Un livre réussi est selon moi une œuvre d’apothicaire. J’imagine souvent son auteur penché au-dessus de son établi, trois poils de ceci, une goutte de cela. Travaillant avant tout sur l’atmosphère, le rythme et tout un tas d’autres méticuleuses magies. On se doute qu’un tel boulot réclame du métier. Sylvette Heurtel en a. Ce tout nouveau recueil, Les Contes déraisonnables, est un très savant mélange. De douceur et d’ironie. D’humour et de délicatesse. Ce qui frappe, c’est avant tout la justesse, le sens du détail (Quand elle parle de la mer, le sel vous poisse les lèvres. Vous y êtes). Une mécanique qui n’en a pas l’air, un art consommé des dialogues, une science des parfums, des couleurs. Il fallait oser dresser un livre autour de l’absence. Sylvette a su y glisser ce qu’il faut de mélancolie et de tendresse. Un très beau recueil de nouvelles… Ma préférée ? « Ceux qui sont en mer ». C’est une perle. Au milieu d’un collier.
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Ces nouvelles de Sylvette Heurtel ont pour fil conducteur le thème de l'absence. La mer, le voyage et l'errance intime ainsi que les gens de mer y sont très présents.
Mais surtout, les personnages que l'auteur nous invite à rencontrer demeurent longtemps à notre esprit après la lecture. Comme de vraies rencontres, dans la vraie vie....
Il faut avoir un regard, de l'empathie et un un sacré talent pour nous rendre ces êtres de papier aussi vivants, surtout que la mort est souvent évoquée dans cet ouvrage. Absence, douleur ou périple, Sylvette en parle comme faisant partie de chacun et de nos existences, et elle apporte à son livre une humanité et une pudeur qui éclairent chaque nouvelle.
Un beau recueil à l'écriture ciselée avec au final, un véritable voyage. Et une boucle bouclée...
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Voilà. Je l'ai lu.
Si j'osais, je dirais dévoré. J'ai d'abord admiré l'objet, derrière lequel se cache une certaine philosophie. Que je partage.
Mais ce n'est pas tout. L'écriture est fine, fluide, subtile. Tout est dans l'ellipse, dans la suggestion. Je pense à La peau du loup mais aussi à Reine des glaces, etc... Il y a là une patte épatante et surtout une très grande maîtrise.
J'ai passé un excellent moment de lecture. Et croyez-moi, je suis difficile...
Alain Emery
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J'ai rencontré Sylvette Heurtel en 2008 lors du Festival Mauves en noir. Sa nouvelle "La Peau du Loup" avait croisé la mienne, "En eaux troubles", dans le recueil publié à l'occasion du concours de nouvelles.
Deux ans plus tard, La Peau du loup, ce conte noir qui flirte à la limite du fantastique fait partie d'un ouvrage que Sylvette a réalisé en collaboration avec l'imprimeur/éditeur Henry des Abbayes, à Fougères.
Un très beau livre contenant quinze nouvelles qui revisitent les figures du conte traditionnel. Des histoires pour les grands qui aiment encore se faire peur, à la façon des enfants, et qui apprécient la belle écriture.
Chaque texte est ciselé, coloré, parfumé, noirci, re-raconté, ré-inventé et certains réservent des chutes surprenantes. Ce recueil est vraiment un beau moment de lecture!
Des liens vers le blog de l'auteur et celui de l'éditeur:
http://retourdeletreaime.over-blog.com/article-contes-malpolis-46537331.html
http://retourdeletreaime.over-blog.com/ext/http://editionsdesabbayes.blogspot.com/
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Le recueil de nouvelles "Nous n'en parlerons pas" est le troisième ouvrage de Sylvette Heurtel publié par Henry des Abbayes. On y retrouve l’univers de la nouvelliste avec bonheur, ces moments de vie arrachés au quotidien qu’elle sait si bien sublimer… avec ce ton et cette patte qui n’appartiennent qu’à elle.
Chaque nouvelle est une invitation au voyage, dans un univers fait de rencontres, de départs avortés et de découverte du monde, si vaste ou si proche soit-il. Des voyages que l'on peut donc faire à sa porte, à quai, dans sa tête ou au milieu de l'océan. Le tout raconté avec une écriture tout en délicatesse, même pour dire la dureté de la vie.
On quitte chaque histoire avec l'envie d'en lire une autre. On a envie de s’attarder avec ce groupe de copines en vacances, d’aller parler à Harriet sur son bateau, d’aller frissonner à la fenêtre de Gibraltar, de retrouver les âmes perdues sur un chemin… Mais on finit quand même par arriver à la dernière page.
Une chose est sûre, Sylvette apporte quelque chose de nouveau à chacun de ses livres : on a le sentiment de voir évoluer son monde au fur et à mesure des histoires et des années. A chacun de ses livres son bonheur de lecture, un lieu où l’on voudrait être, une nouvelle fétiche pour le lecteur…
On en redemande.
http://editionsdesabbayes.blogspot.fr/2013/09/titre-nen-parlerons-pas-auteur-sylvette.html#more
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Le blog de Maryline Martin
http://maryscolors.blogspot.com/2010/03/les-contes-malpolis-de-mlle-h.html
Je fonctionne à l'instinct, j'aime ou je n'aime pas et je fréquente en littérature quelques chemins parallèles qui mènent à de jolies rencontres et à de très belles découvertes littéraires : la lecture des Contes Malpolis de Sylvette Heurtel en est une...
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Au bout de la lecture de "Quitter l'hiver" le roman de Sylvette Heurtel, je repense au dernier mot du préfacier. En effet une fois à bord de l'habitacle pour le road-movie promis, jusqu'au terme du voyage, je n'ai pas été tenté de descendre.
Dès les premières lignes, je suis saisi par l'originalité du style de l'auteure, spontané et désacralisé. C'est aussi une voix, des personnages bien campés et des évocations qui participent à la pertinence de l'histoire écrite ; puis les événements s'enchaînent comme vécus par le narrateur grâce à une restitution minutieuse de leurs cadres, et de l'atmosphère, offrant ainsi un régal permanent aux cinq sens.
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Quitter l'hiver n'est pas un polar, encore moins un thriller et pourtant, j'en ai tourné les pages comme si c'en était un.
Katia, jeune serveuse d'un restaurant parisien, est victime d'une tentative de viol par son patron. Elle évite le pire, assomme son agresseur et prend la fuite non sans avoir piqué quelques centaines d'euros dans la caisse de l'établissement. Un réflexe, pourrait-on dire, parce que son destin de fugitive est désormais scellé et tout est bon à prendre pour s'en sortir. En parallèle, Madeleine, auréolée d'une brillante carrière d'animatrice radio, voit se profiler à l'horizon la silhouette menaçante de la camarde. Cancer. Elle domine tant bien que mal les douleurs postopératoires et chimiothérapiques en fumant des bédos et décide de regagner son île natale, en Bretagne. Katia fait du stop. Madeleine embarque Katia. Et c'est parti pour une aventure au cours de laquelle les deux femmes vont se jauger, se découvrir et finalement se réunir dans ce que je pourrais qualifier de "chute horizontale", comme dirait Cocteau, d'autres penseront à un road movie, sauf qu'ici on sait où on va. Parmi les personnages qui viendront se greffer au récit, je citerai notamment Marcus, chanteur tourmenté qui s'échappe régulièrement sur l'île pour se réfugier dans l'alcool, à l'instar de bon nombre d'artistes que la notoriété répugne autant que l'insuccès, suprême contradiction.
Au fil du voyage, on découvrira d'autres protagonistes non moins attachants ou mystérieux, souvent fragiles, les liens se tissent, la vérité se fait jour.
Pourquoi ai-je parcouru ce livre comme un polar ? Eh bien parce qu'il y a la notion de danger, d'événement inattendu qui peut bouleverser le projet des deux femmes. Katia a abandonné son violeur inconscient sur le sol du local où a eu lieu l'agression. Est-elle une meurtrière ? Ou bien a-t-il survécu ? Si oui, il a peut-être alerté les autorités, d'autant qu'un vol a été commis… De son côté, Madeleine, très diminuée, sera-t-elle suffisamment forte pour accomplir son pèlerinage à rebours ? Si c'est le cas, comment se passeront les retrouvailles avec les îliens qui connaissent la jeunesse et l'histoire de celle qui est un jour partie pour devenir célèbre ? Tout est possible.
Avec ces incertitudes qui incitent à tourner rapidement les pages, on se surprend néanmoins à goûter les passages plus contemplatifs, offrant des moments bienvenus et intimistes. Bien décrits sont les paysages parcourus, l'atmosphère qui règne sur l'île, en digressions finement ciselées. Et puis il y a la souffrance de Madeleine, son délabrement physique évoqué tout en pudeur, sans tomber dans la pleurnicherie. Et il y a aussi, j'allais oublier… de l'amour. Bien que je ne sois pas très porté sur la littérature du genre (Marc Lévy ne fait pas partie de ma culture livresque, personne n'est parfait), j'avoue avoir été troublé par une scène de coup de foudre magistralement évoquée.
D'aucuns diront que l'écriture est fluide mais je n'aime pas trop ce qualificatif. En matière de littérature, la fluidité est devenue synonyme de simplisme, alors que le style de l'auteure, pour fluide soit-il, offre une narration parsemée d'embâcles habilement contournés, donnant au lecteur l'impression qu'il descend une rivière changeante, dans une espèce de faux rythme. On n'est pas sur le canal du Nord à bord de la péniche de l'homme du Picardie, si vous voyez ce que je veux dire.
Je vous invite donc à quitter l'hiver avec Sylvette, c'est aux éditions Henry des Abbayes, c'est une belle histoire à laquelle on croit, bien qu'elle soit suffisamment invraisemblable… pour faire un bon livre. Après tout, ce que l'on attend d'un roman, n'est-ce pas de tordre le cou au réel ?
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