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Critique de Blok


La machine à explorer le temps est l'un des livres fondateurs de la SF moderne dont Wells est sans doute le fondateur, beaucoup plus que Jules Verne
Le protagoniste de ce livre, jamais nommé autrement que "l'explorateur du temps, appellation que l'on conservera dans cette critique, est revenu dans son XIXeme siècle d'origine après un périple qui l'a conduit huit cent mille ans dans le futur, époque à laquelle l'humanité est divisée en deux races: les Eloïs, mentalement dégénérés, qui vivent dans l'oisiveté et un bonheur apparent, et les Morlocks, qui ont apparemment conservé leurs facultés intellectuelles mais sont devenus physiquement monstrueux. Ils entretiennent les Eloïs qu'ils utilisent comme un bétail. Selon l'auteur et le narrateur cette situation n'est que l'évolution de la situation économique et sociale de leur époque : la bourgeoisie (souvent appelée "leisure classe dans la littérature sociale de l'époque) a donné naissance aux Eloïs; les prolétaires qu'elle exploitait ont continué à entretenir leurs anciens maîtres devenus leur bétail.
L'explorateur du temps, est retourné à son époque après avoir échoué à sauver des Morlocks une Eloïs, Weena, pour laquelle il éprouvait des sentiments. Il retourne vers le futur pour la sauver, nous offrant ainsi une fin ouverte dont profite Baxter pour imaginer ce retour.
Ce n'est pas une mauvaise idée de départ. Disons tout de suite qu'il s'agit d'un livre très différent de celui de Wells, où l'on perd l'aspect de critique de la société victorienne, très présent chez Wells, dont on connaît les convictions socialistes.
Il existe hélas une autre différence : le traitement en partie ratée de l'idée de départ.
Les choses commencent assez bien pourtant : l'explorateur du temps retrouve bien des Eloïs et des Morlocks, mais très différents : ces derniers bénéficient d'un haut degré d'évolution morale et technique, au point d'être les créateurs d'une sphère de Dyson, qu'ils partagent avec des Eloïs, cette fois des humains authentiques, avec lesquels les Morlocks n'ont aucun contact, et que d'ailleurs l'Explorateur du Temps ne rencontrera pas. Vous me pardonnez ce petit spoil, sans conséquence car l'auteur ne s'intéresse pas à la dichotomie Morlocks -Elois, pas plus qu'à la fable sociale de Wells. L'explorateur pense que le nouvel (si l'on peut dire! Notre langage ne comporte pas de tournures appropriées à la description des conséquences d'un voyage temporel, comme l'a souligné Poul Anderson dans La Patrouille du Temps) nouvel donc, état des choses résultent de modifications à la trame des évènements insultes par son premier voyage et la relation qui en a été faite. La réalité est plus complexe, le voyage temporel selon Baxter se produisant dans le cadre d'univers parallèles dans lesquels l'Explorateur du Temps va voyager en compagnie d'un Morlock.
Et c'est là que les choses se gâtent, les péripéties de leurs voyages se révélant répétitives et étirées en longueur. En raison de la mauvaise utilisation de la situation de départ le livre comporte beaucoup de longueurs. le récit s'égare à un moment dans une robinsonnade beaucoup trop longue et assez pénibles bien qu'elle soit censée jouer un rôle capital dans l'histoire. Je dis " censée"parce que, malgré le pacte de suspension de l'incrédulité, on y croit pas vraiment, pas plus qu'à la suite échevelée qui veut prendre une dimension cosmique, trop large pour l'auteur, et pour le lecteur hélas. le tout dans un mélange de hard science (avec les défauts de ce genre, qui n'est finalement pas plus scientifique que le reste de la science fiction, et se fonde sur des théories que ni l'auteur ni le lecteur ne maîtrise, telle ici la mécanique quantique, peut-être en raison de l'absence remarquée du chat de Schrodinger -peut-être que la pauvre bête, trop sollicitée par les auteurs de SF, était alors en grève ?) et de métaphysique toutes deux hélas bien approximatives, et qui donnent lieu à des explications laborieuses et difficiles à suivre, au point qu'on se croirait presque chez Maurice G. Dantec (non, quand-même pas Dantec, là j'exagère).
Bref on reste vraiment sur sa fin, avec le regret d'avoir vu un très beau sujet bien mal exploité.
Je n'ai pas lu le livre que Baxter a consacré à La Guerre des Mondes, un autre des chefs-d'oeuvre de Wells. Je m'y essaierai peut-être, non sans inquiétude.
PS
Je constate qu'un certain nombre de lecteurs jugent le livre de Baxter supérieur à celui de Wells
Je ne suis absolument pas de cet avis. le livre de Wells est mieux écrit
Par ailleurs la thématique est beaucoup plus riche, il s'agit d'une fable sociale à la manière de la ferme des animaux d'Orwell et de certains ouvrages de London ou même Chesterton ; il appartient ainsi à tout un courant de fiction spéculative très britannique
Enfin il ne s'encombre pas de tout le bric à brac scientifique de Baxter qui amusera beaucoup les lecteurs du XXII siècle si on le lit encore à l'époque
Alors que Wells est intemporel et on le lit toujours 130.ans après, comme on lit Orwell et London (au fait, je sais que London n'est pas britannique, inutile de me le signaler mais par ses thématiques il est très proche de Wells)
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