AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Myriam3


179 histoires courtes écrites par des Américains originaires de 42 états différents (pour rappel, il y en a 50 en tout), de tout profil et de tout âge, voici ce que propose ce livre que Paul Auster a décidé de publier en 2001.
Ce n'est pas, donc, du Paul Auster, ni toujours de la grande littérature car là n'était pas le but, mais ces récits sont, pour beaucoup, captivants.

Bien sûr, ils n'ont pas été écrits ni sélectionnés au hasard, mais tout d'abord, une petite mise au point sur l'origine de ce recueil:
Invité en 1999 à l'émission radiophonique All Things Considered sur la radio publique américaine, Paul Auster se voit proposer de venir régulièrement lire un texte, une nouvelle sur cette radio. Mais cela lui demande trop de travail, et également de compromis par rapport à sa propre production littéraire. C'est alors sa femme, Siri (Hustvedt) qui lui suggère de se faire envoyer des nouvelles parmi lesquelles il piocherait. Ainsi est née l'idée du national Story Project: Auster lance un appel à l'écriture par la radio, indiquant que tous les textes, de l'écrivant débutant à l'auteur confirmé, seraient acceptés et lus sans exception, mais, il y mettait une clause: les récits devaient être véridiques, personnels, courts, mais également incroyables, comme mus par des forces inconnues et mystérieuses, en bref ces récits devaient surprendre, défier toute attente du lecteur.
Ce critère, important, est sans aucun doute ce qui permet de créer une certaine homogénéité dans cette grande diversité de textes, mais aussi de les rallier à la patte de Paul Auster, car c'est bien ainsi que ses propres récits se construisent.
Auster a reçu bien plus de textes que ce qu'il espérait, plus de 4000 en tout, qu'il a lus un par un, dont certains ensuite à la radio.
Et c'est ainsi qu'il a décidé, touché par toutes ces vies, toutes ces voix anonymes, de leur rendre hommage en en publiant un certain nombre dans un recueil.

Nous y voilà, donc. le livre est partagé en dix parties dont voilà la liste, pour vous donner une idée: Animaux / Objets / Familles / Bouffonneries / Etrangers / Guerre / Amour / Mort / Rêves / Méditations. (j'ai le livre en anglais, peut-être que les titres ne correspondent pas à ceux de la traduction française), mais, au-delà de ce choix de classement, on retrouve dans ce livre toute l'Amérique - enfin, les Etats-Unis! - ou presque: son histoire (Grande Dépression, Vietnam), sa société (immigrés, Noirs, croyants, bandits, armes à feu, 4 Juillet), sa géographie, par le prisme de 179 regards anonymes et tout-à-fait subjectifs.
Ceci dit, ce n'est pas pour son aspect sociologique que j'ai aimé lire ce livre même si ça y contribue, pour moi qui suis fascinée par la mythologie américaine! - mais parce qu'il y a, dans ce recueil, de véritables perles, des récits dont la trame est digne de celles de bons romans, dont les drames touchent profondément, des récits qui interrogent sur la vie, les relations, l'inexpliqué, le hasard.
Le hasard justement, Paul Auster, il me semble, a bien affiné sa sélection de textes, tant certains lui ressemblent incroyablement. Je pense surtout à celle qui s'appelle Table for Two. En voici un résumé:
EN 1947, deux étudiants new-yorkais, l'une en littérature anglaise et l'autre en arts appliqués, se retrouvent assis à la même table d'un restaurant bondé. elle lit "les Grandes espérances" de Dickens (tiens, il me semble avoir lu que ce livre figure parmi ses préférés...). le jeune étudiant lui lance quelques mots à propos de la vie tragique du pauvre Pip, les deux se regardent et c'est le coup de foudre. Avant de se quitter, elle lui donne son numéro de téléphone inscrit sur la couverture des "Grandes espérances", qu'il oublie dans le train pour Brooklyn après s'être endormi. Il s'en veut énormément, ne peut oublier cette fille qu'il ne pourra plus retrouver maintenant.
L'été suivant, il embarque pour Paris pour y peindre, elle pour Oxford. de là, elle décide de passer quelques jours à Paris, et prend avec elle un nouvel exemplaire des "Grandes espérances"... ai-je besoin de raconter la suite? du vrai Paul Auster pour moi!

mais il y a aussi Isolation, le récit d'un père et ses six adolescents en deuil à la plage après le meurtre de leur mère, et Margie, où une drôle de coïncidence n'en empêche pas moins la réalisation d'un cheminement funeste.

On peut lire ce livre tout de go, au risque de se laisser emporter dans le tourbillon de cette multitude de voix et de situations toutes si différentes, ou bien cueillir, de temps en temps, une histoire, et la savourer, rire ou verser une larme.
Commenter  J’apprécie          70



Ont apprécié cette critique (5)voir plus




{* *}