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Critique de Fandol


Après le Train des Enfants, Viola Ardone, traduite en français par Laura Brignon, me ramène en Italie, au début des années 1960, en Sicile, cette fois. Au travers de l'histoire d'Oliva Denaro, c'est tout le sort des femmes sous le joug du patriarcat qui est raconté.
Les parents d'Oliva ont trois enfants. Fortunata est l'aînée et Cosimino est le frère jumeau d'OIiva. Amalia, leur mère, une excellente couturière, est Calabraise. Sur un coup de foudre, elle a tout laissé pour suivre Salvo Denaro et venir vivre à Martorana, village sicilien au bord de la mer.
Oliva appréhende beaucoup l'arrivée du « cardinal », ces règles tant redoutées qui feront d'elle une femme et qui la priveront de tous les plaisirs de l'enfance.
Avec un réalisme impressionnant, Viola Ardone me plonge dans la vie quotidienne de cette famille engluée dans les traditions, prise au piège des commérages, empêtrée dans les rigueurs imposées par la religion. Tout cela est saupoudré d'un humour froid, toujours au bon moment.
Avec Liliana et son père, le communisme tente de faire évoluer les mentalités tant bien que mal mais cela reste très marginal.
Amalia est très sévère avec ses filles. Elle rappelle sans cesse cet adage : « Un fille, c'est comme une carafe, qui la casse la ramasse. »
Hélas, pour Fortunata, la catastrophe se produit dès qu'un garçon sans scrupules abuse d'elle. La voilà enceinte, obligée d'épouser ce Gerò Musciacco, fils d'une famille aisée du village qui la séquestre aussitôt et ne se prive pas de faire la fête et de se pavaner avec d'autres femmes.
Ainsi, la vie du village défile. Oliva a beaucoup apprécié Rosaria, institutrice trop évoluée qui a été remplacée par un homme se chargeant de rappeler aux filles qu'elles devront être soumises à leur mari.
Riche en rebondissements, ce roman bascule avec ce jeune homme, fils d'une famille aisée, les pâtissiers du village, les Paternò : ah, cette fameuse cassata ! Bien sûr, Oliva n'est pas insensible aux charmes du garçon qui ne se gêne pas pour tenter de l'amener dans ses bras. Il la fait même danser à la fête du village mais Oliva ne veut pas de ce Pino Paternò.
L'histoire se déroule toujours dans cette atmosphère pesante, loin de la ville et de son anonymat. À Martorana, tout le monde se connaît et les langues de vipère s'en donnent à coeur joie. Oliva va avoir seize ans et, déjà, sa mère veut la marier pour la sortir des griffes de ce prétendant sans scrupules dont la réputation est mauvaise. Pourtant, le drame approche et ne manque pas de me scandaliser.
Oliva, dans sa lutte, est bien soutenue par Liliana et Calò son père, plus d'autres amis fidèles comme Saro, ce garçon discret et prévenant avec lequel, enfant, elle s'amusait à donner un nom aux nuages.
La vie de la famille Denaro, fortement bouleversée, met peu à peu en lumière Salvo, le père. Homme effacé qui se contente de plaisirs simples en cultivant son jardin et en allant ramasser des escargots ou des grenouilles pour les vendre, il se révèle important alors qu'Amalia, son épouse, le traite sans cesse de bon à rien et regrette amèrement de s'être amourachée de lui.
Les chapitres s'enchaînent à un rythme soutenu. Ils sont courts et donnent à ma lecture un attrait que j'apprécie. Surtout, Viola Ardone, au travers de son second roman, le choix, met en lumière le combat des femmes pour ne plus être assujetties aux hommes qui les exploitent comme des domestiques, les brutalisent et leur infligent des violences sexuelles.
Il a fallu attendre 1981 pour voir le droit pénal italien abroger le mariage réparateur et le crime d'honneur grâce au combat mené par les députées communistes. Les mentalités évoluent, les temps changent mais il ne faut pas oublier les combats douloureux menés par d'autres femmes il n'y a pas si longtemps et se méfier de ceux qui sont nostalgiques, tout en sachant que dans de nombreux pays du monde, le sort des femmes ne s'est guère amélioré.
Le choix, de Viola Ardone, fait partie des huit livres sélectionnés pour le Prix des Lecteurs des 2 Rives 2023.

Lien : https://notre-jardin-des-liv..
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