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Critique de michfred


La poésie baroque m'a toujours enchantée: moi qui suis la mesure même (!!!!) je trouve dans ses débordements, son outrance, sa folle imagination, un merveilleux exutoire à mes rêves les plus fous. Et chez les baroques, mon préféré c'est Agrippa d'Aubigné.

D'abord j'adore son nom en contraste absolu avec son prénom, comme un vivant oxymore - le trope préféré des baroques!!- je trouve son histoire follement romanesque : petit garçon, il accompagne son papa sous les coursives du château d'Amboise pour voir quelques amis et cousins pendus aux dites coursives ( la conjuration d'Amboise, complot huguenot, fut déjouée et punie en 1560), il épouse avec passion la cause protestante et part guerroyer contre les catholiques dans une France déchirée par les guerres de religion, tombe amoureux fou d'une catholique, proche de la Cassandre de Ronsard , son pire ennemi, poète officiel du honni Charles IX- la belle Diane Salviati, voit l'affreux massacre de la Saint Barthélémy, et s'engage en poésie comme il s'engage à la guerre: "Je n'écris plus les feux d'un amour inconnu..;".

Il sera le vengeur lyrique et armé de ses coreligionnaires massacrés.

La Saint Barthélémy, 24 août 1572...

Il rappelle le jour sinistre avec force, "Voici venir le jour, jour que les destinées voyaient à bas sourcils glisser de deux années, jour qui avec horreur parmi les jours se compte, qui se marque de rouge et rougit de sa honte, qui voulut être nuit et tourner sur ses pas" (je cite de mémoire, je dois en oublier un peu...) nous dit-il dans le martèlement sourd d'un tambour funèbre.

Il évoque l'horreur de la Seine rouge de sang, des corbeaux croassant , repus de chair humaine, sur les murs du Louvre. Vision infernale...Et, dans les Châtiments, évoquant la résurrection des corps, il n'oublie pas les "cendres des brûlés", les corps suppliciés des martyrs protestants venant en riant à la place qui vit leur supplice réclamer justice à Dieu qui leur rit en retour, complice: "Riants au ciel riant d'une agréable audace"....

Un grand poète, à l'oreille musicale, aux images magnifiques:
"Comme un nageur venant du profond de son plonge
Tous sortent de la mort comme l'on sort d'un songe"

Pour ceux que la performance physique intéresse, Agrippa était un colosse, capable de renverser à mains nues son cheval.

La force, le courage, l'érudition...une sorte de Pantagruel: Rabelais l'aurait adoré..Ils se sont ratés de peu!
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