-Quel nom ?
- Celui de la légion ! Il m’a dit : général, ces hommes sont à toi, j’en réponds sur ma vie, mais je veux leur donner moi-même un nom ! J’ai répondu : d’accord, vas-y, un nom d’animal. Tu sais ce qu’il me répond ?...Alouette. Je lui dis : « Alouette » ?! Mais c’est ridicule ! Pourquoi pas « Poulet » pendant que tu y es ! Chez nous on donne des noms sauvages, ours, lion, des trucs comme cela tu vois ! Il ne voulait pas en démordre. Alors, j’ai fini par lui demander : mais, tonnerre, pourquoi « Alouette » ? Il m’a répondu : « une alouette, elle va où elle veut, et rien ne l’arrête ! » J’ai éclaté de rire. C’était bien vu ! Alors je lui ai dit : « D’accord ! Va pour « Alouette ! ». Quand je vais apprendre cela à César, il va me botter le cul !
Nous ne laisserons pas nos maisons, nos villages, nos villes, nos récoltes, tomber aux mains crochues des Romains, des Germains ou de tout autre rapace envahisseur. Avant le grand départ, nous brûlerons tout, nous mettrons le feu à ce qui fut notre pays et notre terre. Comme nos ancêtres venus de l’est l’ont fait avant nous, nous émigrons, définitivement, pour offrir à nos descendants un sort meilleur et digne de notre peuple. Par les dieux, nous vaincrons !
-César attend peut-être des ordres de Rome ? hasarde le Tulinge.
-En Gaule, César est Rome ! explique Artébax, le druide.
-Quel nom ?
- Celui de la légion ! Il m’a dit : général, ces hommes sont à toi, j’en réponds sur ma vie, mais je veux leur donner moi-même un nom ! J’ai répondu : d’accord, vas-y, un nom d’animal. Tu sais ce qu’il me répond ?...Alouette. Je lui dis : « Alouette » ?! Mais c’est ridicule ! Pourquoi pas « Poulet » pendant que tu y es ! Chez nous on donne des noms sauvages, ours, lion, des trucs comme cela tu vois ! Il ne voulait pas en démordre. Alors, j’ai fini par lui demander : mais, tonnerre, pourquoi « Alouette » ? Il m’a répondu : « une alouette, elle va où elle veut, et rien ne l’arrête ! » J’ai éclaté de rire. C’était bien vu ! Alors je lui ai dit : « D’ accord ! Va pour « Alouette ! ». Quand je vais apprendre cela à César, il va me botter le cul !
- Tu as emprisonné mes officiers au mépris de nos accords. Traîtrise ! Félonie ! Pire qu’un crime !...Et tu viens, sourire aux lèvres, demander la paix ? Tu te moques de moi, le vieux ! Une larme perle à la paupière du Gaulois.
- Où sont-ils ? gronde César.
« Résister ? Peine perdue ! Mentir ? Inutile, ce Romain saura tôt ou tard ! »
Au-delà des montagnes de la peur, ce paysage âpre, torturé et tourmenté qui déchire les yeux et broie les tripes, s’étend la plaine infinie de la sérénité, calme à tout jamais, pays où les corps ne pèsent plus, où l’angoisse, interdite de séjour, s’effiloche dans le néant, où seules s’étalent les beautés du monde. Franchir la frontière n’est pas affaire de volonté. Elle s’offre d’elle-même lorsque la déesse Spes, la précieuse, la belle, l’omniprésente Espérance, s’évanouit, laissant l’homme seul, face à sa destinée.
La frontière…
L’Ancien redresse le torse. Comme par magie, les rides désertent son visage, les yeux s’animent, les épaules s’affermissent, la silhouette se cambre, gommant d’un coup des décennies de décrépitude. Même la voix, claire et lumineuse, traduit la métamorphose.
Devant lui, César, dont l’emportement tord les traits, paraît vieux.
L’Ancien fixe son vainqueur d’un air tranquille.
-Ils sont morts, dit-il.
-Les Helvètes sont les plus forts. Je n’ai pas peur d’une poignée de Romains !
Le Tulinge tente de détourner de son ami Rauraque la colère d’Harilac.
-D’abord, ils ne sont pas une poignée, ils ont déplacé une légion ! Ensuite, des auxiliaires de chez eux ont entendu dire que trois autres légions étaient en route. Enfin, nous avons un long chemin à parcourir jusqu’à l’océan. Les occasions de montrer notre bravoure ne manqueront pas.
-Hein ? Quoi ?
-Nous disions : avec les Romains, on se bat ou on négocie ? résume Ségorix.
-Mieux vaut vaincre sans combattre que combattre sans vaincre !
- On embarque des armes ? demande un costaud court sur pattes.
- Dans cette affaire, l’arme, c’est ton navire ! réplique Gabalisco. Inutile d’encombrer le bord de boulets, de flèches ou de javelots. Tout ce fatras ne nous sera d’aucune utilité.
Quelques ordres encore, puis une courte allocution du roi Dagomar, suivie d’une invocation des dieux par Dervocon, et les capitaines, Gabalisco en tête, rejoignent leurs bords.
Un chef de guerre rend rarement hommage a son ennemi. Eh bien moi, César, j'ose. devant toi Minerve, je glorifie l'héroïsme admirable des Nerviens!
- Nous n’avons pas perdu notre temps en venant ici. Tu as raison, le Chauve ! Ces rafiots sont bons pour les eaux plates ! Des planches ! Voilà ce que c’est ! Des planches avec des bonshommes dessus ! Mais ça ne suffit pas à en faire des navires. Et encore moins des navires de guerre. Ah ! Ah ! Ah !
L’œil de Gabalisco étincelle. Frottant l’une contre l’autre ses larges mains calleuses, il suppute le rapport de force entre ses massifs vaisseaux hauturiers, hauts de franc-bord, solides comme des rocs, dotés de proues et de poupes vertigineuses, habitués à étaler tous les coups de chien sans gémir, et les embarcations romaines effilées, fluettes, élégantes, presque frêles. Un sourire de loup éclaire sa face burinée.