Citations sur Les Pontons flingueurs, tome 1 (8)
Il sortait de son hôtel où il s’était installé le matin même. Il y avait posé ses affaires dont une mallette fermée à clef qu’il avait fourrée avant de sortir au fond de son élégant sac de sport et n’avait rien pris avec lui si ce n’est un pistolet UZI qu’il portait dans un holster de ceinture, dans son dos, bien caché par la Parka. Avant de le glisser là, il y avait vissé un silencieux.
André Fortin
le gars ne risquait pas d'avertir la police, même pour assurer sa sécurité, ç'aurait été signé son accointance avec l'autre, le mort de la Canebière, et, en général, il ne fait pas bon se retrouver dans le même sac qu'un mort, au sens propre tout comme au sens figuré.
Il alla s’installer à la terrasse de La Samaritaine qui regarde la rue de la République se jeter dans le Vieux Port.
Son plus grand plaisir, lorsqu’il était de repos, consistait à boire à petites gorgées son premier café en lisant dans La Provence d’abord la page Société, les faits divers, se réservant comme un dessert celle entièrement consacrée à l’O.M.
RENÉ FREGNI
Dans le même temps, de l'autre côté du lac, la rumeur s'amplifiait. Certains prétendaient que le capitaine Momo avait repêché le corps d'un académicien en habit (à cause des reflets verdâtres). D'autres jurèrent qu'il s'agissait d'un boa constrictor. Dans la bande à Gibet, de retour de quelque java, on assura que la dépouille était celle d'un poulpe géant.
-Pas du tout, fit le commissaire Dnartreb, c'est un crocodile. Du Nil, précisa-t-il. Je m'y connais, j'ai fait la croisière l'année dernière.
ce n'était pas un type aimable, il continuait à s'interroger sur cette connaissance sans doute oubliée, il le dévisageait avec incrédulité. Il avait tort, , car c'était ses mains qu'il fallait surveiller. La gauche, innocente pour l'instant, allait se poser sur son épaule en un geste fraternel, alors que la droite, plus bas, faisait jaillir de la ceinture un poignard à la larme terriblement effilée.
Le braqueur, ayant forcé le tiroir-caisse ( un tiroir-caisse à l'ancienne qui faisait ding) s'empara d'une somme très modeste. Le libraire, n'écoutant que son courage qui ne lui disait rien, se garda d'intervenir....Il se montra de plus d'une singulière complaisance en proposant au casseur d'emporter les œuvres complètes d'Agatha, plus Un privé à Babylone de Brautignan. A la suite de quoi, sans même le remercier, le braqueur enferma le libraire dans un placard encombré d'invendus. (Contrairement à une tradition littéraire très répandue, on ne trouve pas que des cadavres dans les placards.)
Le soir tombait sur le lac à peine ridé par une légère brise du sud. on dit que le soir tombe. En réalité, il ne fait que se glisser furtivement à la place de la lumière qui s'en va de son côté éclairer d'autres pays où l'on entendra dire, tout aussi abusivement, que le jour se lève.
Avec toute la force de son amour pour Ariane, Charlie Oraison plongea la lame dans le nombril de l'huissier, jusqu'à la garde. Avec tout le poids de son amour il pesa sur le manche. La lame de dix-huit centimètres se dressa vers le sternum, tranchant net l'aorte. L'huissier ouvrit une ronde bouche, rota, abandonna l'idée de faire signer quoi que ce soit, fut parcouru de soubresauts respiratoires et tomba dans les pommes avec mallette et imprimé. Trente secondes plus tard il n'était plus de ce monde.