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3.96/5 (sur 10 notes)

Nationalité : Italie
Né(e) à : Cassacco , le 26/07/1930
Mort(e) à : Udine , le 25/12/2009
Biographie :

Carlo Sgorlon est né le 26 juillet 1930 à Cassacco dans le Frioul en Italie et mort le 25 décembre 2009 à Udine, c’est le deuxième d’une famille de cinq enfants.
Sa mère est maitresse d’école et son père couturier, il a beaucoup vécu à la campagne avec ses grands parents dans une grande liberté et sans vraiment aller à l’école, il revenait en ville à la fin de chaque année scolaire pour les examens de passage dans la classe supérieure et retournait s'immerger dans la vie rurale du Frioule. Il est allé au collège à Udine où il est marqué par l’enseignement d’un professeur qui lui fait découvrir la poésie et l’art.
A 18 ans il est reçu à l’école normale supérieure de Pise, il y réalise des études de Lettres et fait une thèse sur Kafka. Il mène ensuite parallèlement une carrière de professeur de lettres et d’écrivain.
Ses romans sont intimement liés à la vie paysanne du Frioul avec ses légendes, ses croyances, les drames de la seconde guerre mondiale et la coexistence de populations si différentes sur une même terre.
Il a remporté une quarantaine de prix littéraire dont le Campiello deux fois et le Strega.

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Source : http://www.sgorlon.it/
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Bibliographie de Carlo Sgorlon   (5)Voir plus

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Citations et extraits (19) Voir plus Ajouter une citation
Il existait beaucoup de légendes sur l'origine de la taïga. Falaleï en avait fait le récit à Marco, alors que celui-ci allait le voir dans son isba. C'étaient des mythes fort anciens, que les hommes s'étaient peut-être racontés entre-eux peu après avoir inventé le langage, et quand ils expliquaient toutes choses au moyen d'histoires imaginaires.
L'une racontait que la terre avait inventé la taïga parce qu'elle voulait se soustraire aux furies du ciel et se créer un abri contre la violence des orages continuels. Une autre disait que la forêt avait été crée, au contraire, afin que les hommes qui poursuivaient l'élan femelle avec des arcs et des bâtons perdent ses traces. Cette femelle immense et maternelle, avec son museau de chameau et son corps mi-cheval mi-cerf, était la mère antique, la génitrice de tous les animaux de la forêt. La toundra résonnait du bruit rythmé de ses sabots, qui dans sa fuite éperdue s'entrechoquaient à une cadence régulière. Les animaux prièrent les dieux de la terre de sauver pour toujours leur grand-mère, et alors la toundra et la steppe se transformèrent d'un seul coup en une forêt sans fin, où tout poursuivant se perdrait et où les animaux, au contraire, se sentiraient parfaitement chez eux. Ainsi l'élan fut sauvé et la taïga devint un labyrinthe inextricable, où tout chasseur s'égarerait.
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Comme nous, elle rôdait autour de l'église orthodoxe, mais n'y entrait pas pour ne pas tomber dans l'infamie de l'infidèle. Elle éprouvait de la nostalgie pour les villages kirghizes où l'on priait Allah plusieurs fois par jour et où les gens s'inclinaient jusqu'à la terre, le visage tourné vers la ville sainte. Elle aussi ressentait comme une faute d'avoir perdu son Dieu, et de ne plus pouvoir le prier à la manière des siens, comme si la religion avait disparu du monde. Mais peut-être la nostalgie remontait-elle encore plus loin dans le temps, jusqu'à trouver dans son sang, dans la partie le plus reculée de son esprit, les dieux les plus anciens de son peuple, ceux qu'ils priaient auparavant, parce que même Allah était un Dieu étranger et récent, et donc un peu chancelant et fragile, auquel les gens prêtaient une attention distraite, comme dans un demi-sommeil.
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Désormais je pouvais disparaître dans la Russie infinie, et rien dans l'ordre du monde ne changerait. Et puis moi, au fond, je savais que la Sibérie était partout, que toute vie était Sibérie, l'exil, la vie "tal forest", dans un service militaire sans fin. Partout j'étais chez moi et partout j'étais étranger.
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L'une des choses qui, étrangement, nous unissait était un coquillage qui s'offrait à la vue de l'hôte sur le dernier rayon d'une étagère aménagée dans le mur. Ce grand coquillage en spirale ressemblait à la coupole d'une pagode orientale qui finirait en flèche. Anataï l'avait eu d'un Mongol en échange d'un couteau en manche de corne. Mais le Mongol l'avait eu d'un Tibétain, auquel l'avait donné un Indien, pour lui avoir enseigné à reconnaître une herbe qui guérissait la dysenterie. C'était donc un coquillage qui avait une histoire. Aucun de ses propriétaire, sauf le premier, n'avait vu la mer. Anataï et Aïdym le regardait l'un et l'autre comme une relique. Quand le vieillard le prit pour que nous le rapprochions de notre oreille et entendions le bourdonnement dans sa spirale, je compris à quel point il nous faisait confiance et nous offrait son amitié. Chacun de nous écouta longuement, avec beaucoup de sérieux, comme si, à l'intérieur, était tapi un génie invisible qui, dans un murmure, prédisait notre sort. Dès que nous entrions dans l'isba, notre regard aussitôt se portait du côté du coquillage, comme pour nous assurer qu'il était encore là et que tout était en ordre.
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Tandis qu'il polissait ses meules, il pensait et repensait au mystères de l'univers. Il était convaincu que Dieu n'habitait pas hors du monde, au bout des neuf cieux, mais en lui-même, et était même le levain et le grain qui faisait croître la nature entière. Il se mit à dire aux gens de son village et à ses clients qui venaient dans son échoppe que les prêtres expliquaient les choses au moyen de fables, et qu'au contraire il fallait se mettre à réfléchir et à trouver des pensées pour grandes personnes. Que Dieu dormait dans les pierres et dans la terre, rêvait dans les chiens et dans les lièvres, et se réveillait et prenait conscience de lui-même dans l'homme.
Longtemps Francesco avait été raillé et pris pour un fou par les paysans et par le prêtre lui-même. Mais ensuite quelqu'un avait écrit des lettres anonymes, et Francesco avait été traduit devant le tribunal religieux de la ville afin d'exposer ses doctrines. Une première fois les juges le renvoyèrent chez lui, le tenant seulement pour un sot et un insensé. Mais la seconde fois ils le gardèrent longuement au cachot, lui firent subir interrogatoires sur interrogatoires, et à la fin il fut brûlé en pleine place, sur un tas de fagots.
Pour moi ce Francesco, dont le prêtre du village avait écrit l'histoire, n'était ni un exalté ni un gâteux. Il était au contraire plein de sagesse et il avait une intuition des choses très proche de la mienne. Sentir la terre comme une mère avisée et mystérieuse était une pensée sœur et compagne de celle du Francesco des meules. Son ombre se tenait derrière moi, et je la sentais comme celle de mes grands-parents et de mes arrière-grands-parents qui, cheminant à travers le monde, m'avaient précédé.
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Mais en contrepartie de tout cela, nous travaillions au chemin de fer le plus long du monde. C'était quelque chose de si vaste que nous ne pouvions pas même l'imaginer dans son intégralité, et que nous devions y penser comme une multiplication infinie de cette petite partie qui composait le cadre de nos expériences, parce que nous l'avions bâtie. Pour tous nos pensées restaient fixées sur ce jour, encore blotti dans le giron du futur, où nous verrions déboucher du fond de la bande déboisée la cheminée en forme de champignon d'une locomotive, et son long panache de fumée noire...
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- On les laisse tranquilles ? Mais tu te rends compte ? Il y a des gens qui passent leur temps à prier et à se battre le poitrine. Toute leur vie n'est qu'illusion. Mais tu te rends compte ?
- C'est une illusion pour tout le monde. Nous sommes tous portés par l'illusion. Nous n'avons la force d'aller de l'avant que parce que, devant nous, il y a le fantôme de l'espoir...
- Tu crois ? C'est bien possible. Oui, maintenant que j'y pense, tuas sûrement raison. Tout est illusion. La seule chose certaine est la mort. Et nous, nous ne faisons que réchauffer en notre sein, pendant toute la vie, l’œuf de la mort, qui tôt ou tard éclora...
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Alternaient en lui curieusement des pensées et des rêves à double face. Il savait que sa mère était morte à l'hôpital d'Oulan-Oude, et pourtant il l'imaginait en voyage dans des contrées lointaines, avec la tribu dispersée dont il avait entendu raconter la légende par Aïdym. La Tribu était partie pour un long voyage dans la steppe, l'année du Grand Vent ; ensuite on avait perdu tout signe et toute trace d'elle, et elle continuait éternellement à marcher, à l'écart de toute piste et de tout sentier, et jamais ne pouvait parvenir à destination, frappée qu'elle était par une obscure malédiction.
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Falaleï se rendit compte que les fables, qui avaient vieilli et fané en lui depuis des années, retrouvaient leur fraîcheur et leur verdeur lorsqu'il y avait un enfant qui les entendait pour la première fois ou la centième fois, avec une attention béate. Il les avait empilées dans sa mémoire, pêle-mêle, et il les avait laissées là se couvrir de poussière et de moisissure. Mais à présent elles redevenaient valables, et il les reprenait petit à petit, les dépoussiérait, leur donnait une nouvelle existence et un nouvel éclat. Mon Dieu ! Combien il en connaissait ! Jamais, ô grand jamais, il n'aurait crû qu'il y en eût autant. Il pensait les avoir perdues et oubliées, et en revanche non, elles étaient là, en lui, comme dans l'attente de revenir au grand jour. Il lui suffisait d'attraper le bon bout pour pouvoir ensuite les dévider et les raconter jusqu'à la fin. En elles, il voguait avec quiétude et sans embûches, comme un navire sur les fleuves paisibles de Sibérie, et il arrivait immanquablement à l'embouchure. C'était une navigation qu'il aimait, qui correspondait à sa nature profonde.
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Pour eux, les choses demeuraient toujours les mêmes, parce que le monde était incurablement vieux, corrompu, chargé de malheurs qui y étaient attachés comme le gui le plus tenace. Le temps s'écoulait, mais s'écoulait mal, sans évolutions. Je voyais bien que toute chose avait un côté lumineux et un côté obscur, mais eux ne distinguaient que le sombre versant négatif. La justice était un songe auquel les hommes, éternels enfants, ne savaient jamais renoncer.
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