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Critique de AnnaCan


Ce livre clôt, en ce qui me concerne, la trilogie commencée avec « Une semaine de vacances » et poursuivie avec « Un amour impossible ».
On y retrouve, placés sous une focale différente, nombre des faits relatés dans ses deux précédents romans, avec en leur coeur, l'inceste. de nouvelles touches sont apportées au tableau initié des années auparavant, le portrait psychique de l'autrice-narratrice prend forme sous nos yeux, se précisant, s'approfondissant sans cesse. On peut, selon son humeur, trouver ce travail passionnant ou terriblement lassant. J'oscille pour ma part entre les deux attitudes.
Nous entrons dans l'histoire au moment où Christine a treize ans, à l'âge où son père, sur l'insistance de sa mère, s'introduit dans sa vie. La petite fille éprouve une joie éperdue à l'idée de le rencontrer, d'exister enfin aux yeux de ce père tant admiré, s'accroche à la perspective de s'en faire aimer. Hélas, presque simultanément à leurs retrouvailles se met en branle la mécanique implacable de l'inceste. L'enfant s'y soumet, écartelée entre l'intarissable besoin d'être aimée, reconnue par son père comme sa fille au même titre que ses autres enfants, et l'absolue nécessité de protéger son intégrité psychique. Elle espère, toujours et encore, avant chaque rencontre, que ses relations avec son père vont prendre un tour normal et filial. Elle se rassure : Non, elle n'est pas en train de bousiller sa vie et d'hypothéquer son avenir. Ce faisant, de rencontre en rencontre, de renoncement en renoncement, elle assiste, impuissante, à son anéantissement.
Le roman navigue entre narration du vécu et analyses de ce qui a été vécu, de ses conséquences sur la vie psychique, amoureuse, sexuelle de la narratrice. Si j'y ai retrouvé l'indéniable courage et l'extrême lucidité avec lesquels Christine Angot aborde ce trou noir qu'est l'inceste, je n'ai pas été pleinement convaincue par ce livre. Environ aux deux tiers du roman, l'on quitte la narration pour une transposition du journal intime tenu par l'autrice alors qu'elle avait vingt-huit ans. Des phrases courtes dans un style télégraphique, ordinaires et descriptives couchées à l'état brut sur le papier se succèdent dans un rythme monotone. Je me suis dit : « Si le livre continue comme ça jusqu'au bout, j'abandonne. » Heureusement, la narration reprend au bout de quelques pages, et le dernier tiers du livre est particulièrement bouleversant. On y perçoit la solitude d'une femme ayant vécu une expérience indicible qu'inlassablement, sans jamais désespérer des ressources du langage, elle cherche à transmettre, à donner à voir, à donner à ressentir et à comprendre.
Et même si, à mes yeux, elle n'y parvient pas d'une façon aussi magistrale dans ce roman-ci qu'avec « Une semaine de vacances », il mérite vraiment de s'y attarder.
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