- J'aime bien les supermarchés. C'est des endroits où on fait des choix... mais des choix qui ne sont pas graves, des choix colorés et (espérons-le) savoureux.
Les adolescents les plus heureux ne sont pas les adultes les plus heureux.
Pourquoi NOUS ? Pourquoi TOUJOURS NOUS ? Pourquoi est-ce que c’est NOUS qui nous faisons harceler, insulter, frapper ? Qui tombons malades ? Dont les parents meurent ? Se retrouvent sans travail ? Pourquoi c’est NOTRE prof préférée qui est VIRÉE ? Nous sommes les quatre élèves les plus MAUDITS du collège. J’en ai assez.
- est-ce que ça va être ça, devenir adulte ? aller d'humiliation en déception ?
- tu connais Mithridate ?
- son père est mort assassiné quand il était ado.
il craignait lui aussi de se faire empoisonner, on complotait contre lui...
alors chaque jour il absorbait de petites quantités de poison...
pour s'insensibiliser.
- genre, comme par les piqûres d'abeille ? j'ai fait ça quand j'étais petit.
-voilà.
mithridater, ça s'appelle.
-eh bien, tu vois, j'ai le sentiment que depuis notre naissance...
on nous éduque en nous mithridatant contre la tristesse et le renoncement.
Il y a parfois des satisfactions dans la vie. Elles sont encore plus grandes quand on en est à l’origine. Tout n’est pas perdu.
Il y a pas mal d’élèves dans ce collège qui ont tout pour eux. Ils sont riches, populaires, jamais malades, ils portent des vêtements à la mode, ils sont bons élèves. L’inégalité du bonheur et du malheur est un fait. Leurs parents ne sont pas morts et jamais au chômage. Ils règnent sur le collège. Ils sont à l’aise partout. Ils sont cools et ils nous méprisent. Je sais que c’est une question d’apparence et que les vies parfaites n’existent pas mais ils gagnent quand même sur pas mal de plans.
Ce n’est pas facile, il faudra travailler mais je refuse que ça passe par l’ennui et la souffrance, nous allons nous amuser et devenir amis avec les nombres.
Ces coups reçus, comme un rappel à l’ordre, pour nous intimer de cesser d’être différents, ont eu l’effet inverse.
Nous avons encore moins envie de faire des efforts pour nous mêler aux autres.