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Critique de gruz


gruz
10 novembre 2017
Avec "C'est le coeur qui lâche en dernier", Margaret Atwood nous sert une farce noire dont la lecture de certains passages ont de quoi rendre écarlate.

Futur (très) proche, l'économie s'est effondrée, on cherche à survivre par tous les moyens. Une entreprise propose de vivre le rêve américain, une semaine sur deux. La première semaine dans un pavillon propret et un environnement aseptisé, dont il est impossible de sortir. La seconde, en prison, en intervertissant les places d'un couple qui prend le chemin inverse. Bienvenue dans la dystopie carcérale d'une auteure dont l'imagination et la clairvoyance n'ont pas de limites.

Margaret Atwood est une visionnaire. "La servante écarlate", datant de 1985, a été remis sur le devant de la scène grâce à la série TV qui vient d'en être tirée. Ce qu'elle imaginait il y a trente ans a de quoi mettre mal à l'aise dans le contexte actuel. Son extraordinaire trilogie d'anticipation questionne sur notre avenir proche avec un capacité quasi divinatoire ("Le Dernier Homme", 2005 - "Le Temps du déluge", 2012 - "MaddAddam", 2014).

L'auteure est une magnifique conteuse doublée d'une remarquable observatrice de notre société. Avec "C'est le coeur qui lâche en dernier", elle creuse encore davantage ce sillon analytique au travers, cette fois-ci, d'une étonnante comédie sombre. Un récit qui tient autant du roman social que du vaudeville.

Le ton est décalé, surtout dans sa seconde partie, une autre manière de planter un décor subtilement effrayant tout en alertant sur certaines dérives de notre société actuelle.

Les choix que nous faisons ont un prix, l'acceptation tacite de la perte de nos libertés individuelles n'est pas sans conséquences. Ou quand la peur de l'avenir et le besoin de sécurité peuvent amener une certaine utopie vers une dictature.

Le ton parfois léger et drolatique, rend cette lecture franchement surprenante. Sous couvert d'une histoire d'amour décalée, Atwood dérange. Et les quelques scènes grivoises et sexuellement explicites ne font que renforcer ce sentiment.

Voilà un roman pas comme les autres, entre roman d'anticipation, sombre étude de moeurs, satire et romance dissonante. Sans doute que ce choix audacieux de narration ne plaira pas à tout le monde. Pour ma part, je l'ai trouvé aussi surprenant que réjouissant. Une manière originale de montrer qu'il est de plus en plus difficile de trouver sa place dans cette société qui se déshumanise. le propos me parle fortement, la manière de l'avoir traité m'a réjoui, les dialogues (très nombreux) m'ont épaté.

Je ne saurais trop vous conseiller de vivre quelques heures avec ses "Alternants", l'expérience vaut la peine d'être vécue. Margaret Atwood est un écrivain majeur, ce n'est pas ce roman étonnant qui va le contredire.
Lien : https://gruznamur.wordpress...
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