AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Nat_85


Je remercie François des éditions Envolume pour l'envoi du roman » La traversée des mensonges « de Joseph AGOSTINI paru en ce tout début d'année 2020.

Joseph AGOSTINI est psychologue clinicien, chroniqueur sur RTL et au Huffington Post. Il traque l'inconscient à travers ses différents essais littéraires et ses pièces de théâtre. Il est l'auteur de Dalida sur le divan, Gainsbourg sur le divan, Manuel d'un psy décomplexé et Manuel pour en finir avec la mort aux éditions Envolume.

La famille Santini se retrouve à la morgue de Marseille suite au décès de Claude, le père. Fabienne a une dernière faveur à demander à ses quatre grands enfants : accompagner le corps de leur père dans une ultime traversée vers Ajaccio. Mais en ces instants si propices à la solennité et au recueillement, ce voyage devient le terrain des règlements de comptes. Les langues se délient, comme trop longtemps contenues.
p. 11 : » Je m'appelle Thomas Santini, j'ai trente-six ans et je suis cardiologue à Bastia. J'ai deux enfants, Maé et Virginie, de respectivement trois et six ans. Je les ai eus avec une femme formidable, Chloé, gynécologue à Pietranera, à deux pas du centre-ville. Nous nous sommes connus pendant nos études, je suis resté avec elle dix-sept ans de ma vie. Et puis, un beau jour, je suis tombé amoureux de sa meilleure amie, Véronique. «
Or, voilà, quoi de plus embarrassant et de plus culpabilisant que de s'envoyer en l'air avec sa maîtresse lorsque l'on apprend le décès de son père ? A priori, pas grand chose, si ce n'est que ça n'est que la partie émergée de l'iceberg ! Lui qui a été si longtemps la fierté de ses parents, le fils prodigue, on peut dire qu'il a fait voler en éclats cette image !
p. 13 : » Véronique n'a plus voulu me revoir pendant six mois. Elle ne m'a donné aucune nouvelle. Pas un texto, rien. Je me disais qu'elle me tenait pour responsable de la mort de Jean-Christophe. Et j'avais fini par me persuader qu'elle avait raison. J'avais honte, je me sentais comme la dernière des merdes. «
C'est Nina qui retrouve en premier Fabienne et Thomas à la morgue.
p. 17 : » Je m'appelle Nina Santini, j'ai trente-trois ans, je suis professeure des écoles à Lyon, je roule en MiniCooper et j'écoute Chérie . La veille de la mort de mon père j'étais allée au théâtre avec ma femme Samira, voir La Cantatrice Chauve d'Eugène Ionesco. «
Lesbienne, mariée à Samira, arabe, philosophe et aveugle ! Il n'en fallait pas moins pour bousculer cette famille corse raciste et homophobe ! Mais cet éloignement n'a pas été sans conséquences…
p. 17 : » Les pensées de Nina s'enchaînent sans qu'elle puisse les arrêter, comme si elles étaient prises dans un noeud logique implacable. Elle prend conscience qu'elle a, tout au long de ces mois, donné tout pouvoir à Thomas, en lui laissant la mission de sauver leur père et ne doutant absolument pas de sa capacité à y parvenir ! «
C'est dans un état d'esprit empli d'une grande contrariété que la famille se résout finalement à prévenir Georges, l'aîné de la famille, parti vivre en Inde.
p. 33 : » – Tu as raison, murmure Fabienne. Préviens Georges, dis-lui de nous rejoindre. Moi, je n'ai pas la force de l'appeler. Quand on se fâche avec quelqu'un, c'est vrai qu'on ne va pas à ses obsèques. Mais quand ce quelqu'un est son père, c'est différent. Il faut qu'il vienne. Sinon, il risque de le regretter toute sa vie. «
Mis à la porte de la maison à l'âge de dix-sept ans par son père, Georges n'a cessé de revendiquer son appartenance au nationalisme corse.
p. 89 : » On avait tous un grain dans cette famille. Moi, le premier. Je ne m'en étais jamais caché. le nationalisme, c'est quoi ? Juste un truc pour vous dire merde ! «
Le dernier a rejoindre la fratrie est Francescu, schizophrène.
p. 103 : » […] avoir eu un enfant schizophrène, ça n'a pas été simple. Ils ont dû être déçus. C'était même peut-être à cause de moi que mon père, il préférait les plantes. »
Alors, entre les dernières formalités administratives et l'embarquement pour cet ultime voyage avec leur père vers sa Corse natale, le lecteur assiste à des échanges particulièrement houleux. Entre le franc parlé de Nina, l'instabilité psychologique de Fabienne, la psychorigidité de Thomas qui éprouve le besoin de tout contrôler et l'imprévisibilité du fils schizophrène, on a là un cocktail explosif de retrouvailles familiales corses. Une vraie psychothérapie familiale!
Toute l'ingéniosité de Joseph AGOSTINI réside dans le fait que le lecteur se retrouve malgré lui propulsé dans ce huit-clos familial, sous haute tension. Impossible de ne pas se retrouver dans certaines scènes ou situations et cela prête franchement à sourire. Très rythmé par des dialogues percutants, presque théâtraux, l'auteur met en avant tout le paradoxe de l'entité familiale, capable du meilleur comme du pire.
Lien : https://missbook85.wordpress..
Commenter  J’apprécie          311



Ont apprécié cette critique (29)voir plus




{* *}