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Citations sur Jardins d'exil (106)

Ce fluide écarlate et épais, salé comme la mer, fleuve d’une source invisible, d’allure si homogène à vue d’œil, a pourtant une double consistance : les cellules sanguines, granulaires, lieu de notre mémoire intime ; et le plasma, aquatique et transparent, trait d’union entre tous les êtres, mer originelle emportée dans notre périple pour conquérir la terre ferme. Comme si jusque dans notre sang s’observait le concept d’insociable sociabilité de Kant.
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Tout est à sa place hormis les livres – art, finance, romans à prix – qui tapissent les murs. Plan du territoire : le plan, de Thomas Ménez, trône ainsi au milieu de la bibliothèque. Le titre rappelle la troisième partie de Du côté de chez Swann de Proust : Nom de Pays : le nom. Là où Proust s’attelle à une analyse étymologique et symbolique des noms évocateurs de villes et villages qu’il n’a pour certains jamais visités, et se laisse porter par une douce rêverie contemplative qui l’emmène de Normandie jusqu’en Italie, Ménez s’attache à démystifier la campagne française, abandonnée, devenue un désert médical et finalement en proie aux touristes du monde entier. Il y ajoute des histoires sordides de morts et de fesses. Il met en scène sa propre fin dans un déferlement de violence gratuite. Son œuvre incarne cette pensée freudienne selon laquelle tout phantasme dérive d’un désir sexuel refoulé et que toute tentative d’en échapper est condamnée par la finitude humaine. Ses personnages schopenhaueriens – dont Freud était l’un des plus fervents disciples – oscillent inexorablement entre ennui et frustrations. Le charme discret des abysses.
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Selon moi, toutes les techniques médicales devaient s’exécuter comme une partition de musique. Pourtant, ce n’était pas le cas, du plus banal des gestes, l’hygiène des mains, au plus complexe, la ponction pleurale. Des écarts étaient tolérés. On pouvait omettre une étape, ajouter une vérification ou une mesure, cruciale pour certains, sans intérêt pour d’autres. Écarts que les différences culturelles ne pouvaient seules expliquer. Un fossé existait entre approches de terrain et recommandations, elles-mêmes divergentes d’un pays à un autre – ce qui pour moi, jeune étudiant naïf, relevait de l’hérésie. Pourquoi donc continuer à sacrifier ses jours et ses nuits à connaître sur le bout des doigts une froide et monotone littérature si aucune harmonie globale ne s’en dégageait ?
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Mais que cet acte soit fomenté par le gouvernement lui-même, par des pilleurs organisés ou par les révolutionnaires, une chose les unit tous, my friend, leur ignorance ! Ils s’imaginent que toutes les cultures se valent et qu’eux, hommes et femmes du présent valent bien plus que ces peuplades archaïques. Nous sommes tous devenus des amnésiques volontaires. On ne peut quand même pas effacer d’un geste notre passé juste parce que le monde est imparfait, non ? Qui sont ces gens pour décréter que tous ces restes, les seules traces de nos ancêtres, sont inutiles ? La dernière fois qu’un type a pensé comme eux, il a détruit une grande partie du patrimoine russe, c’était Joseph Vissarionovich Stalin, Alejandro !
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J’aimerais tant – mais je n’ai pas le courage de lui avouer – voir des photos d’elle, de ses amis proches ou de ses amoureux, en vacances ou en soirée, au travail ou en week-end – des photos plus personnelles que celles des réseaux sociaux, plus floues, mal cadrées, peu avantageuses. Un réflexe de paléogénéticien qui veut démystifier le passé. Non, Jésus, s’il a existé, n’était pas blond et n’avait pas les yeux bleus, mais était brun et basané. Cléopâtre ? Peut-être (car aucun test ADN concluant n’existe à ce jour) une belle métisse aux traits négroïdes comme sa demi-sœur assassinée, Arsinoé IV, retrouvée dans la ville d’Éphèse ? D’autres restent au contraire fidèles à leur réputation, par exemple Agnès Sorel, la dame de beauté, blonde et blanche comme la mort, qu’elle sut si bien dompter grâce à un embaumement de qualité.
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Elle marque un silence, un silence presque théâtral, puis elle reprend comme si elle avait choisi de couper court au flot de discussion, au pilote automatique dans lequel se perdent les gens qui n’ont rien à dire, qui ont trop à faire, les gesticulateurs contemporains, les dissipateurs d’un trop-plein d’énergie vitale. Tout ce stratagème de la routine mondaine, mondialisée, pour ne pas affronter ce silence qui nous effraie tant.
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Son existence ressemble à présent à un krach, à une fractale vertigineuse, à un double pendule au mouvement chaotique, incontrôlable. Elle prend conscience amèrement de la pauvreté de sa vie extraprofessionnelle, qui se limitait à l’addition inutile d’instants superficiels et vains : un restaurant avec les copines le week-end, prolongé d’une sortie en boîte de nuit où elle s’amusait à compter les refus adressés à d’audacieux prétendants ; une séance de gymnastique suédoise dans une salle de sport aseptisée de son quartier pour compenser les excès du week-end ; meubler son appartement devenu aussi impersonnel que des livres de développement personnel ; lire ce qu’on devait lire, des essais verbeux et pédants, des romans de la rentrée littéraire d’auteurs en vogue pour maintenir l’illusion d’appartenir à une classe d’élite.
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Le pronostic vital est engagé. Un sentiment d’absurdité, puissant, camusien, s’empare de moi. Je suis l’observateur d’un monde que je ne reconnais plus, que je ne valide plus, dont je doute de l’authenticité. On ne quitte jamais le monde de désespoir, on le quitte parce qu’il nous a déçus une fois de trop, comme Bouazizi et tous les autres.
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Romain a toujours manqué de confiance en lui, en grande partie à cause de son embonpoint qu’il traîne comme un boulet. Souvent dans un état de légère dépression, latente, récurrente, structurelle même, il a trouvé dans les romans de Thomas Ménez – et en particulier dans le premier livre de cet ancien ingénieur informaticien, son « chef-d’œuvre absolu » selon lui, Dernière manifestation d’un corps social, « Manifestation » pour les connaisseurs – une connivence, un écho, et dans ses personnages des alter ego, des porte-voix. Dans ce court roman, un être à la dérive nous livre sans concession sa vie de dépressif frustré et en tire une théorie sociale sur le sexe. Un vague espoir surgit au milieu du récit, pour se dissiper aussitôt et le roman se ter-mine sur une paix éphémère dans un paysage bucolique, que l’on devine être l’antichambre d’un suicide. D’après Romain, c’est la vérité crue enfin dévoilée.
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J'admire donc d'autant plus ces jeunes de Tunisie et d'Egypte, qui ont trouvé la force daffronter un pouvoir injuste et autoritaire. Quand l'espoir d'un avenir meilleur meurt, meurt avec lui la crainte du pire, et ne subsiste que la passion du présent.
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