Beaux Arts Magazine, Hors-série : Van Gogh à Auvers-sur-Oise

Le docteur Paul Gachet

Le bon Samaritain de la " Nouvelle peinture"

Si l'on cédait à l'amour des raccourcis, le destin de Paul Gachet ( 1828-1909) se résumerait au triptyque suivant : un médecin sans vocation ni grand talent, un fou de peinture devenu collectionneur et graveur, un spécialiste de la neurasthénie aussi atteint que son meilleur portraitiste, Vincent Van Gogh.Trois facettes, et presque 3 temps d'une vie qui n'a pas livré tous ses mystères.


( p.28(

Commentaire d' oeuvre
Le Docteur Gachet, " expression navrée de notre temps"

Dès son arrivée à Auvers, Van Gogh prévoit de faire le portrait du docteur Gachet, qu'il entreprend au bout d'une quinzaine de jours.(..)

- Le Visage
Un sosie de Van Gogh

Avec ses cheveux roux, son visage soucieux et son regard clair et doux perdu au loin, Gachet apparaît comme un double de Van Gogh.
Voyant en lui un "frère " atteint du même mal, le peintre lui donne, grâce à une multitude de petites touches qui animent les muscles de son visage, une expression souffrante, les sourcils tristes et les yeux affaissés (...)

( p.26)

Entretien avec Emmanuel Coquery

Comment se fait- il, dans ce cas, que cette période n'ait jamais vraiment été
montrée ?

Monter une exposition Van Gogh est toujours un défi. Les prêts sont difficiles à obtenir.Mais le Musée d'Orsay, qui possède la plus importante collection de Van Gogh hors de son pays natal- grâce au don de Paul et Marguerite Gachet pour le Musée du Louvre, affecté en 1986- a la chance de conserver sept toiles du peintre hollandais de la période d'Auvers-sur-Oise, sur les 26 oeuvres de son fonds Van Gogh.La proposition de cette exposition venue du musée Van Gogh d'Amsterdam, qui possède 8 toiles réalisées à Auvers, nous permettait d'envisager de retracer cette histoire conjointement.

À propos du tableau " Racines, Auvers-sur- Oise, juillet 1890- Van Gogh Museum Amsterdam

Selon Wouter Van der Veen, directeur de l'Institut Van Gogh à Amsterdam, la complexité des " Racines" prouve que le suicide de l'artiste ne fait pas suite à une crise de démence " Vincent Van Gogh réfléchissait longtemps à ses toiles.Pour faire un tableau avec une composition si complexe, il faut avoir toute sa tête. (...)Son geste ultime(son suicide) a été commis de manière consciente et lucide."

Entretien avec Emmanuel Coquery

Vous présentez au Musée d'Orsay, à Paris avec le musée Van Gogh
d 'Amsterdam,la première exposition d'envergure consacrée à la dernière période de Van Gogh, dont la vie s'achève brutalement à Auvers-Sur-Oise en 1890.En quoi ces quelques semaines passées dans ce village sont- elles importantes ?

C'est une période cruciale, d'abord parce qu'il s'agit de la dernière. Entamé le 20 mai 1890, le séjour à Auvers-sur- Oise, qui se conclut par la mort de l'artiste le 29 juillet, ouvre le mythe de Vincent Van Gogh, artiste tourmenté et ignoré,
" suicidé de la société " pour citer Artaud.Surtout, on assiste, à Auvers-sur- Oise, à un jaillissement de peintures éblouissant.Imaginez qu'en 70 jours, le peintre va produire 74 tableaux : cela fait plus d'un par jour ! Sans compter les 33 dessins, un carnet de croquis, la gravure , à laquelle il s'essaye pour la première fois.... Sa production est fiévreuse, il dessine tout ce qu'il voit.