Citations sur Rivages de l'Est : En kayak du Danube au Bosphore (41)
Les gares sont propices à l’envol de la pensée. Elles ouvrent l’imaginaire comme les rails ouvrent le chemin, et les destinations qu’elles proposent offrent d’infinies possibilités de croire en nos rêveries. p.18.
Nous peuplons une planète perdue dans le cosmos à l’ombre d’une balise incandescente qui ressemble à des milliards d’autres. Nous ne sommes rien ou, en tout cas, si minuscules que toute crainte, toute certitude, toute tragédie se dilue aussitôt que nous prenons conscience de notre insignifiance. Cette vaste fièvre, cette énergie immense que nous consacrons à remuer nos vies, tout ce superflu qui nous paraît vital, ces petites gloires et ces petites défaites, toutes ces préoccupations qui nous confinent dans le tambour du quotidien, tout ça disparaît lorsqu’on regarde les étoiles. p.200.
L’ailleurs – l’altérité peut-être plus encore – conduit le voyageur hors du cadre, vers une expression moins rigide et plus fluide de lui-même, en marge des idéologies et de la pensée immobile. L’errance le débarrasse de son enveloppe, l’allège de son fatras, lui donnant l’occasion de faire peau neuve lorsque, d’aventure, s’opère la métamorphose. p.228.
Les longues journées de kayak ont lié les paysages et les visages sur une même épissure. Je mesure l’enseignement des expériences vécues, incrustées en moi comme la géographie des lieux dans ma géographie intérieure. p.227.
Si le mouvement est un moteur de l’esprit, l’immobilisme, lui, incite à la paresse et à l’endormissement. Le farniente fabrique des consommateurs dociles, des jouisseurs conditionnés qui confondent l’injonction du désir avec la faculté d’agir selon leur volonté. p.179.
Avons-nous oublié que l’humanité vécut dans l’errance, sans cadre ni doctrine, durant des dizaines de milliers d’années ? Peut-être que non. Et peut-être est-ce cela qui entretient notre fascination pour les peuples voyageurs et insoumis. p.73.
L’étape possède d’innombrables vertus, indissociables du voyage. Elle est une pause, une respiration, qui permet comme dans la vie de regarder un instant derrière soi avant de continuer d’avancer. p.178
L’aventure n’existe pas au travers d’un objectif. Elle existe chaque jour, au rythme du vent, du bruissement des frondaisons, du cliquetis de l’eau sur les rives ou des stridulations des insectes au petit matin dans la fraîcheur qu’amène la rosée. p.22.
Ce n’est pas le monde qui change lorsqu’on le parcourt, mais le regard qu’on porte sur lui. p.228.
Le ciel reste l’ultime monde inconnu, peuplé de nos songes. Il alimente nos questionnements impérieux, tout comme il nous sert de miroir : c’est parce qu’il montre l’ailleurs que nous pouvons tenter de comprendre qui nous sommes. p.200.