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Citation de nadejda


D’un bout à l’autre de mon enfance, l’odeur d’usine signe le retour de mon père. L’odeur puissante des cuves à distiller, qui excède toutes les odeurs connues de la nature, les aggrave prodigieusement. Odeur d’essences pures, lavande pure, rose pure, orange pure, vanille pure, parfois additionnées, citron pur et griotte pure, menthe pure et tubéreuse pure, trop compactes pour se dissoudre, s’annuler l’une dans l’autre : iris contre gingembre, encens contre violette, luttant à même la fibre des vêtements. L’odeur incruste les vestes de mon père, ses écharpes de laine, ses mouchoirs de soie, ses costumes, ses chemises, ses nœuds papillon, le cuir de ses chaussures, et aussi ses cheveux, la peau de son visage, la peau de ses mains, ses ongles, ses poils. Dès son entrée dans la maison, l’odeur d’usine dissout toute concurrence, le fumet de soupe et de gratin en train de cuire, les effluves de savon de Marseille de la salle de bains, le tabac froid, l’humidité des murs. L’odeur précède mon père, l’escorte dans les couloirs, marque son sillage comme l’herbe couchée le passage d’un animal.
(...) L’odeur dessine un territoire, le territoire de mon père.
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