II
CELLE QU'ON ATTENDAIT
Que manque-t-il donc a ta voix
Quelle pudeur et quelle prudence
Pour parler à voix de pierres
Et d'arbres
À voix de ciel et d'eau
p.56
II CELLE QU'ON ATTENDAIT
Là-haut
Brille un silence désarmé
C'est comme une maison secrète
Où se confie un voyageur
Aux pierres aux yeux clos
Il a laissé ouvertes les fenêtres
Pour cette nuit de halte
Et se tient coi
Près de sa belle et calme marcheuse
Aux cheveux déliés
Et qui rend à la nuit
Comme une terre gorgée d'eau
Son souffle égal
p.55
I NOVEMBRE
On est là
Devant ce beau jardin du monde
Puis la lumière comme un souffle
Libère les oiseaux
Dont le chant accompagne
La lente remontée des terrasses
Lavées de l'ombre
Comme une carène encore humide
Qu'on a tirée sur le sable
Ici la paix résiste
Et vont les pentes
À l'abandon
p.13
II CELLE QU'ON ATTENDAIT
Riverain de la terre qui t'attardes
Cependant qu'à nouveau montent d'en deçà
Les cris des compagnons
Et que rougeoie l'horreur
On te tire en arrière
Pour quelque temps encore
Tu vois ce cercle des splendeurs
Dont la fugue te prend en écharpe
Pour quelque temps
Tu es le point où ces courbes s'assemblent
Et celle qu'on attendait s'approche
Si douce
Qu'on avait oublié jusqu'à ce goût de larmes
Qui rassure
p.66-67
II CELLE QU'ON ATTENDAIT
Le grand hiver libère ses chevaux de frise
Au ciel craquant
Que des oiseaux traversent
Brandons
Que lancerait par jeu
On ne sait quel dieu
Amant de la rigueur
Marcheur impénitent
Tiens-toi droit et ferme
N'y a-t-il rien à voir par là-haut
Que ce bleu riverain qui se dilate
Et pèse aux branches
Comme un fruit
p.52
I
NOVEMBRE
Viens
Grand oiseau de silence
Dont l'aile ouverte éclipse l'aube
Viens
Des lointains où nos regards s'essoufflent
Viens
Du plus proche où tu te tiens
Ma belle énigme
Dans l'élégance du matin
p.45
II
CELLE QU'ON ATTENDAIT
Les pluies
Et les fumées qui montent
Des feux de broussailles
Ont assombri la lumière un peu fade
De l'automne
C'est un voile léger
Simple taie
Sur le bleu du ciel
Mais il semble soudain
Qu'un poids sous l'horizon
Attire à soi comme la hampe
D'un drapeau
Et sous la lumière pâlissante
Une clarté seconde se fait jour
De l'une à l'autre
A dérivé
Imperceptible
Un peu de temps
P.49
I
NOVEMBRE
Nuit de plus en plus vaste
Et secrète
Et sa courbe devant nous
De moins en moins visible
Masquant les pierres où trébucher
Pleine nuit de novembre
Sous la clarté des astres morts
Indifférents au demeurants
Qui mêlent pour toujours leurs mains
Tendres et blanches
Comme de frêles ailes
Offertes
À l'arche sombre qui domine
p.12
II
CELLE QU'ON ATTENDAIT
Une passante
De celles que l'on croise auprès des puits
A simplement posé sur toi ses yeux riants
A-t-elle mêlé sa voix à celle de la source
Quand penchée sur la margelle
Elle a souri à vos deux formes confondues
Dans l'auréole bleue d'en bas
Qui le dira
Mais que reviennent es ténèbres
Et les sarments secs du malheur
Que tous aient revêtu leur cuirasse
Fait piaffer leurs escouades
Dressé des lances contre le ciel
Et tournoyé comme des buses
Il faudra mettre fin à ce vacarme
Reprendre besace et bourdon
Et l'appeler à tous les vents
La gracieuse
Entrer dans le chant calme de la terre
p.71