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Citations sur Oeuvres complètes, tome 1 (13)

Petit poème des poissons de la mer (1926)

Je me suis penché sur la mer
Pour communiquer mon message
Aux poissons :
« Voilà ce que je cherche et que je veux savoir. »

Les petits poissons argentés
Du fond des mers sont remontés
Répondre à ce que je voulais.

La réponse des petits poissons était :
« Nous ne pouvons pas vous le dire
Monsieur
PARCE QUE »
Là la mer les a arrêtés.

Alors j’ai écarté la mer
Pour les mieux fixer au visage
Et leur ai redit mon message :
« Vaut-il mieux être que d’obéir ? »

Je le leur redis une fois, je leur dis une seconde
Mais j’eus beau crier à la ronde
Ils n’ont pas voulu entendre raison !

Je pris une bouilloire neuve
Excellente pour cette épreuve
Où la mer allait obéir.

Mon cœur fit hamp, mon cœur fit hump
Pendant que j’actionnais la pompe
À eau douce, pour les punir.

Un, qui mit la tête dehors
Me dit : « Les petits poissons sont tous morts. »

« C’est pour voir si tu les réveilles,
Lui criai-je en plein dans l’oreille,
Va rejoindre le fond de la mer. »

Dodu Mafflu haussa la voix jusqu’à hurler en déclamant ces trois derniers vers,
et Alice pensa avec un frisson : « Pour rien au monde je n’aurai voulu être ce messager ! »

Celui qui n’est pas ne sait pas
L’obéissant ne souffre pas.

C’est à celui qui est à savoir

Pourquoi l’obéissance entière
Est ce qui n’a jamais souffert

Lorsque l’être est ce qui s’effrite
Comme la masse de la mer.

Jamais plus tu ne seras quitte,
Ils vont au but et tu t’agites.
Ton destin est le plus amer.

Les poissons de la mer sont morts
Parce qu’ils ont préféré à être
D’aller au but sans rien connaître
De ce que tu appelles obéir.

Dieu seul est ce qui n’obéit pas,
Tous les autres êtres ne sont pas
Encore, et ils souffrent.

Ils souffrent ni vivants ni morts.
Pourquoi ?

Mais enfin les obéissants vivent,
On ne peut pas dire qu’ils ne sont pas.

Ils vivent et n’existent pas.
Pourquoi ?

Pourquoi ? Il faut faire tomber la porte
Qui sépare l’Être d’obéir !

L’Être est celui qui s’imagine être
Être assez pour se dispenser
D’apprendre ce que veut la mer…

Mais tout petit poisson le sait !
Il y eut une longue pause.
« Est-ce là tout ? demanda Alice timidement.
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TRIC TRAC DU CIEL


ROMANCE

La musique sort des fenêtres
Dissolvez-vous moelles de nos os
La ville entière se renverse
Dans un spasme délicieux

Dans la ville noire le bruit
Que font quelles orgues obscures
À coups de manivelle dure
Gagne, gagne à chaque cahot

Ah la ville en a plein les os
De cette liqueur sans pareille
Qui l'inonde par les oreilles
Et la perce de ses cristaux

Un silence réside au fond
De la mélodie enivrante
Que toute la ville en attente
Puise au cœur de l'orgue profond

Et l'attente se réitère
Dans l'espace de chaque ressaut
Que la manivelle au cœur faux
Imprime à la musique claire

Quelle Arabie ou quelle Afrique
Tient le refrain que nous cherchons
Brise les glaces de nos fronts
O musique, blessante musique

p.352
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"L'arbre à graines percera-t-il le granit ossifié de la main? Oui, dans ma main il y a
une rose, voici que ma langue tourne sans rien. [...] Et les choses en lui tournent comme des
grains dans le van" (I*,134-135).
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TRIC TRAC DU CIEL


LA TRAPPE

La trappe, la trappe roule le ciel
Frère porcher tu t'extravases
Tes cochons en état de grâce
Se révèlent emmanuels

Un esprit souffle sur les bouses
Un vent venu on ne sait d'où
Où se transfigurent les choux
Du petit jardin sans pelouses

Au travers des palais terreux
De leur humilité plénière
Les moines couchent leurs poussières
Ils sont vils, ils sont lumineux

L'ordure enferme le secret
De la membrane planétaire
Où se ramasse la matière
De leurs rêves outrepassés

Voici venir l'hyper-espace
Le béquillard sanctifié
La ribaude en état de grâce
Et la veuve au ventre gelé

p.351
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TRIC TRAC DU CIEL


ORGUE ALLEMAND

L'orgue allemand excite le singe
Sur la place aux pavés étroits
Et la foire qui les assiège
Comme une bannière se déploie

La vieille foire borde le ciel
Aux marges de la ville en pointe
Et l'orgue explose à chaque seconde
Avec le bruit des orgues du ciel

D'Elle, de nous, ou de cette âme
Que nous assîmes au banquet
Dites-nous quel est le trompé
O inspirateur des infâmes

Celle qui couche dans mon lit
Et partage l'air de ma chambre
Peut jouer aux dés sur la table
Le ciel même dans mon esprit

p.350-351
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DEUXIÈME PARTIE
TEXTES ET POÈMES INÉDITS/BILBOQUET


LA NUIT OPÈRE

Extrait 2

Le Verbe pousse du sommeil
comme une fleur ou comme un verre
plein de formes et de fumées.

Le verre et le ventre se heurtent,
la vie est claire
dans les crânes vitrifiés.

L'aréopage ardent des poètes
s'assemble autour du tapis vert
le vide tourne.

La vie traverse la pensée
du poète aux cheveux épais.

Dans la rue rien qu'une fenêtre,
les cartes battent ;
dans la fenêtre la femme au sexe
met son ventre en délibéré.

p.227-228
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DEUXIÈME PARTIE
TEXTES ET POÈMES INÉDITS/BILBOQUET


LA NUIT OPÈRE

Extrait 1

Dans les outres de draps gonflés
où la nuit entière respire,
le poète sent ses cheveux
grandir et se multiplier.

Sur tous les comptoirs de la terre
montent des verres déracinés,
le poète sent sa pensée
et son sexe l'abandonner.

Car ici la vie est en cause
et le ventre de la pensée ;
les bouteilles heurtent les crânes
de l'aérienne assemblée.


p.227
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DEUXIÈME PARTIE
TEXTES ET POÈMES INÉDITS/BILBOQUET


  LE MAUVAIS RÊVEUR

  Mes rêves sont avant tout une liqueur, une sorte
d'eau de nausée où je plonge et qui roule de sanglants
micas. Ni dans la vie de mes rêves, ni dans la vie
de ma vie je n'atteins à la hauteur de certaines images,
je ne m'installe dans ma continuité. Tous mes rêves
sont sans issue, sans château-fort, sans plan de ville.
Un vrai remugle de membres coupés.
  Je suis, d'ailleurs, trop renseigné sur ma pensée
pour que rien de ce qui s'y passe m'intéresse : je ne
demande qu'une chose, c'est qu'on m'enferme défini-
vement dans ma pensée.
  Et quant à l'apparence physique de mes rêves, je
vous l'ai dit : une liqueur.

p.224
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DEUXIÈME PARTIE
TEXTES ET POÈMES INÉDITS/BILBOQUET


VITRES DE SON

Vitres de son où virent les astres,
verres où cuisent les cerveaux,
le ciel fourmillant d'impudeurs
dévore la nudité des astres.

Un lait bizarre et véhément
fourmille au fond du firmament ;
un escargot monte et dérange
la placidité des nuages.

Délices et rages, le ciel entier
lance sur nous comme un nuage
un tourbillon d'ailes sauvages
torrentielles d'obscénités.

p.229
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DEUXIÈME PARTIE
TEXTES ET POÈMES INÉDITS/BILBOQUET


L'ARBRE

Cet arbre et son frémissement
forêt sombre d'appels,
de cris,
mange le cœur obscur de la nuit.

Vinaigre et lait, le ciel, la mer,
la masse épaisse du firmament,
qui gîte au cœur épais de l'ombre.

Un cœur qui crève, un astre dur
qui se dédouble et fuse au ciel,
le ciel limpide qui se fend
à l'appel du soleil sonnant,
font le même bruit, font le même bruit,
que la nuit et l'arbre au centre du vent.

p.225
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