstances et en dépit des difficultés qu'elles rencontrent, la détresse qu'elles peuvent éprouver.
Dès lors que l'on choisit de mettre un enfant au monde, on parle moins de dons que de dettes. Du don de la vie de jadis, on est passé à une dette infinie à l'égard de celui que ni Dieu ni la nature ne nous impose plus et qui saura bien vous rappeler un jour qu'il n'a pas demandé à naître...
Aïna m'explique alors les conditions d'avortement à Madagascar. Qu'il soit spontané ou provoqué, l'avortement est passible de dix ans de prison. Chaque jour, trois femmes meurent des suites d'un avortement.
Ces injonctions de la société consistent non seulement à obliger les femmes à procréer pour la survie de l'espèce, « donner un sens» à leurs vies, leur faire croire qu'une fois mères elles seront de vraies femmes, prises au sérieux. Mais pire encore que de ne pas vouloir d'enfant, l'injonction suprême étant que, si cette condition de mère ne leur sied pas, elles se taisent. A tout jamais.
Là où Orna Dornath s'est intéressée dans son étude au regret comme fait social, c'est-à-dire le résultat d'une injonction exercée par la société, j'ai de mon côté cherché à "humaniser" le sujet en m'intéressant à l'histoire de ces femmes, avec l'intuition que les deux sont intimement liés.
Quels sont leurs parcours? Leurs expériences familiales? Comment ont-elles grandi? Rêvaient-elles d'enfants quand elles étaient plus jeunes? Où se tapit le regret dont elles parlent? Comment vivent-elles au quotidien avec ce sentiment indicible?
Le regret naît d'une pression sociale qui voudrait que chaque femme ait vocation à devenir mère, bonne si possible, et l'expérience de chacune d'entre elles conditionne son rapport à la maternité.
La sociologue Orna Dornath a mis en lumière le regret grâce à son étude, d'autres suivront et creuseront son sillon, des disciplines comme la psychologie ou la philosophie pourraient également venir l'éclairer.
Le regret de maternité relève de l'indicible et de l'inavouable dans une société où ce sentiment va à l'encontre des fondements de l'organisation des sociétés humaines. Il faut un niveau de conscience de soi et de courage considérable pour l'identifier, se l'avouer à soi-même et, encore plus, le dire aux autres.
Et aussi étrange que cela puisse paraître, c’est justement l’intérêt que ces femmes portent à leur regret qui fait d’elles des femmes investies dans leur rôle de mère.
le regret naît d'une pression sociale qui voudrait que chaque femme ait vocation à devenir mère, bonne si possible, et l'expérience de chacune d'entre elles conditionne son rapport à la maternité