AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Robegregori


Sorti en 2005, ce livre de l'écrivain franco-grec Vassilis Alexakis n'a pas reçu de prix littéraire, mais il figure parmi les plus beaux récits sur le sujet de la disparition d'une mère que j'ai jamais lus.
Dans ses pages, on ne trouve pas un sentiment de chagrin ou de deuil. L'auteur s'adresse à elle, absente depuis douze ans, comme il faisait auparavant, dans les lettres que mère et fils avaient l'habitude de s'échanger.
Le récit devient ainsi un journal intime où l'écrivain lui confie les petites histoires de sa vie et retourne sur des souvenirs qui lui sont chers. La difficulté de ses premières années en tant que jeune étudiant émigré en France, le rêve de devenir romancier, le plaisir pour l'écriture, le début de sa carrière dans la presse et le cinéma, jusqu'à la publication de ses premiers livres.
La distance qui se creuse inévitablement entre parents et enfants. « Je m'adressais à vous comme si j'avais acquis quelque titre de noblesse à l'étranger et que je fusse outré par votre stagnation » - écrit le romancier. Une sorte de condition de transfuge et d'arrogance procuré par l'instruction, que l'écrivain Nicolas Mathieu, lauréat du Goncourt 2018, questionne également souvent.
La relation entre la langue maternelle et les autres qui ont été apprises, comme le sango, une langue africaine, que l'auteur découvre par hasard et décide d'étudier. Et encore, la beauté de la langue elle-même. « Je n'aime pas les idiomes qui aspirent à monopoliser la parole. Aucune langue n'a raison de se réjouir du silence d'une autre. Je ne crois pas que le refus obstiné de la France de reconnaître les langues régionales a été bénéfique au français. Il l'a au contraire privé de la possibilité d'un dialogue qui l'aurait sûrement enrichi. Un idiome ne s'appauvrit pas en découvrant des modes de pensée étrangers au sien ».
Et puis, le sauvage développement du tourisme, en particulier dans les îles grecques. « Désormais, il ne fait plus jamais nuit à Santorin. Tous les magasins restent illuminés jusqu'à l'aube. Fira ressemble à un supermarché à l'approche de Noël. Certains commerçants souhaitent même que l'on installe des lumières sur le volcan de façon que la représentation ne s'arrête jamais ».
La narration s'achève avec la recommandation de la mère de mettre fin à celle qui était devenue la conversation la plus longue qu'ils avaient jamais eu - « Je crois que tu devrais m'oublier à présent ».
En réponse, Vassilis Alexakis fait sienne une phrase d'un poète indien, Ayappa Paniker, qu'il avait entendue dans le passé et retenue dans sa mémoire - « Je t'oublierai tous les jours ».
Commenter  J’apprécie          00







{* *}