Déjà, Rurik passait la tête par l'entrebâillement, puis un bras, qu'il agita.
– Bonjour Jocelyn, claironna-t-il. Vous n'avez pas l'air mal pour quelqu'un qui a failli mourir !
— Ils ont fait une brèche dans le mur et sont aux portes du donjon, madame. Gareth a dit que vous deviez rester ici. Vous avez reçu une pierre sur la tête et vous saignez beaucoup. La pression sur la tête de Sybilla s’apaisa, mais revint presque aussitôt.
— Nous essayons d’arrêter le saignement.
— Je ne vois pas, murmura Sybilla. Je ne vois pas !
Elle sentit qu’elle était en train de perdre sa maîtrise de soi et une terreur d’un nouveau genre envahit son cœur et son esprit.
— Ne parlez plus, madame, l’apaisa Aldys. Nous nous occupons de votre blessure. Tout ira bien.
— Emmène cette damoiselle et trouve-lui un endroit à l’abri.
Levant la main pour la poser sur sa gorge, elle se retourna, comme si elle voulait parler, mais, finalement, ne dit rien. La marque sanglante de la main de Giles maculait son cou et il savait que son gantelet de fer laisserait des bleus sur sa peau blanche et tendre ; cependant, la compassion qu’il commençait à éprouver pour elle s’évanouit quand il vit deux de ses hommes gisant au milieu d’une flaque de sang sur les dalles de pierre de la chapelle.
La surface lisse d’un lac gelé : voilà ce que son visage devait évoquer à cet instant précis. Le sourire courtois qu’arborait Arabella Cameron, tandis qu’un énième représentant du clan Mackintosh entonnait un poème dédié à sa beauté, menaçait de se fendiller d’un instant à l’autre. Exactement comme la glace sous les coups de pioche. Pourrait-elle résister encore longtemps à l’hilarité ? Certes non, si son admirateur continuait à se ridiculiser de la sorte… Son nez la chatouillait et l’expression d’intérêt poli qu’elle affichait céda bientôt la place à un large sourire, annonciateur d’un fou rire.
Shannon jeta un coup d'œil à la dame de compagnie de sa mère pour obtenir sa permission, avant d'approcher le lit.