Citations de Thomas More (177)
Alors, une discussion s’élève, la multiplicité et le conflit des opinions embrouillent une chose très claire en elle-même, la vérité est mise en question
Ainsi, ce qui devait faire la richesse de votre île en fera la misère, par l’avarice d’une poignée de misérables.
« Mais l’orgueil, passion féroce, reine et mère de toute plaie sociale, oppose une résistance invincible à cette conversion des peuples. L’orgueil ne mesure pas le bonheur sur le bien-être personnel, mais sur l’étendue des peines d’autrui. L’orgueil ne voudrait pas même devenir Dieu, s’il ne lui restait plus de malheureux à insulter et à traiter en esclaves, si le luxe de son bonheur ne devait plus être relevé par les angoisses de la misère, si l’étalage de ses richesses ne devait plus torturer l’indigence et allumer son désespoir. L’orgueil est un serpent d’enfer, qui s’est glissé dans le cœur des hommes, qui les aveugle par son venin, et qui les fait reculer loin du sentier d’une vie meilleure. Ce reptile s’attache de trop près à leurs chairs pour qu’on puisse facilement l’en arracher.
Chez l'homme en particulier, il existe une autre forme d'avarice, l'orgueil qui le porte à surpasser ses égaux en opulence et à les éblouir par l'étalage d'un riche superflu.
Les lois sont promulguées, disent les Utopiens, à seule fin que chacun soit averti de ses droits et de ses devoirs. Or, les subtilités de vos commentaires sont accessibles à peu de monde, et n’éclairent qu’une poignée de savants ; tandis qu’une loi nettement formulée, dont le sens n’est pas équivoque et se présente naturellement à l’esprit, est à la portée de tous.
Des Scylles, des Célènes, des Lestrigons mangeurs de peuples, et autres harpies de même espèce, on en trouve presque partout. Ce qui est rare, c’est une société sainement et sagement organisée.
Je ne saurais dire combien j'exulte à présent, à quel point je me sens grandi, à quel point je me fais de moi-même une plus haute idée. J'ai constamment devant les yeux la preuve que le premier rang m'est réservé par mes Utopiens; bien plus, j'ai déjà aujourd'hui l'impression de m'avancer, couronné de cet insigne diadème de froment, attirant les regards par ma bure franciscaine, tenant en guise de sceptre auguste la gerbe de blé, entouré d'une insigne escorte d'Amarautes. Et c'est ainsi qu'en grande pompe je marche au-devant des ambassadeurs et des princes des autres nations, qui nous font vraiment pitié avec leur sot orgueil, j'entends, de s'en venir parés comme des gamins, alourdis de toilettes efféminées, enchaînés avec cet or méprisable, et prêtant à rire avec leur pourpre leurs pierres précieuses et autres babioles creuses.
En général l'argent est le nerf de la guerre, soit pour acheter des trahisons, soit pour combattre à force ouverte.
Le roi qui nourrit une armée n'a jamais trop d'argent.
Mais n'est-il pas dommage de voir des hommes forts et beaux, de les voir se consumer dans l'inaction, s'amollir dans des occupations de femmes, tandis qu'on pourrait les rendre laborieux et utiles, en leur donnant un métier honorable, et en les habituant à vivre du travail de leurs mains ?
La nature inspire à chacun de caresser avec amour les produits de son invention. C'est ainsi que le corbeau sourit à sa couvée, et le singe à ses petits.
Le prince est la source d'où le bien et le mal se répandent comme un torrent sur le peuple.
A l'entendre discuter si savamment les institutions et les moeurs des différents peuples, il semblait qu'il eût vécu toute sa vie dans les lieux où il n'avait fait que passer.
Son âme est ouverte à tous ; mais il a pour ses amis tant de bienveillance, d'amour, de fidélité et de dévouement, qu'on pourrait le nommer, à juste titre, le parfait modèle de l'amitié.
Les magistrats en effet ne souhaitent pas éprouver les citoyens malgré eux par des fatigues inutiles. Car la Constitution vise uniquement, dans la mesure où les nécessités publiques le permettent, à assurer à chaque personne, pour la libération et la culture de son âme, le plus de temps possible et un loisir affranchi de tout assujettissement physique. En cela réside pour eux le bonheur véritable.
C'est la hantise de la pénurie qui rend avide et rapace, ainsi qu'on le constate chez tous les êtres vivants ; l'homme y ajoute l'orgueil, qui lui est propre et qui lui donne l'illusion que l'on dépasse les autres par un étalage de superfluités. Les principes des Utopiens ne laissent aucune place à ces mauvais sentiments.
Écoutez les axiomes de la morale politique proclamés unanimement par les membres du noble conseil :
Le roi qui nourrit une armée n'a jamais trop d'argent.
Le roi ne peut mal faire, quand même il le voudrait.
Il est le propriétaire universel et absolu des biens et personnes de tous ses sujets ; ceux-ci ne possèdent que sous son bon plaisir et comme usufruitiers.
La pauvreté du peuple est le rempart de la monarchie.
La richesse et la liberté conduisent à l'insubordination et au mépris de l'autorité ; l'homme libre et riche supporte impatiemment un gouvernement injuste et despotique.
L'indigence et la misère dégradent les courages, abrutissent les âmes, les façonnent à la souffrance et à l'esclavage, et les compriment au point de leur ôter l'énergie nécessaire pour secouer le joug.
Quand une proposition est faite, il est défendu de la discuter le même jour; la discussion est renvoyée à la pro- chaine séance.
De cette manière, personne n'est exposé à débiter étourdiment les premières choses qui lui viennent à l'esprit, et à défendre ensuite son opinion plutôt que le bien général; car n'arrive-t-il pas souvent qu'on recule devant la honte d'une rétractation et l'aveu d'une erreur iréfléchie?
Vous le comprendrez facilement, si vous réfléchissez au grand nombre de gens oisifs chez les autres nations. D’abord, presque toutes les femmes, qui composent la moitié de la population, et la plupart des hommes, là où les femmes travaillent. Ensuite cette foule immense de prêtres et de religieux fainéants. Ajoutez-y tous ces riches propriétaires qu’on appelle vulgairement nobles et seigneurs ; ajoutez-y encore leurs nuées de valets, autant de fripons en livrée ; et ce déluge de mendiants robustes et valides qui cachent leur paresse sous de feintes infirmités. Et, en somme, vous trouverez que le nombre de ceux qui, par leur travail, fournissent aux besoins du genre humain est bien moindre que vous ne l’imaginiez.
Considérez aussi combien peu de ceux qui travaillent sont employés
en choses vraiment nécessaires. Car, dans ce siècle d’argent, où
l’argent est le dieu et la mesure universelle, une foule d’arts vains
et frivoles s’exercent uniquement au service du luxe et du
dérèglement…